La nuit tombait à pic pour Kofur, car elle signifiait la fin du trajet à dos de cheval - ou tout du moins la fin de l'étape, puisque le voyage était loin d'être fini, d'innombrables lieues s'étendant encore jusqu'à Lossarnach, leur but. Il faudrait des jours, peut-être même une ou deux semaines avant d'atteindre cette région montagneuse du lointain Gondor... Le Nain ne savait guère évaluer les durées d'un périple à cheval, lui si habitué à user de ses propres pieds et de ses courtes jambes pour se déplacer.
Tout ce qu'il savait, c'est que la compagnie de l'humaine et de l'elfe suffisait tout juste à rendre la progression agréable. Car, bien que le cheval de ce dernier évitât de trop secouer le passager ou de le laisser choir au sol, Kofur s'était senti assez mal à l'aise sur une si grande bête, et il espérait bien que ce sentiment n'était dû qu'à son manque d'accoutumance avec l'équitation. De fait, c'était la première fois qu'il montait sur un vrai cheval pour un grand parcours, et non sur un poney sur de courtes distances, comme quelques fois dans sa jeunesse dans les Montagnes Grises.
Or donc l'ambassadeur Sombre-chêne estima que les chevaux avaient besoin de repos, et à cela le Naugrim ne fit aucune objection. D'ailleurs, lui-même était quelque peu courbatus, n'ayant pourtant pas mis le pied par terre.
Après avoir monté le camp, les trois acolytes partirent à la chasse, car ils avaient grand faim. Ce fut l'occasion d'étrenner le don du peuple elfique, et le Nain ne la manqua pas: il se saisit de l'arc de l'ancien Prince de Mirkwood et y encocha une de ses flèches personnelles. Celle-ci s'y adapta parfaitement, l'artéfact étant de moindre taille que les arcs elfiques habituels, et l'ancien arc de Kofur se trouvant être légèrement plus grand que ceux que portent traditionnellement les Nains.
Même si Sombre-chêne ne souhaitait approcher la Lorien qu'en cas d'urgente nécessité, le trio n'eut pas à marcher bien longtemps pour rencontrer de petits bois et bosquets foisonnants de buissons et de taillis, susceptibles d'abriter le gibier nocturne tant recherché. Entre le regard perçant de l'Elfe, les yeux du Nain habitués à l'obscurité des mines et ceux d'Amy qui ne pouvaient fonctionner que dans le noir, le groupe avait toutes ses chances de faire mouche. Encore fallait-il que l'actuel possesseur de l'arc se montre habile et précis...
Ils n'eurent pas atteindre longtemps. Sans doute alerté par les faibles bruissements des pas des chasseurs, un chevreuil sortit précipitamment de derrière un bosquet de houx, fuyant à quelques distances devant eux. L'œil de Kofur brilla à cette vue, son bras se contracta, la corde de l'arc se tendit sans un grincement, et la flèche siffla, décrivant une belle trajectoire curviligne. L'animal continua cependant de plus belle.
- Nous mettrons cela sur le compte de la distance, chuchota le tireur mécontent,
mais ne comptez pas sur moi pour rater deux fois de suite.Et de se remettre en route, tirant une autre flèche de son carquois. Elle finirait dix minutes plus tard dans le corps d'un grand lièvre, première cible touchée par le Khazad depuis l'acquisition de sa nouvelle arme.
- Je vous l'avais bien dit, maintenant je touche à tous les coups, déclara-t-il, riant le moins bruyamment possible.
L'un de vous veut-il s'y essayer?