La marche des Ombres

Des froides montagnes du nord aux arides déserts du sud, en passant par les terres du Gondor, du Rohan, et de toutes les contrées connus, un appel s'était fait entendre. D'un geste, les chefs de guerre commandaient aux sombres guerriers de sortirent de leur torpeur, et de se diriger vers le Nord. Un peu partout dans Arda se levait les hommes de l'Ombre, et leur chemin était tout tracé. Ils devaient tous converger vers le nord, vers les hauts des Galgals, vers le Seigneur-Dément, leur maître à tous. Malgré leur divisions en petits groupes d'une dizaine, voir une vingtaine de soldats, ils ne passaient pas totalement inaperçus, et les rumeurs couraient à propos d'hommes en armes sillonnant les vastes territoires paisibles des Terres du Milieu. De mystérieuses disparition de ressources et de vies semblaient confirmer cette angoissante hypothèse. Mais en réalité, Qui s'en souciait ? Peu de gens sans doute, car les Ombres du Destin savaient rester discrets, et leur férocité n'avait d'égale que leur maîtrise de la fourberie et de la "guerre invisible". Il y avait parfois sur le chemin des obstacles que les guerriers des Ténèbres étaient forcés d'éliminer, mais jamais rien de contraignant.

La seul exception fut un petit hameau délabré de quelques dizaines d'habitants, dans l'Ithilien, qui fut en une nuit privé de sa population. Le seul survivant de l'ignoble carnage fut un jeune garçon d'une dizaine d'année, au regard vide de toute émotion, que l'on retrouva couvert de sang. il ne cessait de répéter d'incompréhensibles paroles, mais un mot cependant revenait souvent dans son discours dénué de sens : Nirrenraug. Un nom ? Peut-être, mais que désignait-il ? un objet ? une personne ? Si il était certain que l'enfant avait perdu la raison, certains disaient qu'il n'avait pas seulement assisté à l'abominable massacre, mais y avait également participé. En effet, il portait un solide bâton dont l'un des extrêmité était sanguinolent, et en l'examinant, les autorités qui furent dépêchées sur les lieux trouvèrent d'abjects résidus de cervelles. Or, lorsque le petit fut retrouvé, l'un des enquêteurs se rappela la présence d'un cadavre de femme près de lui dont le crâne était fendu. Le recherches s'arrêtèrent là, et l'enfant fut placé dans une maison pour déficients mentaux, et plus personne ne parla de ce soir monstrueux où les Ombres du Destin avaient décidé d'égayer quelque peu leur ennuyeux voyage.

Un vent glacial soufflait sur les plaines du Gondor. Alors que nulle vie ne semblait animée ces vastes contrées, le son de deux chevaux lancés aux galops troubla la quiétude angoissante de ces lieux. Deux hommes chevauchaient ainsi vers une nouvelle quête, motivés par la vengeance, l'envie et la haine; deux guerriers unis par un même ennemi, mais aux caractères bien différents. Voila bien une semaine qu'ils ne s'étaient même pas adressés la parole, et ce silence ne fut que récemment troublé par la voix maurose d'Alderic, l'archer vétéran.

Tu ne m'as toujours pas dit ce que nous cherchions dans ce coin d'Arda. Et j'espère que tu as une raison valable, car tu sais pertinement que notre fragile alliance pourrait se terminer par une flèche bien placé...

Sur son destrier, le cavalier aux noirs habits ne fit guère de commentaires sur l'instant, mais après quelques secondes, une moue fatigué aux lèvres, commença son récit, en s'adressant à un interlocuteur imaginaire plutôt qu'à son compagnon.

Dans le Livre, j'ai trouvé deux références d'un grand intérêt. La première rapporte une histoire de rebellion lors du passage de main de Nirrenraug. Le Haut-Suzerain élu à ce moment était un homme des repaires, et il a tenté de renverser en vain le pouvoir du gardien. Ses propos sont quelques peu rapportés par doyen, et voici les grandes lignes de son discours :
-premier point : Croc-Noir a voulu étendre son influence à travers toutes les terres du milieu et au delà, il a donc créer le système des repaires, petits postes avancés comportant entre dix et et quinze membres disséminés un peu partout dans les contrées. Le point faible de cette institution reste cependant cette dite dissémination, car l'influence du maître aux lames jumelles ne s'y fait plus sentir. Au contraire, lors d'une Nirrenraug, où tout combattant est soumis à un effort physiques proche de la torture, les guerriers des repaires ont tendances à manifester une profonde antipathie envers leur tourmenteur. Aucune drogue ou influence malfaisante ne vient altérer leur jugement, et rester cloîtrés dans un petit espace en étant presque privé de liberté d'action les exaspèrent. Si changement il y a, il viendra des repaires...


Balak prit une profonde inspiration, appréciant quelques instants la douce fraîcheur du vent de printemps.

Le second point concerne les domaines. De tout temps, il a toujours existé trois domaines. Le Domaine premier est celui de l'Arnor, et Croc-Noir y vit, au côtés du Haut-Suzerain, qui contrôle les autres Domaines. Ces derniers se trouvent au Harad et dans le Grand Nord, en dehors des terres du milieu. Lynth, car tel était le nom de celui qui osa élever la voix contre son seigneur, décrit les deux domaines avec minutie. Pour résumer,Au nord, ce ne sont que des barbares, des guerriers brutaux obsédés par les chasses auquels ils s'adonnent dans leurs froides contrées. Un bon chef se traduit par un bon chasseur, rien de plus. Cependant, ces barbares vénèrent la Force, et supposent que celle-ci est plus grande lorsque l'on sert Melkor. Si un homme parvient à leur prouver le contraire en parvenant à vaincre le Gardien en combat singulier, il n'est pas impossible qu'ils adhèrent aux nouvelles idées du vainqueur.
Les guerriers du Harad sont cependant moins maléables, et leur fidélité au mal est indéniable. Du moins c'était la situation au temps de Lynth, mais Doyen fait quelques références à la situation de nos jours :
Achmed Al Kahboul, actuel Suzerain du Domaine du Harad, est connu pour sa cruauté sans borne, et ce même avec ses propres troupes. Cela fait a déjà fait de nombreux mécontents, qui n'ont reçu qu'un plus mauvais traitement en guise de remerciement pour cet avis éclairé. Peut-être pouvons-nous nous servir de cet argument pour n rallier certain à notre cause.

-Balak...c'est ma foi fort intéressant, mais ça ne m'apprend toujours pas où nous allons.

-J'y viens, vieux filou, j'y viens. la seconde information qui a attiré mon regard parle de "Celle-qui-fus-abandonnée", ou "la Belle déchue". Je n'ai trouvé que des bribes de rensignements sur elle, mais elle aurait été très proche de Croc-Noir il y a fort longtemps, mais ces derniers sont désormais en froid. Selon les textes, elle se trouve actuellement "là ou jamais les ténèbres ne meurent".

-En Mordor ?

-J'y ai pensé, mais je n'en suis pas convaincu. Vois-tu, au cours de mes lectures, j'ai entrevu une certaine présence humaine autour d'elle grâce à quelques rares détails, or le Mordor n'est aujourd'hui habité que par quelques orques stupides.J'ai récemment entendu parler d'une cité dans les terres orientales qui corresponderait vaguement à cette description, et c'est là notre chemin.

Alderic secoua légeremment la tête, puis lâcha quelques grognements à peine audible, avant de se renfermer dans un profond mutisme. Sans autres échanges verbales, ils continuèrent leur route vers leur inquiétante destination.