A la recherche des Ents...

L'essai avait été concluant, et la partie la plus difficile de la mission avait finalement été un succès: ils avaient convaincu Fangorn de leur délivrer les clefs d'Orthanc, afin de pouvoir cantonner des troupes dans le clos d'Isengard et de bloquer le passage vers le Nord à toute créature du mal, toute force qui aurait voulu prendre à revers l'Armée de Coalition.

Mais queles étaient au juste les forces qui devaient faire cela, Ambremage l'ignorait...

A présent, il ne restait plus, au petit groupe, qu'à gagner l'orée Sud de la forêt d'Ent, puis de prendre la direction de l'antique anneau d'Angrenost, puis d'ouvrir, grâce aux clefs d'Orthanc, l'accès à toute armée du bien qui se trouverait éventuellement à proximité - s'il y en avait une, bien sûr, faute de quoi les compagnons d'aventure seraient bien embêtés, et Tanarith en premier.

"Nous vous en remercions immensément, Sylvabarbe. Encore une fois vous et les Ents aurez apportez votre pierre à l'édifice de l'union des Gens Libres, et qui sait... tous les petits cailloux pourront en former un grand et nous mener à la victoire. A cela, je ne connais pas la réponse, mais qui ne tente rien n'a rien."

Sylvebarbe fut alors l'auteur d'une remarque fort intéresante concernant l'Elfe qui les accompagnait, cette Elaïne qu'ils avaient trouvé en chemin.

"En effet, noble berger de la forêt, cette Elfe a été frappé d'un mal mystérieux, qui ne l'est peut-être pas pour vous. Car il provient sans doute... hem... eh bien... d'un Ent. Un Ent au coeur obscur, semble-t-il, qui tient sa demeure non loin d'ici. Nous vous serions reconnaissants, si vous pouvez la sortir de cet état rapidement. Mais si c'est impossible, nous serions contraints de la laisser à la garde de vos Gens, car nous ne pouvons souffrir d'aucun délai."

Fangorn poussa un profond soupir qui, avec la force de son souffle, semblait être une bourrasque de vent, agitant les capes et faisant voleter les cheveux d'Elaïne au-dessus de laquelle l'être millénaire s'était penché.

Il lui toucha le front d'un de ses doigts semblables à une racine noueuse, et il commença à murmurer des choses. C'était du parler entique, et c'était signe que cela prendrait du temps, pour sûr. Mais à mesure que Sylvebarbe parlait, il semblait que des mots appaaissait dans l'esprit des gens présents, ils savaient ce qu'il était en train de marmonner sans pourtant comprendre un traître mot de son parler.
Il s'adressait à lui...

"Sombrenoyer... Sombrenoyer..."

Et lui demandait de partir. Ce n'était pas une demande amicale sans pourtant être non plus un ordre direct. Mais la sagesse retentissait dans sa voix, et il était Fangorn, il était la Forêt toute entière...

Alors enfin Sylvebarbe se retourna à nouveau vers eux, et leur dit :

"Il lui faudra peut-être encore un certain tempas avant de revenir à elle. Forcechêne vous accompagnera. Adieu, amis de la Forêt."

Ce qu'il voulait dire par un certain temps, nul ne pouvait le deviner, et déjà il s'en allait, tandis l'Ent massif leur indiquait le chemin.

Elaïne se pencha à nouveau sur ses nerfs et leur imprima une secousse similaire… La bouche se ferma. Elle allait continuer son investigation lorsqu’une présence bienveillante se déversa dans son esprit, balayant la résistance de Sombre Noyer, Silvebarbe libéra Elaïne des torrents de haine qui l’environnaient…

* Merci…

L’esprit de l’ent lui répondit posément avant de quitter son esprit… A nouveau seule dans son corps, Elaïne abaissa les murailles mentales qui entouraient sa personnalité pour récupérer ce qu’il en manquait… Et quelques "bouts" de sombre noyer qu’elle ne projeta pas dans l’oubli, préférant conserver son savoir millénaire… Et une image de cet ent lorsqu’il était encore bon…

Alors qu’une part de son esprit s’occupait de cela, le reste s’escrimait à reprendre ses attaches dans son corps à l’agonie pour lui rappeler qu’il était bien habité et qu’il n’avait aucune raison de ne pas fonctionner normalement…

* Et voilà… je m’en sort pas si mal… D’ici un petit moment je devrais pouvoir atteindre le monde extérieur…

Mais elle non plus n’avait aucune idée de ce que signifiait un "petit moment" elle était hors du temps…

"Adieu... et merci."

Ambremage ne trouva rien d'autre à dire, mais ces trois mots étaient amplement suffisants, car ils refusaient à eux seuls son ressentiment, le dernier particulièrement. Et Fangorn méritait certes d'être remercié: il avait peut-être été brusqué, et sa délibération avait été, comme qui dirait, du travail expédié... mais l'essentiel était là. La mission pouvait être poursuivie, elle pouvait plus que jamais réussir.

Qui leur donnerait finalement les clefs d'Orthanc? Tanarith l'ignorait... tous l'ignoraient... sans doute les Ents leur feraient-ils bon acceuil en Isengard. La volonté de Sylvebarbe se répandait sans doute très vite sous la voûte des forêts...

Pour l'instant, Radagast, Milindë, et Ambremage regardaient avec nostalgie le vieil Onodrim s'éloigner, et finalement disparaître dans les ombres profondes des branches entrelacées et des barbes de lichen de la forêt Fangorn.

Forcechêne restait silencieux pendant ce temps, puis tourna les talons sans mot dire et guida le groupe. Elaïne se remettrait sans doute très bien parmi les bergers des bois... cela prendrait peut-être du temps, mais toute guérison en demande, sans quoi ce n'est pas une bonne guérison.

Ambremage fermait la marche, rythmée par les pas lours de l'Ent massif.

Les trois compagnons quittaient le coeur de Fangorn pour, qui sait, ne jamais y revenir...