Le Chien chevauchait rapidement à travers les étendues arides du Harad, exténuant sa monture sous lui. Sa mission était des plus importantes, et, tout comme une demi-douzaine d’autres messagers, il traversait le désert. Le soleil était particulièrement impitoyable : dardant ses rayons, il desséchait toute peau exposée à son feu, privait de vigueur même les plus valeureux combattants.
Le Chien devrait bientôt faire demi-tour : il avait quitté la dernière oasis connue de la région deux jours auparavant, et ses réserves d’eau étaient presque épuisées. Avec un peu de chance, les informations que lui avaient données les derniers nomades croisés se vérifieraient, et il tomberait sur la tribu du célèbre chef Khaled ibn Massar.
Le Chien monta sa tente à la tombée de la nuit, et alluma un petit feu de camp avec les quelques morceaux de bois qu’il possédait encore : dans le désert, une fois la nuit tombée, le froid vous gelait jusqu’aux os, et un feu, bien que révélateur de votre présence en ces lieux si inhospitaliers, était un luxe face auquel on ne rechignait pas.
Le Chien se réveilla en sursaut, une lame sous la gorge. Son feu n’était plus que braises rougeoyantes, mais pourtant, une vive lumière éclairait la scène. Le mercenaire leva le regard, et rencontra celui, dur, d’un haradrim. D’autres nomades en armes se tenaient à ses côtés, prêts à intervenir.
« Je suis ici en paix. J’apporte un message aux maîtres du désert. » dit le Chien, d’une voix neutre, sans aucune trace de peur.
Les pillards le lorgnèrent quelques instants, puis, après lui avoir pris son cimeterre, le mirent debout. Toujours en silence, ils lui firent signe de monter en selle. Quatre hommes l’encadrèrent, dont celui qui, quelques instants plus tôt, tenait sa lame sous sa gorge. Le petit groupe était mené par un cinquième cavalier vêtu de rouge.
Ils avancèrent plusieurs dizaines de minutes, passant sur le sommet des dunes. La lune éclairait le désert, lui conférant un aspect onirique : les torches éteintes, les dunes mêlaient ombre et sable blanc, comme si toute couleur avait fui le monde. Puis, après une durée indéterminable dans ce monde si éloigné du réel, les cavaliers purent apercevoir quelques lumières. Ils se dirigèrent vers ce qui ressemblait de plus en plus à un campement. Des guetteurs se tenaient droits, sur le sommet des dunes : leurs silhouettes sombres se découpaient de temps en temps contre la lumière de l’astre nocturne.
Le petit groupe mit pied à terre en arrivant aux abords du campement de ce qui semblait être l’une des plus grandes tribus de la région : le Chien comptait plusieurs dizaines de tentes, et bien plus de chevaux. Il fut guidé vers le corral, sous bonne garde : deux guetteurs s’étaient joints aux cavaliers, qui leur expliquèrent rapidement la situation.
Le cheval du Chien fut parqué avec ceux du clan, et on lui fit signe de dormir à même le sol, à côté du corral. Un homme resta avec lui, afin de prévenir toute tentative de fuite, et on l’attacha fermement à un piquet de tente. La nuit fut particulièrement longue et inconfortable, tant pour le mercenaire que pour son garde. Le froid qui, comme le sable, s’insinuait partout, les empêchait de fermer l’œil. Le Chien finit néanmoins par fermer les paupières, et s’endormit sans s’en rendre compte, terrassé par la fatigue accumulée ces derniers jours.
L’éclat du soleil le réveilla, en même temps que le reste du campement. Des hommes et des femmes sortaient des tentes, et, après avoir remarqué sa présence, le dévisageaient. Le Chien se redressa, et demanda à son gardien de lui retirer ses liens. Le nomade le fit en silence, puis lui commanda de le suivre. Les deux hommes s’approchèrent d’une grande tente au centre du campement, gardée par deux guerriers à l’aspect redoutable.
« Al-Mansûr va te recevoir, étranger. » lui dit l’un des deux hommes tout en écartant une tenture.
Le Chien entra dans la tente, qui était richement décorée. A l’intérieur, sur un siège simple, un homme d’âge mûr, arborant une barbe poivre et sel finement taillée, attendait, encadré de deux autres guerriers lourdement armés. Le Chien s’avança de quelques pas, puis s’agenouilla sur les tapis qui constituaient le sol de la pièce.
« Ô Seigneur, je ne suis qu’un humble messager vous apportant une nouvelle de la plus haute importance, de la part des Neufs qui règnent sur la Cité du Destin. » Le Chien se releva, et regarda le chef de la tribu dans les yeux.
« Parle, messager. Khaled Al-Mansûr ibn Massar t’écoute. » dit le maître incontesté de la tribu.
« -Ô Seigneur, les Conseil des Neufs d’Umbar t’envoie ses salutations respectueuses. Sous la direction de mon maître, le Seigneur Taorin, capitaine des Chiens du Désert, les Neufs te demandent de venir les rejoindre aux abords de la Cité du Destin, avec tous tes hommes, afin de traiter d’une affaire de la plus haute importance. Toutes les tribus du grand désert ont été, ou seront sous peu, prévenues : toutes sont conviées à venir à la rencontre des Neufs. Le Conseil serait très honoré par votre auguste présence, Al-Mansûr. Vos prouesses sont connues de tout le Sud, et tous vous respectent. » Le Chien s’inclina, et sortit de sa sacoche une lettre cachetée par le sceau des Neufs.
« Voici le message, scellé de la main même du Seigeur Taorin. » Le mercenaire tendit la lettre à l’un des guerriers, qui la prit et la donna à Khaled ibn Massar.
Le Victorieux prit le parchemin, regarda le sceau, puis le brisa et déroula le rouleau. Il parcourut quelques instants la lettre, qui reprenait, dans un langage plus formel encore que celui du messager, les points que ce dernier avait évoqué. Al-Mansûr hocha la tête, puis fit signe au messager de se retirer.
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Du haut des remparts, les soldats récemment enrôlés dans l’armée des Neufs pouvaient voir les nuages de poussière soulevés par les sabots des nomades qui convergeaient vers les Havres. Selon les messagers revenus, au moins cinq chefs avaient acceptés de se réunir au pied des murailles de la Cité du Destin : de l’est venaient Khaled Al-Mansûr ibn Massar et Nadir Abdelmajid, du nord, Jawhar Han Kadir al-Qudushu, et, du sud, Mustafa ben Hafed al-Haqq et Yasser As-Slam. Près d’un millier de nomades, dont la moitié environ étaient capables de combattre, camperaient bientôt sous les murs d’Umbar, aux côtés des nouvelles recrues qui grossissaient chaque jour l’armée des Neufs…
HRP : Je prends un peu d'avance chronologiquement, afin de faire un peu avncer les préparatifs et de ne pas se retrouver avec 50 osts à faire en une semaine ^^