Le Cap d'Eryn Vorn

Se faufilant entre l’immense royaume d’Arnor et le pays de Dun, caché par les Flots Gris et le Brandevin, se dresse une péninsule qui défie la mer. Le Cap d’Eryn Vorn est un endroit totalement oublié de la Terre du Milieu. Ce trouvant à l’extrême limite du Cardollan, cet endroit ne possède pas le moindre attrait. Il est loin de tout. La civilisation la plus rapprochée est celle, déjà rachitique et peu attirante, des Duns. Les rares villages d’hommes qui sont installés en Cardollan sont peuplés de gens douteux, ceux qui ont fuient les grandes villes souvent par peur de la justice. Ou bien par pauvreté excessive, ils sont venus ici tenter leur ultime chance.

Mais aucun homme n’a poussé sa fuite jusqu’à ce bras de verdure isolé. Rappelant Fangorn ou la Vieille Forêt, la peur des arbres qui y poussent, sème la terreur chez les gens qui s’en approche. Quand le besoin de bois se fait nécessaire, ils se déplacent toujours en large groupe, cherchant en bordure des bois les arbres qui leur seront nécessaire. L’endroit est encore plus petit que la Lòrien, mais encore plus dépeuplé que le Désert du Nord. Certains des Cardollanais qui s’aventurent le plus souvent à la recherche de bois, racontent une vieille histoire par les soirées froides d’hivers. On prétend qu’un homme y vit, appeler le jardinier des arbres, il aurait des pouvoirs sur les arbres centenaires de l’endroit. Certains prétendent que c’est grâce à lui que les arbres n’envahissent pas Cardollan, d’autres croient plutôt que c’est à cause de lui que la forêt est aussi malveillante.

Mais peu importe leurs pensées, ils se trompent, l’être qui vit là n’est pas un homme, mais un elfe, aussi vieux que la forêt elle-même. Mais ce n’est pas pour autant qu’il la « contrôle », la forêt n’a rien de spéciale, si ce n’est que sa vieillesse qui sème la terreur dans l’imaginaire des hommes. D’ailleurs, l’elfe qui y vit rit bien de l’esprit dupe des rares hommes de l’endroit. Car souvent ses mêmes hommes peureux, le prenant pour un être du mal, discute avec lui pendant des heures à la seule auberge de l’endroit. Le Refuge du Bucheron est la pire auberge de toute la Terre du Milieu, mais comme c’est la seule à dix jours de marche, elle est pleine à chaque soir. Et Finrodel, notre elfe en question, y va fréquemment depuis qu’elle à ouverte, 150 ans plus tôt, alors que l’arrière-grand-père de l’actuel aubergiste l’avait bâti de ses mains. Il y puisait les rares gouttes de renseignements sur le monde extérieur qui tombaient ici.

Depuis quelques temps, une rumeur planait au sujet d’un endroit appelé Gar Thulion. La rumeur disait que c’était un nouvel endroit de refuge pour les elfes et que la race commençait à se regrouper là, attirant à elle toutes les autres nations elfes disséminées sur la Terre du Milieu. Finrodel était fort intéressé par cette nouvelle, il n’avait pas remis les pieds à Gar Thulion depuis l’ascension du nouveau prince. Et même si les humains ignoraient tout de Gar Thulion, le simple fait qu’ils connaissent maintenant son nom, laissait croire à l’elfe que de grandes choses se préparaient là-bas.

Aujourd’hui, il était à l’auberge pour y chercher un voyageur, ou un groupe, il y en avait presque tout le temps au Refuge du Bucheron. Si ils faisaient route vers le Rohan ou le Gondor, il se proposerait pour faire route avec eux. Ainsi dès le lendemain (car tout les gens passant là avaient hâte de repartir), il pourrait partir vers cette magnifique ville elfique.

Saeros s'amusait, à l'aide de son couteau, à graver un petit signe elfique sur la grossière planche de de bois qu'il avait devant lui. C'était un peu l'usage ici, au ''Refuge du Bucheron''. Aucune des tables n'étaient épargnées. Il en était de même pour les tabourets, les parois et même divers endroits du pancher étaient empli d'écriture dans toutes les langues de la Terre du Milieu ... Partout, les voyageurs qui faisaient halte laissaient une empreinte de leur passage ... Enfin, là où il restait de la place ...
L'elfe qui en terminait d'imprimer sa marque portait une longue tunique verte sous sa cape de voyage. L'un des pans relevé laissait apparaître un soleil rayonnant, signe de son appartenance à la Maison de la Fleu d'Or de Gar Thulion ...

Il revenait de mission et il lui tardait de retrouver la cité cachée pour en rendre compte mais aussi de revoir Velinyä de l'Hirondelle, sa bien aimée. Depuis des années, il parcourait les terres de long en large pour des missions de renseignement. Il partait plus ou moins longtemps.
Il en avait terminé de son inscription sur le côté gauche de la table ... Velinyä y était désormais inscrit ...

Il releva la tête lorsqu'il aperçut le ''Brûn''* comme on l'appelait amicalement chez les elfes qui voyageaient régulièrement dans les environs et le connaissait ...
D'ailleurs, peu connaissait son véritable nom ... Il était Le ''Brûn''* eut égard aux innombrables années qu'il se terrait dans son bout de forêt ... Pour être tranquille, il était tranquille ... Quasiment personne n'allait jamais par là !

Ce qui intéressa Saeros pour cette fois et lui arracha un sourire, c'est que Brûn semblait fermement décidé à se bouger ... Pour sur, voilà qui n'était pas banal !

Il se décida à quitter sa place, s'approcha de l'elfe et lui tapa sur l'épaule ...

- Vous êtes à la recherche d'un compagnon pour faire la route jusqu'à la forteresse caché me semble-t-il avoir entendu ... Il se peut que je sois celui-ci ... Cependant, il me faut connaître les motivations qui vous pousse à vous y rendre ... Ou tout au moins, tout ou partie de ce que vous pourrez m'en dire ...



*Brûn : Qui persiste depuis longtemps, ou établi depuis longtemps, ou en usage depuis longtemps

La grande salle de l’auberge était éclairée par les rares chandelles parsemées dans l’endroit et un petit feu de cheminé qui produisait plus de fumée que de lumière. Malgré tout c’était un endroit qui convenait bien à Finrodel, dans un endroit comme celui-ci, il était impossible, pour peu qu’on faisait un effort, de reconnaître quelqu’un. Et c’était exactement ce qu’il était venu chercher dans ce coin reculé du monde, ses voyages entre la forêt et le Refuge du Bucheron lui permettais d’éviter toute rencontre qu’il aurait pu lui déplaire. Mais aujourd’hui, il ne venait pas pour se cacher, son large capuchon était rabattu en arrière et il s’affichait fièrement à la manière des elfes.

En entrant dans l’auberge, il s’était immédiatement dirigé vers un petit groupe de quatre marchands qui semblaient parler des affaires dans l’est du Gondor. Il les salua avec politesse et leur proposa de savourer une « bière » avec eux. Mais évidemment l’elfe ne consommait jamais ce genre de produit, mais comme ses oreilles étaient d’une rondeur unique pour son espèce, la plupart des gens le prenait pour un jeune homme encore imberbe, alors il devait se fondre dans se rôle. La plupart du temps, il faisait semblant de la renverser ou bien il prétextait de se sentir mal et allait prendre un peu d’air avec sa bière à la main, avant de la vider dans la boue de la rue. De toute façon, il était déjà très rare qu’il proposa à quelqu’un de prendre une bière ou une cervoise. Mais c’était l’un des meilleurs moyens de s’attirer la sympathie d’hommes semblables.

Après quelques minutes à les laisser discuter encore entre eux, il les questionna sur le genre de commerce qu’ils avaient et il apprit qu’il avait eut la chance de trouver un groupe de vendeur de plume. Ces gens rassemblait les meilleurs plumes de la Terre du Milieu afin de fabriquer un empennage unique qu’ils revendaient ensuite aux elfes. C’était l’excuse parfaite pour leur parler de Gar Thulion :

Vous commercer avec des elfes? Ceux de Lòrien ou plutôt ceux de Mirkwood?

Celui qui semblait être le chef de la bande, puisqu’il parlait le plus souvent et portait les plus beaux habits , lui répondit :

On commerce avec n’importe quel elfe, tant qu’il offre un bon prix.

Mais je veux dire, où vous rendez-vous pour vendre vos produits?

Bha… généralement on voyage dans les Terres Sauvages pour rassembler nos plumes, puis on remonte à Minas Tirith en vendant un peu en chemin. Le reste on le vend aux marchands elfes qui sont là-bas…

Des Terres Sauvages à Minas Tirith, se groupe de marchand devait passer fréquemment à proximité de Gar Thulion… L’elfe sentait qu’il se rapprochait du but :

Et, avez-vous entendu parler de ses rumeurs qui cours sur une ville elfe du nom de Gar Thulion? Je suis un cartographe, menti-t-il, et j’aimerais bien répertorier cet endroit.

À ces mots les quatre hommes éclatèrent de rire durant plusieurs secondes, puis un autre du groupe repris son sérieux et lui dit, non sans un large sourire :

Et tu crois réellement qu’un humain arrivera à mettre les pieds en Gar Thulion? L’endroit est tenu secret par les elfes, il est encore plus dur de ce rendre là que d’entrer en Lòrien sans que les elfes s’en aperçoivent!!!

Et les marchands se lancèrent dans une autre longue rigolade. C’est à ce moment que quelqu’un lui tapa sur l’épaule pour attirer son attention et lui glissa quelques mots. Finrodel s’excusa auprès des marchands, en prétextant qu’il devait aller soulager sa vessie. En se levant, il saisit l’étranger par le haut du bras et le tira à l’écart avec une certaine nonchalance. Il s’approcha tout prêt de son oreille et lui souffla, glaciale :

Les gens de Gar Thulion ont-ils à ce point fait confiance aux hommes pour ne même plus taire le secret de nos villes? Auparavant quiconque voyait cet endroit faisait le serment de taire son existence et voilà qu’aujourd’hui les elfes parlent ouvertement de forteresse cachée devant cinq hommes buvant ensemble dans une auberge miteuse?

Le vieil elfe n’était pas de nature impulsive ou agressive, mais il faut savoir qu’il ignorait tout de Saeros, en autre que celui-ci connaissait son existence à titre de « Brûn ». Car sous toute apparence, il était un homme et c’est pourquoi il accusait l’elfe charitable de dénoncer les secrets du peuple des elfes.

Saeros regardait l'elfe sans trop comprendre. Il avait employé le Quenya eut égard à son grand âge et avait partiellement parler à voix basse. De plus, ses amis marchands était fortement imbibés. Ils avaient déjà du mal à aligner trois mots en langage commun alors le Quenya ...
Il se libéra de la poigne de l'elfe aux oreilles d'hommes et referma les pans de sa cape avant de dire, toujours en langage elfique :

- Je vous laisse à vos marchands, puissent-il vous aider à trouver Gar Thulion mais permettez moi d'en douter ...
Il semble que vos années d'errance et de solitude au milieu de la vieille forêt aient quelque peu altéré vos facultés ... Peut être pouvez vous tromper les humains sur vos véritables origines mais il faudrait plus qu'une ablation partielle de vos oreilles pour tromper un représentant de votre propre race ....
Quand à ma trahison, ce n'est pas moi qui parle en langage commun et ouvertement de Gar Thulion mais bien vous :

Citation :

Et, avez-vous entendu parler de ses rumeurs qui cours sur une ville elfe du nom de Gar Thulion? Je suis un cartographe et j’aimerais bien répertorier cet endroit.

- Telles sont vos paroles ... Je n'ai fait que vous interrompre ... Pour le bien de ma cité ...

Saeros poussa un soupir avant de continuer :

- Il aurait été plus simple et surtout plus judicieux pour votre ''couverture'' de me rejoindre discrètement après en avoir terminé de votre conversation avec les humains puisque vous étiez le seul à pouvoir m'entendre et surtout à comprendre l'ancienne langue ...

- Ma foi ... A présent, veuillez me pardonner ...

Saeros s'inclina puis tourna les talons et s'approcha de la sortie ... Il avait encore une longue route à faire et entre un vieil elfe qui perd la raison et sa belle Velinyä qui l'attendait ... il n'avait plus de temps à perdre ...

Bientôt, les voix et les rires du refuge du bucheron se firent plus lointain. Saeros adorait marcher sous les étoiles et par cette nuit sans nuage, la voute céleste offrait un spectacle véritablement fabuleux ...

Décidément, l’elfe avait dû passer bien trop de temps dans son petit bout de forêt… Il n’avait même pas eut connaissance que la personne en question lui avait parlé en Quenya! Peut-être était-ce ses nerfs qui étaient trop tendus, il avait comprit se que lui disait l’homme, l’idée que les autres aient pu immédiatement comprendre aussi c’était dès lors imposé dans son esprit. L’elfe prit une profonde respiration alors que Saeros s’expliquait brièvement sur sa façon de faire comparée à la sienne. Finrodel ne répondit rien, il était tétanisé sur place. Pas par ce que lui disait son confrère, mais bien par ce qu’il avait fait. Pas à propos de la protection de Gar Thulion, mais bien de sa réaction violente envers un autre Quendi.

Lorsqu’il sorti de sa stupeur, ses esprits s’étaient refroidi et il jeta un œil aux quatre marchands qui étaient assis et regardaient toujours dans sa direction. Maintenant ses esprits calmés, l’elfe réfléchissait bien mieux, il arbora un regard mauvais et défiant, jeta deux piécettes d’argent sur la table en lançant d’une voix qui se voulait l’effet d’un homme réchauffé :

Cet homme ne s’en tirera pas comme sa! Insulter ma famille comme sa, quel culot!

Et sans plus ajouter autre chose, il quitta l’auberge d’un air tapageur. Les marchands qui n’en étaient pas à leur première consommation et qui ne désirait pas réellement aider l’étrange homme qu’ils venaient de rencontrer lancèrent seulement :

Je me demandais bien ce qu’il avait pu dire pour vous offusquer à ce point! Ne le rater pas surtout! Un bon coup dans la rate et il restera plié!!

Et les quatre marchand de Gondor s’esclaffèrent de nouveau, alors que la porte se fermait, étouffant du même coup le peu de lumière qui se projetait dans la ruelle. Juste au bout du dernier jet de lumière, Finrodel perçu un bout de cape voler au vent et s’élança dans cette direction pour rattraper celui avec qui il avait discuté. L’idée de faire le voyage seul ne l’inquiétais pas réellement, ce n’aurais pas été la première fois, mais il répugnait l’idée de rester en froid avec le premier représentant de sa race qu’il voyait en prêt de 200 ans. De plus, le voyage à deux serait quand même mieux! En quelques enjambées, il l’eut rejoint, alors que celui-ci s’était retourné en entend le bruits de ses bottes battant la chaussée :

Je voudrais m’excuser pour ma réaction, je ne m’attendais pas moi-même à agir de la sorte… Je crois qu’au sujet de choses semblables j’ai un peu les nerfs à vif, les dernières citées secrètes des elfes que j’ai vue tomber ont toutes été causé par l’excès de confiance de notre peuple à l’égard des hommes… Je crois que sa m’a secoué.

Sans attendre de réponse de son interlocuteur, le vieux vagabond ajouta, affichant un petit sourire farceur :

Avec les années, j’en suis rendu à avoir oublié que les elfes ont de bien meilleurs yeux que les hommes! La plupart me prennent pour un adolescent imberbe qui se donne des airs de plus vieux que son âge… ajouta-t-il avec un petit rire amusé. Mais ne croyez pas que les années passées loin du monde m’est rendu idiot… Eux m’ont pris et me prennent toujours pour un jeune humain qui à des rêves de fous. Ils ont tous entendus des rumeurs sur Gar Thulion. Entre que je me renseigne calmement à titre d’humain qui cherche à savoir si la rumeur est vraie et qu’un elfe leur parle ouvertement de la forteresse cachée, il y a une grosse différence.

Ma discrétion est au moins une chose qui ne s’est pas perdue ave le temps que j’ai passé ici… Je puis même vous dire que j’ai autant de raisons de ne pas vous dire ce que je cherche à Gar Thulion, que vous en avez de me le demander…

Mais il sembla chasser cette parole d’un grand geste de la main, alors qu’il avança le bras droit pour serrer la main de l’étranger :

Mon nom est Finrodel, dites-moi pourquoi je devrais vous faire confiance et je vous dirais ce que je cherche en Gar Thulion…

Saeros resta un petit moment sans rien dire, regardant avec attention l'elfe qu'il avait en face de lui. Puis, il écarta les pans de sa cape pour laisser apparaitre le fond vert de sa tunique sur lequel reposait un franc soleil aux reflets dorés.

- Je me nomme Saeros, de Gar Thulion, agent spécial pour la Fleur d'Or. Je rejoins la forteresse ...

Il s'inclina avant de reprendre :

- Je n'ai que cela à vous offrir ... La confiance est quelque chose qui se gagne et les lauréats se font rares par les temps qui court ...
Je n'ai pas la prétention de l'obtenir si rapidement de vous … Ni l'intention de vous accorder si facilement la mienne ... Toutefois, il semble que nos desseins soient semblable et que notre route serpente dans la même direction ...

Il finit par sourire et serra la main de l'elfe avant d'enchainer :

- Finrodel …Vous possédez plusieurs noms dirait-on, Finrodel d'Eryn Vorn ! La réputation des bois du ''Cap des Bois Noirs'' vous doit beaucoup !
D'aucun, chez les humains, disent qu'elle est hanté par un homme qui ne meurt pas, d'autres qu'un mage protège les bois de sortilège puissant, certain parlent d'un monstre, d'un vieux fou, d'un esprit frappeur, d'un sorcier ayant pouvoir sur les arbres, d'un ent solitaire, quand ce n'est pas la forêt entière qui serait soumise à un maléfice étrange …

Il rit, lâcha la main du vieil elfe, referma sa cape en plaça le capuchon sur sa tête et se remit en route tout en continuant :

- Il m'est plaisir de connaître votre véritable nom à présent … Par chez nous, pour ceux de nos agents qui vous ont aperçut arpentant les bois, vous êtes le ''Brûn''. Certain pensent que vous êtes aussi âgé que la forêt ... Agé vous l'êtes certes … Mais dites moi, êtes vous un elfe aussi ancien qu'on le prétend ?

Le vieil elfe regarda l’emblème doré qu’exposa brièvement l’homme se tenant en face de lui. La fleur d’or lui disait en effet quelque chose, mais n’importe qui aurait pu se procurer semblable blason en abatant un représentant de la maison. Ce qui rendait le vieil errant confiant c’était la façon dont il parlait; il avait dit « la forteresse » et non Gar Thulion. Et son regard témoignait de la fierté des gens de la forteresse appartenant à une haute maison. Du moins était-ce bien ce qu’il s’en souvenait. D’ailleurs, à tout cela il trouva bien de répondre à Saeros :

La confiance n’est pas rare par les temps qui court, elle l’a été de tout temps…

Quoi de plus vrai? À chaque époque de ce monde les gens disaient la même. Qu’aujourd’hui la confiance est plus rare. L’elfe croyait plutôt que c’étaient eux-mêmes qui, plus jeunes, accordaient plus facilement leur confiance. Ainsi il confondait leur vision du monde au véritable monde. Mais il n’encombra pas son nouveau compagnon de ses pensées de vieillard. Il préféra répondre aux commentaires de son compagnon :

Le Brûn!, s’exclama-t-il avec un brin de rire dans la voix, et bien, nul doute vous êtes bien plus prêt de la vérité que tout ces humains. Vous même avez entendu encore plus de rumeurs que je ne l’aurait cru possible à mon sujet. Encore heureux que personne ne m’est prit pour une nouvelle incarnation du seigneur ténébreux!

Il rit de bon cœur, comme souvent lorsqu’il avait la chance de voir l’un des siens. Il lui donna une petite tape dans le dos, alors qu’il ajoutait :

Vous voyez à quel point ses rumeurs sont erronées maintenant… Et c’est à cause de celles-ci que vous croyez que je suis âgé? Je peux vous dire que si l’on prétend que je suis plus vieux qu’Arda, alors les rumeurs mentent.

Là dessus, il reporta son attention sur la route et ajouta tout en allant d’un bon pas :

Vous comptez aller jusqu’où cette nuit?

Les deux elfes avaient fini par se mettre en route sous le couvert de la nuit. Saeros avait proposé à son nouveau compagnon de profiter du temps relativement clément ainsi que de la température idéale et propice à une bonne et longue marche pour s'avancer au mieux ...

- Je dirais qu'il serait bon de mettre quelques milles entre vous et vos bien aimés bois si vous le voulez bien. Il nous faudra une bonne semaine pour traverser le Cardolan et atteindre le fleuve. Je pense que nous tenterons la traversée du Gwathlò à l'embouchure pour rejoindre Lond Daer, le port ...

Il fit une petite moue dubitative avant de reprendre :

- C'est un drôle d'endroit que je n'aime guère ... Sa réputation n'est pas usurpée, c'est un refuge pour nombre de pirates et c'est plutôt mal fréquenté, la prudence sera de mise ... Enfin ... Là, il nous faudra trouver une embarcation pour descendre plein sud en suivant la côte et suivre finalement l'Isen jusqu'à la Trouée de Rohan ... Voilà pour la première partie de notre voyage. Qu'en dites vous Finrodel, cet itinéraire vous convient-il ?

Il y avait longtemps que l’elfe n’avait pas entendu parlé le doux et harmonieux langage des gens de sa race, il se rendait compte que la subtile mélodie de ses mots lui avait manqué durant ses années alors que son nouveau compagnon lui parlait du Gwathlò ou de Lond Daer. D’ailleurs, à ce nom, l’elfe fit une grimace réprobatrice qu’il ne se gêna pas de montrer à Saeros qui semblait rechigner cette alternative autant que lui. La dernière, et seule, fois où le vieil elfe avait mit les pieds dans cet endroit, il était infesté de la pire racaille qu’on pouvait rassembler dans tout le Cardollan. Il aurait au moins espéré qu’avec un nouveau roi en Arnor et la paix précaire au pays de Dun, l’endroit aurait un peu rehaussé sa clientèle, mais malheureusement, l’homme de la Fleur d’Or lui disait le contraire.

N’ayant pas vraiment d’autre choix, Finrodel accepta tout de même l’idée de passer par ce port miteux, mais refusa, pour des raisons pratiques, la suite de l’itinéraire offert :

Je ne crois pas qu’il nous sera possible de passer par l’Isen. En partance de Lond Daer la quasi-totalité des navires se dirigerons vers Minas Tirith. Je serais étonné que nous trouvions un bateau qui ferait voile vers l’Isengard… Qu’irait-il faire dans un endroit désolé et sans vie? Peut-être serions-nous mieux de prendre un navire jusqu’à Minas Tirith, puis de là, un autre jusqu’au pied du Rauros. À moins que vous n’ayez déjà un arrangement avec un navire là-bas à titre d’envoyé spécial.

Les prévisions de Saeros s'avérèrent relativement justes. Une semaine après leur départ, les deux elfes aperçurent enfin le Gwathlò, fleuve des flots gris, qui serpentait à travers la terre du milieu jusqu'au nord, près des landes d'Etten …

Les deux dernières journées n'avaient rien eut de très agréables et les deux marcheurs avaient été obligés de fortement ralentir la vitesse de leur progression à cause d'une météo désastreuse. Après les premiers jours de voyage sous un franc soleil, le temps avait brusquement viré à l'orage pour terminer en une véritable tempête.
Il pleuvait des cordes sans discontinuer sous un ciel noir qui se déchirait régulièrement pour laisser apparaitre de longs éclairs aveuglants.

Se déplacer dans les régions sauvages d'Arnor par ce temps capricieux n'avait rien d'une ballade de santé. De plus, les deux elfes étaient souvent en désaccord sur les chemins à emprunter, sur le moment des haltes, sur leurs visions des choses en règles générales …

Saeros s'était finalement rallié à la proposition de Finrodel consistant à embarquer à Lond Daer sur un bateau en partance pour Minas Tirith. Il ne pouvait nier que le vieil elfe n'avait pas tout à fait tord. Trouver une embarcation pour la cité blanche serait chose aisée et de plus, ils auraient certainement le choix de pouvoir prendre le bateau qui leur conviendrait le plus. Le revers de la médaille est que le voyage, bien que devenant plus sûr, s'en trouverait allongé de plusieurs jours ... Velinyä, sa bien aimée de l'Hirondelle lui manquait.

L'elfe de la fleur d'or criait pour couvrir le bruit de la pluie et surtout du vent qui soufflait avec une telle force que les quelques arbres qui se trouvaient à proximités ployaient bas donnant l'impression de saluer le passage des deux elfes par d'excessives révérences :

- Regardez Finrodel, voici le fleuve ! Enfin, nous y voilà …

Plusieurs roulements de tonnerre couvrirent une partie de la suite de la phrase de l'elfe.

- …................ A présent, il nous faudrait trouver …..... Abrité pour laisser passer la nuit et tenter notre chance au matin …..... les flots gris pour rejoindre le port … Il existe des petites cabanes de pêcheurs …....... de la rive ….................................... en dites vous ?

Le voyage avait redonné des ailes au vieil elfe, bien qu’il se promena régulièrement d’un bout à l’autre du cap d’Eryn Vorn, son dernier véritable voyage à travers la Terre du Milieu remontait à la fin du troisième ère. Il allait le cœur léger, il semblait ne presque pas toucher le sol durant sa marche, au même titre que tous les elfes des bois, de plus, il s’étonnait que le temps fût si clément avec eux. Habitué d’être lové entre deux vaste cours d’eau, Finrodel savait que la forte humidité qui y régnait entrainait de fréquentes pluies torrentielles. Mais ce qui étonnait l’elfe d’avantage encore, c’était l’aisance qu’il avait à discuter avec Saeros, il revenait d’un long voyage, qui n’était pas son premier et cela semblait les rapprocher. C’était certes une relation différente que celle qu’il avait développé avec l’un des conseillé de Elu Thingol qui portait lui aussi le nom de Saeros. Il était un être abjecte qui avait bien mérité son sort, alors que son nouveau compagnon semblait emplit de gaieté de cœur et de nobles intentions.

Le mauvais temps lui-même n’avait entamé le bonheur et la conviction de Finrodel, alors qu’à la tomber du second jour de pluie, ils apercevaient enfin les Flots Gris. Un petit sourire de satisfaction aux coins des lèvres, il tenta de saisir le sens de la phrase de son compagnon, car le vent emportait ses paroles au loin à chaque nouvelle bourrasque. Il cru saisir que Saeros voulait rejoindre des camps de pêcheurs pour ensuite remonter les Flots Gris jusqu’à Lond Daer au matin venu. L’idée semblait être des plus sages, car les bateaux ne partaient jamais la nuit et il leur faudrait trop de temps ce soir pour remonter jusqu’au grand port. Finrodel hocha donc la tête en signe d’affirmation, choisissant d’emboîter le pas de son compagnon.

Le temps qu’ils rejoignent le plus proche village sur la côte, Isìl était haute dans le ciel, même si l’on ne pouvait voir d’elle qu’une pâle lueur bleuté se reflétant sur les imposants nuages orageux. Les gens de l’endroit n’était pas sous le règne bienveillant des rois, et même si ils ne craignaient pas vraiment les étrangers, ils croyaient pouvoir leur soutirer aisément des écus pour tout et n’importe quoi. Et Finrodel, jouant la prudence, se refusa formellement à dépenser une seule pièce inutile, alors qu’ils étaient encore si loin de leur but. La chance leur sourit à tout deux alors que Saeros cognait à la porte de leur vingtième maison. L’homme qui ouvrit la porte avait le visage blême et s’appuyait sur la poignée de la porte pour ne pas tomber au sol. Un large bandages de tissu gris clair était enroulé autour de l’avant-bras qui ne le soutenait pas et des tâches de sang en maculaient la surface.

L’homme leur avaient refusé l’accès à son toit, comme tout les autres avant, mais Finrodel s’avança alors, pointant du doigt la blessure du pauvre homme et lui demande :

Si je vous guéris de votre blessure, si bien et si vite, que demain avant l’aube vous pourrez prendre la mer avec les autres pêcheurs, nous laisserez-vous dormir au chaud et prendre un léger repas avant le coucher?

L’homme semblait méfiant et il leur en fît par en les menaçant de les jeter dehors à grand renfort de coup si on s’était jouer de lui, mais il accepta tout de même. Finrodel, retira rapidement son manteau délavé tout en posant son sac dans un coin et s’approcha immédiatement de leur hôte. Il retira les bandages d’une main experte et analysa la blessure pendant prêt d’une minute. Il se leva alors et demanda au blesser si il y avait de l’eau chaude quelque part, avisant une bouilloire sur le poêle, il n’attendit pas la réponse pour s’en saisir alors que l’homme ajoutait :

Je l’air retiré du feu il y a une vingtaine de minutes pour me faire une infusion apaisante.

Le vieil elfe qui était absorbé par sa tâche, testa la bouilloire du dos de la main et la jugea convenable. Revenant vers l’homme, il l’avisa qu’il sentirait une certaine douleur au contact de l’eau, mais l’intima de ne pas bouger malgré tout. Alors qu’il versait l’eau avec autant de délicatesse qu’il le pu, Finrodel se mit à marmonner un air en Telerin. Lorsque la plaie fût entièrement recouverte d’eau, il reprit le chant avec plus de force :

Allacha bellè stalga ora palta quendi

Son chant avait été extrêmement bref et le pêcheur regardait maintenant l’elfe aux allures d’homme avec un regard étrange, ne comprenant pas ce qu’il faisait là. Mais son étonnant ne fût rien à comparer à la stupeur qui le frappa quand son bras, subitement cessa de lui faire mal. Il reporta son attention sur son avant-bras, maintenant dépourvu de traces de blessures. Incrédule, il passa avec vigueur sa main à l’endroit où se trouvait plu tôt sa blessure, puis jeta un regard sur Finrodel. Son regard était indéchiffrable, mais il fini par dire :

Je vous ai promis le gîte, je respecterais ma parole… Mais vous partirez à l’aube avec moi et je ne veux plus jamais vous revoir.

Là-dessus il se leva et rejoignit son propre lit.

La baraque du pêcheur n'avait rien d'une taverne trois étoiles certes, mais Saeros poussa un ''ouf'' de soulagement lorsque leur hôte avait daigné les laisser entrer. Deux pièces mal entretenue et une petite ajoute attenante dont le toit prenait l'eau, emplie de filet et divers objet de pêcheur voilà ce qui constituait le gîte, mais aux yeux de l'elfe, après les heures passées sous la pluie battante, cela valait bien la plus belle des tavernes ...


Saeros avait d'abord cru à une blague lorsque son compagnon avait proposé à leur futur hôte de s'occuper de sa blessure. Cependant, lorsque l'homme avait accepter, il avait rit et l'avait donc laissé gérer le problème.
Il regarda tout d'abord du coin de l'oeil, tout en cherchant un endroit au sec, comment le ''vieux'' allait bien pouvoir s'en sortir avec la blessure de l'homme avant de se rapprocher, grandement intéressé par la drôle d'incantation ou peut être était-ce une mélopée qu'avait prononcé Finrodel ? …
Il fut carrément bluffer lorsque le vieil elfe se retira, dévoilant l'endroit où se trouvait la blessure … Il n'y en avait pratiquement plus trace …

Saeros s'apprêta à demander à son compagnon par quel miracle il avait réussi cette prouesse mais se retint au dernier moment, cachant sa surprise et faisant comme si cela était tout à fait naturel. D'ailleurs, il ne s'adressa pas à Finrodel mais au pêcheur :

- Bien ! Heureux d'apprendre que nous pouvons terminer de nous installer …

Saeros salua son hôte et adressa un franc sourire à Finrodel. Il retira ensuite sa longue cape et l'accrocha prêt d'un âtre. Il se saisit d'une bûche qui trainait non loin et la jeta dans le feu pour le relancer.

Il trouva une chaise près du feu qui commençait à crépiter et laissa la douce chaleur le réchauffer. Il ferma les yeux, épuisé et laissa ses pensées vagabonder à la façon des elfes lorsqu'ils se reposent …

Au milieu de la nuit, un bruit de frottement le fit reprendre lentement conscience. Tournant ses yeux vers le bruit, il aperçut la silhouette trapue du pêcheur penchée au dessus des affaires de Finrodel et un frisson le parcouru lorsqu'il vit briller fugitivement, grâce à la faible lueur du feu qui mourrait lentement dans l'âtre, la lame d'un poignard qu'il sortait du vieux sac usé par les voyages ...

Une très ancienne légende qui était apparu à une époque oubliée de tout hommes racontait qu’en des temps étranges, reculés de l’ancienne ère, vivait de sombres rois aux pouvoirs magiques. Des gens étranges qui auraient échappés aux régions désolées du Fornost. On disait que le seul moyen de les détruirent était de leur trancher la gorge avec une arme de leur propre peuple, sinon leur âme devenait un esprit qui prenait possession d’un nouveau corps.

C’est avec cette pensé en tête que le vieux pêcheur fouillait doucement les bagages de son hôte impromptu. Son courage ne tenait qu’à un fil et seule la crainte que l’esprit ne le possède après la mort du voyageur l’empêchait de le tuer avec un outil de son atelier. Chaque fois qu’un objet émettait un petit bruit de frottement, le cœur du pauvre homme cessait de battre pendant un instant, tant la peur d’éveillé l’homme le tenaillait. Il chercha longtemps, car le sac était encombré d’herbes, de vêtements de rechange et d’une lourde tente en peau. Mais il parvint finalement par trouver une très longue dague, elle devait faire près de deux pieds de long, mais il n’arrivait pas à en voir d’avantage avec la pénombre qui régnait dans cette pièce de la maison.

Soupirant sans bruit à l’idée d’être libérer de cette horreur, il leva l’arme du sol et l’approcha doucement du cou bien visible du sorcier toujours assoupit. D’un geste vif du bras, il fit glisser l’arme sur toute sa longueur, appuyant avec force sur le manche pour être certain de faire une entaille suffisamment profonde. La réaction fut immédiate, Finrodel ouvrit les yeux tout grands d’un seul coup, sidéré par se qui venait de se passer. Il leva un bras en hâte et saisit son bâton de l’autre main, alors que le pêcheur tombait à la renverse, tenant fermement sa poitrine entre ses crispées.

L’elfe se releva, son cou ne semblait pas porter la moindre marque. C’est seulement si l’on portait une grande attention à la clarté du jour que l’on aurait pu voir une fine ligne rosée sur sa peau. Mais pas la moindre goutte de sang, pas la moindre entaille. Il passa la main sur sa gorge, comme pour en chasser un simple malaise passager. Il se tourna alors vers l’homme au sol, celui-ci était toujours vivant mais semblait éprouver un grand mal à l'intérieur.