Sommets nordiques

De sombres nuages annonciateurs de tempête éclipsaient les cieux. La lune qui, timide devant cette couverture, éclairait peu le chemin de la compagnie.

Sept hommes, enveloppés de fourrure pour combattre la morsure du vent, tentaient leur difficile ascension des contreforts rocheux eneigés. Malgré leurs précautions, le vent se leva et pénétra leurs maigres protections dans l’espoir de ralentir ses inconscients qui osaient entreprendre pareille prouesse.
Malgré les éléments se déchainant contre eux, les hommes continuais, comme si les souffrances de leur corps n’arriveraient jamais à percer leur discipline mentale.

Ils franchirent des crevasses aux allures de gorges abyssales ainsi que des pentes escarpées, capables de vous repousser bien loin en arrière au moindre faux pas. En contrebas attendait toujours un amoncellement rocailleux don le vent avait soigné leurs formes tranchantes. Quand ils quittèrent cet enfer, ils furent confrontés à des affleurements dénudés de prises, vierge de tout passage. Là où nul homme n’aurait jamais espérer survivre, eux continuaient…

Arriver au sommet, la tempête rugissait telle une longue complainte devant l’obstination des martyrs infatigables. Malgré toute la fureur du vent et de la neige, cette troupe de démons ne cilla pas, feignant l’indifférence la plus méprisable.

Un de ses hommes -s’il était encore possible de les nommés ainsi- traversa les rangs pour faire face à l’orage. Le vent hurlant couvrait ses psalmodies, dans une ultime tentative de taire cet insolant qui tentait encore de lui tenir tête. Des éclairs déchiraient le ciel, frappant les rocs et faisant trembler la terre.
Rejetant en arrière sa sombre crinière, l’homme tira de son fourreau une énorme épée de feu. En l’élevant vers les cieux, celle-ci semblait lui défier de rivaliser avec ses pouvoirs, accentuant les éclairs qui, zébrant le ciel, se convergèrent vers un point précis situé au niveau de l’épée…
Les mots étranges que récita l’homme, tout droit sortit d’un autre âge, assombrirent les cieux qui faisaient déjà offense aux pauvres rayons qu’arrivait parfois à envoyé la lune devant se barrage nuageux.

Défiant la bourrasque, l’homme dressa l’épée vers le ciel et dans un déchirement d’air, sembla réussir à plonger celle-ci dans le cœur même de la tempête. Une lanière de feu déchira l’air et, renforcer par l’impossible jonction de multiples éclairs, remonta jusqu’au firmament lui-même…
Un hurlement démoniaque oblitéra jusqu’aux capacités sonore de la tempête, résonnant longtemps au sommet et dans le cœur des hommes… Le cœur de la tempête fut alors recouvert d’une immense zone d’ombre, éclipsant les derniers espoirs lunaires.

- Enfin, l’éveil… Chuchota le porteur de l’épée d’une méprisable indifférence.

Les grands sommets semblaient plus calme depuis quelques temps. Un grondement sourd manquait dans l'atmosphère, étrangement le paysage n'était plus le même...

Quelques grands aigles tentaient à nouveau le passage, craintifs mais curieux de cette "absence". L'endroit ne paraisait plus aussi hostile, étrangement. C'était incompréhensible, mais en d'autres temps, quelque chose vous aurait repousser... Cette aura, se sentiment de repoussement avait disparu. Le calme reignait en maitre aux sommets nordiques. Une étrange sensation pour ses quelques rares habitants...

Voilà que celui qui avait vécu si longtemps aux sommets nordiques avait été terrassé. Les hommes se croyant libérés d’un bien grand mal, avaient pourtant été aveugles aux signes annonciateurs. Ceux qui avaient planifiés de grands désastres s’étaient armés de fidèles à leur cause. Mais contrairement à leurs maîtres, tous n’avaient pas périt dans le tombeau de leurs ambitions malheureuses.

Le sentier enneigé qu’avaient un jour vu sept hommes défié les inhospitaliers sommets, était à nouveau souillé par le pas d’un mortel. Cette scène semblait familière. Mais les temps avaient définitivement changés, à l’instar du vent qui était toujours aussi cruel à cette altitude. Défiant la nature, le voyageur continuait sur l’ancien sentier, pressant le pas, inflexible au mauvais traitement du froid.

Au sommet, les vents forts se comparaient toujours autant à un ouragan. L’improbable voyageur retira sa capuche, dévoilant une crinière devenue blanchâtre par le mauvais traitement du froid.
Il n’était pas inconnu à cette terre, pas plus qu’elle ne l’était de lui. Mais aujourd’hui, il n’était pas venu défier d’anciennes créatures. Il n’avait nulle épée à faire rougir les cieux. Il était seul, sans maître. Un solitaire résolu, aussi insouciant aux lois de la nature qu’aux craintes des hommes mais pas dénué d’ambitions...


C’est ici qu’il avait cru que tout commencerait, que tout se terminerait. Mais il n’en fut rien. Il n’y avait personne pour le juger, personne pour le commander. Pourtant, les chaînes résidaient. Car la lumière résidait. Et sans lumière, il ne saurait y avoir de ténèbres. Et de la mort aussi.
Les rauques glapissements de centaines de crébains environnaient le sommet qu’ils encerclaient de leur vol.
La mort trouvera un passage.
Les ténèbres se fraieront un chemin. Les ténèbres viennent toujours.
L’homme bande sa volonté vers l’avenir. Malgré l’échec de ses entreprises, ses traits se crispent en un rictus maléfique et résolument déterminé.
Il ne saurait souffrir du chagrin de la défaite.
C'est de nouveau à cet endroit qu'il prend la décision d'entamer un nouveau commencement.
La mort trouvera un chemin. Les dieux eux-mêmes doivent mourir.