Bas quartiers

Triväm conduisit un mendiant qu’il avait convaincu de le suivre dans les rues sinueuses des bas quartiers. Mais même dans ses ruelles reculées, il était difficile d’être réellement seule. Dans l’une d’elle, une veille harpie voûtée vers le sol, les cheveux grisonnants lui masquant le visage, se balançait d’avant en arrière en remuant d'une main fébrile qui tenait une petite coupole en céramique vide, surement dans l’espoir de recevoir un don. Triväm fouilla ses poches et lui jeta quelques pièces, occupant la veille femme qui en retour le bénit à maintes reprises. L’acte n’avait rien d’anodin et rappela au mendiant qu’il aurait lui aussi une récompense pour ses loyaux services. Quand ils arrivèrent dans une ruelle déserte de toute forme de vie, le mercenaire qui comme ses confrères cachait sa réelle identité, expliqua son plan à son acolyte.

- … Et ainsi, avec ce petit mélange, tu auras une peinture temporaire qui accrochera efficacement les murs du Palais. Fait bien attention cependant, n’abandonne pas ton affaire avant d’avoir écrit ton message en entier.

- Mais… Je ne sais pas très bien écrire, si vous ne m’écrivez pas le message, je risquerais de faire des erreurs…

- Tu es bien sage jeune enfant. Mais n’ai craintes, écris les mots à ta manière. Ils comprendront alors de quelle caste sera l’auteur. Je suis sur que tu seras assez adroit pour échapper aux gardes s’ils te repèrent, mais n’oubli pas, finis ton message avant tout, c’est le plus important. Maintenant va, prend cet argent et fait en sorte de le mériter.

Triväm le remercia brièvement d’un mouvement du chef et regarda le jeune garçon se mélanger aux ombres d’une ruelle, prêt à en resurgir une fois arrivé à destination afin d’accomplir son acte d’une facilité quelque peu déconcertante. Mais il ne serait pas le premier et les nuits suivantes, d’autres pauvres gens serraient recrutés jusqu’à que l’un d’eux soit capturé et sous l’évidente torture d’une basse classe, cet acte pourrait devenir le symbole de rébellion de la populace à l’égard des autorités. Parfois, ce sont les plans les plus simples que l'on récolte les plus importants bénéfices.

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Les deux orques se fixèrent droit dans les yeux, chacun prêt à dégainer, leurs mains sur les gardes de leurs cimeterres.

- Ashdautas Vrasubatlat (un jour, je vais te tuer)

- Nar Udautas (pas aujourd’hui)

Ils froncèrent leurs sourcils vierges d’épilosité, se rapprochant l’un vers l’autre d’un pas décidé. Ils se foncèrent soudainement dessus en un grand bruit mat. Leur étreinte fut virile mais sans danger. Les deux orques éclatèrent de rire, satisfaits de leurs réactions et en profitant secrètement pour comparer leur force brute. Celui qui avait prit en premier la parole défit le turban qui occupait le haut de son crâne, dévoilant ainsi une collection de cicatrices refermées depuis bien des années.

- Tu n’as pas changé d’un muscle, haha ! Commenta son homologue, cette fois ci en langage commun.

- J’espérais te trouver ici. Voici mes nouveaux camarades, les Chiens de Pez…

- Je sais. L’interrompu l’autre, qui lui fit alors signe de le suivre un peu plus loin.

Le mercenaire orque hésita un instant à perdre de vue ses camarades qui l’avaient accompagné jusqu’ici mais ceux-ci se montrèrent compréhensif et l’autorisèrent de s’esquiver un moment. Ils entrèrent alors dans une maisonnée déserte et là, ils s’échangèrent leurs craintes et attentes. Étrangement, les Chiens de guerre de Pezarsan étaient étroitement surveillés par les autorités depuis leur arrivée et on avait retardé leur autorisation à prendre le large en prétextant des excuses pompeuses qui tenaient à peine debout. Ils étaient devenus prisonniers et ils cherchaient soudainement des alliés dans la ville portuaire, chose peu aisé quand autant de sinistres rumeurs courraient à votre sujet et avaient forgé votre réputation avant même que vous n’ayez eut la chance de vous exprimer ou d’agir.

Dans la ruelle, une patrouille vit les mercenaires peu discrets qui attendaient leur camarade et se firent un plaisir de les interpellés, cherchant à les pousser à bout afin de les forcer à la confrontation, prouvant ainsi bien malgré eux ce qu’on disait à leur sujet. Les gardes les provoquèrent par des insultes, les haradrims du groupe des mercenaires les ignorèrent mais eurent grand mal à retenir leurs confrères orques à sortir les armes.

- Bag zemarpok ! (Pathétique couard) Rétorqua un des orques en noir parlé, tout en affichant un sourire carnassier empli de défi.

Le chef des mercenaires réapparu enfin, juste avant que les choses dégénèrent afin de calmer tout le monde. Son confrère qu’il avait rencontré plus tôt observait la scène d’un peu plus loin, à l’abri des regards, inquiet de la situation précaire dans laquelle était son ami et sa bande. Il ferrait tout pour les aider, mais il avait la désagréable impression que leur destin était déjà tracé d’avance…

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Ronce se faufila en pleine nuit dans les ruelles sinueuses des bas quartiers, après s'être discrètement échappé de chez le Joallier chez qui il résidait. Il profitait parfois de ses rares moments de paix pour rencontrer ses camarades. Mais ce genre de rendez-vous s'organisait, car toute erreur pouvait compromettre leurs couvertures.
Plus par curiosité que réelle utilité, il essaya de découvrir les différentes planques où résidaient les Chiens de guerre de Pezarsan, cette bande de mercenaire sur qui s'abattrait toute la responsabilité au cas où le complot serait découvert... Encore fallait il semer des indices et rumeurs efficaces qui mènerait pareille enquête vers eux.

Quelques fracas d'acier s'entre choquant firent echo d'une ruelle proche. Ronce fit une pause, le temps de sonder d'un rapide coup d'oeil son environnement. Après satisfaction, il continua son chemin, cherchant à découvrir d'où provenait les bruits.
S'initiant dans la ruelle qui lui semblait la plus suspecte, il s'étonna de n'y voir personne ni aucune trace de confrontation. Un léger froissement de tissu l'alerta et à peine eut il le temps de lever la tête que deux silhouettes bondirent sur lui depuis les toits.

Ils roulèrent ensemble au sol et malgré la force du mercenaire, l'étreinte combinée de ses assaillants l'empécha de se défendre. Il fut ensuite brutalement planqué contre un mur, surement dans l'espoir de gagner un bref instant pour changer les prises de ses aggresseurs. Ronce en profita néanmoins pour riposter à sa manière : usant de ses jambes, il prit appui contre la mur et valsa contre le mur d'en face, emportant avec lui l'un des deux hommes qui n'eut pas la carrure pour encaisser le poid du mercenaire.

L'agresseur encore debout, dégaina un sabre afin de pallier le manque d'allié, celui ci gisant assommé au sol. Ronce fut autorisé à se relever, révélant un certaine notion du combat honorable dans l'attitude de son adversaire, bien qu'il était encore lui même à mains nues... Alors qu'ils évaluaient leurs distances, Ronce fit le choix d'aborder l'inconnu dans l'espoir de pouvoir éviter le combat :

- Raha arhuny (dis moi mon frère), t'en prendre à l'un des tiens ?

- Alkoumha ! (Ta gue***) Tu n'es pas mon frère, qu'un misérable mouton d'un fils de batard !

- Tu parles de l'Emir ? Je ne sers pas ce pays. Je suis mercenaire.

- Et alors ? Moi aussi. Déclara l'homme, dévoilant sa malheureuse dentition alors qu'il souriait fierment.

Ronce eut alors l'étrange sentiment qu'il avait justement à faire à l'un de ceux qu'il recherchait. Profitant de l'aubaine, il se tenta encore au dialogue :

- Je suis ici en paix. Ash'lom semy (Ash'lom est mon nom), et toi, qui sers tu ?

- Ha ha ! Tu ferrais mieux de me donner ton or plutot que tes paroles. Je n'ai aucun intéret pour celles ci... Nous aussi étions ici en paix, cela ne nous a pas empécher d'être tenus prisonniers dans cette maudite ville... Maintenant, avec ton aide, je pourrais surement me payer ma propre sortie.

- Tu es donc un déserteur... Tu vas abandonner tes propres frères d'armes pour sauver ta misérable vie... Pathétique...

Après un bref grognement, l'homme attaqua hâtivement, ne fauchant que de l'air à défaut de chair. L'instant d'après, une série de coups de poings vinrent s'abattre sur son visage, la forçant au sol. Ronce empoigna alors le sabre de son adversaire et s'en servit contre lui avant qu'il ne sorte de son hébètement, lui aérant les entrailles d'une coupe. Il acheva ensuite l'autre gaillard encore dans les vapes avant de rejeter le sabre un peu plus loin. La scène fut exectuée avec rapidité et sans aucun état d'âme, c'était comme une seconde nature pour ce vétéran de nombreux duels.
Au moins, personne n'aura souvenir de son visage et la nouvelle que la bande de mercenaires s'effondrait toute seule était une information suffisamment importante pour considérer sa petite sortie nocturne comme une réussite. Sans plus tarder, il retourna chez le Joallier, prenant bien garde de passer inaperçu.