Le venin dans nos veines

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Ryad Assad
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Ryad Assad

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Le venin dans nos veines EmptyVen 5 Avr 2019 - 22:21
- Sigvald, vous êtes avec moi ?

Les paroles d'Achas avaient à peine été chuchotées, mais elles ramenèrent le guerrier à la réalité. Il avait semblé ailleurs pendant un bref instant, et l'archer avait besoin qu'il fût pleinement concentré sur sa mission. Aller sur le Lac n'avait rien d'une partie de plaisir, et ils devaient faire abstraction de tout le reste pour se concentrer exclusivement sur leur tâche. Ils jetèrent un regard aux alentours, à la recherche d'une éventuelle patrouille, mais personne ne se présenta dans les environs. Ils auraient certainement pu demander l'autorisation officielle du comte pour une telle opération, mais le temps était leur ennemi, et ils ne souhaitaient pas prendre le risque de se voir opposer un refus. Les dangers du Lac avaient tendance à transformer les braves en couards, et les alliés d'hier en ennemis d'aujourd'hui. Et puis il y avait autre chose qui intriguait profondément Achas, et qu'il ne s'était pas résolu à aborder.

- Vous savez un peu naviguer ? Choisissez l'embarcation pendant que je monte la garde.

L'archer était un homme d'action, mais il devait bien admettre que l'étendue de ses compétences n'était illimitée. Les navires n'avaient jamais été son point fort, lui qui avait toujours été un habitant de la forêt, un guerrier sylvestre entraîné à se mouvoir comme une ombre au milieu des arbres. L'idée même de se retrouver à bord d'une frêle embarcation ne l'effrayait pas plus que ça, mais le sentiment désagréable de se sentir vulnérable, loin de tout abri potentiel, le mettait mal à l'aise. S'ils tombaient sur un quelconque ennemi, comment pourraient-ils se défendre sans risquer de faire une mauvaise chute dans l'eau ?

Tout à ses réflexions, il faillit ne pas voir les deux hommes qui allaient d'un pas lourd et qui apparurent comme par enchantement de l'autre côté. Achas nota immédiatement qu'ils étaient armés, et il fit signe discrètement à son compagnon de s'allonger et de se dissimuler. Les deux hommes allaient d'un pas lent, jetant des regards anxieux en direction du Lac. Ils arboraient des livrées uniformes, assez différentes de celles de Syla et Hadden. Des cuirasses de meilleure facture, de même que les armes qu'ils portaient au côté. On aurait pu croire qu'il s'agissait de nobles en parade, mais ils avaient plutôt l'air d'une garde d'élite, des hommes entraînés au maniement des armes qui semblaient bien plus dangereux que les miliciens d'Esgaroth. Ils furent bientôt à portée d'oreille, et les deux Elfes purent capter quelques bribes de leur conversation :

- …andonne pas les recherches, mais qu'il tienne les Miliciens et les mercenaires à l'écart. J'ai pas envie d'avoir du sang sur les mains.

- Ouais, fit l'autre. Autant de témoins gênants si ça tourne mal. Toras a dit quelque chose ?

- Seulement qu'ils allaient parler à Syla. Apparemment DuGrand voudrait qu…

Les deux hommes disparurent. Achas et Sigvald attendirent un moment avant de quitter leur cachette respective. Ils ne savaient que faire de ce qu'ils venaient d'entendre, leur connaissance politique de la vie d'Esgaroth étant encore assez sommaire. Toutefois, si ce Toras avait parlé à Syla, il avait peut-être un rapport avec l'escapade lacustre du capitaine. De nouvelles questions, et toujours aucune réponse. Ils n'avaient plus de temps à perdre.

L'embarcation fut bientôt jetée à l'eau le plus silencieusement possible, et les deux guerriers s'empressèrent de s'éloigner de la ville, en direction du Lac. Laissant les commandes à Sigvald, qui de toute évidence savait godiller un peu mieux que lui-même, Achas se posta à la proue du navire, essayant de localiser quelque chose à la surface de l'eau. Autant pour son compagnon que pour lui-même, il siffla :

- Le Lac est fort grand, et nous n'avons aucune idée d'où il a pu se rendre. Par où commencer ?


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Sigvald Lingwë
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Le venin dans nos veines EmptyDim 2 Juin 2019 - 10:10

- Oui, pleinement, J'ai juste un mauvais pressentiment...

Tous deux furent surpris par l'absence de patrouille sur leur chemin jusqu'au port, ensemble ils se dirigeaient là ou plutôt Sigvald avait rencontré d'amical pêcheur. La nuit était des plus sombres, la lune ne jetait que très peu sa lumière blanche tant les nuages zébrait le ciel et notre mercenaire s'en réjouissait.

- Si l'on veut, pas de mers ni de lacs, j'ai eu l'occasion de descendre des rivières, mais rien d'extraordinaire.


Sigvald tout en répondant à Achas s'affairait déjà à choisir l'embarcation qui lui semblait être en meilleur état, certains ne lui semblaient guère propice à retrouvé le lac tant les coquillages avaient incrusté le bois de la coque. Il jeta son cependant son dévolu sur une barque peu large, donc moins de bruit et munit d'une voile récente afin d'utiliser un minimum les pagaies. Notre mercenaire commença à décrocher le navire amarré à un épais poteau sur la rive quand il entendit un homme parler, aux bruits des pas ils étaient alors clairs que les intrus étaient deux. Tout comme son homologue elfique, Sigvald se plaqua contre l'embarcation, scrutant par le dessous de la proue nos deux individus.

Syla était lié à une sombre affaire, à moins qu'il ne soit qu'un pion inconscient des dangers proches de lui. Notre mercenaire ce rémora rapidement la fois où il avait déjà vu de tels uniformes, les hommes de Toras qui selon les dire du ménestrel n'était qu'une dizaine. Une sorte de garde d'élite répondant aux ordres du Comte Saule. Sigvald avait la certitude d'avoir trouvé son adversaire, son ennemi. DuGrand devint cependant une nouvelle énigme à sa liste.

Notre elfe revint à une triste conclusion qu'il avait tirée de ses voyages à travers les terres humaines d'Arda, que c'est de l'homme que viendra la chute d'Arda, corrompu par l'attrait du pouvoir et de la richesse.

Les hommes de Toras parti, Sigvald dans un silence digne d'une sentinelle de Vertbois mis l'embarcation à flot et accrocha fermement au poteau l'outre de vin achetée plutôt à l'auberge, les pêcheurs seront que les elfes sont sur le lac. Son compagnon le rejoignit et il déploya la voile, leur mission commençait réellement. Direction l'emplacement de l'ancienne Lacville, là où la terreur des cieux était tombée.

- Comme je l'ai dit précédemment je pense que le lieu où est tombé le dragon il y a des siècles me paraît un bon endroit, il n'y a rien d'autre d'important à ma connaissance sur ce lac. Les dires des pêcheurs concernant la brume correspondent au récit de légende concernant  la mort de Smaug. Une garde d'élite sur le lac, et des pêcheurs qui disparaissent comme des témoins gênants. Nul doute que là-bas d'importantes richesses gisent encore sous l'eau, voir des reliques corrompues par l'influence néfaste du dragon. Je pense que nous trouverons les réponses à nos questions là-bas. En chemin je vous parlerais de ces hommes que l'on a vus, je sais qui ils sont.

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Le venin dans nos veines EmptyMer 5 Juin 2019 - 1:17
« Descendre des rivières ».

La réponse de Sigvald laissa Achas pensif pendant un moment. Il n'avait jamais vraiment eu l'occasion de prendre la mer lui-même, malgré sa longue vie, et il ne se souvenait pas avoir récemment embarqué pour combattre un adversaire inconnu. Il avait espéré que son compagnon, fort de son expérience en-dehors des frontières du royaume sylvestre, aurait pu combler ses lacunes en matière de navigation. Malheureusement ce n'était pas le cas, et ils devraient donc se débrouiller avec leur instinct et leur bon sens, deux qualités qui leur avaient permis de s'en sortir jusqu'à présent.

Pourtant, lui aussi avait un mauvais pressentiment.

Il y avait quelque chose d'étrange dans cet histoire, et son sixième sens ne le trompait que rarement, même si pour l'heure il n'arrivait pas à mettre le doigt sur ce qui n'allait pas. Laissant de côté ces pensées, l'archer aida Sigvald à mettre l'embarcation à l'eau. Tous les deux travaillaient merveilleusement de concert, dans un silence concentré qui était l'apanage des combattants expérimentés. Peut-être aussi parce que les mots renfermaient quelque chose de plus terrifiant encore, la promesse d'heures sombres à venir. Malgré leur grande complémentarité, l'épéiste et l'archer n'étaient que deux, deux pour affronter une menace qui avait terrassé à elle seule un contingent entier de gardes d'élite d'Esgaroth.

Tout à coup, leur fol espoir semblait bien stupide.

Mais il restait Syla, et la perspective de le laisser seul en danger sur le lac ne pouvait pas être écartée.

Aussi silencieux que le chant des arbres, les deux Elfes s'éloignèrent peu à peu du rivage, utilisant d'abord les longues rames qu'ils plantaient fermement dans le sable, avant de déplier les voiles. Le vent était timide, mais il suffisait à leur épargner le gros du travail, leur permettant de se concentrer sur la manœuvre. Sigvald à la barre, Achas à la proue l'arme à la main, ils s'enfoncèrent dans la nuit noire, et bientôt disparurent à la vue de quiconque aurait eu l'idée de les observer depuis le rivage.

Le Long Lac portait fort bien son nom, et après avoir nourri l'espoir de retrouver rapidement la trace de Syla, ils durent se rendre à l'évidence : ils n'arriveraient à rien en cherchant à l'aveuglette une embarcation qui était peut-être plus petite et moins facile à repérer que la leur. Sigvald mit alors le cap vers les ruines de l'ancienne Lacville, plus au sud de leur position, dans l'espoir d'y trouver des informations, des indices, n'importe quoi leur permettant de progresser dans leur enquête.

- C'est une bonne idée, bien qu'elle ne me réjouisse guère, marmonna Achas qui demeurait nerveux.

Il n'appréciait pas cette sensation de vulnérabilité. Il avait l'impression que des ennemis se cachaient tout autour d'eux, et qu'ils allaient à leur rencontre inconscients de leur présence. Le sentiment curieux de tomber dans un piège ne le quittait pas, et lui donnait la chair de poule.

- Parlez-moi de ces hommes, Sigvald. Je ne connais pas assez les Edain pour comprendre les subtilités de leurs machinations, et je me rends compte aujourd'hui que ces connaissances me seraient bien utiles.

Laissant à son compagnon le soin de lui donner plus ample informations à ce sujet, Achas s'efforçait de rester concentré sur sa tâche de sentinelle. Ayant les deux mains occupées à manœuvrer l'embarcation, Sigvald était incapable de réagir rapidement si besoin. L'archer devait donc rester à l'affût du moindre mouvement suspect, ce qui exigeait de lui une intense concentration. Il finit par tendre la main en direction du sud-est :

- Regardez cette forme, on dirait que nous avons trouvé les ruines de l'ancienne cité. Les Valar nous préservent de l'influence maléfique du grand dragon.

La silhouette lugubre d'une arche en pierre leur adressa un salut macabre, alors que des oiseaux de mauvaise augure les regardaient passer. Achas résista à l'envie de les effrayer, préférant miser sur la discrétion au détriment de son propre confort. Il était connu que certaines créatures avaient été alliées avec l'Ennemi, et il n'aimait pas se savoir épié ainsi. Face à la difficulté qu'il y avait à naviguer dans ces eaux, l'archer dut prêter assistance à Sigvald, se servant d'une rame pour sonder les fonds du lac afin d'éviter qu'un morceau de ruine enfoui ne vînt éventrer leur embarcation. De même, il s'arrangeait pour pousser l'embarcation loin d'éventuels obstacles trop difficiles à négocier.

C'était un exercice éprouvant pour les deux compagnons, qui devaient se concentrer pour éviter l'accident. Il était d'autant plus difficile de procéder que la nuit semblait de plus en plus noire, comme si les nuages s'étaient ligués contre eux pour les freiner dans leur entreprise. A force de lutter cependant, ils finirent par déboucher sur un espace moins accidenté, mais ils avaient perdu beaucoup de vitesse et leur frêle esquif s'immobilisa peu à peu. Ce bref répit permit à Achas d'observer les environs :

- On dirait que nous sommes dans l'enceinte de la vieille ville, regardez la forme de ces ruines.

Il désignait un ensemble de poteaux qui jaillissaient du sol, plus concentrés que les autres. Certains vieux pontons de pierre étaient toujours debout, tandis que ceux en bois avaient succombé aux flammes du dragon. Le cadavre de ce dernier demeurait pourtant introuvable, probablement englouti par les flots depuis longtemps. L'archer utilisa sa rame pour essayer de sonder les profondeurs, mais bien qu'ils fussent assez proches du rivage, il ne sentait aucune résistance.

Pendant qu'Achas était focalisé sur sa tâche, Sigvald ne put s'empêcher de noter quelque chose d'étrange. Une sorte de picotement au fond de sa gorge et de son nez, comme s'il avait inhalé quelque chose de corrosif. Il n'y avait pas d'odeur particulière, du moins aucune que l'Elfe aurait pu reconnaître, mais elle était désagréable en bouche, lui donnant presque envie de tousser.

Mais plus inquiétant que la toux était la brume.

Elle s'était levée tout d'un coup, et semblait faire disparaître les colonnes et les poteaux qui les entouraient, leur coupant virtuellement toute retraite. Seuls sur le lac, isolés et aveugles, ils faisaient une cible parfaite pour d'éventuels archers. Tout était pourtant parfaitement calme.

Tout, sauf Achas.

L'archer lâcha un cri de surprise et se jeta en arrière, basculant sur le dos en faisant tanguer sérieusement l'embarcation.

- Par les Valar, que… !?

Il ne trouva pas comment finir sa phrase, trop abasourdi pour cela. Son regard croisa celui de Sigvald, et il lâcha dans un souffle :

- Quelque chose m'a arraché la rame des mains.

Ils jetèrent tous deux un œil prudent vers les profondeurs ténébreuses du lac. Il n'y avait rien. Pas un bruit. Pas un mouvement. Il n'y avait que le roulis léger de leur bateau, et la brume qui semblait déterminée à les engloutir totalement. Même le vent semblait avoir cessé de souffler, rendant leurs voiles inutiles.

Il ne leur restait qu'une rame pour rentrer à bon port…

A moins qu'ils ne prissent le risque de pousser plus loin leur exploration des ruines. Mais qui savait ce qu'ils pourraient y trouver ?


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Le venin dans nos veines EmptyDim 23 Juin 2019 - 13:51


Pour notre mercenaire en quête de rédemption Syla n'était pas sa priorité contrairement à son compagnon qui scrutait l'obscurité de la nuit en vain espoir de trouver le capitaine humain. Le vent était doux, une légère brise suffisante pour s'engouffrer dans la voile et les faire avancer. Leur barque clapotait faiblement, mais rien qui ne pourrait indiquer clairement leur position sur l'eau. La lune était cachée de temps à autre par d'imposants nuages, mais ensemble et inexpérimentés, Sigvald et Achas arrivèrent toutefois à suivre bien qu'éloigner de celle-ci la berge en maintenant leur cap vers le sud. Content de casser la monotonie de leur traverser sur le lac, notre elfe répondit à Achas en essayant de n'omettre aucun détail.

- Oui, ces hommes. Lors de ma petite enquête avec les pêcheurs je n'ai tiré que des récits plus nimbés de mystère qu'autre chose, bien que toutes les disparitions ont lieu dans une zone ou une brume épaisse fait son apparition... Le ménestrel ! Juste après mon intervention avec les marins un ménestrel m'a pris à part et nous avons marché et discuté ensemble. Il m'a parlé des hommes de Toras, de leur navire parti un jour sur le lac et qui a leur tout ont disparu sur le lac, ils ont une grande influence dans la cité, son mieux équipé que la milice voir l'armée et travail pour le Comte Saule. Les deux hommes que nous avons entendus plus tôt font partie de ce groupe, mais je ne sais pas qui est ce DuGrand. Pour moi, il ne faut pas avoir confiance en eux, vu leurs discours ils n'hésiteront pas à tuer quiconque se met sur leur chemin.

Notre mercenaire avait fait un résumé court, mais lui-même n'en savait pas plus, il ne s'intéressait que très peu aux histoires et la culture des hommes de l'Ouest, préférant les contrées sauvages et mystérieuses de l'Est.

- Regardez cette forme, on dirait que nous avons trouvé les ruines de l'ancienne cité. Les Valar nous préservent de l'influence maléfique du grand dragon.

Les Valars ? Pfff...Sigvald ne ressentait pour eux que de la pitié et de la haine, pour notre elfe son histoire horrible lui avait forgé une nouvelle vision des choses sur le monde qui ne plairait à personne. Pour lui les Valars ne sont que les reflets des sentiments et d'émotions du créateur Ilúvatar, chacun ayant une personnalité différente, mais qui si on pouvait les rassembler en un seul être serait alors une copie du Créateur. Notre elfe en était persuader le « père de tout » connaissait déjà le futur d'Arda avant même sa création en laissant sa partie sombre Melkor y posé le pied et commettre tout les actes abjectes que lui connaît. Sans mal il n'y a pas de bien, sans guerre pas de paix, sans l'un ou l'autre il n'y a que les Valars, qui pour notre elfe non pas de libre arbitre vu qu'ils sont issus de sentiments et de pensés tirés d'Ilúvatar, dans ce sens ils ont chacun un rôle prédéfini depuis leur création. Et l'équilibre d'Arda fonctionne sur le principe de Mal-Bien à égalité. Une vision des choses qui lui vaudrait d'être exilés définitivement.

- Nous sommes enfin arrivés.

Les ruines de l'ancienne ville étaient aussi lugubres qu'un cimetière, il ne semblait pas y avoir âme qui vive du tout. Sigvald avait rentré la voile et ensemble armer de la rame il essayait tant bien que mal de se frayer un chemin jusqu'à une zone plus sûre et moins risquée afin d'accoster. L'atmosphère était pesante, le lieu était encore marqué par le massacre et l'incendie qui y avait eu lieu. Bientôt et toujours dans un silence de plomb ils arrivèrent au cœur de Lacville, là les structures bien qu'effondrer pour la plupart dépassait encore de toutes leurs hauteurs les bâtiments en périphérie de l'ancienne ville. À mesure qu'ils avançaient, notre elfe sentit une sensation de picotement monter dans sa gorge, désagréable, à la limite du toussotement, mais rien d'insurmontable. Sigvald était certain, ils sont au bon endroit, pas de doute.

Notre mercenaire scrutait à travers la brume grandissante, ile ne discernait à vrai dire pas grand-choses, la forme des bâtiments et des ruines ne formait que des amas flous et les détails se perdaient, il n'osait même pas imaginer un homme perdu dans cette brume. D'un coup Achas tomba en arrière et le tumulte de sa chute entraîner un roulis qui s'estompa au bout de quelques instants très gênants. Sigvald s'efforça de murmurer audiblement malgré la gêne entraîner par la respiration de cette brume.

- Et signaler notre position par la même occasion, j'espère que personne ne vous a entendu, ceci étant dit nous sommes au bon endroit, pas de toute. Cherchons un ponton encore en bon état et continuons à pied, cette partie de la ville semble avoir été la moins touchée par le fléau ou continuons-nous en navire ? Poursuivons en silence.

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Le venin dans nos veines EmptyVen 19 Juil 2019 - 14:28
Achas jeta un regard prudent vers les flots, alors qu'il enjambait le bord de l'embarcation pour rejoindre le ponton de l'ancienne cité lacustre. Il avait encoché une flèche, et scrutait avec attention la surface sombre et presque immobile sous laquelle sa rame avait disparu. Quelque chose en lui l'incitait à la méfiance, mais Sigvald avait écarté d'un revers de main ses préoccupations, préférant se concentrer sur l'exploration des vestiges de la cité.

- À pied, cela fera très bien l'affaire.

Ils abandonnèrent leur barque, non sans l'avoir attachée soigneusement, et continuèrent donc leur progression à travers les ruines. Le silence qui les enveloppait aurait dû leur permettre de distinguer l'approche de n'importe quel adversaire caché, mais il semblait au contraire se retourner contre eux, brouillant leurs sens et leur faculté à anticiper le danger. Sigvald allait en tête, la main très proche de son épée, tandis que Achas le suivait précautionneusement en jetant de fréquents regards derrière lui pour s'assurer qu'ils n'étaient pas suivis.

La légèreté de leur pas les autorisait à progresser même sur des sols instables et fragiles, là où des humains n'auraient jamais pu se tenir sans entraîner dans leur chute de larges portions des pontons de pierre. Si Syla se trouvait ici, il n'était probablement pas à pied. Cependant, la brume naissante et qui les enveloppait ne leur donnait aucune visibilité sur une quelconque présence sur le fleuve. Les deux guerriers, habitués de la discrétion et des embuscades, se déplaçaient à la fois comme des chasseurs et des proies, guettant le danger et l'opportunité dans toutes les directions.

Le souffle calme et l'œil vif, ils examinaient les environs et décidaient sans mot dire de la meilleure route à prendre, celle qui leur offrait à la fois le point de vue le plus dégagé, et la couverture la plus efficace. Ils passaient les environs au crible, de leur vue perçante, et pourtant ils ne décelèrent pas la présence de l'homme qu'ils étaient venus chercher. Ce fut Achas qui s'en ouvrit le premier, exprimant ses doutes à haute voix :

- Sigvald… J'ai l'impression que Syla ne se trouve pas ici… Comment est-ce possible ? Delaynna ne nous aurait pas sciemment induit en erreur.

Alors qu'il formulait sa réflexion à voix haute, il dégagea un début d'explication qui lui glaça le sang. Quelque chose auquel il aurait très probablement pensé naturellement s'il n'avait pas si bien connu la Dame de l'Eau.

- Vous pensez qu'elle a pu se tromper ? Qu'elle a pu être trompée ?

Si tel était le cas, que devaient-ils en déduire ? Que les capacités de la Dame de l'Eau n'étaient pas absolues, et qu'elle avait pu commettre une erreur de jugement regrettable ? Ou bien qu'une force bien plus grande encore avait réussi à les attirer à cet endroit précis, en leur faisant croire que Syla était en danger. Le lac était grand, la perspective d'avoir manqué un indice était bien réelle, mais Achas ressentait dans sa chair une forme de crainte irrationnelle. Ils n'auraient pas dû se trouver ici. Ils n'auraient pas dû s'aventurer seuls sur le lac, et leur présence n'était probablement pas due au hasard.

Alors qu'ils prenaient peu à peu conscience de la situation, et du danger auquel ils étaient exposés, ils perçurent un bruit inhabituel. Un bruit à la fois proche et distant, qui les effrayait en même temps qu'il les attirait. La brume autour d'eux semblait de plus en plus épaisse, comme un mur se dressant entre eux, les empêchant progressivement de se voir. Leurs cœurs battaient vite, frappant dans leur poitrine comme de grands tambours de guerre, au point qu'ils semblaient n'entendre plus que ce bruit épouvantable.

Et soudain un cri.

Un cri de douleur si terrible et si strident que Sigvald ne put que se retourner pour constater l'absence d'Achas. Là où l'archer s'était trouvé, il ne découvrit qu'un arc brisé, et une mare de sang qui se dirigeait vers les profondeurs sombres du lac.

Tellement de sang.

Tellement.

Mais il vit bientôt une forme émerger, et un visage pâle remonta à la surface. Un visage connu. Celui de l'Elfe. Quand Sigvald eût fini de le remonter, il nota immédiatement la gravité de sa blessure. Sa jambe droite avait été sectionnée au niveau de la cuisse, déchiquetée comme si elle avait été prise dans une puissante tenaille. Achas était encore conscient, mais choqué, écrasé par la douleur, le souffle court. Il attrapa fermement le bras de son compagnon, et grogna :

- Il est parti… Il est parti…

Ce furent ses derniers mots avant de s'évanouir. Sigvald, les mains pleines de sang, devait agir rapidement pour canaliser l'hémorragie, mais également s'éloigner, trouver un abri, et essayer de comprendre. Comprendre ce qui venait de se passer, et comment y réagir. Le monde semblait défiler à toute vitesse, et tout autour de lui, la brume et le silence.

Le silence ?

Plus maintenant.

Il capta, comme venu depuis les profondeurs de cette brume impénétrable, des cris qui semblaient surgir de nulle part. Des cris de souffrance… Des cris qui venaient du lac…


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Le venin dans nos veines EmptyDim 4 Aoû 2019 - 12:27
- Sur la terre ferme nous sommes plus en sécurité que sur l'eau, les navires et leurs équipages disparus, votre rame... Le danger nous viens de ces eaux sombres.

L'absence de visibilité et la perception réduite de l'environnant leur brouillaient les sens, Sigvald imaginait sans peine un homme totalement perdu dans de mêmes circonstances. Son instinct lui disait qu'ils n'étaient plus seuls depuis l'étrange événement de la rame, cette sensation d'être en permanence observé. De sa main droite il tenait fermement la poignée de sa lame, prêt à dégainer au moindre son ou mouvement suspect.

Nos deux elfes s'enfoncèrent dans l'ancienne ville aujourd'hui simple cimetière et ruine à ciel ouvert, vestige d'une époque de tristesse et de malheur pour les hommes. Durant leur progression qu'aucun homme n'aurait pu suivre sans se blesser lui-même ou révéler grossièrement sa position, ce sentiment d'observation ne le quittait toujours pas. Sigvald n'était pas du genre à se laisser dominer par la peur, fut un temps c'est « lui » qui insufflait la peur dans le cœur des gens, lui qui était leur pire cauchemar et lui qui par sa seule présence faisait pleurer d'effroi le plus aguerris des guerriers. Il fut aussi dans son temps bien avant les compagnies de mercenaires du Harad actuel, un combattant redouté et l'espace de quelques batailles un chef sur qui tout le monde se reposait pour choisir la bonne décision et les mener à la victoire. Mais Sigvald, de tous les noms qu'il prit, n'avait laissé dans son sillage que cadavres par centaines et des flots de sangs.

La panique d'Achas était palpable, une sentinelle expérimentée qui se laisse envahir par ses émotions , cela énervait clairement notre elfe.

- Je ne pense pas non plus que notre cher Syla soit ici. Tâchez de garder votre calme et par pitié baissez d'un ton ! Sigvald avait parlé certes doucement, mais ces paroles ce voulaient incisif et comme un ordre à suivre.

Mais cela n'avait guère marcher, dans un silence relatif au vu de la voix forte et nimbée de peur d'Achas, d'un geste et d'un pas rapide, notre elfe se retourna et empoigna fermement la sentinelle par le col.

- Elle n'est pas Galadriel, son pouvoir est moindre. Sa vision est abstraite, elle aurait tout aussi bien pu voir un moment du passé comme du futur ou bien nous signaler un danger, un danger que Syla sans le savoir a connu. Alors enfouissez vos craintes loin du moment présent et agissez comme un soldat et non comme un vulgaire novice qui a peur d'un oiseau prenant son envol. Ne faites qu'un avec ce qui nous entourent et à moins d'un danger garder le silence.

Sigvald relâcha sa prise sur son camarade et reprit la marche en tête, quelque peu agacé.  Il ne comprenait pas la panique et les craintes dans les paroles d'Achas, ils étaient tous deux au  bon endroit et le destin qu'Eru leur imposera se présentera à eux comme il se doit, en temps voulu.

Comme pour confirmer sa vision des choses, il sentit un mouvement inhabituel et rapide accompagné d'un intense cri de douleur derrière lui, dans le même instant il dégaina son épée et se retourna prêt à frapper de sa lame. Mais il ne s'attendait clairement pas à la vision qui s'offrit à lui, du sang, beaucoup de sang. Ses pensées fusèrent, une embuscade ? Oui et non. Des hommes ? Il l'aurait voulu, mais non, trop soudain et discret pour que ce soit eux. Autre chose tapis dans l'ombre ? Assurément.

Suivant des yeux la trainée de sang, il distingua du mouvement dans l'eau et notre mercenaire se mit en position de combat, posture abaissée, jambes fléchies, son épée en arrière pointé vers le bas afin de porter un coup en avant et enchaîner sur d'autre attaque. Mais à l'instar d'un combat qui se profilait ce fut son compagnon qui surgit des eaux sombres du lac. Notre elfe aurait paru de la glace et de marbre, son visage ne trahissait aucune émotion, il ferait ce qui doit être fait, le stress d'un combat, le cœur battant en voyant un camarade tombé tout cela ils ne les ressentaient plus depuis longtemps. Seul la haine et la colère le dominaient, deux sentiments contenus par une maîtrise de soi prompt à céder à tout moment.

Notre mercenaire tira le corps meurtri  d'Achas du ponton semi-effondré depuis des siècles. La moitié de sa jambe avait disparu et ce qui l'en restait n'était que chaire déchiquetée et sanguinolente, nul arme n'auraient provoqué une telle blessure, une grande gueule et des dents...

Achas s'évanouit terrassé par la douleur, ces dans ces moments de crise que Sigvald brillait par ces décisions qu'elles soient cohérentes ou totalement folles. Mettre à l'abri son compagnon, savoir exactement ce qu'il a vu et tuer leur prédateur. Notre elfe enveloppa de ses bras et souleva des planches mousseuses Achas, le sang coulait sur son armure et sur ses vêtements et c'est ce qu'il souhaitait. Il l'amena non loin, dans ce qui fut autrefois une ancienne bâtisse, il ne restait que les quatre murs, il y pénétra et déposa son compagnon dans un coin, le sol autrefois cendreux était devenu une sorte de terre boueuse et noire. C'est là qu'un autre cri perça dans la nuit, similaire à celui de la sentinelle, un cri de souffrance. Pressé par le temps, notre elfe plongea sa main dans la blessure béante et s'appliquer rapidement du sang sur son visage et sur son armure afin de devenir la proie, il desserra la ceinture de son compagnon et la noua d'un geste puissant autour du moignon. C'était le mieux qu'il puisse faire au vu de la situation, en espérant que la blessure ne lui sois pas fatale.

Même s'il les crie persistait et le danger grandissait, Sigvald frappa d'un revers de sa main la joue de son compagnon et cria comme il le fit en d'autres temps dans les escarmouches au Harad, d'une voix claire et puissante qui masqua  les hurlements venant de la brume. Il n'avait pas de temps à perdre, tout se passa en un instant.

- DEBOUT !
Dans un quenya qui se voulait aussi violent qu'un orage, Achas ouvrit grand les yeux. Le temps nous manque, rapport sur l'attaque sentinelle ! Le regard de Sigvald était déterminé, profondément implacable. Les yeux d'Achas ne voyait que cela, ses yeux ne s'égarèrent même pas sur le visage et les vêtements du mercenaire rougit par le sang.

Sigvald avait déjà mis en place une stratégie et avait son point de vue sur la situation, mais il voulait de vrai détail, en espérant que son compagnon en ait. Pour lui, ce qui avait attaqué était un prédateur, attendant le bon moment pour frapper sa proie. Une redoutable et grande gueule aux vues de la blessure et une rangée de dents affûtées. L'attaque s'étant passé en un instant, le prédateur était tapis dans l'eau, là où il se sent le plus à l'aise, certainement amoindri dans ses mouvements sur la terre ferme. Notre elfe était une vision de cauchemar, ses vêtements et son visage étaient maculés de sang et son armure reluisait de celui-ci sous les quelques rayons de lune qui perçait ici et là la brume ; tout ça pour attirer son ennemi sur lui et de fait mettre en sécurité Achas. Il était sûr d'avoir affaire à une créature tapis dans les eaux du lac, au vu de l'attaque il avait écarté la possibilité d'hommes. Peut-être était-il à nouveau dans l'erreur...
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Ryad Assad
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Le venin dans nos veines EmptyVen 9 Aoû 2019 - 2:42
L'air devenu irrespirable autour des deux Elfes aurait dû les inciter à davantage de prudence. L'odeur âcre décrite par les pêcheurs, ils la percevaient eux aussi, mais confiants dans leurs capacités ils avaient poussé l'exploration des ruines, avaient décidé de s'aventurer au devant d'un danger devant lequel on leur avait pourtant dit de tourner les talons et de fuir. Suivant les visions de Delaynna, leur compagne, ils avaient décidé de ne pas écouter les conseils des mortels, et de se porter à la rencontrer de celui ou celle qui terrorisait la cité lacustre.

Esgaroth avait besoin de héros, mais surtout de héros vivants.

La chute d'Achas dans les eaux sombres ne fit que confirmer la première intuition de Sigvald. Son émergence des flots, la jambe tranchée, le regard choqué, ne fit que raviver les doutes du guerrier. Qui avait bien pu déchiqueter ainsi la chair, les muscles et l'os sans la moindre difficulté ? Quelle arme pouvait bien détruire avec une telle violence ? Aucune lame n'aurait pu faire un tel massacre. Ce qui impliquait que ce n'était peut-être pas une lame, et qu'ils avaient affaire à quelque chose d'autre. D'une nature bien différente, et bien plus inquiétante. Entrés dans les ruines comme les prédateurs, ils étaient désormais devenus les proies, conscients du danger autour d'eux, mais incapables de le localiser. Pour Sigvald, la tâche était doublement compliquée. Il devait penser à protéger sa vie, mais aussi celle d'Achas qui ne semblait plus en mesure de se défendre.

Il ne restait rien de leur force apparente, sinon l'illusion du contrôle dans la lame encore fermement tenue par le seul Elda encore debout. Devinant que l'information était primordiale dans ces circonstances, Sigvald s'efforça de réveiller Achas en faisant appel à ses réflexes de soldat. L'archer était en bien piteux état, et s'il n'avait pas été de constitution elfique il se serait probablement effondré dans un coma duquel rien n'aurait pu le réveiller. Le ramener à la conscience impliquait de le faire souffrir le martyre à nouveau, mais c'était nécessaire pour l'heure.

- Je ne sais pas, mon capitaine, répondit Achas comme s'il parlait à un de ses supérieurs dans l'armée de Vertbois. Je n'ai rien vu, tout est allé trop vite.

Il respirait rapidement. Beaucoup trop. Son pouls s'était emballé, et même s'il n'avait pas encore vu l'ampleur de sa blessure, il devinait qu'il avait été touché. Il voulut regarder, mais Sigvald l'en empêcha, le forçant à fixer son regard concentré. L'heure était au pragmatisme et à l'action, pas aux tergiversations et aux lamentations.

- Je…

Il hésitait, chaviré par une mémoire qui flanchait et une souffrance innommable qui le déchirait de l'intérieur et menaçait de le rendre fou. Ses membres étaient agités de tremblements, ses lèvres frémissaient comme s'il était transi de froid. Effectivement, le sang semblait refluer de son visage, s'écoulant toujours sur le sol malgré le garrot improvisé. Un tel saignement ne serait pas arrêté par une simple sangle, mais cela ralentirait le flot le temps qu'Achas pût donner des informations plus précises. Pour le reste…

- J'ai entendu une voix… Fit-il. Une voix sous l'eau. Juste une voix qui disait « faim ». C'est tout. C'est tout… Je vous le jure…

Il était en train de perdre prise avec la réalité, comme si son esprit s'envolait déjà vers les Terres Immortelles alors que son enveloppe charnelle trop brutalisée cessait de retenir son essence. Le fëa d'un Elda était une chose bien mystérieuse, qui semblait pousser perpétuellement sur les frontières du hröa comme pour chercher à gagner Valinor le plus rapidement possible, et profiter d'une éternité auprès des Valar. Achas était-il arrivé au terme de son voyage ? Avait-il accompli son destin en Terre du Milieu, et n'était-il plus condamné aujourd'hui qu'à s'en éloigner pour toujours ? Ou gagnerait-il encore de précieuses années de vie ici, par l'action de son compagnon d'armes ? Pour l'heure, rien ne pouvait affirmer qu'il survivrait à l'attaque… ni même que Sigvald y survivrait lui-même.

Alors que le guerrier en était à ces considérations, s'efforçant d'attirer leur assaillant en terrain découvert où il pourrait au moins faire jouer sa maîtrise de la lame pour lui infliger de sérieuses blessures, il fut surpris par une apparition presque surnaturelle. Surgie de la brume, une silhouette gigantesque s'éleva au-dessus des deux Elfes, culminant à trois ou quatre mètres de haut, elle avait la figure d'une femme à la poitrine nue figée dans une expression de noble souffrance. La créature jetée à toute vitesse percuta le ponton sur lequel les deux Elfes se trouvaient, détruisant une partie des ruines et jetant Sigvald à l'eau malgré sa tentative pour conserver son équilibre.

Au moment où ce dernier sortit des flots pour se hisser sur la terre ferme, il fut happé par un silence de mort comme à la fin d'une grande bataille. Ce moment d'hébétude durant lequel nul n'ose respirer de peur de raviver la flamme de la guerre qui vient de s'éteindre. Puis ses oreilles finirent par capter un son, puis un autre, puis plusieurs. Des gémissements, des plaintes. On aurait dit une assemblée agonisante qui cherchait un peu d'aide et de répit. Ce ne fut qu'alors que Sigvald put voir que le monstre marin était en réalité un navire qui s'était encastré dans le ponton avec force sans que personne n'eût été en mesure de l'arrêter.

Contrairement aux frêles esquifs de la marine d'Esgaroth, ce bâtiment était toutefois lourd et imposant, solide et épais. On aurait dit une forteresse flottante, surarmée et prête à livrer une rude bataille. Le style et les traits du mastodonte n'avaient rien de Dalite, assurément, et un œil expert aurait reconnu sans la moindre difficulté la silhouette orientale du navire. D'autres indices permettaient de corroborer cette hypothèse, à commencer par le fait que des voix commencèrent à s'élever, qui parlaient dans la langue si particulière des gens du Rhûn. Les mots étaient trop hachés pour être clairement perceptibles, mais l'accent et certains sons uniques ne trompaient pas.

Les deux Elfes venaient bel et bien d'être percutés par un navire de guerre du Rhûn.

Une silhouette finit par passer la tête par-dessus le bastingage, et par apercevoir Sigvald et Achas qui n'avaient nulle part où se cacher. Elle disparut, puis une autre fit son apparition, et bientôt ce fut une colonie entière d'yeux qui se retrouvèrent braqués vers les deux Elfes. Il y avait tant de visages qu'ils comprirent qu'il n'était pas envisageable de tous les affronter. Pour l'heure il valait mieux parlementer afin de demeurer en vie. Cela tombait bien, car une voix féminine finit par s'élever et leur demander dans un Commun impeccable :

- Messieurs, nous avons été attaqués. Nous avons besoin d'aide.

Le ton était tout sauf rassuré, et on sentait poindre une crainte indicible. Les ennemis d'hier pouvaient-ils devenir les alliés d'aujourd'hui ? Des Rhûnedain pouvaient-ils réellement s'associer avec des Elfes ? Ils n'avaient probablement pas encore remarqué leurs oreilles pointues et leur visage aux traits sculptés, mais il fallait espérer qu'en comprenant à qui ils auraient à faire, ils laisseraient la peur de l'ennemi commun purger le poison d'une peur ancestrale de leurs veines.

Quant à Sigvald, il se trouvait face à une situation difficile à gérer, mais en manœuvrant habilement il pouvait peut-être l'exploiter à son avantage, et résoudre le mystère du lac d'Esgaroth.

Un mystère qui rôdait toujours dans les profondeurs, en attendant son heure.


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Le venin dans nos veines EmptySam 24 Aoû 2019 - 15:34
Tout avait pris une tournure inquiétante, la blessure espérons-le non mortelle de Achas, la créature tapis dans la profondeur des eaux, Sigvald aurait prié pour avoir des hommes à affronter, de simple Orientaux et non ça... Comment une telle chose était apparue si soudainement dans le lac ? Il n'avait jamais entendu parler par le passé d'un tel danger. La guerre des nains l'avait-elle fait fuir des montagnes ? Où est-ce que sa présence ici même signifie qu'elle avait toujours été ici, en sommeil ? Un rejeton de Smaug ? Notre elfe esquissa un sourire à cette simple idée, dans tous les cas cela ferait une belle histoire à raconter lors de leur enterrement, mais autant mourir dans la dignité et prendre la vie de la chose.

Quand Achas ouvrit les yeux, ces traits se déformèrent pour dévoiler un être souffrant et choqué. Sigvald s'en voulu bien vite le fait d'avoir sorti son ami de sa léthargie et de lui faire vivre ces tourments, mais au final notre mercenaire avait eu ce qu'il voulait, «faim ». Dans les contes et légendes qui avaient bercé son enfance et ceux qu'il avait lui-même étudier il n'était fait nulle mention de créature assez intelligente et dangereuses encore en vie pour développer un langage si ce n'est les engeances de Morgoth, les grands serpents, les trolls ou bien des spectres encore attaché à Arda tels les êtres des Galgals.

Dans tous les cas, Sigvald ne se démoralisaient pas, il était juste prêt à faire ce qu'il faut pour l'emporter. Achas retomba inconscient après ses révélations, ce qui soulagea notre elfe.

- Je vous demande juste une chose, ne partez pas. Vous pouvez faire encore beaucoup pour Vertbois.

Contrairement à son habitude, nul colère nul haine de l'habitait, seulement lui et sa volonté de mettre un terme à ses massacres d'innocents. Son visage était toujours de marbre et ses battements de cœur réguliers. Il se releva et sortit de leur abri de fortune pour y attirer la bête. Un silence de mort régnait, mais quelque chose le dérangeait. Il sentit comme une présence, quelque chose d'infiniment plus gros que lui, le brouillard épais ne lui permettait pas de voir aussi loin qu'il le voulait. Et d'un coup, ces yeux s'écarquillèrent, il inspira profondément et retint sa respiration,  surpris par une vision étrange. Une forme grande et fine silhouette de femme s'avançait au dessus de lui, un visage figé de martyre. Sigvald ne savait comment réagir face à cela, il ne bougeait pas, il regardait juste, c'est au moment où la forme s'était rapproché dangereusement de lui qu'il comprit, du bois, c'était du bois, il n'eut le temps de ne faire qu'un pas sur le côté avant que le navire percute bien que doucement les ruines, pris par surprise et dû à son manque d'équilibre provoquer par le choc il tombât à l'eau et y sortis aussi rapidement, son ennemi l'observait il en était sûr. Et voilà qu'une nouvelle et potentielle menace pointait le bout de son nez.

Une fois sur la « terre » ferme, comme à son habitude il se faisait à son environnement, son, odeur, ce qui l'entourait, rien, si ce n'était ce navire apparu de nulle part et les clapotis de l'eau provoquer par le choc. Sigvald alla immédiatement voir la sentinelle meurtrie, qui avait on ne sait comment échapper à la moindre poussière ou débris dû à l'effondrement partiel de leur refuge, toujours sur ses gardes il s'empara de la dague que toute bonne sentinelle se devait de posséder puis notre elfe rejeta son attention sur le navire. S'avançant il passa sa main sur la coque tout en étant près à jeter sa dague d'un lancer mortel sur toute menace passant la tête par-dessus le bastingage. Notre elfe distinguait sans mal les hauts mâts du bâtiment ainsi que les gracieux traits courbés de balistes, le style de la coque n'était assurément pas de conception de Dalite ni d'un style qu'il connaissait. Comme pour étoffer son analyse des voix s'élevèrent d'au-dessus de lui, il était paré à la moindre menace... Le langage du Rhûn et un accent trop distinguable parmi d'autres. Son calme disparu soudainement, il bouillait déjà, son emprise sur la dague et son épée se renforcèrent, on aurais dis qu'il cherchait à rompre le métal par seul force. Une personne se pencha et le regarda rapidement, trop rapidement pour qu'il puisse agir, puis d'un coup une flopée de personnes le fixaient lui. Ils étaient en position de force, notre elfe était sans défenses et il le savait, mais ce qui piqua sa curiosité c'était la réaction de ces soldats, assurément aucun homme d'armes et encore moins des soldats aguerris du Rhûn ne paraderaient sans la moindre protection à découvert. Une voix féminine s'éleva, non-suppliante, une femme qui visiblement cherchait la moindre aide possible et non avec le langage du Rhûn, mais avec un commun sans accent et sans défaut. Aussi décontenancé, les pensés de Sigvald n'avait pas le temps de trouver leur chemin que sa bouche s'ouvrit déjà pour répondre.

- Seulement si vous pouvez maintenir en vie mon ami qui est blessé ! Le temps presse.

Notre elfe ignorait totalement dans quoi il s'embarquait, leur attaque n'avait peut-être rien à voir avec la menace tapis dans les eaux du lac, même si les cris entendus antérieurement le confortaient dans cette idée. Mais sur l'instant il n'avait seulement pensé qu'a la survie d'Achas et rien d'autre.

Pour seule réponse celle qui semblait diriger l'ensemble de l'équipage balança une échelle fait de corde et de bois par-dessus bord et d'un signe de la main l'invita à monter. Sigvald ne pouvait ni décliner l'invitation ni leur opposer résistance sur le moment sans jouer avec la vie de la sentinelle. Il accepta l'invitation avec une haine retenue et un visage de marbre, rien ne le trahissait si ce n'était son regard. Mais une fois à bord, la scène qui s'offrit à lui l'apaisa et il un sentiment d'invincibilité et de courage l'emplit totalement. Sigvald dépassait d'une bonne tête l'ensemble de ces gens à l'exception de quelques-uns. Quand ils remarquèrent enfin ses traits et attributs elfiques, certains brandirent leur armes tandis que d'autres semblaient rassurer par sa présence. Notre elfe se sentait réellement parmi les siens. Les visages et les corps marqués des esclaves blessés comme ceux en bonne santé ne pouvaient que lui renvoyer à sa propre personne. Le bastingage qui lui faisait face était défoncé de l'extérieur, des morceaux de bois jonchaient le ponton, d'imposantes balistes pointaient l'insondable brume, quelques hommes étaient armés, mais rien d'assez menaçant vu leurs façons de tenir les armes. L'équipage et surtout le navire ne manquait toutefois pas de potentiel. Toujours d'un sang froid aussi terrifiant qu'inspirant il établit un plan qui pouvait aussi bien marcher que le faire tuer, mais s'était le seul qu'il trouvait convenable en ne mettant directement que sa vie en danger, il ne souhaitait pas reproduire les mêmes erreurs que dans le passé. D'un ton assuré et déterminé, ces mots n'étaient pas des ordres, mais c'est comme s'il comptait déjà les esclaves avec lui.

- Une dangereuse créature est tapis dans les eaux du lac. Si vous êtes avec moi, il me faudrait des hommes sur les balistes et les tournées vers le quai là-bas. Il désignait l'endroit à peine visible où Achas avait été attaquer, l'endroit bien que dans la brume offrait une large zone que les armes de guerre pouvaient couvrir. Armez aussi autant de personnes que possibles et des arcs pour ceux qui sont sûrs de ne pas rater leur cible et garder en vie mon ami. Il me faut une lance et une torche, cette flamme sera votre cible. Le tout en restant silencieux. Je vais attirer la créature et je vous ferais signe quand vous pourriez déchaîner votre colère. Le temps de se préparer, racontez-moi l'attaque si toutefois elle a un lien avec le lac. Sigvald releva la manche de son bras gauche et leur révéla son bras dont la marque fermement panser n'était pas visible, mais le message était clair, puis il lui tendis son bras à la façon des guerriers du Rhûn. Nous avons beaucoup en commun. Alors, ensemble ?

Notre elfe se sentait confiant, rien que le fait de ne mettre que sa vie en danger s'il réussissent le confortait dans son idée. La question restait cependant en suspens, Sigvald ne pouvait savoir les pensées de la femme qui lui faisait face, son visage était masquée par une écharpe de fin tissu sombre.

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Le venin dans nos veines EmptyDim 25 Aoû 2019 - 14:57
L'attaque avait été soudaine.

Rapide.

Si brutale qu'ils n'avaient pas eu le temps de réagir. A peine eu le temps de comprendre qu'ils étaient pris pour cible. Ils s'étaient pourtant cru à l'abri, ils avaient pourtant espéré pouvoir enfin laisser derrière eux les tourments de la guerre, mais hélas la réalité s'était imposée à eux avec une sauvagerie inouïe. Il y avait d'abord eu un craquement, annonciateur de malheur, puis cela avait été la dévastation. Le sang avait coulé à flots, et le massacre avait été total. Des bras et des jambes, balancés dans tous les sens au milieu d'un océan de larmes et de cris. Dans cette obscurité poisseuse, l'œil trop lent n'avait vu que des ombres, des silhouettes, des esquisses disparaissant derrière le voile de terreur qui s'était abattu sur leur regard.

Les morts savaient-ils eux-même quelle abomination leur avait enlevé la vie ?

Sans doute pas.

Il y avait eu l'effroi, bruyant et omniprésent. Venait désormais le calme. Étouffant. Oppressant. Les mains tétanisées, les regards égarés. Une paralysie à laquelle n'échappaient que les plus forts, les plus déterminés à survivre. Parmi ceux-ci, il y avait Pantea.

Le venin dans nos veines Pantea10

L'ancienne esclave avait surgi sur le pont, sans trop savoir ce qu'elle pourrait y faire car elle ne maniait pas l'épée. Elle se souvenait avoir été bousculée, être tombée au sol, et avoir entraperçu le chaos mouvant qui serpentait sur l'Âzâdî avant qu'il ne s'évanouît dans les eaux. Mais contrairement aux autres, elle n'était pas décidée à rester inactive, à attendre que la chose revînt. Même si elle n'était pas la Voix, même si elle ne parlait pas avec la même autorité aux hommes et aux femmes qui s'entassaient comme du bétail sur ce navire de guerre de marine royale du Rhûn, elle savait rassembler assez de courage et de conviction pour guider ceux qui se trouvaient là, hébétés, choqués au point de ne plus pouvoir rien faire d'autre que respirer et cligner bêtement des yeux. Ils avaient heurté un obstacle, et leur vaisseau s'était immobilisé subitement, menaçant de jeter par-dessus bord une partie inattentive de l'équipage, et facilitant grandement le travail à leur mystérieux adversaire s'il revenait à la charge. Elle fut la première à se précipiter par-dessus bord, pour voir de quoi il retournait.

Et ce fut là qu'elle le vit.

L'homme solitaire, qui la fixait avec méfiance et perplexité. Elle n'aurait su dire ce qu'il faisait là, au milieu de ce qui ressemblait à une cité en ruines, mais elle jugea qu'il était préférable de s'en faire un allié plutôt qu'un ennemi. Elle appela à son secours en Commun, une langue qu'elle maîtrisait mieux que la moyenne de ses compagnons, sans trop savoir s'il pourrait effectivement les tirer de ce mauvais pas. Après tout, il était seul, et il ne pourrait pas résoudre la multitude de problèmes auxquels ils étaient confrontés depuis bien longtemps déjà. La faim, la maladie, et désormais ça… Mais cela valait le coup d'essayer. Survivre à l'Ouest impliquerait de trouver des réponses à leurs innombrables questions, et cet homme pouvait peut-être les éclairer. Il répondit immédiatement que lui aussi avait besoin d'aide, pour un ami blessé. Un échange de bons procédés bien compréhensible. La femme au voile se tourna vers ses compagnons :

- Il faut envoyer de l'aide à cet homme, des guérisseurs. En retour, peut-être pourra-t-il nous expliquer, nous aider à comprendre.

Quelques uns parmi les plus dégourdis semblèrent s'agiter, alors que Pantea amenait l'échelle de cordes qu'elle installa avec une dextérité acquise par l'habitude. Un marin, puis deux, puis trois, descendirent lentement, et passèrent à côté de Sigvald qui leur indiqua la direction à suivre. Achas était en bien piteux état, son moignant vomissant toujours du sang alors qu'il s'était de nouveau évanoui. Sa silhouette pâle semblait luire dans l'obscurité, et ses chances de survie étaient hélas bien maigres. Les marins observèrent les deux hommes un moment, cherchant à savoir ce qu'ils pouvaient faire. Pour la plupart ils ne comprenaient pas bien le Westron, mais le langage des signes était universel, et Sigvald trouva à leur expliquer ce qu'ils devaient faire. En retour, le guerrier fut invité à monter à bord, et lorsqu'il posa le pied sur le pont il put constater à quel point l'attaque avait été dramatique.

Il y avait eu au moins une dizaine de morts, peut-être même davantage tant les cadavres étaient éparpillés. Le double avait subi des blessures plus ou moins graves, dont la plupart semblaient liées à des chocs et de mauvaises chutes. Deux avaient notamment perdu un membre – l'un une jambe, l'autre une main – et leurs hurlements étouffés étaient presque insoutenables. On était penché sur eux, on essayait de gérer au mieux leurs plaies, mais pour la plupart les membres d'équipage étaient encore sonnés. De nombreuses silhouettes étaient prostrées, les mains sur la tête, marmonnant des paroles incompréhensibles. Il y avait du désespoir chez eux, de la résignation, peut-être même l'envie d'en finir une bonne fois pour toutes. Ils étaient littéralement épuisés, amaigris comme après une longue traversée du désert, et leurs yeux n'exprimaient plus rien sinon une farouche lueur de rage teintée de terreur. Ils se battaient avec les tripes, mais étaient proches de craquer.

Pantea posa un regard attristé sur ses compagnons, avant de revenir à Sigvald. Elle l'observait de profil, et elle ne put manquer de remarquer le trait caractéristique de son visage. Des oreilles pointues, qui n'avaient absolument rien d'humaines, et qui le définissaient comme appartenant à une race que les Orientaux avaient appris à détester. Malgré son éducation et son ouverture d'esprit, la femme au voile ne put s'empêcher de reculer d'un bon pas, effrayée.

- Vous êtes un Elfe !

Elle avait entendu tellement d'histoires à leur sujet !

Vils jeteurs de sorts, fourbes et malicieux, immortels mais avides de sang… Tant de rumeurs circulaient les concernant qu'elle éprouvait davantage de peur que de haine à leur endroit : la peur d'être la cible d'une malédiction, ou d'être attaquée par un sortilège. Elle n'aimait pas la magie, ni ceux qui la maniaient, et encore moins les créatures que l'on disait immortelles. En voyant sa réaction, la plupart des esclaves levèrent leurs armes de fortune vers le nouvel arrivant, tandis que d'autres au contraire semblaient se montrer plus sympathiques à son endroit. Sigvald put rapidement constater que ceux qui n'éprouvaient pas de crainte avaient des traits familiers : des Gondoriens, des Rohirrim ou des Dalites, capturés et réduits en esclavages, mais qui avaient grandi en apprenant que les Eldar étaient leurs alliés. De bonnes gens qui, bien que solitaires et parfois isolés dans leurs forêts éternelles, savaient tendre la main à leurs frères mortels. Les autres, plus méfiants, étaient des Orientaux sans qu'il fût très clair quelles étaient les origines. Eux vivaient dans la hantise des premiers enfants d'Eru, et semblaient partager sur la marche à suivre.

Pantea les apaisa d'un geste, après avoir ravalé péniblement son angoisse. Elle n'appréciait pas cette situation, mais ils savaient qu'en s'embarquant vers l'Ouest ils rencontreraient forcément des individus qui avaient jusqu'à présent été considérés comme des ennemis ancestraux. Il leur faudrait surmonter le poison de la crainte pour se faire une place dans cette société, et trouver comment cohabiter avec ces « monstres ». Jugeant qu'il était préférable de tolérer la présence de cet Elfe qui pour l'heure ne semblait pas hostile plutôt que de rejeter la main qu'il pouvait leur tendre, elle incita les hommes d'équipage à lui faire bon accueil, et à le laisser parler. Même s'il était un étranger à leur peuple et à leur race, elle considérait que ses connaissances de ce territoire pouvaient se révéler fort utiles s'ils voulaient y survivre.

Il prit donc la parole, pour leur exposer le plan que son esprit militaire avait déjà conçu. Son œil avait déjà repéré les balistes, et avait analysé la présence d'autant de marins comme une ressource potentielle à utiliser au combat. Son objectif était simple : utiliser la puissance de feu de l'Âzâdî pour envoyer la bête par le fond, en concentrant tous leurs tirs sur elle sitôt qu'elle réapparaîtrait. Lui-même voulait se porter volontaire pour servir d'appât, un rôle aussi dangereux qu'incertain, car il n'était pas dit que la bête viendrait s'en prendre à lui. Pantea, cependant, n'appréciait guère ce plan belliqueux qui risquait tous de les condamner. Elle ne tarda pas à le lui faire savoir d'une voix un peu plus dure que nécessaire. Sans doute le désespoir qu'elle s'efforçait de cacher :

- Nous ne pouvons pas faire ça. Nous ne sommes pas des guerriers, regardez-nous !

Elle marquait un point. Tout autour de l'Elfe, il n'y avait que des visages marqués, des épaules voûtées et des têtes basses. Même si les balistes dont il parlait étaient opérationnelles, les hommes et les femmes qui se trouvaient à bord ne les maniaient pas avec la dextérité d'un équipage de marins entraînés. Même s'ils avaient des arcs et quelques épées, ils ne représentaient pas un bataillon d'archers entraînés et formés à tirer sur une cible mouvante. Leur nombre et leur courage étaient leurs seules armes, mais l'attaque qu'ils venaient de subir avait considérablement réduit l'un et l'autre.

Pour l'heure, ils étaient vulnérables.

Vulnérables et craintifs.

- Nous ne pouvons pas vous suivre dans cette folie…

Son ton était catégorique, et Sigvald dut se résoudre à admettre qu'il ne convaincrait pas les Rhûnedain de l'appuyer. Pas maintenant. Pas après tout ce qu'ils avaient vécu. Ils étaient terrifiés, et ils risquaient au contraire de faire une cible trop facile. Pantea vit le bras que l'Elfe lui tendit, et devina immédiatement qu'il connaissait mieux les coutumes du Rhûn qu'elle-même ne connaissait les mœurs du peuple immortel. Cependant, elle n'était pas encore prête à lui faire confiance, et elle rejeta son offre par un silence assourdissant, avant de simplement lui répondre :

- De toute façon, vous ne pouvez tuer cette chose.

Consciente qu'elle avait des explications à lui donner au sujet de cette affirmation sibylline, elle se détourna, mais l'invita à la suivre d'un geste de la main. Sigvald fendit donc le petit groupe qui s'était formé autour de lui, marchant prudemment aux côtés de la femme au voile. Il pouvait ainsi voir à quel point elle était lasse, surtout d'un point de vue psychologique. Elle était nerveuse, mais s'efforçait de le cacher. Sa voix maîtrisée dissimulait très bien son angoisse, mais sitôt que les oreilles de ses hommes furent assez loin, elle s'ouvrit un peu plus :

- Cette créature… elle bouge trop vite pour que nous puissions l'abattre. J'étais là, quand elle nous a attaquée, mais je ne pourrais même pas vous dire à quoi elle ressemble. Nous n'avons pas d'autre choix que de fuir. Tout ce que nous voulons, c'est survivre.

Elle amena l'Elfe près du bastingage, de l'autre côté du navire, et l'invita à examiner la coque en se penchant. Il pouvait voir avec précision de profondes lacérations dans le bois, comme si on avait planté des pieux pour se hisser à bord. Aucune arme maniée par une main humaine – ou même elfique – ne pouvait faire de tels dommages.

- Si nous la traquons, elle achèvera ce qu'elle a commencé. Elle nous tuera tous. Vous. Moi. Votre ami. Ce n'est pas en courant à la mort que vous l'aiderez.

On sentait que la femme parlait par expérience, et son regard se troubla pendant un bref instant, comme si elle se remémorait quelque chose. En même temps, elle renvoyait à l'Elfe sa propre impétuosité. Pour affronter la bête qui se tapissait sous les eaux du lac, il aurait besoin de réfléchir froidement, calmement, et non de se jeter dans la gueule du loup. Pantea était peut-être humaine, mais précisément parce que son existence était mortelle et que ses considérations étaient bien différentes de celle d'un être qui verrait la fin des temps, elle ne pouvait pas le laisser céder aux élans d'une passion déraisonnable. Contrairement à Sigvald, elle se battait pour protéger tout un peuple, et elle n'était pas prête à les exposer à cette menace mortelle alors qu'ils venaient de survivre miraculeusement à la mort.

Ils furent bientôt interrompus par une jeune fille aux cheveux ébouriffés mais au regard très mature, qui s'était jetée vers la femme au voile pour lui transmettre une information de la plus haute importance. Elle parlait vite, dans un dialecte particulier du Rhûn que les deux femmes partageaient, en jetant de fréquents regards à Sigvald, comme si ce dernier allait le manger toute entière. De toute évidence, l'information comme quoi un Elfe était présent à bord avait circulé rapidement. Pantea hocha la tête à plusieurs reprises, avant de répondre sur un ton bienveillant. Ici, Sigvald ne comprenait pas la langue, et il ne pouvait s'appuyer que sur des impressions pour déceler les rapports de force. En l'occurrence, cette gamine et la femme au voile semblaient liées par une relation presque maternelle.

L'aînée fit signe à l'Elfe de la suivre, poursuivant ses explications :

- Je ne vous ai pas fait monter à bord pour que vous meniez votre guerre, Elfe. Comme je vous l'ai dit, nous avons besoin d'aide. Nous cherchons à atteindre une ville humaine, où nous pourrions être accueillis. Nous n'avons aucune idée de notre position. Si vous pouviez nous renseigner, nous donner des indications… N'importe quelle information serait très précieuse pour nous.

Ces Rhûnedain étaient véritablement perdus, pour ignorer qu'ils se trouvaient si proches de la cité d'Esgaroth. Mais il était vrai que sans carte, sans connaissance particulière de la région, et sans informations précises, il était difficile de se repérer. Ce monde devait leur apparaître bien étrange et bien nouveau, et Sigvald une première rencontre bien étrange. Mais Pantea n'avait d'autre choix que de se reposer sur lui, surtout qu'il était évident que leur périple touchait à sa fin. Ils n'iraient pas beaucoup plus loin dans cet état. L'Elfe pouvait facilement leur indiquer la route à suivre pour rallier la ville sur le lac, mais il ne pouvait ignorer les rapports tendus qui existaient entre les gens de l'Est et le peuple du royaume de Dale. Aujourd'hui, il ne pouvait se porter garant de l'accueil que recevraient ces Rhûnedain, et pourtant ils semblaient si démunis que leur refuser assistance pouvait aisément les condamner à la mort. Cependant qu'il marchait, Sigvald devait peser le pour et le contre, pour prendre la meilleure décision.

Pantea le fit finalement entrer dans une cabine spacieuse, qui avait été conçue pour accueillir les appartements d'un capitaine, mais qui avait aujourd'hui été transformée en hôpital de fortune. Des documents étaient éparpillés par terre dans toute la pièce, tandis que sur le lit était étendue une adolescente au visage déformé par la douleur, qui semblait se débattre avec la mort. Ses convulsions violentes étaient péniblement maîtrisées par deux hommes et une femme, qui semblaient l'exhorter à tenir bon, et à rester dans le monde des vivants. Cette dernière se leva en voyant Pantea arriver, des larmes plein les yeux, et un bras en écharpe. Son visage était difficile à oublier, tant les marques de servitudes qui s'étendaient sur sa peau étaient nombreuses, mais c'était surtout sa voix qui détonait. Même aux oreilles d'un Elfe, elle avait un timbre exceptionnel : une voix faite pour commander, et que n'importe qui aurait voulu suivre.

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Elle échangea quelques paroles en rhûnien avec Pantea… de toute évidence des nouvelles inquiétantes. La blessée ne devait pas avoir vingt ans, et à n'en pas douter elles y étaient très attachées, mais elles ne pouvaient rien faire pour l'aider à s'apaiser car, et cela Sigvald put le constater, elle n'avait pas de blessure physique apparente. Elle ne saignait pas, elle ne semblait pas avoir de fracture ou de contusion particulière. Elle était juste agitée comme si son esprit était possédé. Il y avait quelque chose d'effrayant à voir une âme si jeune être affectée par un mal aussi pernicieux, comme si soudainement la folie s'était emparée d'elle. La femme tatouée finit par interroger celle au voile au sujet de Sigvald, en le pointant ostensiblement du doigt avec une once de méfiance. Les oreilles de l'Elfe ne passaient pas inaperçu. Pantea répondit, avant de traduire pour l'invité.

- Voici Dame Nevä. Notre guide. Elle se demande si vos sortilèges peuvent nous aider à ramener Roksanâ… Le pouvez-vous ?

Son insistance était touchante, mais à la hauteur de son ignorance au sujet des Elfes. Il y avait hélas bien peu de choses que Sigvald pouvait faire pour ce mal, dont il ne connaissait pas encore l'origine. Voyant qu'il hésitait, elle ajouta :

- C'est grâce à elle que la bête s'en est allée, et il faut qu'elle survive. Nous lui devons tellement… Je vous en prie, si vous pouvez nous aider, faites quelque chose…

La supplique dans son ton était déchirante.

Les larmes dans son regard l'étaient tout autant.


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Le venin dans nos veines EmptySam 14 Sep 2019 - 11:53
Le refus de la femme de Rhûn l'agaça profondément, mais notre elfe dû se résoudre à laisser tomber pour le moment. Ces gens étaient trop affaibli, aussi bien moralement qu'usé physiquement. Sigvald savait tout de même qu'à un moment donné ils n'auraient d'autres que de combattre la créature, rester ici signifiait leur mort et nul doute qu'en fuyant ce lieu, la créature les pourchasserait telles les proies qu'ils étaient tous devenus. Aucune échappatoire, mais la bête semblait calmer pour le moment, peut-être blessé durant sa dernière attaque.

Elle le conduisit au bastingage totalement éventré, il se pencha pour observer la coque entailler, la créature avait donc des griffes puissantes, une mâchoire de grande taille, une vitesse  à se mouvoir qui force le respect pour que les humains ne puissent la décrire... Le cœur de Sigvald s'emballait non de peur, mais de joie, une soif de combat qu'il ne connaissait pas comme si son sang elfique l'appelait à tuer cette chose.

- Je comprends votre position, pas de combat. Mais soyez conscient que dans cette histoire ce n'est pas vous et moi qui pouvons-nous permettre de la traquer. Elle nous traque déjà, nous sommes ces proies. Au moment où nous parlons, cette chose doit être en train de nous observer.

Notre mercenaire percevait sans mal la méfiance qu'elle éprouvait envers lui, il ne pouvait que la comprendre, lui-même était toujours méfiant envers quiconque. Malgré son voile il la sentait tendue, sur les nerfs, pas encore tout à fait remis du choc de l'attaque. Au-dessus du bastingage détruit, Sigvald observait calmement les eaux, tentant en vain d'apercevoir le moindre signe d'un mouvement à la surface. Une femme vint les interrompre dans leur conversation, leur langage lui était inconnu, notre elfe ne connaissait pas autant qu'il le voulait le langage du Rhûn, mais il pouvait en saisir le sens des phrases, mais clairement là leur discussion lui échappait totalement. Même s'il ne partageait rien de leur paroles, les deux femmes parlaient de lui au vu des regards échangés.

- Je peux vous aider, mais ce que vous avez en tête mérite une discussion plus sérieuse et a tête reposée. Bien que votre quête soit noble, recherchez un lieu où vous seriez en sécurité et en paix ne sera pas chose aisé. Dans votre ombre ce cache le Rhûn et au vu du navire que vous possédez, vous pourriez bien amener la guerre où il y a déjà la paix. Comme je l'ai dit il faut en parler sérieusement, voire et comprendre toutes les possibilités. Et je vous aiderais soyez en sûr, mais pour le moment n'oublions pas que nous avons déjà un obstacle à surmonter.

En disant cette dernière parole, il tourna sa tête vers les eaux sombres et calmes du Lac.

Leur situation actuelle était des plus délicates, des anciens esclaves cherchant refuge à la frontière du Rhûn. Les conduire à Esgaroth et leur navire seraient envoyés par le fond avant même de toucher quai, ils pourraient toutes aussi bien débarquer et se faire tuer par les habitants méfiant et par pure vengeance envers le Rhûn, finir en prison, renvoyés au Rhûn afin d'éviter une guerre ou êtres acceptés ce qui donnerait un motif clair au Rhûn de se lancer dans une guerre totale avec le Royaume de Dale, une guerre qui sans l'aide des nains trop occupés et Vertbois sans l'avantage de la forêt, seraient un échec total pour les peuples libres. Se remémorant sans mal la carte du monde tant il avait parcouru durant ses longs voyages, leur seul choix viable était le Gondor, Sigvald était persuadé que le Roi leur accorderait l'asile sur ses terres, mais le navire devrait alors être coulé pour empêcher toutes guerres entre l'Est et Dale. Mais avec autant de blessés leur seule option restait Esgaroth, il y avait peu de chances que Vertbois leur apporte de l'aide et de toute façon la route pour y aller serait trop longue. À moins qu'ils méritent leur entrée à Esgaroth en tuant la créature et encore...

Sigvald suivit la femme voilé jusqu'à la cabine du capitaine, avant même de pénétrer dans la pièce, les effluves de sang et l'atmosphère qui s'en dégageait, notre elfe savait déjà qu'il allait dans une sorte d'hôpital improvisé. Parmi les quelques blessés la seule qui semblait vraiment aux portes de la mort était une jeune fille, trois personnes la maintenaient tandis que son corps était parcouru de violentes convulsions, sa peau perlait de sueur, elle pleurait tant la douleur lui était insupportable. L'une de ces trois personnes vint les rejoindre, son visage avait été marqués à de nombreuses reprises, punition ou changement de maître cela lui importait peu. Il tourna à nouveau son regard vers la jeune femme, aucune blessure, pas de sang, étrange.

Les deux anciennes esclaves discutèrent et la nouvelle venue avait une voix qui ne put que rendre nostalgique notre mercenaire. Alors qu'il était mercenaire au Harad, lorsque toute sa compagnie du faire face aux troupes d'un Sultan, celle qui combattait à ses côtés avait exactement la même voix, ensemble ils avaient porté loin les chants de guerre avant d'être tous massacrer mis à part ce qui avait préféré fuir le combat voyant l'issue de la bataille se profiler comme l'ombre de la mort au-dessus d'un mourant. La femme au tatouage lui rappelait cette farouche guerrière qu'il avait côtoyé bien des siècles auparavant, un tempérament de feu contenu sous une apparente discipline de fer.

- Sigvald. Enchantez Dame Nevä. Sigvald lui fit un signe respectueux de tête à leur présentation. Notre elfe ne put esquisser un petit sourire en prenant conscience que le prénom de la femme sonnait clairement elfique. Très rares sont ceux de mon peuple à posséder les pouvoirs que vous citez, mais j'ai connu des guérisseurs et ceux même dans ma propre famille. Je ne peux vous promettre de la ramenez parmi nous, puis-je ? Tout désignant la souffrante. D'un signe de tête elle lui accorda d'approcher et de s'occuper d'elle.

Notre elfe prit connaissance qu'elle avait faits fuir la créature, mais sur l'instant cette information lui parut dérisoire pour leur avenir à tous, cette information lui était juste essentielle pour la sauver, elle. À son approche les deux hommes s'écartèrent, Sigvald se mit à genoux et pressa doucement mais fermement sa main gauche sur le front de la « patiente », la plaquant sans lui faire de mal sur son matelas de fortune et l'autre main au milieu de sa poitrine. Il ne savait pas encore ce qu'il allait faire, il l'avait vu des centaines de fois sa mère et d'autres guérisseurs procédés ainsi pour calmer des blessés. Seul son état lui importait, il focalisa tout son être, son esprit vers elle, le monde autour de lui ne devint que murmure et néant, comme si le monde entier ne se résumait qu'à de l'eau sans fond ni surface et que l'on y cherchait quelque chose... une personne. Sa détresse était palpable, aucune blessure, son mal-être était plus profond, elle avait fait fuir la créature, Achas avait entendu la chose lui parler. Peut-être l'avait-elle aussi entendu, voir communiquer avec elle, mais elle ne s'en serait pas sorti indemne, son esprit n'aurait pas supporter cette présence écrasante. Les pensés de notre elfe se laissait aller, guider par l'instinct et non la logique. Sa concentration, son esprit à la recherche de la fille le fit migrer vers un rêve saisissant et terrifiant à la fois, il n'avait pas de corps seulement "lui" à la recherche d'une lueur à laquelle s'accrocher, et quand il s'en approcha, celle-ci sembla éparpiller, lacérer en plusieurs lambeaux, des fragments d'elle qu'il n'arrivait pas à réunir...

Notre elfe semblait à la fois ailleurs et présent dans la pièce. Son front perlait de sueur, sa peau avait rapidement pâlit et ces mouvements semblait ralentit et précis malgré ses yeux clos. Il se souvint alors de certains chants apaisants, qui se voulait comme des prières, mais sans l'être.

Maintenant sa « patiente », Sigvald pencha sa tête jusqu'au creux de son oreille et avant de chanter, notre elfe pencha pour le Sindarin, une langue qu'il trouvait moins noble que le quenya, moins abrupte que le Sylvain, mais plus doux et calme que tout le reste. Son chant se voulait pour une seule personne, elle. À son oreille le chant se mua comme un murmure puissant en émotions et animé par une volonté inébranlable venant de Sigvald, un murmure venant d'un ami, rempli d'espoir et de tristesse afin de délaisser l'obscurité et les souffrances pour céder la place à la lumière et la chaleur bienveillante du soleil. Notre elfe n'avait jamais fait cela auparavant, mais tout se faisait naturellement, son esprit et sa volonté se concentraient sur une seule tâche, la ramener. Dans son rêve le chant l'aida à réunir un part un les fragments d'elle. Le temps semblait suspendu dans la pièce, la nervosité de l'extérieur n'avait plus d'emprise ici.

Ne pleure plus petite fille...
Invisible au-delà des brumes
N'oublie jamais qu'un Soleil brille:
Il fait étinceler l'écume,
Et tes larmes comme tes yeux
Luisent doucement sous ses feux!

Nuit noire, étoiles qui s'allument.
Inondée de rayons de lune
Elle est là, dame de chagrin
Nienna au regard lointain,
Noyée dans l'ombre de sa mante
Avec sa voix ténue, qui chante.

Reviens sous le soleil, tes amis sont là, ils n'attendent que toi.


Sigvald rouvrit les yeux, se redressa et d'un revers de la main il enleva les larmes qui ruisselaient sur la joue de la fille.

- Aide là, apaise sa souffrance. Ces derniers mots se voulaient à la fois comme une supplique et un ordre désespérés, diriger vers la Valië Nienna. Son sentiment de la voir revenir était sincère, cela occupait toutes ces pensés.

Auparavant notre elfe n'éprouvait que de la haine envers les Valar qui s'étaient désintéresser du monde qu'ils avaient eux-même participé à créer. Désormais et ce depuis quelque temps il considérait les Valar comme des aspects du père de tout, un être suprême qu'il « voyait » à la fois lumière et ténèbres, bien et mal réunis. Les Valar n'avaient de rôle que ce qu'Ilúvatar leur avait donné comme part de lui-même, ce faisant il ne pouvait pas les punir directement. Et en cela Sigvald les avait compris et avait mis ses rancœurs de côté.





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Le venin dans nos veines EmptyDim 13 Oct 2019 - 19:00
Le venin dans nos veines Pantea10   Le venin dans nos veines Nevy10

Un Elfe agenouillé devant une Rhûnadan, chantant auprès des Valar pour la ramener dans le monde des vivants… La scène était si surréaliste qu'elle aurait pu mériter d'être saisie par un peintre particulièrement adroit. Il aurait représenté le visage pâle de la jeune fille, tendu à l'extrême, face à un Sigvald qui se donnait entièrement à sa tâche, le visage concentré. Et tout autour, incapables de comprendre de quoi il retournait précisément, ces affranchis venus de l'Est lointain qui ouvraient des yeux ronds tandis que leurs prières silencieuses accompagnaient la voix mélodieuse de l'Elda.

Comment qualifier ce moment ?

Magique ?

Le mot semblait encore trop faible pour décrire cet instant suspendu. L'un, représentant des Peuples Libres, défenseur de la justice et de la liberté qui était revenu dans la grâce de son suzerain, en appelait à Nienna qui avait le pouvoir d'ôter les souffrances du monde. Son esprit de compassion s'appliquait à embaumer l'âme de cette jeune fille dont il ignorait même jusqu'au nom, comme un guérisseur s'évertuant à sauver la chair d'un inconnu sur un champ de bataille. Et derrière lui, ces Rhûnedain qui pour certains en appelaient silencieusement à Melkor pour protéger l'âme de cette juvénile guerrière.

Ils étaient si différents qu'ils n'en appelaient à des puissances radicalement opposées, sans s'en rendre compte. Pourtant, en dépit de leurs innombrables différences, ils étaient unis dans un seul but, et leurs prières montaient au ciel avec une force décuplée. C'était comme si l'oreille d'Eru elle-même s'était ouverte à l'écoute de cette musique qui unifiait enfin les Vala et Melkor, les Hommes et les Elfes, les libres et les esclaves, les bons et les moins bons. Le vent portait leurs suppliques jusqu'au bout du monde, litanie intemporelle qui en appelait à la bienveillance de quiconque pourrait entendre.

Le chant de Sigvald s'acheva sur une note à la fois tragique et pleine d'espoir. Les Rhûnedain retinrent leur souffle, comme s'ils n'osaient troubler le moment de paix absolue, quand la dernière note achevait de disparaître dans le lointain, et que seul le silence le plus pur semblait exister dans la pièce. Ils ne prirent leur inspiration que lorsqu'ils virent la poitrine de la jeune fille se soulever paisiblement. Elle respirait normalement.

Les mots de Sigvald avaient eu l'effet escompté.

Ce fut alors comme s'ils sortaient de leur torpeur, et un soupir de soulagement communicatif passa parmi eux tous. La jeune fille n'était pas guérie, loin de là, mais elle avait cessé de convulser, et elle paraissait dormir sans éprouver de mal visible. C'était un petit miracle en soi. Ce fut Nevä qui la première arriva à son chevet, une larme solitaire coulant sur sa joue.

- Roksanâ… Murmura-t-elle, moins pour l'intéressée que pour se réjouir à voix basse de son retour dans le monde des vivants.

Elle tourna le regard vers Sigvald, et ajouta :

- Merrci…

Elle semblait vouloir en dire plus, mais de toute évidence elle ne parlait pas assez bien la langue commune pour cela. Les mots restèrent coincés dans sa gorge, et elle se tourna vers Pantea en désespoir de cause. La femme au voile s'avança, et traduisit en termes intelligibles la mélodie envoûtante que formaient les paroles de la Tatouée.

- Dame Nevä vous remercie très chaleureusement de votre aide. Roksanâ est trop jeune pour être votre obligée, mais Dame Nevä assumera cette dette envers vous à sa place, si cela vous convient.

Les coutumes du Rhûn variaient beaucoup d'une tribu à l'autre, mais Nevä respectait les anciennes traditions qui voulaient que celui qui sauvait la vie son prochain pouvait attendre la même chose en retour. Certains faisaient de ces dettes le centre de leur existence, et abandonnaient toute allégeance au profit de celui ou celle qui devenait leur maître. C'était une forme d'esclavage, dans un sens. Nevä n'était pas aussi extrême, mais elle aiderait l'Elfe si elle le pouvait, et si cela n'allait pas à l'encontre de ses autres engagement. Il était étrange pour elle d'être liée ainsi à une créature qu'elle avait appris toute sa vie à craindre, mais Sigvald venait de sauver la vie de Roksanâ, et elle ne pouvait pas dire que pour l'heure il avait fait preuve de la moindre agressivité.

Elle avait depuis longtemps compris que pour atteindre ses objectifs, elle devrait faire des compromis avec ses anciennes croyances. Elle avait longtemps pensé que le monde n'existait qu'en noir et blanc, mais depuis qu'elle avait passé cinq longues et atroces années dans les geôles de Lyra, et qu'elle avait appris la nature réelle des ténèbres, elle trouvait que le gris était un ton parfaitement acceptable. C'était en faisant des compromis avec elle-même, et en se montrant intransigeante vis-à-vis de ses ambitions, qu'elle avait réussi à emmener les esclaves d'Albyor si loin. Elle avait réussi l'impossible, mais l'impossible ne les avait pas encore menés en sécurité.

Sa mission n'était pas achevée, et si pour y parvenir elle devait s'appuyer sur cette créature aux oreilles pointues, elle le ferait.

Pas avec plaisir, mais elle le ferait.

Elle recommença à parler, mais cette fois Pantea lui répondit sans prendre la peine de faire la traduction. Une brève conversation entre les deux femmes s'en suivit, avant que celle au voile ne revînt à la langue commune qu'elle maîtrisait vraiment très bien. C'était comme si elle avait reçu une parfaite éducation, et qu'elle était capable de s'exprimer dans un westron élégant et raffiné. Elle n'était de toute évidence pas une esclave comme les autres :

- J'ai rapporté à Dame Nevä notre brève conversation, et vos mises en garde. Nous sommes bien conscients que nous apportons avec nous une rumeur guerrière qui pourrait nous valoir l'hostilité de vos semblables, et des Hommes d'au-delà de la Mer. Cependant, nous n'avons pas le choix que d'insister auprès de vous. Il nous faut absolument savoir quelle est la ville la plus proche. Nous nous rationnons depuis fort longtemps, et cette bataille était celle de trop pour mon peuple. Si cette créature ne revient pas nous massacrer, c'est la faim qui aura raison de nous. Mais une bête sauvage tapie sous le lac vaut bien mieux que plusieurs centaines de bouches affamées, ne croyez-vous pas ?

La question n'était pas une menace, mais ressemblait à s'y méprendre à un avertissement. Pantea avait rapidement perçu la lueur belliqueuse dans les yeux de l'Elfe, qui paraissait vouloir en découdre avec le monstre. Même s'il avait de fortes chances de mourir, il considérait que c'était là le défi le plus intéressant, et que rien ne devait se mettre entre lui et cette préoccupation du moment. Cependant, la femme au voile était habile négociatrice, et elle venait de lui soumettre un nouveau problème qui pouvait potentiellement déstabiliser la région. Sigvald ignorait précisément combien de Rhûnedain se trouvaient à bord, puisqu'il n'avait vu que ceux – déjà forts nombreux – qui se trouvaient sur le pont. Le navire était immense, et pouvait sans peine contenir une horde d'Orientaux. Or il n'était pas besoin d'être très inventif pour deviner ce qui arriverait s'ils étaient tenaillés par la faim…

Ils échapperaient au contrôle de cette Nevä, leur guide, et déferleraient dans les campagnes environnantes avec un seul objectif : se nourrir. Une armée affamée et désespérée pouvait devenir un véritable fléau, dans une région déjà instable, et qui n'avait pas besoin de cette nouvelle menace. Les récoltes qui faisaient suite à l'hiver interminable étaient fragiles, et ne supporteraient pas d'être piétinées par des bandes de pillards déchaînés. D'ailleurs, même si les troupes du comte ou du roi Gudmund parvenaient à intervenir à temps, elles ne feraient que massacrer de pauvres innocents coupables d'avoir voulu échapper à la servitude. Il y avait parmi ces Orientaux beaucoup de femmes – Nevä, Pantea et Roskanâ n'étant que les plus éminentes représentantes de leur sexe –, mais aussi un certain nombre d'enfants comme celle qui était venue avertir Pantea un peu plus tôt. Il y avait sans doute des vieillards, des malades, des blessés qui ne demandaient qu'un peu de charité.

Esgaroth avait-elle les moyens de leur offrir l'aide dont ils avaient besoin ?

Ou plutôt, Esgaroth le désirait-elle ?

Rien n'était moins sûr, mais c'était précisément la raison pour laquelle Sigvald avait un rôle à jouer. Des innocents risquaient de souffrir s'il ne faisait rien, et la furie qui rongeait le cœur des Hommes comme un poison ferait sans nul doute bien plus de victimes que la mystérieuse créature du Lac. Pantea le dévisageait, percevant son trouble alors que l'Elfe essayait de démêler la situation. Elle voulut ajouter quelque chose, mais ils furent soudainement interrompus par un bruit à la porte. Pendant une seconde, ils crurent que le monstre était de retour, mais c'était seulement un messager venu porter une nouvelle. Pantea s'en fit l'écho :

- Sire Sigvald, votre compagnon a été amené à bord. Son état est critique.

Ils n'eurent pas besoin d'en dire davantage qu'ils étaient déjà dehors. Sigvald, flanqué de Pantea et Nevä qui souhaitait se tenir informée de la situation personnellement. L'étrange trio arriva bientôt sur le pont, où le calme semblait revenu après la bataille. Des hommes en armes s'étaient positionnés sur tout le bastingage, ce qui représentait un peu moins d'une centaine de combattants. Ils regardaient vers le lac avec méfiance, tenant qui une lance, qui un gourdin, qui un arc. Des armes dérisoires qui, espéraient-ils, leur permettraient de repousser un nouvel assaut. Bien d'autres s'affairaient auprès des blessés, qui gémissaient pitoyablement. On nettoyait le pont pour faciliter le passage, en enveloppant soigneusement les morts dans des linceuls, et en jetant les membres tranchés par-dessus bord. Ôter le sang qui s'infiltrait dans le bois serait une autre affaire.

Sigvald aperçut finalement le quatuor qui s'affairait autour d'Achas, qui était en piteux état. Les Rhûnedain avaient fait de l'excellent travail compte-tenu de leurs moyens, en essayant de cautériser la plaie pour limiter dans la mesure du possible le saignement. On sentait encore l'odeur âcre de chair brûlée défier celle entêtante du sang frais. Ils avaient pris soin d'envelopper le moignon dans un linge propre, et de réaliser un pansement suffisamment serré pour éviter toute réouverture. Cependant, entre le choc et la douleur, Achas semblait s'être vidé de ses forces. Son corps physique était en train de se rompre, comme si son fëa cherchait à s'envoler vers les lointaines plaines de Valinor. Il était vaguement conscient, ramené à lui par la douleur lancinante qui le transperçait à chaque seconde. Il serrait les dents comme un preux guerrier, résolu à ne pas laisser laisser échapper le moindre cri de douleur, alors qu'il souffrait de toute évidence le martyre.

Alors que son compagnon s'agenouillait auprès de lui pour constater de ses yeux l'ampleur de la blessure, Pantea s'approcha pour recueillir les dernières informations, avant d'en offrir la traduction :

- Ils ont fait de leur mieux pour le soigner, mais ils ne savent pas s'il va s'en tirer. Certains pensent qu'il peut survivre au choc, à condition de se reposer ici et de ne pas être transporté. D'autres avancent qu'il a besoin de soins intensifs, que nous n'avons pas les moyens de lui offrir… Hélas, nous n'avons pas de guérisseur parmi nous qui pourrait nous donner un verdict définitif…

Elle laissa un silence planer entre eux, alors que Sigvald prenait progressivement conscience de la décision inévitable qu'il devait prendre concernant Achas. Nevä arriva logiquement à la même conclusion, et elle demanda à Pantea de formuler en des termes parfaitement clairs l'équation simple à laquelle il était confronté :

- Si vous souhaitez que votre compagnon reste parmi nous, nous continuerons à le soigner de notre mieux. Vous avez aidé Roksanâ, et Dame Nevä est prête à vous rendre le même service, bien qu'elle ne puisse garantir la survie de votre ami. Si en revanche vous voulez le mener vers de meilleurs guérisseurs… nous sommes disposés à vous y aider. En échange, laissez-nous seulement parler aux autorités de votre peuple. Conduisez-nous auprès des vôtres, je vous en prie… Une simple ambassade pacifique désireuse de négocier. Bien que nous voyagions à bord d'un navire de guerre, nous ne souhaitons pas entrer en conflit avec quiconque.


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Dernière édition par Ryad Assad le Mer 20 Nov 2019 - 19:51, édité 1 fois
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Le venin dans nos veines EmptyLun 18 Nov 2019 - 21:42
Quand elle ouvrit les yeux pour croiser les siens, décryptant son regard et la manière dont les traits de son visages bougeaient, Sigvald sût que la Rhûnedain ce sentait reconnaissante et en sécurité. Puis elle les refermait et s'endormit paisiblement, ce sachant entourer par les siens.

Lui-même ne comprenait que partiellement ce qui s'était passés, il se sentait las comme si dans sa tâche de la ramener il y avait laissé quelques choses, c'était un instant dont il ne pouvait y mettre de mots pour décrire avec autant de précision qu'il le voudrait ce qu'il avait vécu et pourtant tout était clair dans son cœur. Il l'avait réuni et sortit de ce torrent de malheur, mais sa prière l'avait comme il aurait pu dire, guider...

Dame Nevä le sortit doucement de sa torpeur en le rejoignant au chevet de la fille, ces deux êtres été lié par lien qui lui était inconnu, mais la voir ainsi lui mit du baume au cœur et le rassura sur ce qui passait en cet instant. Quoiqu’il lui en coûte il les aiderait autant qu'il le pourrait.

- Ce fut un plaisir de l'aider, bien que ce soit la première fois que j'aide autre que moi. Son ton glacial avait pris des nuances de bienveillance non feinte, cette « expérience » semblait l'avoir quelque peu changé. Ai-je seulement le choix ? Et j'espère cette dette ne jamais être payé, si cela vous convient.

Pour ce qu'il en savait sur le Rhûn, ces gens avaient un sens de l'honneur à faire pâlir un nain ou elfe, nul doute que le sacrifice de soi était quelques choses de révérer et de respecter parmi ces gens. Cependant Sigvald n'en oubliait pas sa mission et celle qui venait se rajouter, identifier et résoudre le problème du Lac et désormais amener ces gens dans un lieu sûr et veiller sur eux le temps qu'il faudrait. Il allait mener ces gens en Esgaroth et veiller à ce qu'il s'était promis de faire en son for intérieur et d'un même coup percer le mystère du Lac.

Ils sortirent de la pièce et notre elfe emboita le pas aux deux femmes. Il se sentait étrangement épuisé et très vivant, plus que jamais d'ailleurs. La dénommé Panthea parlait avec Dame Nevä sans se soucier de leur invité, Sigvald ne se sentit nullement insulté ou même inquiété par cette discussion dont il ne comprenait pas un mot, à l'heure actuelle il n'y avait aucun danger pour lui sur ce pont, bien que sa méfiance naturelle lui intimât de traquer chaque mouvement suspect autour de lui.

- J'en conviens et c'est pourquoi je vous mènerai à la ville la plus proche, la Cité d'Esgaroth. Je suis sûr que vous avez déjà réfléchi à la question, il vous faudra mettre sur pied une sorte de délégation qui représenterait chacun des peuples sur ce navire dont Dame Nevä serait la porte-parole. Et en chemin récupérer une embarcation avec laquelle nous sommes venu mon compagnon et moi, elle nous servira pour accoster dans la Cité, inutile de mettre à quai un navire de guerre et de déclencher un affrontement. Ah, et braquer d'un côté du navire les balistes prêtes et armées en direction du Lac à l'extrême opposé de la ville, je redoute tout de même un invité qui viendrait des profondeurs pour ruiner cette « réunion ».

Sigvald en personne plutôt pragmatique qu'il était ne voyait pas de défaut à ce plan et à son exécution, mais comme à son habitude il redoutait une nouvelle fois la faiblesse et les divagations de l'esprit de l'homme, prompte à céder à leurs émotions et aux actions dicter avec le cœur plutôt qu'avec leur esprit. Mais il savait Dame Nevä résolu et d'acier pour l'avenir des siens.

- Pardonnez mon empressement, je voudrais et je sais que ce n'est pas le moment de vous demander ce service, mais quand elle et sue vous le pourrez je voudrais une entrevue avec cette jeune fille Roksanâ , elle sait ce qui est tapis sous les eaux et ce savoir nous serait d'une grande utilité à tous.

Une exclamation venue du pont les alerta sur la santé préoccupante de Achas.

- Je vous suis.

Son pas était rapide, l'inquiétude se lisait clairement sur son visage. Sur le pont les anciens esclaves armés en prévision d'une nouvelle attaque ne semblaient pas rassurés du tout, une peur et une angoisse non feinte les faisaient aller ici et là, jetant par moments de courage les yeux par dessus le bastingage pour tenter de maintenir un semblant de surveillance. Son attention se porta surtout sur l'état d'Achas, il s'en approcha et reconnu que les hommes du Rhûn l'avaient remis sur pied mieux qu'il ne l'aurait fait lui-même ou du moins tout aussi bien qu'il l'aurait fait. Sigvald accablé par l'état de son compagnon, s'agenouilla et apposa sa main sur le front d'Achas, il était tiède et sans guérison plus sérieuse et urgente, son « ami » quitterait probablement Arda pour rejoindre ses ancêtres. Le seul pouvoir que détenait Sigvald et qui pouvait sauver la sentinelle était de guider ces réfugiés en un autre lieu, à Esgaroth.

- Vous avez fait du mieux que vous pouviez et en cela je vous en suis reconnaissant. Là où nous allons il y a une personne qui peut le sauver.

Il marqua une pause sachant que tout reposait sur lui, un massacre ou comme son plan s'il était appliqué dans des conditions optimales, leur donnerait le salut à tous. Sigvald s'avança jusqu'à la proue et s'aperçut que le navire s'était bien éloigné des quais, sûrement à cause des reflux et remous dû au choc contre le vieux ponton de bois. Il prit un peu de hauteur et scruta chaque parcelle du lac visible, aucun mouvement. Il regarda avec réconfort et joie les étoiles dont la luminosité perçait sans mal le brouillard épais. Il passait ses doigts sur le pommeau de son épée comme pour s'assurer qu'elle était bien en place, sachant que si tout allait bien il n'aurait plus à la sortir ce soir.

Et avec un sourire sincère et plein de confiance tout en regardant les deux femmes qui l'accompagnaient depuis le début sur ce navire, il leur répondit en un Rhûnien qui se voulait familier, bien que les mots choisis restaient un peu cérémonieux.

- Si vous êtes prêts, je vous guiderais.
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Ryad Assad
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Le venin dans nos veines EmptyLun 25 Nov 2019 - 18:57
Le venin dans nos veines Pantea10   Le venin dans nos veines Nevy10

L'argument de Pantea avait fait mouche, et elle inclina élégamment la tête quand l'Elfe lui fit comprendre qu'il accepterait de les aider. D'une voix résignée mais non déçue, il leur expliqua qu'il les conduirait à la cité d'Esgaroth, que la femme au voile connaissait de nom comme étant une des cités de l'Ouest avec laquelle les gens de Vieille-Tombe avaient fait commerce par le passé. Elle ignorait tout ou presque des coutumes des gens d'au-delà de la mer, mais les rumeurs qui étaient parvenues à ses oreilles présentaient les gens d'Esgaroth comme des commerçants pragmatiques, des individus qui sauraient peut-être mettre les différences culturelles de côté pour accueillir des réfugiés.

Tout du moins l'espérait-elle, car ils avaient bien peu de choses à offrir pour monnayer la protection du suzerain de ces terres.

Pantea prêtait grande attention aux paroles de l'Elfe, et un élément particulier la fit réagir. Elle ne put s'empêcher d'interrompre l'Elda pour lui apporter une précision qui n'était pas inutile au sujet de son peuple. Sigvald avait sans peine noté que beaucoup des pensionnaires du navire de guerre semblaient avoir des origines différentes. Il y avait là des gens du Rhûn, assurément, mais d'autres avaient le type occidental, et quelques uns – rares, à dire vrai – avaient le cheveu blond des gens du Rohan. Il était logique de supposer qu'ils appartenaient à autant de groupes différents, mais leur expérience commune à bord de l'Âzâdî avait forgé des liens indestructibles entre eux. Des liens qui faisaient d'eux un peuple à part, désormais.

- Il n'y a qu'un seul peuple ici, sire. Âzâd Shuda, c'est ainsi que nous nous nommons… Les Affranchis, dans votre langue.

Son ton solennel ne laissait pas de place à la discussion. Sigvald ne pouvait qu'imaginer ce que ces hommes, ces femmes et ces enfants avaient dû traverser pour en arriver là, si loin des grandes villes du Rhûn d'où ils arrivaient exténués et démunis. Les évasions d'esclaves d'une telle ampleur n'étaient pas monnaie courante dans un royaume où la pratique était répandue et acceptée, ce qui laissait présager des difficultés qu'ils avaient dû rencontrer tout au long de leur périlleux voyage. Les troupes de la reine avaient probablement essayé de les arrêter, mais c'était aussi le cas des marchands lésés d'avoir perdu leurs biens, tout autant que des chasseurs de prime désireux d'être récompensés pour avoir contribué à écraser cette petite rébellion.

Dans les flammes d'une guerre inégale et qu'ils ne pouvaient gagner, ces esclaves avaient développé des liens de fraternité qui dépassaient leurs origines respectives. Il était évident que les anciennes allégeances étaient tombées. Il n'y avait plus d'Occidentaux et d'Orientaux, plus de Rohirrim et de Khandéens. Il n'y avait que des Affranchis qui avaient lutté de toutes leurs forces pour arracher leur liberté aux griffes des sinistres Melkorites. Ils se battraient jalousement pour la préserver, et même ceux dont les origines plus ou moins lointaines les rattachaient aux terres de l'Ouest semblaient réticents à l'idée de se placer au service d'un seigneur dont ils ne connaissaient rien. Ils avaient besoin de la protection d'un puissant souverain pour survivre, mais cela ne signifiait pas prêter hommage au premier venu, et abandonner leur liberté chèrement acquise.

La fierté de ces gens se lisait dans leurs yeux, malgré leur terreur et leur épuisement.

Une fierté avec laquelle il faudrait compter à l'avenir.

L'Elfe poursuivit son explication, détaillant les modalités de leur voyage vers Esgaroth. Pantea approuva chaque élément, considérant en effet qu'il était plus prudent de ne pas approcher d'une ville avec un navire de guerre. Les Affranchis ne souhaitaient pas effrayer les gens d'ici, et ils feraient le voyage en petit nombre afin d'ouvrir des négociations apaisées. Sigvald proposa de récupérer une embarcation que lui et son infortuné compagnon avaient prise pour venir, ce à quoi Pantea ne s'opposa pas non plus. Si c'était le moyen le plus pratique et le plus rapide, alors ils feraient ainsi.

La question du positionnement des armes de l'Âzâdî fut un peu plus compliquée, et Pantea se proposa de faire la traduction à Nevä pour lui permettre de donner son avis. S'en suivit une brève conversation, et la femme au voile finit par annoncer :

- Dame Nevä comprend votre position, et elle est prête à détourner ces armes de la ville d'Esgaroth. Cependant, vous devez nous garantir que nous ne serons pas menacés par les gens d'ici, et que nous n'aurons pas à nous battre. Nous souhaitons avant toute chose négocier et parler de paix, mais Dame Nevä n'a qu'une confiance modérée dans les intentions des vôtres. Pouvez-vous me certifier que personne ne s'en prendra à nous ?

La question était importante pour Nevä, et Sigvald était face à un dilemme. Il connaissait les sentiments parfois agressifs des gens d'Esgaroth vis-à-vis des Orientaux, et il savait que la situation pouvait dégénérer très rapidement. S'engager à ce que les habitants du Lac se montrassent pacifiques reviendrait à mentir pour la bonne cause. Cependant, il était convaincu que la véritable menace venait du Lac, et que les querelles humaines n'étaient que d'inutiles distractions face au problème principal. Pour affronter la créature librement et avec tout le soutien nécessaire, il avait besoin d'apaiser les tensions entre Orientaux et Occidentaux, ce qui n'était pas une mince affaire.

Le choix lui appartenait, et dans cette circonstance il devait faire preuve de diplomatie pour apaiser tout un chacun.

La dernière requête de Sigvald concernait Roksanâ, que l'Elfe demandait à voir dès qu'elle serait réveillée. La demande était compréhensible, car il était vrai que la jeune guerrière avait affronté et repoussé la créature du Lac à elle seule. Elle était donc peut-être en mesure de donner des informations précieuses à l'Elfe, qui semblait obnubilé par cette créature. Ce fut à cet instant que la femme au voile comprit que l'Immortel était en chasse, et que sa rencontre avec l'Âzâdî n'était que le fruit du hasard. Il était là pour traquer et pour tuer ce monstre : le sort des esclaves n'était qu'une distraction pour lui. Elle rangea soigneusement cette information dans un coin de son esprit, jugeant utile de connaître les intentions réelles de leur interlocuteur pour mieux discuter avec lui par la suite. Revenant à Roksâna, Pantea se tourna vers la femme tatouée pour lui faire la traduction de nouveau, et lui soumettre cette requête. Elle connaissait la relation très spéciale que Nevä entretenait avec la jeune guerrière, et savait que tout ce qui concernait son bien-être était particulièrement cher à son cœur. Depuis que la jeune fille était montée à bord, Nevä jouait le rôle de mère de substitution, une posture dans laquelle elle semblait s'épanouir, même si l'inquiétude pointait sur son visage chaque fois que les trompettes de la guerre appelaient sa protégée à prendre les armes.

La réaction de Nevä fut étonnante, car loin de s'offusquer à l'idée qu'il désirât la voir, elle semblait au contraire favorable à un tel échange. Elle se tourna droit vers le Premier Né, et lui répondit maladroitement :

- Oui. Oui.

Un assentiment assorti d'un hochement de tête appuyé qui montrait que Nevä considérait que c'était un engagement solennel. Sigvald avait soigné la guerrière, et elle n'oublierait jamais son geste, tant et si bien qu'elle était prête à lui accorder une entrevue avec sa protégée. Son autorisation cachait en réalité d'autres motifs, que la femme tatouée préférait ne pas divulguer pour le moment. Elle ne parlait pas la langue commune, mais elle avait parfaitement compris la relation étrange qui unissait Sigvald et la créature du Lac. Dans son esprit, il était évident que si les Affranchis parvenaient à tuer la bête, ou au moins aidaient à la neutraliser, ils auraient gagné leurs lettres de noblesse et peut-être le droit d'être accueillis par les gens d'Esgaroth. En rendant ce service aux peuples de l'Ouest, elle espérait secrètement gagner une amitié qu'elle doutait de les voir offrir sans contrepartie.

Nevä était toute à ses pensées quand ils arrivèrent auprès du compagnon de Sigvald, qui se trouvait être lui aussi un Elfe. Les sourcils de la femme se haussèrent quand elle vit la gravité de sa blessure… elle avait vu son lot de plaies, et savait qu'il ne s'en sortirait pas en restant à bord. L'idée même de devoir le transporter ailleurs pour l'opérer semblait présenter de grands risques, mais elle ne pouvait pas reprocher à l'Immortel de vouloir soigner son compagnon. Ce fut alors qu'elle se rendit compte que tout cela soulevait un paradoxe. Si ces gens étaient immortels comme on le disait, alors pourquoi une telle blessure, si grave fut-elle, était-elle si préoccupante ? Ne pouvait-il pas tout simplement récupérer ? Ou bien se faire pousser une nouvelle jambe comme les lézards ? Elle ne connaissait rien aux Elfes, et ils lui paraissaient terriblement mystérieux. Elle savait que derrière leur apparence assez proche des humains se cachaient des secrets effrayants, et elle n'était pas pressée de les découvrir.

Elle demeura en retrait pendant qu'ils prenaient des nouvelles du blessé, gardant un œil sur les sentinelles qui se trouvaient aux alentours. Ils observaient le Lac avec inquiétude, mais ils semblaient aussi préoccupés par la présence de l'Elfe à bord. Pour beaucoup, c'étaient la première fois qu'ils voyaient une créature aux oreilles pointues, et la curiosité le disputait à la crainte. Nevä ne pouvait pas leur en vouloir. L'Ouest était si mystérieux, peuplé de créatures magiques effrayantes, de monstres qui sortaient des trous dans la terre, de lanceurs de sortilèges cachés cachés dans d'immenses forêts, ou encore de créatures spectrales qui hantaient les morts comme les vivants. Il était compréhensible de ne pas être à l'aise dans ces régions…

Pourtant, elle allait devoir s'y aventurer plus avant. C'était le sens de la phrase de Sigvald, prononcée dans un rhûnien étonnamment correct. Rares étaient les étrangers à le parler, et elle ne serait pas attendu à l'entendre prononcé avec un accent aussi peu prononcé. Comme si l'homme avait déjà côtoyé des Orientaux, et qu'il avait appris à leur contact. Cela mit immédiatement Nevä sur une posture défensive. Elle connaissait parfaitement le dialecte qu'il parlait, que l'on appelait communément « langue des esclavagistes ». C'était une langue véhiculaire dans laquelle s'entretenaient généralement les marchands d'esclaves du Rhûn, du Khand, et certains venus du Harad. Le dialecte empruntait énormément au Noir Parler, auquel se rajoutaient des expressions ou des mots venus des grands ensembles géographiques de l'Est ou du Sud. La langue était peu utilisée ailleurs, chacun préférant utiliser son propre idiome pour communiquer. Nevä était surprise de voir que cet Elfe connaissait ce dialecte particulier, qu'elle associait personnellement à certains des maîtres qu'elle avait eus par le passé.

Elle en fit la réflexion à Pantea, qui se tourna à Sigvald pour lui traduire :

- Le rhûnien que vous utilisez n'est guère apprécié, ici. Vous parlez comme un esclavagiste…

Ce n'était pas un reproche, plutôt un constat… et un avertissement. Il valait mieux que Sigvald prît garde de ne pas heurter les sentiments de ceux qui essayaient de sauver Achas. Ils avaient déjà traversé tant d'épreuves pour échapper à la servitude : un rien pouvait les inquiéter. Cependant, Pantea ne semblait pas en vouloir à l'Elfe outre mesure, et elle poursuivit :

- Nous vous suivons, sire. Dame Nevä et moi-même souhaitons discuter avec vos chefs. Nous souhaitons également amener un homme pour nous accompagner. Il sera chargé de notre sécurité, mais aussi de veiller sur votre compagnon.

Ce n'étaient pas des conditions excessives. Esgaroth ne risquait pas d'être prise par deux femmes qui semblaient franchement inoffensives, et un garde du corps auquel Sigvald pouvait de toute façon tenir tête. La méfiance des Affranchis était à la hauteur de leur inexpérience, car Nevä et Pantea étaient sur le point de se livrer à des individus qui les considéraient franchement comme des ennemis sans s'entourer d'une large garde armée. Elles étaient soit inconscientes, soit particulièrement braves.

Toujours est-il qu'après avoir distribué quelques consignes rapides, et rassemblé quelques affaires, elles rejoignirent Sigvald à son embarcation. On avait déplacé Achas précautionneusement, et en l'avait installé au milieu du frêle esquif, tandis que les autres passagers prenaient place de part et d'autre. Nevä s'était assise à sa droite, et elle posa une main délicate sur la joue de l'archer. Paradoxalement, elle semblait faire preuve de beaucoup de bienveillance vis-à-vis de lui, comme si le fait qu'il fût aux portes de la mort physique effaçait les craintes et les appréhensions qu'elle éprouvait vis-à-vis des Elfes.

++ Il ne va pas s'en tirer, Pantea. Il est trop faible… ++ Fit Nevä dans un rhûnien que Sigvald ne comprenait pas, pour le garder délibérément à l'écart. ++ J'ai peur de la réaction des hommes de l'Ouest si nous leur ramenons un cadavre. ++

++ Je sais… Mais cet Elfe semble être quelqu'un de droit, il n'a pas cherché à nous mentir ou nous manipuler. ++

++ C'est vrai, mais nous devons rester prudentes. Le sort des nôtres en dépend. J'ai laissé des consignes à Roksanâ et aux Tatoués. Si nous ne revenons pas, je leur ai dit de continuer vers le Sud. ++

Nevä eut un petit sourire en coin. Elle avait effectivement donné ces consignes, mais elle savait pertinemment que personne ne les écouterait. Privés de leur Voix, les esclaves risquaient de devenir nerveux, de paniquer, et de commettre des actes irréfléchis. Les Tatoués, Roksanâ en tête, parviendraient à remettre de l'ordre en leur promettant une opération de vendetta contre Esgaroth. Ils déferleraient par centaines, en espérant pouvoir retrouver leurs deux principales cheffes. L'opinion de Nevä était de toute évidence partagée par le garde du corps que Pantea avait choisi, lequel s'invita dans la conversation :

++ J'ai bien peur que notre échec ne signifie la guerre. Les Affranchis ont faim, ils préféreront se battre plutôt que de fuir encore. ++

L'homme en question était pour le moins sinistre. Vêtu de sombre, aucun carré de peau n'était visible sur lui et il dégageait une aura austère et dangereuse. Son visage était couvert d'un masque de cuir, tandis que sa peau était bandée comme s'il était blessé. Il ressemblait à une apparition macabre, à l'exception du fait qu'il se mouvait avec élégance et fluidité. Sa posture était celle d'un tueur, et Sigvald n'avait pas pu manquer de noter qu'il avait les attitudes d'un guerrier accompli. Même s'il était peuplé d'esclaves, l'Âzâdî abritait quelques guerriers d'exception, et celui-ci en faisait partie. Nevä acquiesça aux paroles de l'homme masqué, et renchérit :

++ Nous devons absolument réussir ces négociations. Pantea, essayez de récolter des informations au sujet d'Esgaroth, de sa politique et de ses gens. Nous devons nous préparer.++

L'intéressée hocha la tête, et se tourna vers Sigvald qui ramait apparemment sans effort pour faire avancer leur embarcation. Soignant la formulation de sa question, elle se lança :

- Sire Sigvald, que pouvez-vous nous apprendre sur Esgaroth ? Que devons-nous savoir sur ses gens, sur ses coutumes, et plus largement sur ce qui nous attend ? Nous sommes désireux de ne commettre aucun impair, vous comprenez…

A l'heure actuelle, Sigvald connaissait presque aussi bien la politique officielle de la ville que les jeux de pouvoir officieux qui se déroulaient. Il pouvait choisir de révéler ce qu'il souhaitait à ses compagnons d'infortune, mais il devrait porter les conséquences de ses décisions.


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Le venin dans nos veines EmptyMar 3 Déc 2019 - 13:24


Pantea le surpris dans le bon sens, les mots qu'il avait employés ne reflétaient en rien la pensée qui l'animait sur le moment, changeant ainsi radicalement le sens de sa phrase. Mais la réponse de la jeune affranchie lui plu d'autant plus, lui qui voyait des peuples différents réunis dans un même groupe soudé par une expérience commune il n'en était rien, ils étaient des êtres uniques forgés en un seul peuple, animés par une seule et même volonté, le désir de vivre en paix. Sigvald les voyait sous un nouveau jour, il esquissa un subtil sourire en pensant à cela.

- Je ne peux vous garantir que la négociation se passe tel que nous l'espérons, mes paroles ont un poids dans cette ville autant que mes actes, mais là-bas l'autorité appartient à son régent et je ne peut prétendre connaître son point de vue sur votre situation.

Notre mercenaire savait fort bien que les gens d'Esgaroth avaient une pensée amère et belliqueuse envers le Rhûn, mais ce qu'ils pensaient d'anciens esclaves lui était totalement inconnu. Mais oui, si la situation venait à clairement dégénérer et si par la force des choses il était contraint de choisir un camp, notre elfe serait partagé. Sa propre survie passait depuis des siècles au-dessus de tout, il avait combattu et abandonné un nombre d'anciens camarades tout bonnement impensable, mais aujourd'hui il s'agissait de personnes comme lui, leurs histoires et la sienne lui rappelait son passé, entre eux et sa propre personne la décision était difficile. Son cœur lui dicterait quoi faire le moment venu.

Sigvald avait obtenu sa garantie d'une entrevue avec Roksanâ quand celle-ci serait rétablie, il n'oubliait pas le danger du lac mais la santé de la jeune fille l'important vraiment, certes moins que celle d'Achas. L'état de la sentinelle ne quittait jamais ses pensées, arriveraient il à temps ? Est-ce qu'il vivrait ? Pas une pensée pour Delaynna, il la savait forte. Ces questions sans réponse qu'il devait garder dans un coin de son esprit pour ne pas dévier de sa tâche. Si la négociation n'aboutissait que sur un refus, la créature servit sur un plateau serait alors la clé qui déverrouillerait les portes d'Esgaroth aux affranchis.

- Le rhûnien que vous utilisez n'est guère apprécié, ici. Vous parlez comme un esclavagiste…

La réponse cinglante de Pantea lui apparut comme un coup de massue, lui-même pensait bien faire, ce langage lui était naturellement sortie de la bouche. La langue des esclavagistes, il ne s'était même jamais poser la question quant à l'utilisation de cette langue. Jadis il était cette chose, ce « Sombre Coeur », lui l'utilisait couramment. Il se maudit pour avoir fait ressurgir ce genre de souvenir. La surprise et la déception se lisaient clairement sur son visage.

- Je vous prie de m'excuser, je n'avais aucunement conscience de ce fait.


Suivant la discussion, Pantea lui présenta leur garde du corps. Notre mercenaire détermina par réflexe et d'un œil avisé la meilleure façon de le tuer, évaluant ces aptitudes physique et imaginant potentiellement un combat entre l'individu et lui-même. Amener un homme comme lui, qui pourrait inspirer la crainte se voulait comme avoir Grond au-dessus de leur tête, le moindre petit coup de vent et le résultat  se trouverait être un bain de sang. Sigvald le dévisagea très clairement voyant à la fois la nécessité d'amener celui-ci et le danger passif qu'il représentait à leur entreprise. Puis Pantea et Dame Nevä partirent de leur côté donnant ordres et indications à l'ensemble de l'équipage.

Dans ce brouillard aussi épais les humains naviguaient quasiment à l'aveugle, notre mercenaire se mit à la proue donnant la direction, ses informations étaient relayés par un des affranchis. Les marins de fait dirigeaient le navire avec une certaine aisance et parmi les décombres de l'ancienne cité, le vaisseau de guerre ne frotta qu'à trois reprises un quai ou un monceau de ruines. L'embarcation fut trainée à la suite de l'Âzâdî grâce à un grappin habillement lancé. Au fur et à mesure le brouillard devenait plus épars et le navire s'arrêta là, à la lisière.

Sigvald suivit avec attention la descente sur l'embarcation de son compagnon mortellement blessé, son état le préoccupait au plus au point, le temps pressait. Notre mercenaire pris la tête de la barque, Achas et les deux femmes se tenaient au milieu et l'homme en noir en arrière, féroce chien de garde. Notre elfe ramait avec force sans pour autant se fatiguer, jetant de temps à autre des coups d’œil en arrière, bien que les humains ne voyaient seulement l'horizon, lui voyait déjà Esgaroth. La main posée de Nevä sur Achas n'échappa à l'elfe, s'ensuivit une discussion entre les trois affranchis.Tandis qu'ils échangeaient quelques mots, curieux comme à son habitude notre elfe décryptait les expressions des visages ; ils transpiraient la peur, celle d'un potentiel échec assurément.

La question de Pantea le tira de ses pensées. Ils avaient encore largement le temps de discuter avant leur arriver, Sigvald prévoyait de débarquer près du quai militaire, histoire d'arriver loin des regards indiscret, mais assez visible pour qu'un bruit face son chemin et que les bardes s'empresse de répandre la rumeur du retour des elfes... Sigvald lâcha les rames un court instant pour passer son visage sous l'eau, il s'essuya sans délicatesse sur sa manche et au vu du rouge qui teinta son habit il se rappela l'attaque sur les quais, propre, notre elfe se remit en position et ils filèrent à bonne allure.

- Bien par où commencer ? Voyez Esgaroth comme n'importe quelle cité des hommes désormais, le pouvoir et la richesse prévôt sur le reste. C'est une ville de pêcheur et d'hommes de culture, ils sont rudes, mais assez ouverts d'esprits pour différencier le bon du mauvais . Le Comte a été élu par le peuple ou choisi par le Roi de Dale, la cité souveraine plus au Nord. Si j'en crois ce que j'ai entendu durant mon séjour ici, le pouvoir et la richesse dont jouit le Comte Saule l'ont éloigné des malheurs de son peuple. Le cœur des hommes est aisément corruptible, je ne l'ai pas rencontrer mais il doit être homme arrogant et à ses yeux vous lui serez inférieur. Je n'ai aucune sympathie pour ce genre d'hommes, mais vous devrez rentrer dans ces bonnes grâces j'en ai peur. Je sais que vous ne vous laisserez pas corrompre par ses belles paroles, mais vous devrez rester de marbre et ne montrer aucune animosité. Sinon Esgaroth reste un carrefour pour la culture, sa richesse principale provient principalement de ses artistes, peintres, jongleurs, acteurs, mais principalement de leurs bardes, fort respecter à travers tous les Royaumes de l'Ouest, bien qu'il semble avoir perdu en popularité vis à vis des nobles, le peuple les écoutent toujours avec attention. À notre arrivée ne vous étonnez pas si nous nous faisons escorter et fouiller par la garde de la ville. Sachez que ce qui vous à attaquer sur le navire et ce que je pourchassait à causer malheurs et souffrance pour les habitants de la ville. Les attaques qu'ils ont subies ont fait de nombreux morts et le peuple est rongé par la tristesse et l'inquiétude. Pour certains ces émotions se sont mués en colère envers le Rhûn qu'il juge responsable de tout cela, pour d'autres les superstitions ont pris le dessus, y voyant là l’œuvre de fantômes ou de dragons revenus les hantés. Vous arrivez au même moment que de sombres évènements j'en ai peur, soyez respectueux, coopératif et tout devrait ce dérouler pour le mieux. Je resterais avec vous. Ah, quand nous rencontrerons le Comte veiller à vous inclinez comme je le ferais. D'autres questions ?

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Ryad Assad
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Le venin dans nos veines EmptyDim 29 Déc 2019 - 10:13
Le venin dans nos veines Pantea10   Le venin dans nos veines Nevy10

Sigvald n'avait pas su se montrer particulièrement rassurant auprès de Pantea, ce qui n'était pas pour plaire à la jeune femme au voile. Elle aurait voulu que l'Elfe lui apprît de bonnes nouvelles, que les gens de la cité d'Esgaroth étaient ouverts et accueillants… qu'ils leur offriraient l'asile et le couvert sans hésiter. Une mince lueur d'espoir en ces temps troublés aurait sans aucun doute pu changer l'état d'esprit des Affranchis. Cependant, il semblait que les malheurs qui s'étaient abattus sur la Terre du Milieu n'avaient pas épargné la cité lacustre, et que les rares gens de bien qui habitaient à l'Ouest de l'Anduin n'avaient plus un pouvoir suffisant pour protéger les rescapés de l'Âzâdî. Il faudrait faire face à ce nouveau défi en temps utile, mais pour le moment elles devaient déjà régler leur problème le plus urgent : gagner la cité en échappant à la créature qui rôdait sous le lac.

Ils embarquèrent donc discrètement, couverts par les archers, et prirent la direction d'Esgaroth en contenant leur inquiétude. Pour le moment, les eaux du lac étaient calmes, paisibles… Rien ne venait troubler la tranquillité des lieux, sinon leurs paroles murmurées à voix basse, conversations étouffées par le bruit des rames qui fendaient la surface liquide du Long Lac. Le tout avait quelque chose d'apaisant et d'angoissant à la fois…

Dans ce cauchemar, l'Elfe apparaissait comme leur principale source d'information, et elles étaient donc contraintes de le suivre. Pantea était la seule qui le comprenait sans difficulté lorsqu'il s'exprimait en Commun, et elle était donc la seule à lui adresser la parole directement, tandis que les autres observaient les environs avec anxiété. Seule intermédiaire entre leur guide et ses compagnons, la femme au voile s'efforçait de noter dans un coin de son esprit tout ce que l'Immortel prenait la peine de lui communiquer comme informations. Ainsi donc, le comte Saule qui dirigeait la ville n'était pas un homme de bien, mais plutôt un individu intéressé par l'argent et l'influence. Deux choses dont les Affranchis ne disposaient pas, hélas…

Ils n'auraient même pas pu acheter la nourriture dont ils avaient cruellement besoin pour remplir leurs estomacs depuis trop longtemps rationnés, alors corrompre un homme de pouvoir… Inutile d'y songer.

- Rentrer dans ses bonnes grâces, fit-elle pour elle-même. Je crains que cela soit plus difficile que prévu… Nous devrons trouver une solution pour lui être utile, mais j'ai bien peur que cela mette Dame Nevä dans une position difficile. Elle serait prête à tout pour son peuple, au mépris de sa propre sécurité.

En disant cela, elle avait regardé le bras blessé de Nevä. Cette femme avait tout sacrifié pour la cause des Affranchis, et elle avait bien failli y laisser la vie… plusieurs fois. Pantea s'était prise d'affection pour cette femme de caractère, blessée au plus profond de son âme, mais résolue à mener sa mission à bien. Elle ne souhaitait pas la voir mourir, surtout pas alors qu'ils se trouvaient si près du but. Ils avaient accompli tellement de choses, ils avaient traversé tant de malheurs, et ils s'en étaient sortis ensemble, en restant solidaires et surtout vivants. La mort de Nevä pouvait avoir un effet dévastateur sur le moral des Affranchis et, peut-être plus inquiétant encore, elle pouvait résoudre les plus modérés à se tourner vers l'option militaire. Ils aimaient profondément leur Dame, et se battraient jusqu'à la mort pour venger sa mémoire.

Pantea revint à la conversation lorsqu'elle entendit Sigvald évoquer le fait que les gens d'Esgaroth soupçonnaient les gens de l'Est d'être responsables des attaques. Son regard très expressif trahissait ce que son visage dissimulé ne montrait pas. Une forme d'inquiétude teintée de fatalisme, car cette nouvelle l'accablait sans la surprendre. Évidemment, les gens de l'Ouest craignaient et haïssaient les Orientaux au moins autant que l'inverse était vrai. La méfiance réciproque entre les deux peuples ne datait pas d'hier, et il était bien naturel pour le peuple d'Esgaroth de blâmer ses sinistres voisins. Cependant, cela ne faisait pas les affaires des Affranchis. Un nouvel obstacle se dressait face à eux, qu'ils devraient surmonter.

- Nous arrivons au pire moment, de toute évidence… J'ai bien peur que votre présence ne suffise pas à nous garantir une arrivée paisible, mais nous n'avons d'autre choix que d'espérer. L'avenir nous dira si nous avons eu raison de vous faire confiance.

La femme n'ajouta rien, mais son ton laissait entendre qu'elle n'était guère optimiste. Elle comprenait parfaitement les enjeux de cette première rencontre, et les conseils de Sigvald, pour utiles qu'ils fussent, ne lui donnaient guère de perspectives réjouissantes. Elle se tourna vers ses compagnons pour leur expliquer de quoi il retournait, laissant l'Elfe seul avec ses pensées.


~ ~ ~ ~


Malgré la crainte que leur inspirait la chose qui sommeillait sous le lac, ils parvinrent à rallier Esgaroth sans encombres, mais pas sans quelques frayeurs. Le silence glaçant les terrifiait, et ils avaient l'impression terrible d'être observés par ce « quelque chose » tapi dans l'ombre qui les menaçait. Toutefois, si des yeux étaient posés sur eux alors qu'ils glissaient silencieusement sur les flots, leur adversaire mystérieux n'osa pas se montrer. Peut-être avait-il été blessé par Roksanâ, et pansait-il ses blessures en ce moment. Ils s'étaient raccrochés à cet espoir, fébriles comme des marins perdus au milieu de la grande mer par une nuit tempétueuse, jusqu'à voir enfin les lueurs rassurantes de la ville.

Sigvald les leur indiqua, et Pantea se redressa pour mieux les observer. La silhouette de quelques maisons se dessina à travers la brume qui semblait déjà se dissiper, et bientôt elle vit quelques lumières qui déambulaient, probablement des hommes portant des torches sur les quais. Pour les Rhûnedain, la vision d'Esgaroth était proprement spectaculaire, et ils restèrent un moment étonnés de cette architecture si particulière. La ville était tout simplement construite sur l'eau, et ses bâtisses étaient suspendues sur des piliers de bois ou de pierre qui s'enfonçaient dans les flots. On circulait dans les rues par bateau, et la ville était protégée par une sorte de petit rempart défensif garni de tours et de gardes. L'Elfe ne tenait pas à les faire entrer incognito dans la cité, car il se signala rapidement aux hommes en faction, lesquels semblèrent s'agiter en les voyant.

Des paroles furent échangées dans un Commun un peu étrange que Pantea avait du mal à comprendre. Elle nota cependant que Sigvald avait révélé leur présence, les présentant comme des « invités », ou des « visiteurs », elle ne savait pas trop quel mot il avait utilisé pour les présenter. Nevä, inquiète malgré son visage grave, gardait l'œil alerte, et leur garde du corps masqué avait porté la main à son arme en essayant de cacher sa nervosité. Ils avaient tous l'impression de se jeter dans la gueule du loup, guidés dans les griffes de leur ennemi ancestral par une créature surnaturelle qui hantait leurs cauchemars depuis leur plus tendre enfance.

Quelle folie étaient-ils en train de commettre ?

Ils franchirent une grande arche de pierre qui ressemblait à s'y méprendre à une grande porte, et furent accueillis par des gardes armés qui les dévisageaient sans douceur. Une forme de haine se lisait dans leurs regards, même si aucun d'entre eux n'avait encore dégainé l'épée. Certains quittèrent leur poste, choisissant de marcher sur les quais de bois qui serpentaient entre les maisons, escortant virtuellement la frêle embarcation qui s'enfonçait dans la cité lacustre. Sigvald les immobilisa finalement, et mit pied à terre. Immédiatement, une demi-douzaine de soldats l'encadrèrent, et commencèrent à l'interroger au sujet des étrangers. Une longue conversation s'en suivit, mais Pantea était bien incapable de tout traduire. Ils parlaient vite, avec un rude accent, et certains des mots qu'ils employaient lui échappaient tout simplement. L'Elfe, quant à lui, paraissait ne pas avoir de mal à s'adapter et à leur répondre de telle sorte que la conversation semblait fluide.

Pendant ce temps, les trois Rhûnedain demeuraient assis, attendant patiemment que l'on décidât de leur sort.

- Ils n'ont pas l'air heureux de nous voir, fit leur homme masqué.

- Non, répondit Nevä. Mais ce n'est pas une surprise. Restons calmes, et bien disposés. Nous ne sommes pas en position de force, j'en ai peur.


~ ~ ~ ~


Sigvald avait réussi à convaincre les gardes de le laisser pénétrer dans la cité, ce qui n'était pas un mince exploit, mais les Miliciens ne semblaient pas vouloir le laisser aller plus loin. Ils l'avaient écouté car ils savaient que l'Elfe était un envoyé d'Angrod qui travaillait avec le capitaine Syla, mais ils n'accepteraient pas pour autant que des émissaires du Rhûn fussent autorisés à circuler librement dans les rues de leur cité. Leur réaction donnait le ton, et ils ne se préoccupaient pas de connaître les détails de la situation : tout ce qui leur importait était de gérer le cas de trois intrus qu'ils assimilaient à des criminels en puissance. Ils étaient tellement focalisés sur eux qu'ils n'avaient pas noté la présence d'une quatrième silhouette à bord, celle d'Achas l'archer qui était inconscient, entre la vie et la mort. Chaque seconde était comptée, pourtant la conversation ne semblait pas s'orienter vers le bien-être de l'Elfe. Seul importait le cas des étrangers. Le vétéran parmi les Miliciens, qui répondait au nom de Sirrin, était particulièrement intraitable sur ce point :

- J'ai beaucoup de respect pour les Elfes, mais aucun pour ces sales chiens orientaux. Si vous n'aviez pas été là, j'aurais ordonné qu'on les abatte sur place, alors estimez-vous heureux que j'aie laissé rentrer ces misérables ici.

Il marqua une pause, et ajouta sur un ton où pointait une forme de déception :

- Je pensais que vous nous ameniez les coupables, pour une exécution ou quelque chose de ce genre, et j'ai déjà fait quérir nos supérieurs pour leur annoncer la bonne nouvelle… La diplomatie n'est pas mon affaire, et je n'ai pas l'intention de mener ces trois-là auprès du comte. Qui sait quelle sorcellerie ils portent en eux ?

Il était évident qu'il croyait dur comme fer dans les pouvoirs obscurs que l'on prêtait aux hommes de l'Est, et en posant le regard sur ces trois individus, son impression se renforçait. Une femme au visage tatoué comme si elle était adepte des arts mystiques, et deux individus dont le visage était partiellement ou totalement dissimulé. Qui se cachait ainsi, sinon ceux qui avaient quelque chose à se reprocher ? Accompagnant ses paroles d'un geste de la main, il gronda :

- Gardes, désarmez-les, et arrêtez ces meurtriers.

Les Rhûnedain ne parlaient pas la langue des gens du lac, mais ils comprenaient parfaitement les intonations, les jeux de regard et les attitudes. Sitôt que l'ordre fut donné, le garde du corps se plaça entre les Miliciens et les deux femmes, faisant tanguer la barque sur laquelle ils se trouvaient tous les trois. Il avait porté la main à son arme, et son visage masqué ne trahissait pas la nature de ses intentions. Il n'entendait pas se constituer prisonnier sans résister.

La tension était montée d'un cran. Les gens du lac étaient particulièrement tendus, et leur inexpérience les rendait dangereux. A tout moment, ils pouvaient paniquer et faire un geste brusque qui déclencherait les hostilités. Le premier qui sortirait son arme aurait perdu, et si le sang coulait aujourd'hui, les relations entre les Affranchis et le peuple d'Esgaroth seraient perpétuellement dégradées. Sigvald devait faire preuve de tact et de diplomatie pour apaiser les deux parties, mais pouvait-il réellement

Sirrin reprit :

- Maître Elfe, dites à vos amis de déposer les armes et de s'agenouiller sans résister, faute de quoi je n'aurai d'autre choix que de demander à mes gardes de les éliminer…


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Le venin dans nos veines EmptyDim 19 Jan 2020 - 23:07


Du navire à Esgaroth, la navigation sur ce maudit Lac se déroula dans un profond calme masquant une tension grandissante quand à leur futur très proche. Sigvald lui-même sentit une pointe d'inquiétude quant au bon dérouler des choses, mais la douce brise du vent sur son visage l'apaisa tout aussi vite. Tandis que la délégation parlait dans son langage qu'il ne saisissait pas encore, notre elfe s'efforçait de contenir sa peur de devoir endurer la responsabilité d'un nouveau massacre si les choses viraient à la catastrophe. Notre elfe avait l'impression d'avoir vécu de nombreuses vies distinct pourtant réunies dans une seule et immortel vie, sa jeunesse et cette idée farfelue de quitter Vertbois pour parcourir les côtes d'Arda, sa vie en tant que bourreau et serviteur de Melkor sans oublier Sauron, sa longue remonter de pente en tant que mercenaire au Harad secoué par de multiples échecs et tueries de nouveau, jusqu'à ce moment présent où tout semble s'arranger... Sigvald ne comprenait toujours pas pourquoi il n'était toujours pas mort ni pourquoi le destin s'acharnait à le guider vers ce qui semble à chaque fois un espoir de s'en sortir pour le précipiter vers un nouvel échec.

Il prit une profonde inspiration, encore un peu perdu par ses pensées négatives. Laissant de côté la créature tapis dans l'ombre pour s'attaquer à une épreuve d'autant plus difficile à ses yeux.

- Nous sommes arrivés.


* ~ ~ *~* ~ ~ *


Alors que notre elfe menait l'embarcation droit vers les quais, passant sous la grande arche du port fortifié, la garde se mit à le suivre d'un œil curieux avant de comprendre ce qu'ils avaient réellement sous les yeux. Des Orientaux et un elfe.

- Je suis le représentant du Seigneur Angrod de Vertbois-le-Grand, je demande audience auprès de votre Seigneur le Comte Saule.

Son ton se voulait serain et un mouillage lui fut indiqué. Leur escorte armée leur fit un accueil des plus froids, tous réunis autour de la barque qui se balançait encore mollement au rythme des remous. Il était un piètre diplomate quand on connaît son passé, ses paroles et ses convictions s'imposaient par le sang versé de ses adversaires non pas par des mots habilement prononcés au bon moment.

- Je demande audience auprès du Comte Saule pour une affaire des plus importantes. Cette délégation son mes invités. Et j'ai d'importantes nouvelles pour le Capitaine Syla.

La troupe qui les entourait recula et seul notre elfe mit pieds à terre. Pour Sigvald la tension que dégageait la milice et leur haine envers ses nouveaux venue était quasi palpable et pesante. Le moindre faux pas et ce serait un bain de sang comme il en avait que trop souvent vu. D'un œil avisé et d'une ouïe affûté par l'expérience il voyait les mains se crisper sur les manches d'armes, le bruit crissant des gants en cuir d'un homme qui serre les poings, la respiration plus intenses que normale d'un autre. Chacun évaluant le potentiel danger que représentait l'autre dans une atmosphère à couteau tiré.

Sigvald du jouer d'une grande patiente et d'un contrôle de soi digne d'un nain devant une bière qu'il ne doit pas boire. Ecoutez ce garde vociférer et aboyer tout en démontrant sa totale ignorance du monde dans lequel il vit fut un véritable supplice pour notre elfe. Sigvald fixait droit dans les yeux le milicien sans discontinuer, s'ils étaient en un autre Âge il les lui aurait crevés pour ne plus entendre sa voix puis lui aurait arraché la langue pour ne plus entendre ses cris pour finir par tout bonnement le décapiter. A la fin de ce monologue de pure démonstration de force sur les autres miliciens, Sigvald avait clairement compris que celui-ci se prenait pour le chef de la troupe alors qu'il n'était qu'à ses yeux qu'un garde parmi les gardes. L'ignorance des hommes et leur peur si primaire...

- Gardes, désarmez-les, et arrêtez ces meurtriers.

Sigvald ne réagit que trop tard et le garde du corps des deux jeunes femmes s'interposa prenant de cours notre elfe. Bien que sur la vacillante barque l'homme en noir était en position prêt à défendre les deux femmes. Comme pour se parler à lui-même et pour faire écho à ses propres expériences d'antan aussi marquantes sois tel, un sentiment de colère non dissimulée visant tout le monde s'entendait clairement dans sa voix lasse.

- Revivre ce même instant encore et encore... NHUTA ! D'un quenya qui se voulait autoritaire il s'interposa à son tour entre la petite délégation et la milice. Arrêtez ! Cela suffit !


- Maître Elfe, dites à vos amis de déposer les armes et de s'agenouiller sans résister, faute de quoi je n'aurai d'autre choix que de demander à mes gardes de les éliminer…


- Posez -- Arme -- Calme.
Se retournant doucement vers le garde du corps il lui intima de poser les armes tout en parlant avec un Rhûnien très basique et brut.

Alors que derrière lui s'élevait avec une crainte perceptible le langage qu'il ne comprenait pas, il entendit l'arme de l'homme en noir être lancer sur le bois du quai dans un bruit sourd. Il souffla rassurer, notre elfe gonfla le torse et domina de toute sa hauteur l'homme qui l'insupportait tellement.

- Je ne veut aucune effusion de sang. Maintenant que je peux m'exprimer librement... Son ton restait solennel, mais devint assez rude pour donner l'impression que Sigvald était le supérieur du milicien et que celui-ci se faisait retrousser les manches après une bavure. Je vous présente ces chiens d'Orientaux comme vous le décriviez si bien. Ils se sont libéré du monde d'esclavage qu'était leur vie auparavant et sont partis à l'Ouest dans l'espoir de trouver un refuge dans les Royaumes de Bien. Si vous l'ignorez ces marques sur leur corps sont les signes de passage d'un maître à un autre, d'une erreur commise ou d'un refus de se soumettre. Permettez-moi de vous présenter Dame Nevä, cheffe du peuple des « Affranchis » d'où ma demande d'audience avec le Comte Saule. Deuxième point j'ai des nouvelles concernant les tristes évènements du Lac, mes invités se sont aussi fait attaquer sur le lac, je tiens une piste d'importance et je pense même savoir à quoi nous avons affaire, pour cela il me faut voir le Capitaine Syla. Troisièmement je veux que sur le champ vous alliez sortir du lit votre meilleur guérisseur et que vous me rameniez la femme elfe avec qui je suis venu. Au cas où vous ne l'auriez pas remarquer nous avons un elfe gravement blessé dans l'embarcation à moins que votre colère infondée ne vous est rendu aveugle. Où préfèreriez-vous nous mettre au arrêts auquel cas je devrais expliquer à mon Seigneur et de fait le Roi Gudmund que la cité d'Esgaroth refuse l'hospitalité à ses alliés et les laisse mourir à sa porte. La décision est vôtre peuple de Bard.

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Ryad Assad
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Le venin dans nos veines EmptyMer 22 Jan 2020 - 14:00
Le venin dans nos veines Pantea10   Le venin dans nos veines Nevy10

« Posez… Arme… Calme… »

Trois mots simples, qui venaient pourtant peut-être d'éviter une guerre. Nevä et Pantea se concertèrent rapidement du regard, pour déterminer quelle devait être la marche à suivre. Elles savaient qu'elles ne seraient pas reçues comme des invitées de marque à Esgaroth, malgré toute leur bonne volonté. Elles étaient originaires d'un royaume qui depuis des siècles faisait planer l'ombre d'une sinistre menace sur l'Ouest, et les vieilles rancœurs pouvaient être tenaces. Elles-même n'auraient-elle pas repoussé l'Elfe qui essayait désormais de leur sauver la vie, si elle n'avait pas eu besoin de lui ?

Ce fut Nevä qui, finalement, prit la décision.

++ Faites ce qu'il dit ++ Souffla-t-elle sur un ton qu'elle voulait apaisant. ++ Nous ne sommes pas venus pour chercher querelle avec les gens d'ici. ++

Elle espérait que, ce faisant, les tensions allaient s'apaiser et qu'elles obtiendraient le droit de parler au puissant seigneur des lieux. Ses idéaux de paix et d'amitié fraternelle n'étaient peut-être que chimère, mais elle avait réussi à mener les Affranchis jusqu'ici en se fiant à ses convictions, et elle ne voulait pas les trahir si près du but. Pas après avoir tant sacrifié…

Leur garde du corps laissa donc tomber son arme, visiblement mal à l'aise. Il se retourna vers elles, et leur glissa :

++ J'espère que vous savez ce que vous faites… ++

Nevä n'avait plus la main sur la situation, et elle désigna l'Elfe du menton. Il était le seul, désormais, à pouvoir éviter la guerre.



~ ~ ~ ~



En tant qu'ambassadeur du seigneur Angrod de Vertbois, Sigvald jouissait d'une autorité particulière dans la cité. Il avait un statut particulier, et il n'était pas facile de lui tenir tête de manière frontale. Pour autant, les Miliciens ne voulaient pas lui faire trop de faveurs, et leur ressentiment vis-à-vis des Elfes transparaissait à travers leur attitude. Pour eux, les Eldar étaient des alliés opportunistes qui ne les aidaient que lorsqu'ils y trouvaient un avantage. Ils avaient quémandé l'assistance elfique plusieurs fois durant la crise du Rude Hiver, mais leurs demandes n'avaient pas été entendues.

Ou pire, on les avait ignorés.

Les Premiers-Nés avaient perdu une partie du prestige qui les entourait jadis, lorsqu'on voyait leurs fiers oriflammes flotter dans les vastes plaines du Rhovanion, et qu'ils marchaient aux côtés des Hommes et des Nains quand le danger se faisait pressentir. Aujourd'hui, les Elfes étaient bien rares à arpenter la Terre du Milieu, et les gens d'ici étaient las de courber l'échine devant ces créatures qu'ils considéraient comme hautaines et peu fiables.

« Pourquoi s'humilier devant ceux qui nous abandonnent ? » Demandait le peuple.

Les rares amis des Elfes avaient aujourd'hui du mal à justifier le maintien des anciennes alliances. Sigvald était donc sans le savoir victime d'un problème qui le dépassait, mais qui le concernait au premier chef puisqu'il appartenait au même peuple que ceux que les gens du Lac critiquaient. La posture de Sirrin trahit immédiatement le conflit interne qui le déchira lorsqu'il entendit l'Elfe lui parler comme s'il était un vulgaire serviteur. D'un côté, il était obligé de reconnaître qu'il ne faisait pas le poids face à un ambassadeur, mais de l'autre il mourait d'envie de montrer à cet inconnu qu'il ne fallait pas mépriser le peuple d'Esgaroth. La tirade de Sigvald était efficace, et suffit à instiller un doute profond chez les hommes de la troupe, qui se regardèrent sans trop savoir quoi faire, attendant l'avis de leur chef.

Celui-ci garda le silence pendant un moment, avant de régler les problèmes dans l'ordre de priorité.

- Occupez-vous du blessé, transportez-le immédiatement auprès des meilleurs guérisseurs de la ville.

Deux hommes descendirent dans l'embarcation pour s'occuper d'Achas, et convinrent rapidement qu'il était plus prudent de ne pas déplacer le blessé pour le moment : il aurait été imprudent d'essayer de le faire serpenter entre les habitations d'Esgaroth sur un brancard, au risque de trébucher ou de ré-ouvrir sa blessure qui semblait pour l'heure être stabilisée. Ils invitèrent donc les trois Rhûnedain à débarquer sur le quai pour conduire l'esquif plus loin dans la ville, là où ils pourraient essayer de trouver de l'aide, notamment celle de la femme Elfe dont Sigvald leur avait parlé. La présence des trois Orientaux aux côtés des gens d'Esgaroth fit monter légèrement la tension. Une femme tatouée, une femme voilée et un homme masqué… Le malaise des Miliciens ne voulait pas disparaître, et ils dévisageaient les nouveaux venus comme s'il s'agissait d'une toute autre espèce, des créatures jamais vues jusqu'à présent.

Il fallait dire que ces hommes n'avaient presque aucune notion fine de politique. Pour eux, des Orientaux étaient des Orientaux, et ils ne voyaient aucune différence entre les régiments organisés de la reine Lyra, qui avaient pris position à l'est de Dale, et les Affranchis qui venaient quémander de l'aide sur le pas de leur porte. Ces tatouages n'avaient aucune signification pour eux, sinon celle de la guerre et de la violence. Sirrin s'étonna d'ailleurs de savoir qu'il s'agissait de marques de punitions, car la femme que Sigvald présenta comme étant Nevä en collectionnait un grand nombre. Avait-elle tant désobéi qu'il avait fallu la marquer de manière répétée ? Le processus semblait douloureux, et s'il s'agissait de marques d'infamie, arborer autant de symboles devait véritablement être humiliant.

Sirrin ne voulait cependant pas se laisser attendrir par un joli récit qui pouvait aussi bien avoir été monté de toute pièce pour le convaincre. Il préférait se montrer méfiant, et maintenir une apparence froide et dure, afin que les nouveaux arrivants en ville ne pussent jamais dire que la Milice d'Esgaroth était composée d'amateurs et de laxistes. Il tenait à la réputation de son corps d'armée.

- Sire, finit par répondre le vétéran, je ne vois aucune objection à ce que vous obteniez une audience auprès du comte. Ce n'est pas à moi de vous la refuser. Cependant, vos invités me paraissent suspects, et je refuse qu'il entrent dans le Castel sans avoir reçu une autorisation de mes supérieurs. Je me vois donc dans l'obligation de les mettre aux arrêts sur-le-champ…

- Pas si vite !

Tous les présents tournèrent la tête dans un bel ensemble vers le duo qui venait d'approcher. Deux hommes cuirassés portant la lance et l'épée, ainsi qu'un casque raffiné aux paragnathides renforcées. Leur équipement tranchait avec celui des Miliciens, et il était facile de deviner qu'il s'agissait des hommes de Toras, le Conseiller Martial. Une sorte de garde personnelle du comte, dont l'allégeance semblait aller davantage à l'argent qu'à la cause du peuple d'Esgaroth. Celui qui avait parlé semblait assez jeune, mais il dégageait une grande confiance en lui, et il s'approcha de Sirrin – qui pourtant était plus âgé – sans paraître éprouver la moindre crainte ou le moindre respect :

- Nous sommes venus car nous avons été informés de l'arrivée d'étrangers dans la cité, mais nous ignorions qu'ils étaient guidés par l'ambassadeur de Vertbois… Cela change considérablement la situation, ne croyez-vous pas, Miliciens ?

Sigvald n'était arrivé que depuis peu. Ces hommes avaient-ils donc des yeux et des oreilles partout pour réagir aussi rapidement ? Sirrin semblait se poser la même question, mais il se mordit l'intérieur des joues pour ne pas exploser, et répondit sèchement :

- Cette affaire est entre les mains de la Milice, je pense que nous pouvons gérer sans votre aide.

- Au contraire, répondit l'autre, j'ai l'impression que nous arrivons à temps. Ambassadeur, je me présente, je suis Erling, à votre service. Vos invités ne sont certes pas habituels, et arrivent dans des circonstances particulières, mais je suis persuadé que le comte Saule aurait grand intérêt à les recevoir.

Les Miliciens, qui étaient un peu plus nombreux, n'appréciaient pas de voir les troupes de Toras prendre le contrôle de la situation. Sirrin ne voulait pas créer un incident diplomatique sur-le-champ, mais il sentait que s'il n'intervenait pas maintenant, il ne pourrait plus jamais rien dire. Alors, prenant sur lui d'affronter le courroux de Toras, il s'interposa et répondit :

- Je crois que vous n'avez pas compris, Erling, quand je vous disais que cette affaire était entre les mains de la Milice. Ces étrangers ne verront pas l'ombre du Castel avant que l'ordre ne me soit parvenu de la part du comte ou de ses officiers. Je n'introduirai pas de sauvages orientaux au cœur de nos défenses avant de m'être assuré qu'ils ne représentent aucun danger, et que toutes les mesures auront été prises pour les empêcher de nuire.

Montrant les dents, il ajouta :

- Et maintenant retournez à vos affaires, quelles qu'elles soient. Nous avons un vrai travail à accomplir, et vous nous retardez.

Erling pâlit de rage, mais ne trouva rien à répondre. L'expérience l'emportait sur l'arrogance cette fois-ci, et il devait bien admettre qu'il ne faisait pas le poids face aux quatre Miliciens déterminés à ne pas céder un pouce de terrain. Leurs veines étaient gonflées de colère, et en disaient long sur l'animosité entre les deux groupes. Décidément, Esgaroth était loin d'être unifiée. Erling aurait pu finir par tourner les talons, vexé d'avoir été mouché ainsi, mais il lui restait encore une carte à jouer. Sigvald, en sa qualité d'ambassadeur, pouvait faire pencher la balance d'un côté ou de l'autre.

- Désolé que vous ayez dû assister à cette scène, Ambassadeur, siffla-t-il. Comme vous le voyez, la diplomatie n'est pas une qualité que l'on retrouve partout à Esgaroth. Laissez-nous vous conduire auprès du comte, et vous faire un accueil bien plus digne de notre peuple.

Sirrin ne pouvait rien dire, mais son regard était si expressif que les mots n'étaient pas nécessaires. Il était outré, contrarié, et en même temps résigné. L'influence des hommes de Toras était grandissante dans la cité, et lui-même n'était qu'un Milicien parmi d'autres, moins important que le capitaine Syla ou le sergent Hadden. Certes, il manquait de diplomatie, il était peut-être borné et clairement xénophobe, mais son ignorance ne signifiait pas qu'il était sans honneur et sans valeurs. Il se battait pour ce qu'il croyait juste, même si cela signifiait qu'il devait être une épine dans le pied de Sigvald pour le moment. Essayant d'obtenir gain de cause auprès de l'Elfe, il ajouta :

- Sire, je serai inflexible quant au fait de maintenir ces étrangers loin du Castel pour l'heure… Cependant, si vous vous portez garant de leur comportement, je peux leur épargner les geôles de la cité. Ils ont l'air affamés et épuisés : je suis sûr que nous pouvons leur trouver une place au chaud dans les baraquements de la Milice. Ils y seront sous bonne garde, mais dans des conditions tout à fait acceptables. Les mêmes que les nôtres, en vérité.

Ce petit compromis n'était pas anodin de la part d'un homme qui nourrissait une méfiance – pour ne pas dire une haine – vis-à-vis des gens de l'Est. Il craignait les esclavagistes et les soldats masqués que l'on voyait parfois surgir. On racontait mille histoires de leurs déprédations, et les légendes du passé relataient leur alliance avec les grands ennemis des Peuples Libres. Cependant, maintenant qu'il voyait ces trois voyageurs égarés qui semblaient bien frêles, il lui semblait difficile d'imaginer qu'ils pourraient renverser l'ordre à Esgaroth. Il ne relâcherait pas sa vigilance, mais un peu de gruau et d'hydromel ne leur ferait pas de mal.

Et puis, si l'Elfe disait vrai, alors ces étrangers avaient grand besoin de leur aide.

Sigvald pouvait décider librement sur qui s'appuyer pour la suite, mais les conséquences de son choix ne seraient sans doute pas anodines. A Esgaroth, il devait choisir ses alliés avec soin…[/b]


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Le venin dans nos veines EmptyMer 12 Fév 2020 - 22:42


Avec une moue passablement agacée le vétéran ordonna que ses hommes s'occupent enfin de la sentinelle gravement blessée qu'était Achas. Vis-à-vis du « blessé » Sigvald ne voyait pas comment le désigné autrement, il est vrai qu'il s'était plus ou moins attaché à lui, il ne le considérait clairement pas comme un ami et étrangement pas non plus comme un fardeau, compagnon d'armes peut-être et encore. Quoi qu'il en soit voir les deux hommes s'occuper d'Achas le soulagea terriblement, à la fois parce qu'il le savait en de meilleures mains que les siennes et aussi car il se déchargeait de la responsabilité d'avoir sa potentielle mort sur la conscience.

Le quatuor était toujours entouré par les gardes, au moindre faux pas de la part de chacun des partis et le sang couleraient indubitablement. Alors que le vétéran semblait prendre à mesure conscience de l'incongrue de la situation, Sigvald se rendit compte du ton plutôt sec et supérieur avec lequel il avait parlé précédemment, Il ne s'en ferait pas excuser pour autant, ce qui est fait est fait, mais il se jura pour le moment d'essayer de moins tenir compte du fait que les humains ne sont que de simples humains et de fait les reconnaître avec un peu plus d'importance qu'ils devraient en avoir.

L'on aurait dit une mise en scène parfaitement exécuté, alors que la situation s'enlisait vers un conflit inévitable. Sigvald perçut au loin et se rapprochant de lourds bruits de pas avant même de devoir tourner la tête pour s'apercevoir que la richesse et l'importance des nouveaux venus contrastaient terriblement avec les hommes de la milice planter autour de lui. Les hommes de Toras ? Il ne pouvait le savoir, mais seulement le supposé. Au moins à Esgaroth les nouvelles allaient presque aussi vite que le vent, sitôt le pied poser dans la cité que les oreilles du Comte étaient déjà au courant de leur présence. S'ensuivit une joute verbale entre le vieux milicien et l'un des hommes nouvellement venu. Le jeune homme qui accordait autant de respect au vétéran qu'il en aurait pour un chien galeux stupéfia Sigvald par son assurance et par sa crédulité de croire que l'argent et le pouvoir pouvaient l'emporter sur le bon sens. Après une discussion respectueuse qui se voulait plus comme une querelle entre deux chiens de guerre, Sigvald conclu que « l'appui » de la milice et donc celle du peuple lui était plus favorable que cet Erling aux airs de petit seigneur, sans toutefois contrarier ce dernier et se mettre le Comte Saule à dos. Il s'adressa aux deux hommes à la fois.

- Bien messieurs si vous ni voyez aucun inconvénients je vais suivre vos deux propositions, le protocole est ce qu'il est. Je vais vous suivre Erling afin de porter les nouvelles que j'ai nouvellement acquises sur les agissements sur le Lac ainsi que demander une audience officielle pour mes invités en qui j'ai pleinement confiance. Quant à la délégation des Affranchis nul besoin de sortir du cadre, la Milice à généreusement proposer de les maintenir sous sa protection le temps qu'il faudrait, le maintien de l'intégrité d'Esgaroth est maintenu et celle de la délégation l'est tout autant. Cependant je ne suis pas leur voix, ni leur pensées, Dame Nevä cet arrangement vous convient-il ? Vous pourriez en apprendre plus sur la cité et le royaume dans lequel vous avez posé pieds, le temps que je fasse le nécessaire pour arranger votre situation.



Sigvald savait Dame Nevä intelligente et son regard affirmé le réconforta dans sa vision des choses. Nul besoin de se mettre à dos la garde du Comte ni la milice. Notre elfe se rapprocha du vétéran dont il n'avait plus aucune animosité envers sa personne, celle-ci venait d'être balayé par le venue de cet arrogant Erling. Il parla assez fort pour que ses mots parviennent aux oreilles de Pantea et ne sois qu'un murmure difficilement audible à ceux des gardes du Comte.

- S'ils vous suivent traités les avec respect, je sais ce que peuvent penser certains de vos hommes. Mais ils ont vécu l'enfer de l'esclavage, leur vie n'a été que souffrance quotidienne. Montrez leur que le noble peuple qui a rebattit cette cité n'a rien perdu de sa superbe. Vous avez toute ma confiance et par pitié appelez-moi Sigvald, plus de Maître ou de Sire, juste Sigvald.

Notre elfe n'avait jamais aimé qu'ont le mettes sur un piédestal, il ne souhaite qu'être un simple être vivant parmi la multitude et rien de plus, si seulement aux yeux des mortels un elfe n'était pas juste une créature qui leur était supérieure... Et ce mot « maître » lui faisait horreur au plus au point, lui renvoyait sans cesse à sa propre servitude et à celui qui fût son maître jadis. Les seuls titres d'importance qu'on lui avait donnée par le passé ne lui rappelait que trop bien les conséquences terribles de ses agissements d'alors et le sang indélébile qui tâcherait ses mains jusqu'à la fin des temps.

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Ryad Assad
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Le venin dans nos veines EmptyDim 23 Fév 2020 - 0:42
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Erling n'était de toute évidence pas ravi de l'arrangement qui venait d'être conclu, mais il ne pouvait pas se permettre de perdre la face plus qu'il ne l'avait déjà fait. Il obéissait au comte, et il tirait son autorité de ce dernier, mais la Milice continuait à jouir d'un certain prestige à Esgaroth. S'opposer directement à l'un d'entre eux aurait été mauvais pour l'image de Saule, et ce dernier tenait absolument à préserver les apparences. Le soldat fronça les sourcils, mais afficha bientôt une mine affable, comme s'il avait obtenu exactement ce qu'il voulait.

En réalité, il n'était pas loin d'y être parvenu.

Saule avait donné des consignes particulièrement claires à ses hommes : surveiller les allées et venues des trois Elfes qui avaient pénétré en ville, et s'assurer qu'ils feraient ce pour quoi ils étaient là – à savoir résoudre le mystère du lac – sans nuire aux affaires comtales. Erling avait appris la disparition des deux guerriers dans la nuit, et il avait patrouillé en pensant bien les voir revenir avant les premières lueurs du jour. Il ne s'était pas trompé, et il avait attrapé les deux conspirateurs, même s'il ne s'attendait pas à voir dans quel état ils rentreraient.

Le comte aurait probablement préféré régler cette affaire en toute discrétion, pour éviter d'inquiéter le peuple davantage en leur présentant un Elfe à la jambe sectionnée, et un trio d'Orientaux pour le moins singulier. Les trois nouveaux arrivants étaient effrayants, et correspondaient tout à fait à l'image que la plèbe se faisait de sorciers capables d'envoyer des navires par le fond. Saule aurait probablement enfermé ces trois individus dans un cachot souterrain, et il se serait arrangé pour maintenir le peuple dans l'ignorance de ces secrets.

La dernière chose qu'il voulait, c'était de voir Esgaroth entrer en guerre contre une horde de Rhûnedain acharnés, ce qui l'aurait obligé à assumer des fonctions de commandement militaires qu'il ne possédait pas.

De l'autre côté, Sirrin semblait également soulagé de voir que Sigvald se montrait raisonnable. Ce fut d'ailleurs lui qui prit la parole pour remercier l'Elfe d'avoir su montrer compréhensif :

- La Milice se fera un devoir de veiller à leur sécurité, autant qu'à celle des habitants de la ville. Nous n'aimons pas les gens de l'Est, mais puisque vous leur faites confiance, maître Elfe, nous nous assurerons de les traiter humainement.

C'était le meilleur arrangement auquel il était possible d'arriver, pourtant Sigvald voulait donner la parole à celle qui semblait commander le trio. Une femme au visage couvert de tatouages, qui suivait les échanges sans paraître rien y comprendre, mais avec un regard qui en disait long sur son degré de concentration. Quand l'Elfe lui confia la liberté de décider de son sort, ce fut Pantea qui lui fit la traduction à voix basse. Nevä hocha la tête à plusieurs reprises, avant de répondre, ce que la femme au voile prit la peine de traduire :

- Dame Nevä accepte vos conditions, et elle vous remercie de votre hospitalité. Elle tient à rappeler que notre peuple est pacifique, et que nous ne cherchons nullement le conflit.

Une précision bien inutile, car les hommes ici présents se fichaient éperdument des motivations des étrangers. Leurs convictions personnelles n'entraient pas en ligne de compte : seul le comte Saule déciderait de leur sort, et jugerait qu'il s'était opportun ou non de les laisser vivre. La guerre, ils la portaient en eux comme une marque de plus inscrite dans leur chair : leur origine orientale transparaissait dans leurs vêtements, dans la rude langue qu'ils parlaient entre eux quand ils échangeaient quelques paroles à voix basse. C'était plus qu'il n'en fallait pour susciter la méfiance des gens d'Esgaroth, malmenés par le Rude Hiver, mis à genoux par les disparitions sur le lac, et désormais prompts à croire dans les rumeurs de sorcellerie orientale.

La bonne foi n'avait que peu de valeur, ici.

Il fut donc entendu que Nevä et ses compagnons iraient avec Sirrin, pendant que Sigvald se rendrait au Castel pour s'y entretenir avec le comte Saule. L'Elfe jugea cependant prudent d'adresser quelques paroles au soldat de la Milice, afin de le sensibiliser davantage à la cause des Rhûnedain. Ce n'était pas une posture que l'on attendait habituellement de la part d'un Premier Né, et cela incita Sirrin à écouter avec attention. Il jeta un regard surpris vers ce trio étrange.

Des esclaves ?

On entendait souvent des rumeurs de personnes qui disparaissaient, capturées pour être ensuite vendus sur les marchés de Vieille-Tombe ou des autres villes du Rhûn que les gens d'ici ne connaissaient même pas. Les femmes étaient particulièrement vulnérables, car fort recherchées par les Orientaux que l'on disait entretenir des harems et des bordels où ces infortunées prisonnières étaient soumises à tous les vices des hommes de l'Est. Sirrin en avait conçu une haine sans limite pour ces marchands d'humains qui sillonnaient les terres sauvages et s'en prenaient sans vergogne aux caravanes isolées, laissant dans leur sillage la désolation la plus totale.

C'était bien la première fois, cependant, qu'il avait connaissance d'esclaves ayant fait le trajet inverse. Échappés des geôles où elles pourrissaient, ces deux femmes et leur compagnon masqué avaient vraisemblablement traversé des épreuves innommables pour arriver jusqu'ici, et le vétéran en conçut un respect nouveau pour ces voyageurs perdus et visiblement affamés. Il se tourna vers Sigvald, et lui répondit à voix basse :

- L'ennemi de mon ennemi est mon ami. Si ces gens sont bien ce que vous dites, alors ils bénéficieront de la protection d'Esgaroth, j'en suis persuadé. Par égard pour eux, je ne les ferai pas enchaîner ou emprisonner tant qu'ils ne se montreront pas agressifs.

Il se tourna vers Pantea, la seule apparemment à comprendre le Westron, et il lui dit sur un ton exagérément lent :

- Nous. Pas. Enfermer. Vous. Compris ?

La femme au voile inclina la tête élégamment, et répondit :

- Naturellement, sire. Je comprends vos conditions, et je suis certaine que mes compagnons se montreront particulièrement dociles et bien disposés.

Sirrin se sentit un peu bête devant cette réponse pleine d'éloquence, mais il lui semblait impossible qu'une femme de l'Est parlât aussi bien la langue de l'Ouest. Son accent était léger et nullement gênant, si bien qu'il aurait pu avoir l'impression de parler avec une femme venue du Sud du Gondor, ou d'une autre région méridionale. Il reprit sur un ton normal :

- Bien, c'est entendu alors. Si vous voulez bien me suivre. Maîtr… euh… Sigvald, puisque c'est ainsi que vous vous nommez… Je vous laisse plaider votre cause auprès du comte. Ce n'est que sur son ordre que je laisserai vos amis orientaux sortir. Bonne chance.

Ils s'en furent donc chacun de leur côté. Nevä jeta un dernier regard par-dessus son épaule. Elle pressentait que les choses ne se dérouleraient pas aussi facilement que l'Elfe l'espérait.


~ ~ ~ ~


++ Pour le moment, cela ne se passe pas si mal ++ Fit Pantea à voix basse. ++ Ils nous ont servi un repas chaud, et nous ne sommes pas enfermés. Pouvions-nous vraiment attendre davantage d'hospitalité de leur part ? ++

Nevä observait son assiette avec un mélange d'envie et de dégoût. Son estomac la travaillait, mais elle ne pouvait se résoudre à manger alors que son peuple souffrait sur l'Âzâdî. Ses proches se rationnaient, et elle aurait dû se gaver au frais de gens d'Esgaroth ? L'idée même de se sustenter la rendait malade. A l'inverse, leur compagnon masqué qui leur servait de garde du corps semblait savourer son repas. Avec une dextérité peu commune, il parvenait à manger sans dévoiler son visage, se contentant de soulever furtivement son masque chaque fois qu'il approchait la cuillère de sa bouche. Nevä l'observait faire avec curiosité, et il finit par lui lancer entre deux bouchées :

++ Vous devriez manger pendant que c'est chaud. Pour prendre des forces. ++

La femme tatouée fronça les sourcils, mais il ajouta :

++ Quand nous rencontrerons le maître de cette ville, et que vous négocierez pour sauver l'entièreté de nos compagnons, il vous faudra toutes vos facultés. A quoi bon tomber de fatigue devant lui ? Que gagnerons-nous à faire preuve de zèle, là où nous devons nous montrer pragmatique ? ++

Pantea posa une main sur l'épaule de Nevä, et appuya le propos de leur compagnon masqué :

++ Vous n'avez rien à prouver à personne en matière de dévouement. Vous nous avez mené si loin, et ce n'est pas un repas qui changera quoi que ce soit. Vous ne trahissez personne, bien au contraire. ++

La Voix se laissa convaincre, et avec quelques réticences elle porta le gruau à sa bouche. La première bouchée fut la plus difficile, car son corps réclamait avidement cette nourriture providentielle, et elle eut toutes les peines du monde à contenir ses élans les moins louables, pour conserver une apparence distinguée devant leurs hôtes.

Les soldats présents les observaient avec une méfiance non dissimulée, et il avait fallu toute la persuasion de Sirrin pour les convaincre de ne pas les traîner par les pieds en place publique pour leur faire payer les crimes dont ils les estimaient responsables. Le vétéran avait appelé à l'humanité de ses compagnons, mais il avait rapidement pu constater que la colère et l'esprit de vengeance s'étaient répandus dans leurs veines tant et si bien qu'il n'était pas possible de les raisonner.

- Regarde son visage, fit l'un. Tout déformé avec ces marques… On dirait des formules magiques, ou quelque chose de ce genre-là. Je vois même pas pourquoi on la laisse en vie.

- C'est une esclave, répondit Sirrin encore une fois. L'Elfe me l'a assuré, ils sont de notre côté, et ils demandent seulement asile ici.

Il y eut quelques grommellements, mais personne n'osa les importuner. Cependant, le fait que deux d'entre eux fussent masqués dérangeait les gardes, qui auraient aimé voir leur visage pour mieux les cerner. La femme au voile les intriguait particulièrement, car elle était la seule à comprendre leur langue, et il était donc plus difficile de parler derrière son dos. En outre, elle dégageait une certaine grâce, une certaine douceur. Elle se tenait assise bien droit, et son port altier lui donnait une forme de noblesse.

- Je me demande vraiment à quoi elle ressemble… dit l'un des gardes.

- Il faudrait juste lui retirer son voile, ce serait rapide, répondit un autre.

L'intérêt et la curiosité étaient de puissants moteurs, qui pouvaient hélas avoir des conséquences désastreuses.


~ ~ ~ ~


En arrivant au Castel, Sigvald pensait sans nul doute pouvoir être reçu dans les plus brefs délais. Après tout, il venait avec des nouvelles de plus extrême importance, qui concernaient les affaires du lac, et qui avaient un lien direct avec la sécurité et la prospérité d'Esgaroth. Pourtant, quand il fut introduit dans le Salon des Ambassadeurs, où on faisait attendre les dignitaires qui souhaitaient rencontrer le comte, il lui fut notifié qu'il devrait faire preuve de patience.

- Sire, le comte se repose à l'heure qu'il est. La nuit est bien avancée, et j'ai bien peur qu'il faille attendre demain matin pour que le maître de la ville vous accorde une audience afin d'entendre votre rapport.

Ironie du sort, pour cet être immortel et sur lequel le temps n'avait aucune prise, que d'en être réduit à attendre de pouvoir présenter son cas devant le comte Saule, un homme à l'existence limitée et si brève. Hélas pour Sigvald, malgré toutes ses protestations et ses tentatives, il n'eut aucun autre choix que de patienter en comptant les heures et en regardant le soleil se lever paresseusement à travers la grande fenêtre qui donnait dehors.

Esgaroth s'éveilla bien avant le comte, qui ne fit son apparition qu'une poignée d'heures avant la mi-journée. Il s'était pomponné, fardé, et avait revêtu un joli costume noir brodé d'or qui lui donnait l'air énergique et dynamique qu'il affectionnait tant. Sigvald fut introduit dans la salle de réception, qui avait été ré-aménagée pour la journée en salle d'audience. Un haut fauteuil dominait les visiteurs, qui étaient invités à se placer en face du comte pour lui soumettre leurs requêtes.

Saule se comportait comme un petit monarque dans la ville, alors qu'il n'était que délégué du roi Gudmund. Il aimait cependant à récupérer la symbolique royale, et à mimer la prestation de serment par cette mise en scène qui semblait grotesque compte tenu des proportions de la ville. Pour autant, il ne fallait pas sous-estimer Saule, qui était entouré de quelques gardes soigneusement choisis pour défendre sa vie. Des hommes de Toras, à n'en pas douter.

- Maître Elfe, bienvenue au Castel. J'ai ouï dire par mon chambellan que vous aviez réalisé de merveilleux progrès dans votre traque des responsables des disparitions sur le lac. On m'a confié que trois prisonniers étaient détenus à l'heure actuelle par la Milice d'Esgaroth : j'ai demandé à ce qu'ils soient immédiatement transférés dans les geôles du Castel afin d'y être placés sous bonne garde.

Méprise ou manipulation de la part des gens d'Esgaroth ? Toujours était-il que les engagements de Sigvald avaient été foulés au pied, et qu'à l'heure actuelle des hommes en armes étaient partis arrêter Nevä et ses compagnons, rompant virtuellement l'accord passé entre l'Elfe et les Orientaux. Saule ne semblait pas au courant de ces détails, à moins qu'il eût agi délibérément pour mettre l'Ambassadeur d'Angrod en difficulté. C'était une possibilité.

Le maître des lieux reprit, plein de compassion :

- J'ai également cru comprendre que votre compagnon avait été grièvement blessé dans l'opération. Ces Orientaux sont de farouches adversaires, nous avons hélas pu le constater nous-mêmes à Esgaroth, mais aussi à Dale. Si vous le souhaitez, je peux dire au bourreau de vous prêter sa hache. Ce ne serait que justice de vous voir décapiter celui parmi ces sinistres barbares de l'Est qui s'en est pris à votre ami.

Son sourire s'élargit :

- Il y a bien longtemps que nous n'avons pas eu d'exécutions à Esgaroth, mais je suis certain que nous pourrions organiser quelque chose ce soir. Cela vous conviendrait-il ?


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Le venin dans nos veines EmptyLun 9 Mar 2020 - 0:04

Malgré la promesse de protection du vétéran envers les Nevä et sa compagnie Sigvald savait pertinemment que la parole d'un homme ne vaut que pour lui et non les siens. Le potentiel accrochage entre les hommes de la milice et la délégation n'était pas à exclure, mais cela ne lui incombait plus désormais.

- L'ennemi de mon ennemi est mon ami. Si ces gens sont bien ce que vous dites, alors ils bénéficieront de la protection d'Esgaroth, j'en suis persuadé. Par égard pour eux, je ne les ferai pas enchaîner ou emprisonner tant qu'ils ne se montreront pas agressifs.

- Cela va de soi.

Sigvald se détourna du petit groupe et suivit l'impétueux Erling en qui il n'avait aucune confiance. Notre elfe fit un signe de tête respectueux envers Dame Nevä et au détour d'une maison ils quittèrent les quais. La colère refit doucement surface dans le cœur déjà sombre de l'elfe lorsqu'il se remit à penser à la créature du Lac, la simple pensée de la voir morte tournait en boucle dans sa tête, au point de mettre ses inquiétudes pour la santé d'Achas et l'étrange événement que du surmonté Delaynna de côté, cependant il n'oubliait pas les esclaves sur leur navire de guerre et la jeune fille qui détenait la clé de cette affaire. Au fur et à mesure de la marche nocturne jusqu'au castel, Sigvald se mit à penser à la situation présente, une prise de position qui ne le ressemblait que peu, toute sa vie il avait tout fait pour ne pas se mettre en avant et n'avoir aucune responsabilité sur les épaules, voilà qu'aujourd'hui il jouait avec la vie d'un grand nombre de gens et ça ce n'était plus lui. Il ne souhaitait plus avoir ce rôle de décisionnaire et pourtant celui-ci s'imposait à lui comme inéluctable.

Plus cette mission avançait plus il cogitait sur sa raison d'être, ses propres envies, ses propres besoins et à chaque fois la même réponse « Qui suis-je vraiment ? ». Selon ses propres critères il n'était que la parodie de ce qu'est un véritable elfe. Une carcasse solide, mais vide, est-ce que ses sentiments étaient réelles ? Ou était-il juste le fruit d'un idéal qu'il s'efforçait vainement d'atteindre ? Sigvald le repenti sonnait terriblement faux, parti dans cette mission pour se donner bonne conscience pour un mal causé qui ne sera jamais pardonnable à ses yeux. Il fallait en finir le plus vite possible avec cette mission et quitter tout cela.

Le castel détonnait avec le reste de la ville, plus fortifié et d'une architecture plus riche, à l'image de l'homme qui dirige la ville surement, de ce qui lui avaient dient les pêcheurs et le barde, l'image que se faisait Sigvald du comte était plutôt négative. Bien qu'il répugnait toujours à rencontrer des dignitaires ou des hommes faisant figure d'autorité, il s'était engagé sur cette quête et de fait il devait la mener à terme. Erling et un servant proprement habillé le conduisit jusqu'à un salon à l'écart et bien garder, le faste de la pièce aurait plu à n'importe quel humains, même à cette heure tardive on s'affairait à amener de la nourriture et du vin sur un plateau d'argent bien qu'embelli de fine gravure, notre elfe le jugea grossier et sans plus de valeur que celle du métal qui le constitue. Une fois reçu dans la pièce on lui intima de faire montre de patience au vu de l'heure et c'est ce qu'il fit. La décoration trop charger du lieu bien que surement appréciable par d'autres le fit prendre la première porte venu donnant sur l'extérieur. Là, dans ce qui semblait être un petit jardin d'hiver à l'abri des regards, bien que les gardes n'étant pas loin, il pouvait enfin se sentir plus à l'aise. Il y avait de nombreux pots vides de toutes végétations, mais les quelques arbustes qui se disputaient les parcelles de terres portaient encore leurs fruits, des oranges et des citrons pour la plupart. Les fleurs étaient plantées comme une petite armée en rang serré et par couleur, aucune place au naturel. Quelques bancs en pierre étaient disposés ici là le long d'un chemin pavé serpentant à travers le jardin, qui malgré tout restait plutôt accueillant. Il fallait attendre le jour pour que le Comte dédaigne enfin se lever, notre elfe en profita pour se reposer, il s'allongea sur l'un des bancs et regarda le ciel étoilé parsemer de sombres nuages.

Un peu de repos, enfin.


* ~ ~ *~* ~ ~ *


Ses songes et ses pensées dérivèrent de ses souvenirs épars dont certains lui étaient tout bonnement inaccessibles, oublier à jamais où cacher au plus profond de son âme torturer. Il se retrouva à nouveau sur cette côte face à la mer. Le vent était doux, légèrement chaud, l'herbe en contrebas se mouvait dans un rythme régulier et apaisant, le soleil baignait la côte sous le soleil apportant une chaleur diffuse et légère sur sa peau, les nuages jetaient leurs ombres par intermittence sur cet océan de verdure. Plus loin la mer n'était pas agitée et les quelques vagues qui s'échouaient sur la grève produisaient un son harmonieux tandis que le bruissement des feuilles du chêne sous lequel ils étaient tous deux le rassurait, la nature n'était que musique et Arda semblait plus vivante aujourd'hui que demain.

Mais son cœur lui n'était que crainte et peur, partager par ce qu'il devait faire et le chemin qu'il devait suivre. Le bien et le mal, il savait les deux importants ne formant qu'un tout, mais qui pourtant ne devait jamais se confondre. Alors que la vision de ce qui l'entourait s'obscurcissait une main apaisante passa délicatement dans ces cheveux et le monde resplendissait à nouveau de lumière. La tête posée mollement sur ses cuisses, les yeux perdu vers le paysage, il sentait ses cheveux balayer son visage, qu'est-ce qu'ils sentaient bon, ici et maintenant notre elfe se sentait plus vivant que jamais. Mais même elle ne pouvait arrêter la peur qui rongeait Sigvald de l'intérieur. Sa voix douce s'éleva sans pour autant altérer la mélodie du vent.

- Tu sembles troubler ?
- Et pourquoi ne le serais-je pas ? Notre monde, Arda se meure doucement et je ne peux l'empêcher.
- Et que veux-tu faire ?
- Chaque fois que je songe à quelle action je pourrais entreprendre je me heurte à un mur insurmontable.
- Peut-être n'es-tu simplement pas à la hauteur ? Ne te tracasse pas, on ne peut changer l'inévitable...
- Seulement le ralentir.
- Oui, Et qu'as-tu en tête ?
- Rien je suis encore dans le flou, totalement perdu.
- Tu sais, d'autres se sont perdu sur ce même chemin, peut-être les as tu oubliés ?
- Comm... Comment ?
- Ta mémoire n'est qu'un vaste champ de ruines ou seulement quelques fondations tiennent encore debout, la plupart de tes souvenirs ont été altérer et mit dans ton esprit à l'époque où Sigvald l'innocent à donner naissance au Sombrecoeur.

En un battement de cils, le jour s'évanouit et une nuit obscure prit place, sans étoile, sans bruit. Un vide immense remplaçait chaque parcelle d'Arda. Une peur et une angoisse indescriptible envahirent notre elfe, au point qu'il pouvait sentir la mort l'attirer. Tout semblait si réel. Elle, sa voix douce auparavant avait pris un ton cruel et l'aura de son corps semblait plus néfaste qu'autre chose, elle semblait lui arracher les cheveux à chaque « caresse » et le rythme s'intensifiait. Le simple contact de sa peau contre la sienne n'était que feu brûlant et douleur. « elle » n'était plus celle d'avant, une chose terrifiante l'avait remplacé.


- Quoi ? Qu'est-ce que... Je crois que je deviens fou !!? Pourquoi dis-tu cela ? Arrête ! Je rêve, ce n'est qu'un rêve, rien qu'un rêve. Juste un rêve.

- AHAHAH... Je suis là pour toi, ne t'inquiète pas. Tout ceci n'est qu'un rêve ou bien l'écho de folie qui s'était emparé de Sigvald l'innocent ? Je ne puis te donner de réponse. Huron le mercenaire était plus taciturne et il se fichait du monde. Toi ! Tu mourras bientôt à moins que tu ne sois déjà entrain de mourir, comme tout ceux qui ton précéder. La folle quête qui a conduit l'Innocent au massacre de centaines d'esclaves livrer au pillard tout comme lui, t'en souviens-tu ?! Ou préfères-tu te souvenir des nombreuses mises à mort et les massacres perpétrés par le Sombrecoeur ? Vois les visages des enfants et des femmes qu'il a défigurées et tuées, ressent les douleurs des hommes dont il arrachait les membres, ressent le file de sa lame entailler leurs chairs ! Ressent ce qu'on ressentit les familles qu'il a brisées par obligations, mais aussi par pur plaisir de vengeance. Mais si tu souhaites toucher le fond remémore-toi Huron le mercenaire, une vie fade et sans goût à batifoler aux côtés des humains dont il se souciait pourtant si peu, ceux qui avaient un tant soient peu d'importance à ses yeux, il les a menés à la mort, est-ce que leurs noms te reviennent en mémoire ? Et que dire de toi Sigvald le Repenti ? Un bouffon sans but qui cherche à se racheter aux yeux des siens, un enfant voilà ce que tu es ! Le plus pitoyable d'entre tous et j'espère celui qui mourra le plus vite. NE FUIS PAS ET MEURS !  
- Réveil toi, réveil toi, réveil toi, réveil toi, réveil toi, réveil toi, réveil toi. REVEIL TOI !



* ~ ~ *~* ~ ~ *


J'ouvris les yeux et me redressai d'un bond. Une douleur intense envahissait mon corps, équivalente à quelques heures passées enchaîner et battu dans les souterrains du temple à Djafa et une migraine à en perdre la tête. Le simple le fait de maintenir les yeux ouverts était une brûlure diffuse et douloureuse dans tout mon visage. Qu'est-ce qu'il venait de se passer ? Suis-je devenu fou ou n'étais-ce qu'un cauchemar ? L'aube s'était déjà levé et je n'eus pas le temps de réfléchir à la situation qu'un servant venait me quérir pour l'audience avec le Comte.

- Maître Elfe est-ce que vous vous sentez bien ? Je me suis permis de vous apporter une coupe de vin.
- Oui, oui. Je vous remercie de votre prévenance. Comment vous appelez-vous ?
- Dairon, fils de Dairon mon Seigneur.
- Que la vie vous apporte beaucoup de bonheurs Dairon fils de Dairon.


Je ne fis qu'un trait de la coupe et emboîtai le pas au servant. Encore sous le choc de ce que je ne m'expliquais toujours pas. Je décidais tant bien que mal de mettre ça de côté pour le moment, mais mes pensées dérivèrent toujours sur les paroles de la femme dans ce « rêve » si s'en était bien un.

L'ouverture de la porte sur la Grande salle balaya les occupations de mon esprit pour étudier l'endroit, garde, emplacement des sorties, d'un œil avisé je me concentrais sur le moindre de détail au cas où. Le Comte Saule avait une  vraie petite garde royale que certains seigneurs devaient lui envier, armes et armures de bonne factures, des hommes de bonnes carrures et des visages qui en disaient long sur leurs allégeances, certains vouaient clairement un culte au Comte à leur façon de le regarder d'autres clairement c'étaient le pouvoir et l'argent que leur procuraient cette situation. La salle était plus encore richement décorée que le salon réservé aux dignitaires de passage, de grands étendards et nombreux tableaux ornaient les murs, la vieille pierre des murs avait été largement recouvert de pans de tissus. Tout n'était qu'étalage de fortune. Une dépense de richesses mal avisées propre aux humains. Le Comte Saule était bien ce qu'il avait cru comprendre, pouvoir et argent, une corruption qui gangrenait à coup sûr les hautes sphères des hommes et qui les amèneraient à leurs ruines et celle d'Arda.

Après un discours pompeux de la part du Comte et grandement inutile dont je ne retins que l'essentiel, je rentrais droit au but, bien que l'idée d'une exécution était la bienvenue, je voyais plus la tête de la créature que celle des affranchis.

- Il est vrai qu'une exécution pour de bonnes raisons n'est déplaisante pour personne je dois vous le confier. Cependant, je pense que les informations qui vous ont été apportées ont dû être quelques peut altérer par le trajet, j'en suis entièrement fautif par l'empressement de ma requête. J'en conviens qu'une présentation ici même plutôt aurait été la bienvenue, seulement mon inquiétude quant au mal qui ronge votre cité à prit le pas sur la bienséance j'en ai peur. Les nouvelles que j'apporte sont à la fois bonne et mauvaise. En l'occurrence une créature pour l'heure non identifiée rode dans le Lac, à sa poursuite jusqu'à la vieille Lacville l'elfe qui m'accompagnait s'est vu arracher la jambe, une blessure due à de puissantes mâchoires. La rencontre avec les « Rhûniens » qui n'ont sont pas pour la plupart n'est dû qu'au hasard, ils sont d'anciens esclaves qui ont réussi à se défaire des chaînes de leur maître, ont recouvert la liberté et sont venu chercher asile à l'Ouest des terres sombres. Leur navire tout comme les gens d'ici a subi une attaque de cette créature, leurs pertes furent nombreuses j'en ai peur. L'une des leur à survécu à cette attaque et cette jeune fille à fait fuir la créature. Je dois bientôt m'entretenir avec elle pour savoir exactement à quoi nous avons affaire. Mais j'ai bien peur qu'il s'agisse non pas d'Orientaux comme nous l'espérions, mais d'un vers une engeance de Smaug qui aurait élu domicile dans les ruines de l'ancienne cité, l'un de ses descendants certainement. Le navire des Âzâd Shuda comme il se nomme, la délégation que je me suis permis de mener dans votre cité, leur navire témoigne des puissantes griffes de la bête. Mais pour témoignage le leur vous sera des plus précis et éloquent. S'il met toujours permis de chasser cette bête dans le royaume de Dale  avec votre accord je partirais sans tarder Comte Saule.

L'espace d'un instant alors que le l'homme sur son trône de bois cogitait, les paroles de la femme résonnaient encore « Sigvald le Repenti allait mourir » ou était déjà mort... Est-ce que les tortures et les défaites avaient enfin eu raison de moi... La folie m'avait-elle emporté ?
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Ryad Assad
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Le venin dans nos veines EmptyMar 17 Mar 2020 - 16:38
Le venin dans nos veines Dauert10

Sigvald n'avait pas pu manquer de remarquer l'opulence dans laquelle se complaisait le comte d'Esgaroth, lequel méprit le regard circulaire que jeta l'Elfe pour de l'admiration. Il aimait l'effet que produisait sa décoration riche et pompeuse sur les visiteurs, il aimait les impressionner par son charisme, son charme, et sa conversation. Pour ainsi dire, Saule aimait plaire, presque autant qu'il aimait être craint.

Une combinaison dangereuse qui faisait de lui un serpent dans des habits de soie.

Ses paroles pleine de légèreté portaient en réalité un sens très grave, et ses intentions n'étaient pas très claires. Son empressement à faire disparaître les Orientaux pouvait passer pour le zèle compréhensible d'un dirigeant confronté à une menace persistante, et qui voudrait éliminer rapidement l'épine fichée dans son flanc. Le peuple d'Esgaroth apprécierait sans doute de voir des coupables identifiés et condamnés par la justice rapide du comte et de ses hommes. Pouvait-on cependant ignorer le fait que Saule était un homme intelligent, particulièrement bien informé, et que ses troupes avaient participé à l'altercation avec Sirrin ?

Que savait-il réellement, et à quel point manipulait-il Sigvald et les Rhûnedain ?

Difficile à dire.

La réponse de l'Elfe fut particulièrement diplomate, et soigneusement formulée afin de ménager la sensibilité de tous dans la pièce, notamment du comte Saule. Cependant, ses mots ne pouvaient pas être pris à la légère, car ils portaient des accents menaçants qui ne pouvaient qu'inquiéter les habitants de la cité lacustre.

Saule écoutait avec attention, sans rien dire, laissant Sigvald terminer.

Cependant, dans son esprit, chaque nouvel élément venait s'ajouter au précédent pour former un tableau sombre et complexe qui ne lui plaisait pas du tout. Tout d'abord, il y avait la question de ces anciens esclaves, venus « chercher asile » à l'Ouest. Ce n'était pas du goût du comte, qui ne voulait pas voir d'étrangers arriver sur ces terres et simplement s'y installer. Ces gens étaient fort différents des populations locales, et demeuraient totalement incontrôlables. Ils n'apporteraient que danger et violence dans leur sillage. L'Ouest n'avait pas d'esclaves pour une bonne raison : tout le monde savait qu'ils formaient une horde sauvage et affamée, des sauterelles dans les champs de blé.

Venait ensuite la seconde information, bien plus terrible encore. Saule faillit s'étouffer quand l'Elfe évoqua une « engeance de Smaug », et il se retint de couper la parole à l'ambassadeur. Il ne souhaitait pas commettre un impair, mais les hommes qui écoutaient la conversation dans la pièce ne purent s'empêcher de murmurer entre eux.

Un dragon ?

Impossible.

Un vent de panique passa dans l'assistance, alors que les courtisans les moins courageux commençaient d'ores et déjà à planifier leur départ. Saule les voyait, ces puces sur son dos qui s'agitaient pour lui rappeler leur présence en permanence, mais qui n'hésiteraient pas à le quitter pour un hôte plus riche et plus puissant. Il les méprisait tous, autant qu'il reconnaissait leur utilité. Il avait besoin d'eux, ce qui ne l'empêchait pas de les haïr pour la plupart.

Et désormais, Sigvald venait de donner un coup de pied dans l'édifice précieux que le comte avait construit depuis son arrivée au pouvoir, révélant les failles de ses alliances, et la faiblesse de ses piliers. Il lui fallait absolument reprendre la main sur la conversation, et rassurer son peuple. D'une voix forte, il reprit :

- Votre rapport est très alarmant, maître Elfe, mais ne vous laissez pas abuser par la sorcellerie orientale. Ils vous feraient voir un fils de Smaug là où il n'y a qu'un vulgaire lézard. Ils font de la fumée des flammes, du vent qui tempête les rugissements d'une créature des abysses, et quand vient la nuit et que les nuages s'amoncellent dans les cieux, ils vous feraient paraître la brève éclipse de la lune pour l'œuvre de Smaug le Terrible lui-même. Maître Elfe, vos yeux ont probablement été abusés par leur magie noire, mais rassurez-vous… il y a plusieurs siècles que les dragons n'ont pas été aperçus dans le Rhovanion, l'explication est ailleurs.

Les propos du comte étaient convaincants, et les gens d'Esgaroth hochèrent la tête en réponse à ses paroles, conscients qu'il disait vrai. Smaug avait été la dernière de ces créatures à être aperçue dans les environs, et même si on avait rapporté l'apparition d'un dragon lors de la Bataille du Nord, les récits racontaient bien qu'il venait de loin, et qu'il était commandé par un puissant sorcier.

Sans doute un de ces Orientaux.

- Et puis, pourquoi un dragon s'en prendrait à des pêcheurs, hm ? Pour du poisson ? Cela n'a pas de sens.

Il y eut quelques rires discrets dans l'assemblée, et le comte sourit pour lui-même, satisfait de son trait d'esprit. Il avait réussi à rattraper la situation, il lui fallait désormais enfoncer le clou. Les trois prisonniers lui donnaient l'occasion parfaite :

- Je suis davantage préoccupé par ces nouveaux arrivants dont vous me parlez. Combien sont-ils, que veulent-ils réellement ? Nous n'avons aucune idée de leurs intentions, et il se pourrait bien qu'ils constituent une avant-garde destinée à éprouver nos défenses. Nous avons déjà vu la sournoiserie des gens de ce pays, et je vous rappelle que notre roi Gudmund s'efforce à l'heure actuelle de contenir la menace qu'ils représentent.

Il marqua une pause. Nul n'ignorait ici que les soldats du Rhûn s'étaient implantés très loin à l'Ouest de leur dernière cité, accentuant ainsi considérablement la pression militaire et diplomatique sur le petit royaume de Dale. L'alliance conclue avec l'Arnor, via le mariage de Dinaelin et Aldarion, avait notamment été passée pour contenir leur poussée et renforcer les liens entre les Peuples Libres. Chacun dans l'assistance était sensible à cette question, et était enclin à croire le récit habile du comte. Le méchant de l'histoire était tout trouvé, car le poison de la colère circulait déjà dans le cœur des hommes d'ici. Ils n'avaient pas à faire un gros effort pour détester leurs voisins orientaux et tout ce qui s'en rapprochait.

- Pour le moment ambassadeur, il est plus sage que vous restiez ici et que vous m'aidiez à conduire l'interrogatoire de ces prisonniers. Votre vie est précieuse, et je ne voudrais pas la risquer auprès des ennemis d'Esgaroth, qui sont aussi les ennemis de votre seigneur Angrod. Votre compagnon est déjà revenu grièvement blessé, et je ne peux pas risquer une nouvelle déconvenue. Nous attendrons donc l'arrivée des prisonniers pour poursuivre notre entretien.

Saule fit un geste évasif de la main, qui signifiait qu'il en avait terminé pour le moment. Il avait faim, et il n'aimait pas manger en parlant de politique. Sigvald fut de nouveau invité à patienter, alors que le soleil commençait à se hisser le ciel de la cité.

Dairon fils de Dairon se trouvait toujours là, et il apparut évident qu'il avait été préposé aux bons soins de Sigvald. Il lui apporta une collation, rafraîchissement bienvenu compte tenu de la chaleur qui semblait écraser toute la ville. Le jeune garçon, qui n'avait pas encore quinze ans, semblait avoir entendu une partie de la conversation et il ne put s'empêcher de demander à Sigvald, une fois qu'ils furent seuls :

- Maître Elfe, est-ce que c'est vrai ? Est-ce qu'un dragon va détruire Esgaroth ?

On lisait une profonde inquiétude dans son jeune visage, mais pas de celles que les enfants pouvaient ressentir. On décelait plutôt la gravité d'un adulte habitué aux tourments, et qui se lamenterait seulement de devoir affronter un nouveau mal. Dans sa jeune vie, Dairon avait déjà vécu le Rude Hiver, et le conflit interne qui avait déchiré Esgaroth. Il avait vu son lot de cadavres, de sang, de trahisons et de malheurs. Le dragon le préoccupait, mais ce n'était qu'une catastrophe de plus.

- La sorcière disait donc vrai ?


~ ~ ~ ~

Le venin dans nos veines Pantea10   Le venin dans nos veines Nevy10


Il fallut un peu plus d'une heure avant que la délégation orientale ne fût autorisée à pénétrer au Castel. Sigvald avait été appelé à rejoindre le comte pour les accueillir, et il se tenait aux côtés du maître de la ville, ainsi que DuGrand, Toras, et les principaux officiers de la cité. Le comité était restreint à une douzaine d'hommes de confiance, en comptant les gardes qui se trouvaient dispersés dans la pièce.

L'arrivée des étrangers suscita naturellement une vive émotion, et quelques menaces à peine voilées furent murmurées suffisamment fort pour faire comprendre à Nevä et ses compagnons qu'ils n'étaient pas les bienvenus ici. Le plus étonnant était peut-être de constater la tension qui régnait entre les hommes de la Milice et leurs prisonniers. Sirrin lui-même semblait soucieux, et il s'efforçait de maintenir une certaine distance entre ses troupes et le trio venu de l'Est.

Il s'était de toute évidence passé quelque chose, mais personne ne semblait vouloir en parler.

- Sire, lança Sirrin d'une voix claire et forte, voici les trois prisonniers que vous attendiez.

- Fort bien, soldat. Je constate que vous n'avez pas jugé utile de les entraver. Pourquoi cela ?

Le ton de reproche du comte était cinglant, mais il avait prononcé sa question de manière polie et raffinée, si bien qu'il était difficile de savoir exactement ce qu'il pensait. Sirrin choisit l'option de l'honnêteté, preuve de sa droiture :

- Sire, les prisonniers ont volontairement déposé leurs armes, et se sont comportés avec la plus extrême dignité lorsqu'ils étaient sous ma charge… Je considère qu'en l'état, ils ne représentent pas une menace pour votre sécurité ou celle des autres dignitaires de la cité.

Sirrin était sincère, mais quelques hommes derrière lui firent une moue contrariée qui n'échappa guère au comte Saule. Ce dernier ne fit aucun commentaire, mais il était trop retors pour ne pas utiliser cette information plus tard. Il se tourna brièvement vers Sigvald et lui demanda :

- Est-ce qu'ils comprennent notre langue ? Puis-je leur parler directement ?

La question avait du sens : les Orientaux n'étaient guère légion dans les parages, et ce peuple lointain et hostile était connu pour parler une langue rude et gutturale, que les gens d'ici trouvaient particulièrement peu élégante. Le Westron, langue de l'Ouest, était certainement connu des élites du Rhûn, mais rien n'était certain concernant ces esclaves. Pantea avait entendu les paroles du comte, mais elle jugea plus utile de ne pas intervenir immédiatement, et se contenta d'adresser un signe de tête positif à Sigvald pour l'inciter à dire la vérité.

Ayant obtenu sa réponse, le comte reprit :

- Au nom d'Esgaroth, et de Sa Majesté le roi Gudmund de Dale, bienvenue étrangers. Je suis le comte Saule, maître de la cité et premier défenseur des gens du Lac.

À voix basse, Pantea traduisait ses paroles à Nevä et à l'homme masqué. Elle avait du mal à rendre dans la langue du Rhûn les titres qu'il affichait pompeusement, mais s'efforçait de donner une transcription au plus juste, afin de faciliter la communication.

- Vous êtes ici présents pour répondre des accusations qui pèsent sur vous, et puisque je détiens également la fonction de premier magistrat de la cité, considérez que je serai le juge lors de votre procès que je déclare ouvert dès à présent.

Pantea sentit un frisson lui courir le long de l'échine, et elle s'interrompit en dévisageant Sigvald avec intensité. Ce n'était pas ce qui était convenu ! Nevä avait pris la responsabilité de venir à Esgaroth non pas pour être jugée, mais pour s'entretenir avec le comte, et obtenir asile. L'injustice de la situation était violente, mais Saule n'avait pas fini de leur faire comprendre à quel point elles s'étaient jetées dans la gueule du loup :

- Vous êtes accusés d'avoir pénétré illégalement sur les terres du roi Gudmund, d'avoir conspiré contre l'autorité royale, d'avoir attenté à la sécurité de la cité d'Esgaroth, mais aussi d'avoir insidieusement attaqué les navires sur le lac. Vous devrez enfin répondre d'accusations de sorcellerie, et d'avoir utilisé les moyens surnaturels pour arriver à vos fins. Confessez-vous vos crimes ?

- Certainement pas, répliqua Pantea acerbe. Nous sommes innocents, et nous sommes uniquement là pour…

Il suffit, trancha le comte qui n'appréciait de guère de voir une femme prendre ainsi la parole. Il connaissait le manque de manières des gens du Rhûn, mais le fait de voir une esclave se dresser ainsi face à lui l'agaçait au plus haut point. Sa réponse fut aussi cinglante qu'un coup de bâton sur les doigts :

- Je ne m'intéresse pas aux raisons que vous invoquez. J'entends d'abord et avant toute chose déterminer votre responsabilité dans cette affaire. Quand vous aurez répondu des accusations qui pèsent sur vous, si vous parvenez à faire la démonstration de votre innocence, alors j'écouterai ce que vous avez à me dire.

Il marqua une pause, et ajouta :

- Maître Sigvald, puisqu'il n'est pas approprié pour une femme de prendre la parole ainsi devant une assemblée d'hommes, fût-ce pour défendre sa tête, je vous invite à prendre la défense de ces individus. Vous semblez sensible à leur cause, et je doute pas que votre défense sera des plus éloquentes, vous qui paraissez manier le verbe aussi bien que l'épée. La parole est à vous, maître Elfe, je vous en prie. Nous écoutons ce que vous avez à nous dire.

Après avoir joué son dernier coup habilement, Saule recula pour prendre place sur le fauteuil princier qu'il occupait, laissant Sigvald se rapprocher des Affranchis. Défendre ces derniers exigerait beaucoup de dextérité, et il n'était pas certain qu'attaquer frontalement le comte fonctionnerait bien : le maître des lieux avait prouvé à de nombreuses reprises qu'il pouvait être inflexible et aisément agacé. Il fallait au contraire ruser, et s'efforcer de présenter une argumentation solide afin de démontrer l'innocence des Orientaux. Le point faible du comte était peut-être son entourage, dont il se préoccupait beaucoup, et qu'il essayait toujours de ménager. Les convaincre serait difficile, mais s'il ralliait ces dignitaires à sa cause, Sigvald pouvait espérer gagner le comte. Pour cela, il fallait trouver les mots justes, et se préparer aux questions qui allaient inévitablement tomber. Les Rhûnedain avaient peut-être certaines réponses, certains éléments à apporter, mais il appartenait à Sigvald de savoir s'il voulait d'abord se concerter avec eux, ou bien essayer de convaincre l'assistance.

Le temps jouait malheureusement contre lui, et il devait prendre une décision rapidement.


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Le venin dans nos veines EmptyMar 31 Mar 2020 - 15:53


Je n'étais pas à mon aise dans ce petit palais qui n'était qu'étalage de richesse et pouvoir, la nature humaine se voulait trop corruptible. Le Comte Saule plaçait évidemment ses propres intérêts avant celui de ses gens et clairement certain de sa cour qu'il jugeait peu important ou pas assez dangereux. Un homme qui n'avait de pouvoir que ses mots et dont les mains étaient plus aptes à se passer de l'huile dans les cheveux qu'à tenir les rênes de son cheval et voir de ses propres yeux la vie dans la cité qu'il est censé diriger avec justesse. Je sentais la perfidie dans cet homme à milles lieues, mais je n'avais d'autres choix pour le moment que de faire avec.

Dans son petit monologue le Comte ne me laissa aucunement place à la parole, il ne fis qu'intensifier la haine que j'éprouvais pour ce genre de personnage. Puis il me congédia, je retournais dans le salon des ambassadeurs adjacent au petit jardin. Je devais faire montre de patience ; une chose qui me faisait cruellement défaut tant je ruminais la colère contre Saule. Une fois dans la pièce je fus surpris par la présence du jeune Dairon s'affairant à préparer assiette et cruche de vin et à les positionner et repositionner pour que le tableau soit parfait.

- Un dragon comme dans les légendes vous voulez dire ? Il n'en est rien je vous rassure, mais oui j'ai vu de mes yeux les traces de la bête et les dégâts de sa mâchoire, cette sombre engeance doit être encore un « enfant » et c'est pour cela que ses attaques se veulent isolées, donc tu n'as aucune crainte à avoir avant plusieurs siècles.

Le jeune expira comme rassuré, mais la lueur dans ses yeux me démontrait qu'il voulait faire quelques choses, la peur dans son attitude avait été remplacer par... du courage ou de l'espoir ? Je ne serais dire.

- Je te propose de faire une action que tu pourrais raconter à tes enfants quand tu trouveras femme ? Votre Comte prend la situation à la légère, il se fourvoie sur la menace. Va chercher les ménestrels et dit leur que la bête rôde sur le Lac, que les Orientaux qui ont été fait prisonniers sont des esclaves qui ont réussi à se libérer du joug de la reine du Rhûn et qu'ils ont réussi à mettre en fuite la bête pour le moment. Il m'est impératif à moi comme à Esgaroth de savoir comment, et dit aux ménestrels que certains de ces esclaves sont originaires de ce royaume, du Gondor aussi bien que de l'Est. Qu'ils préviennent le plus de gens possible, je crains pour leur vie. Il nous faut les sauver, c'est la clé. Dis leur aussi de faire parvenir ces informations à Dale le plus vite possible, faire savoir que des esclaves ont fui le Rhûn et demande asile. D'ici je ne peux rien faire, je te confie cette tâche si tu l'acceptes Dairon fils de Dairon.


Je marquais une pause pour lui faire répéter ce que je lui avais dit.

- Et qu'elles étaient les propos de la Sorcière ?

- Agis avec discrétion, de la discrétion, ne prends aucun risque.
Ayant eu ma réponse je ne pouvais que lui souhaiter ma bénédiction.

Le temps était compté, allonger sur le banc, les yeux fixant le soleil je me perdis à nouveau dans mes pensées comme irrésistiblement attirer. La douce brise me caressait le visage, la chaleur de l'astre jaune sur ma peau était plus qu'agréable, cette main qui passe délicatement dans mes cheveux et ce parfum qui enivre mes sens. Je me relevai en sursaut dos à « elle » face à la côte et aux vagues se brisant au loin sur la grève. Tout était parfait, un petit paradis et pourtant mon cœur se serrait, débordant de tristesse.

- Pourquoi...pourquoi ? Pourquoi suis-je à nouveau ici ? POURQUOI !!!
- Chuuut... Ça va aller... ne t'emporte pas comme Sombrecoeur. Tu n'as rien à craindre ici.
- Il faut que me réveille, REVEIL TOI !!!
- Chut, chut. Tout va bien , tout va bien.
Elle passa ses bras autour de mon cou, non méchamment et elle me rapprocha « d'elle », comme une douce étreinte. A vrai dire sa voix et son contact me calma presque aussitôt. Il y avait un côté aussi terrifiant que rassurant, soit c'était un rêve ou un cauchemar qui se voulait persistant et très réaliste, soit j'avais définitivement perdu la raison.
- Très bien... Que fais-je ici ?
- Tu peux répondre à cette question sans mon aide il me semble.
Je sentais son souffle chaud dans ma nuque, rien de dérangeant bien au contraire.
- Qui es-tu ? Est-ce que tu es réelle ou juste une illusion créer par mon esprit ?
- Qui sait ? Ne suis-je pas assez réelle pour toi ?
Elle me pinça l'oreille droite avec la vive douleur qui l'accompagnait. Peut-être ne suis-je que ton imagination... Et si j'étais une chose encore plus grande ? Une chose que tu ne puisses même pas te représenter. Elle susurra des mots et le soleil disparu pour dévoiler un sombre ciel étoilé, tout simplement magnifique.
- Je n'aurais pas ma réponse.
- Non, ce n'est pas cela que tu cherches.
- Et qu'est-ce que je recherche ?
- La vérité.
- Sur quoi ?
- Toi et ta place en Arda.
- Je n'en sais rien, peut-être... Et qui suis-je ? Lors de notre dernière rencontre tu as dit que j'allais mourir, comment le sais-tu ?
- Je n'oublie jamais mes paroles. Ne te sens-tu pas différent ?
- Il me semble avoir...


Je sorti de mon état en sursaut au moment où un garde arrivait. Le Comte Saule me demandait. Sur le chemin je massais l'endroit où « elle » m'avait pincé, je ne comprenais toujours pas ce qui m'arrivais.


* ~ ~ *~* ~ ~ *


Une fois dans la grande salle, je fus à la fois surpris de constater les personnes présentes et à la fois je m'y attendais. La perfidie du Comte n'avait d'égale que son arrogance. À nouveau du regard j'étudiais la pièce, sortie, personnes en présence, arme et armure, physique et visage des gens, j'avais appris à me méfier de tout et à redoublé de vigilance parmi des hommes dont l'honneur ne trouvait de sens que si elle était lourdement rétribuée en pièce d'or. Un combat tournerait au bain de sang et la mort, au vu des autres gardes du castel, une chose à éviter à tout prix.

Au côté du Comte je m'efforçais de rester de marbre quand les « prisonniers » arrivèrent et joie me pris quand je les vis sans chaînes. Sirrin avait répondu avec sincérité et je fus rassurer d'avoir placer ma confiance en cet homme bourru, mais juste.

- Comte Saule, deux d'entre eux ne comprennent pas notre langage ni ne savent le parler. Cependant leur porte-parole manie le Westron avec plus d'aisance et de noblesse que certain à l'Ouest.

Cette petite réponse se voulait respectueuse, tout en freinant les idées du Comte sur la potentielle stupidité d'esclaves et leur manque de savoir. S'ensuivit un échange houleux entre Panteä et Saule, le fait de reléguer au rang secondaire les femmes était une coutume humaine que j'avais en horreur. Je retins ma colère pour ne pas saisir le manche de mon arme et le transpercer de part en part. Je n'eus qu'une longue expiration. Quand le Comte me « força » plutôt que m'invita à défendre les Âzâd Shuda je dus à nouveau me retenir et ne pas critiquer cette comédie grotesque. Toutefois je gardais espoir que le jeune homme Dairon est transmis le message et que le peuple d'Esgaroth aille montrer leur colère à la porte du Castel, je me devais de gagner du temps si toutefois la prévoyance que j'avais eue allait poter ses fruits. Je n'avais jamais au grand jamais participé à un jugement si ce n'est le mien et je n'en gardais que très peu de souvenir tant j'étais bouleversé sur le moment. Ma seule expérience pour faire connaître la vérité avait été les tortures perpétrées de mes mains. Il me fallait retourner discrètement la situation.

- Soit, à dire vrai je manie mieux les lames que les mots. Mais les deux sont de redoutables armes j'en convient. Je vais vous reprendre point par point si vous me le permettez. Je vous le concède ils ont effectivement pénétré sans autorisation préalable sur les terres du Roi Gundmund, mais les représentants sous forme de délégation d'un peuple ne peut-elle pas franchir et venir se présenter sans que cela soit un crime ? Pour l'accusation de conspiration contre la couronne je vous demanderais une preuve, un témoin, sinon celle-ci n'a nulle valeur et de même pour votre accusation d'atteinte à l'intégrité d'Esgaroth, ces gens se sont fait prisonniers de leur plein gré. Pour les attaques de navires sur le lac, permettez-moi de dire que cette accusation ne tient pas la route, au vu de mon précédent rapport, même si un récit détaillé de leur part serait plus que la bienvenue tenant compte de la situation. Pour les accusations de sorcellerie je vous invite à étayer votre accusation, la magie comme vous l'appelez est une chose plus que rare en terre du milieu. Pour tous ces crimes je demande des preuves ou témoins afin de pouvoir défendre cette délégation et représentant du peuple Âzâd Shuda en conséquence.

J'avais parlé sur un ton clair et fort, sans que cela ne choc l'assemblée. Je ne souhaitais que marquer les esprits et démonter une part une les accusations et par la suite montrer les bienfaits d'accueillir définitivement ou non ce peuple en fuite.

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Ryad Assad
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Le venin dans nos veines EmptyMer 29 Avr 2020 - 17:12
Dairon était un garçon fiable, serviable et obéissant. Croiser un elfe correspondait à peu de choses près à l'événement le plus excitant de sa vie entière, et il n'était pas tout à fait certain de savoir comment y réagir. Son flegme était lié à la force de l'habitude, mais lorsqu'il entra dans une véritable conversation avec Sigvald, il ne put cacher bien longtemps son souci. L'immortel s'efforça de lui expliquer la situation de manière claire, sans l'inquiéter outre mesure, mais les rumeurs de la présence d'un dragon réactivaient de profonds souvenirs enfouis dans la mémoire collective. Esgaroth craignait ce genre de légendes, et cette nouvelle pouvait enflammer la population.

Sigvald voulait cependant se montrer rassurant, et confia une mission au jeune page. Contacter les Ménestrels, et les mettre au courant de la situation, de la question de la bête, de l'arrivée de ces étrangers en ville. Le garçon cligna des yeux à plusieurs reprises, surpris par cette demande particulièrement. Elle venait d'un Elda, cependant, et il se sentait honoré qu'on lui confiât une tâche d'une telle importance :

- Ce sera fait, sire. Je m'en chargerai dès que possible.

Cependant, l'Elfe était également curieux au sujet d'un détail que Dairon avait évoqué l'air de rien. La question de la sorcière… Le jeune garçon ne lui avait pas parlé directement, mais il l'avait écoutée à quelques reprises, et il se souvenait parfaitement de ce qu'elle avait dit :

- Oui, la sorcière… Elle est venue à Esgaroth il y a quelques temps, pour enquêter sur les disparitions sur le Lac, mais les gens d'ici ne l'aimaient guère. Surtout les femmes, je crois qu'elles étaient jalouses. Après avoir enquêté, elle a demandé l'aide du comte, en lui disant qu'il s'agissait d'un dragon. Mais personne n'a voulu la croire, alors elle est partie… Un beau jour, elle a tout simplement disparu, en laissant un avertissement.

Il marqua une pause lourde de sens, avant d'ajouter :

- Elle a affirmé que la bête n'était pas revenue pour rien… qu'elle cherchait quelque chose.

Il fut bien en peine d'en dire davantage, ni même d'expliquer quel était le sens précis des paroles de la sorcière. Était-ce une menace, ou bien une manière d'effrayer les habitants de la cité lacustre ? Était-ce un conseil particulièrement bien informé qui aurait dû les pousser à agir ? Difficile à dire. Les dragons n'étaient pas connus pour être en quête d'autre chose que de l'or, des trésors, des pierres ou des objets précieux. La créature du lac était-elle de cette engeance ? Cherchait-elle aussi à s'asseoir sur un tas d'or en dévorant tous ceux qui passeraient à proximité ?

Dairon n'était hélas pas en mesure de résoudre ce mystère, pas davantage que Sigvald qui devrait creuser la question…


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Le venin dans nos veines Pantea10

Pantea ne put s'empêcher de froncer les sourcils en entendant la rebuffade du comte Saule, qui de toute évidence ne voulait pas qu'une femme osât s'imposer ainsi au milieu de tous les hommes qui constituaient l'assemblée. La situation de son sexe n'était guère plaisante au Rhûn, mais au moins elle avait la certitude que devant n'importe quelle assemblée, elle aurait été en mesure de plaider sa cause personnellement, et non par l'entremise d'un avocat commis d'office, qui semblait aussi peu enclin de prendre la parole qu'elle l'était de la laisser.

Elle jeta un regard appuyé à Sigvald, comme pour lui faire comprendre que tous les espoirs de son peuple reposaient désormais sur ses épaules. Ce n'était pas pour l'enchanter, évidemment. Elle avait conscience que les relations entre les Elfes et les Orientaux n'étaient pas au beau fixe, et l'idée même d'avoir à confier le poids d'une telle responsabilité entre les mains d'un individu qui l'aurait tuée sans la moindre hésitation dans d'autres circonstances la terrifiait. Tant d'Affranchis attendaient patiemment leur retour pour envisager une existence différente, meilleure, plus confortable, et elles ne pouvaient même pas leur offrir la plus petite garantie.

Elle avait l'impression d'abandonner les siens.

L'argumentaire de Sigvald fut cependant précis et efficace, retranché derrière un argument principal : le comte n'avait pas apporté la preuve de ses dires, et ses accusations ne semblaient pas fondées. Ce n'était pas la défense la plus efficace, car la plupart des souverains s'affranchissaient librement de ce genre de considérations, et laissaient aux accusés le soin de prouver leur innocence, sans se compliquer inutilement la vie à chercher des éléments à charge. Saule, cependant, cherchait à asseoir son autorité, et il ne pouvait pas simplement balayer les arguments de l'Elfe d'un revers de main.

Il devait trouver une carte à abattre, et son sourire en disait long sur sa confiance.

D'un geste de la main, il ordonna à ses gardes de faire entrer un homme que l'on avait tenu jusqu'à présent hors de vue, dans une pièce adjacente. C'était de toute évidence un pêcheur modeste, qui n'avait pas l'habitude de se trouver en si noble compagnie. Le malheureux observait les dignitaires d'Esgaroth avec inquiétude, mais il se figea en découvrant le visage de Sigvald qui l'observait. Il n'avait aucune idée de ce qui se jouait, mais il aurait reconnu cet Elfe entre mille, et la réciproque était vraie. Le pêcheur faisait partie de ceux qui avaient partagé une outre de vin avec l'immortel, et qui avaient beaucoup apprécié son geste.

Il eut un signe de tête amical, mais de toute évidence il n'avait aucune idée du rôle qu'il devait jouer dans toute cette affaire. Saule le fit venir à lui, et lui intima de dire ce qu'il avait à dire :

- Monsieur Wudburn, vous êtes pêcheur à Esgaroth, c'est cela ? Vous avez déclaré avoir vu des choses bien étranges, pourriez-vous nous en dire davantage ?

L'homme hocha la tête timidement, et s'avança pour s'expliquer :

- Ou-oui, m'sieur l'comte, j'ai vu des choses pas très naturelles su'l'lac. Des brumes pas bien normales, qui s'lèvent vite et qui sentent fort. Je…

Il semblait hésiter, mais un regard appuyé du comte l'incita à continuer :

- J'ai aussi vu des Orientaux, ils faisaient des choses… ils brûlaient des trucs, ils faisaient des tours de magie noire, ça oui.

- Mais vous les avez entendus, non ? Fit Saule. Que disaient-ils précisément ?

Le pêcheur sembla se souvenir de quelque chose, et il ajouta :

- Ou-oui, c'est vrai aussi ! Je… ils disaient… euh… ils disaient « on va attaquer Esgaroth ». Voilà, c'est ça qu'ils disaient, oui j'm'en souviens. Ils disaient ça.

L'assistance eut un grognement agressif, et les regards vers les trois émissaires se firent beaucoup plus menaçants. Pantea jeta un regard outré au comte, puis à Sigvald. C'était un mensonge, un mensonge éhonté, mais qui correspondait parfaitement à ce que les gens du Lac voulaient entendre. Le poison de haine dans leurs veines les rendait insensibles à la logique, et il faudrait beaucoup d'efforts de la part de l'Elfe pour réussir à retourner la situation. La femme au voile comptait sur lui pour y arriver, car ils n'avaient pas d'autre option pour l'heure s'ils voulaient éviter une guerre.


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Le venin dans nos veines EmptySam 6 Juin 2020 - 11:51
Gagner du temps, voilà ce qu'était mon objectif. Le messager devrait être déjà en route pour Dale et les ménestrels devraient déjà répandre la menace du jeune vers, menace qui éclipserait totalement celle de potentiel Orientaux venus répandre la mort sur le lac ; ainsi que la venue de réfugié ancien esclave de toute origine qui demande asile après avoir mis le Rhûn en échec.

Mais pour le moment je me trouvais dans une posture bien délicate, j'avais entre mes mains la vie de quasi tout un peuple, bien que son nombre soit réduit pour le moment, il avait un grand potentiel. Pour la première fois, sans devoir sortir ma lame et combattre je pourrais enfin sauver la vie de gens que je considérais presque comme des « camarades » dans le sens où avec notre passé similaire je me sentais plus proche d'eux que quiconque en cet instant.

Je me devais de placer les bases avant de creuser et  de détruire, comme je l'avais appris au service de Melkor.

Je saluai avec autant de plaisir que j'avais passez avec les pêcheurs le témoin qui semblait tendu, il avait à coup sûr reçu des pressions de la part des autorités, il me fallait démonter son témoignage sans pour autant le faire passé pour un menteur.

À dire vrai Mon Seigneur, je reviendrais si vous me le permettez sur le témoignage de Monsieur Wudburn. Il serrait bon pour nous tous de savoir quel peuple vous accusez et comment il a vu le jour, comment ils en sont venu à arriver sur les terres de Sa Majesté le Roi Gudmund et leurs motivations, puis je reviendrais sur ce témoignage.

Un signe rapide de tête du Comte lui indiqua de poursuivre, chose qui l'ennuyait visiblement déjà. Je me tournai vers les deux dames et leur parlai à voix basse.

Racontez-moi avec sincérité l'histoire de votre peuple, de sa création jusqu'à ce jour et je leur retranscrirais en même temps vos dires. Faites un résumé simple et mettez l'accent sur votre quotidien en tant qu'esclaves, les origines des membres de votre peuple, leur qualité, mais surtout les combats contre vos anciens maîtres.

Voilà comment gagner du temps, la suite fut un récit bouleversant, aussi triste que brutal de par les évènements raconter. J'avais suffisamment scruté les visages des gens lors de mes interrogations en Harad pour savoir quel sentiment toucherait qu'elle personne aux vues de ses expressions. Mon récit, leur récit, je le contais pour tous, choisissant à qui m'adresser et regarder. Suite au témoignage de Pantea l'ambiance c'était plus qu'alourdit, les mines étaient maussades et les regards de haine s'étaient pour une bonne partie muée en pitié, certains soldats semblaient faire montre de respect comme un soldat à un autre. Bien qu'il me semble avoir touché beaucoup de cette assemblée, le Comte Saule, lui, semblait plus détendu, mais toujours aussi perplexe.


* ~ ~ *~* ~ ~ *


Maintenant revenir sur le témoignage de Monsieur Wudburn et l'éjecter de ce jugement sans pour autant lui nuire. J'échafaudai un plan précis bien que bancale, je me souvenais mot pour mot les paroles du témoin, le tout maintenant était de démonter tout ça. J'entamai la discussion sur un ton décontracté.

Bien, Monsieur Wudburn j'ose espérer avoir bien lavé vos filets... Oui ! Votre témoignage, pourriez-vous revenir dessus et me répéter vos paroles de tout à l'heure.

Je soulignait les quelques erreurs et ses paroles changeantes et les garda pour moi. Ce n'était pas encore le moment de « détruire ».

Donc si je reviens sur ce que vous avez confiés à cette assemblée et selon vos souvenirs vous auriez entendu cette phrase venant des Orientaux. Je me tournai rapidement vers les émissaires Âzâd Shuda et leur intima un peu de sérieux et revint vers le pêcheur. Puis je "traduisis" dans un rhûnien approximatif, le langage des esclavagistes, mais avec une voix convaincante tout en intégrant le mot Esgaroth dedans ce qu'avait soi-disant entendu le pêcheur. Donc si ces personnes étaient de vrai Orientaux, ils auraient parlé dans leur langage et non en Westron, tout comme vous tous vous parleriez en Westron et non en Rhûniens alors que vous êtes entre vous et "seuls". Alors... Si je ne m'abuse ça donnerait ceci. Jouer-Saute-Mouton-Esgaroth. C'est bien cela que vous avez entendu ?

Je me contentait de prendre les choses simplement sans me prendre la tête à leur expliquer le pourquoi du comment, raisonner directement un audience recluse derrière un rempart de haine ancestrale était un défi insurmontable et je m'appliquais simplement à les faire ouvrir la porte de ce dis mur, doucement, par les sentiments et non par leur bon sens.
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Ryad Assad
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Le venin dans nos veines EmptyMar 30 Juin 2020 - 14:44
Le venin dans nos veines Pantea10   Le venin dans nos veines Nevy10


Wudburn était un idiot, mais pas un homme foncièrement malhonnête. Il avait sincèrement voulu aider le comte d’Esgaroth en lui offrant ses services, et on lui avait affirmé que ce menu mensonge lui permettrait de protéger toute la cité. Il s’agissait simplement de prétendre avoir vu et entendu ce que tout le monde savait par ailleurs : que les Orientaux étaient des monstres sanguinaires animés d’intentions malfaisantes. Il n’avait jamais pensé à mal, et n’avait jamais anticipé que les Rhûnedain qui venaient de débarquer dans sa cité pouvaient être autre chose que des envahisseurs ou de sinistres esclavagistes. La décision de Sigvald d’humaniser ces étrangers, en leur donnant la parole, et en leur permettant de faire étalage des souffrances qu’ils avaient pu traverser, fit l’effet d’un coup de poing à tous les membres de l’assistance.

L’Elfe était noble et fier, et beaucoup des Hommes de la cité du lac admiraient les gens de son peuple, leur beauté, leur intelligence, mais aussi leur sagesse. Cependant, leurs émotions étaient trop souvent déconnectées de celles des Edain, car leur vie éternelle ne les prédisposait pas à voir le monde sous le même prisme. La perspective de la mort et de l’oubli, qui hantait chaque homme et chaque femme en Terre du Milieu, rendait l’existence des Hommes similaire, qu’ils fussent à l’Est ou à l’Ouest de l’Anduin. C’était cela que Sigvald souhaitait leur rappeler.

Pantea lui jeta un regard surpris, désarçonnée par sa proposition, mais elle répondit simplement :

- Je ferai la traduction, mais je tiens à donner la parole à Dame Nevä. Elle est la Voix de notre peuple.

Le comte Saule parut ne pas apprécier de voir ceux deux femmes prendre la parole impunément dans ce procès improvisé, mais puisqu’il l’avait organisé et que Sigvald avait souhaité donner la parole aux accusés, il ne pouvait décemment pas reculer maintenant et leur intimer de se taire. Pris à son propre piège par l’habileté de l’Elfe, il fut contraint de se mettre en retrait, et de laisser cette femme au visage marqué par la servitude prendre la parole. S’il avait su à qui il avait affaire, il n’aurait probablement jamais autorisé qu’elle s’exprimât publiquement.

Nevä se leva doucement, et s’avança d’un pas au milieu de l’assistance, comme un signe de défi. Elle était majestueuse malgré ses atours déchirés et tâchés de sang. Elle dégageait une aura de puissance et de commandement qui ne l’avait jamais quittée, et son esprit inflexible demeurait aussi acéré qu’une lame elfique. Il y avait chez elle plus de force de caractère que chez les soldats les plus vaillants, et bien qu’elle ne combattît pas à l’épée comme beaucoup, elle était une guerrière dans l’âme. Indomptable, résolue et fière, elle avait fait le serment de protéger le peuple des Affranchis de tout mal, et elle était déterminée à ne pas les abandonner. Pas après avoir tant sacrifié pour arriver là.

Lorsqu’elle prit la parole, sa voix claire et puissante résonna dans le Castel, faisant tressauter de surprise tous ceux qui se trouvaient là. Nevä était la Voix, et la voix était sa seule arme. Les mots qu’elle utilisait demeuraient étrangers aux oreilles des gens d’Esgaroth, mais les émotions, la passion qui coulait entre ses lèvres étaient universelles.

++ Messieurs, je sais que les peuples de l’Ouest n’entretiennent pas d’esclaves, et vous peinez sans doute à imaginer ce que représente notre vie. Laissez-moi vous expliquer la mienne, et celle de tous les esclaves d’Albyor, qui plient l’échine sous le régime le plus atroce et le plus violent qui soit. ++

Pantea faisait merveille, traduisant fidèlement toutes les paroles de Nevä, en profitant des pauses régulières dans son récit. Le contraste était saisissant entre l’énergie déployée par la narratrice, et le calme stoïque de la traductrice, qui assénait les propos avec méthode et élégance.

++ Albyor est une cité où la vie d’un esclave vaut moins que celle d’un cheval. Les plus fortunés et les plus talentueux parmi nous peuvent espérer vivre comme esclaves domestiques, mais l’immense majorité d’entre nous, dont moi, est chargée de travailler dans les mines, ou les chantiers de construction. Nous taillons la roche à longueur de journée, et quotidiennement des éboulements viennent prendre la vie de courageux esclaves. Chaque jour, des dizaines d’entre nous meurent, et leurs corps ne sont même pas enterrés dignement. Ils périssent, oubliés de tous, anonymes, jetés dans des fosses communes pour déblayer le passage et faire de la place à de nouveaux esclaves décharnés qui doivent prendre leur place, en priant pour ne pas mourir à leur tour. Dans ces mines, j’ai perdu des amis, des proches, des confidents, tous ceux qui m’ont donné la force de continuer à avancer sont morts dans ces cages, sous les coups de gourdin des geôliers, battus à mort pour avoir demandé de l’eau, ou pour avoir voulu prendre une pause. Ceux qui sont jugés inutiles périssent les premiers, car nos maîtres ne veulent pas se donner la peine de nourrir ceux qui ne leur rapportent pas d’argent. ++

La douleur dans sa voix n’était pas feinte, pas davantage que l’indignation que l’on sentait poindre par-dessous la souffrance. Elle ne parlait pas en vains mots, elle se contentait de décrire du mieux qu’elle le pouvait la violence de son existence, la cruauté de ses maîtres, et l’inhumanité du traitement qui était réservé à ceux qui, comme elle, avaient le malheur d’être pris au piège dans les entrailles d’Albyor.

++ Des hommes, des femmes, des enfants, par milliers travaillant dans ces mines infâmes. Nous sommes le mortier entre les briques. Nous sommes les graviers sur le sol, nous sommes les charpentes, les rigoles, nous sommes les fondations de cette cité. Albyor est bâtie sur notre sang, sur nos corps, et sur notre désespoir. Mais croyez-le, notre situation s’est encore aggravée. Le Dieu Sombre est depuis peu devenu le véritable maître de la ville, et en son nom des vies sont sacrifiées. De plus en plus fréquemment, et de plus en plus nombreuses, car sa soif de sang ne connaît pas de fin. Le temps est venu pour Melkor le Terrible et son fidèle représentant, Jawaharlal, grand prêtre de Sharaman, ainsi que son bras armé, le tribunal des Ogdâr-Sahn. Des heures bien sombres, qui alourdissent encore le fardeau insupportable qui pèse sur les épaules des miens. Voilà la réalité, messieurs. Voilà le monde duquel nous venons, et dont nous nous sommes échappés au prix de grands sacrifices. ++

Cette fois, Nevä ne put retenir son émotion, et sa voix se fit tempétueuse face à l’injustice et à la mort de tant des siens. Elle revoyait encore les visages de ceux qui avaient succombé parmi les premiers à la furie des hommes de la garde. Elle revoyait le navire en flammes, sur lequel elle avait perdu tant de compagnons de valeur. Elle sentait encore le goût du sang dans sa bouche. Elle entendait les cris désespérés de ceux qu’ils n’avaient pas pu prendre à bord, et qui avaient sauté de toutes leurs forces pour espérer atteindre le pont. Ils en avaient pris autant qu’il leur était possible, puis ils étaient partis. Combien en avaient-ils laissé sur le quai ? Combien de centaines d’hommes, de femmes et d’enfants, aussi courageux qu’eux pour avoir voulu s’échapper, mais malchanceux de ne pas avoir pu embarquer à bord de l’Âzâdî ? Elle frémissait rien que d’y songer.

++ Nous nous sommes battus sans armes contre l’élite de l’armée d’Albyor, à la seule force de nos bras et de nos convictions. Nous avons traversé la moitié du Rhûn en échappant à tous les dangers qui se sont abattus sur nous, à toutes les tentatives de nous arrêter. Nous avons survécu à la faim qui nous tenaillait, nous avons survécu à l’épuisement, à la maladie… Et nous sommes arrivés jusqu’à vous aujourd’hui, emplis d’espoir. Voilà qui nous sommes. Nous ne cherchons ni la guerre, ni la querelle : seulement un endroit où vivre en paix, conformément à vos lois, et dans le respect de nos coutumes et de nos valeurs. ++

Pantea acheva sa traduction, mais se permit d’ajouter une note plus personnelle :

- Aux paroles de Dame Nevä, je tiens à ajouter en mon nom propre que ces Affranchis se sont battus pour leur liberté, mais ils craignent au moins autant votre peuple que leurs anciens maîtres. Ils espèrent simplement que les idéaux des « Peuples Libres » ne sont pas que des paroles creuses, comme beaucoup le pensent à l’Est. Vous avez une chance de prouver que l’honneur des Hommes de l’Ouest n’est pas tombé en désuétude.

Elle se tut, et laissa l’assistance dans un silence pesant. Un silence de mort. Sigvald lui-même ne connaissait pas l’entièreté du récit des Affranchis, et il n’imaginait sans doute pas à quel point celui-ci pouvait être émouvant. Ces esclaves avaient traversé des dangers inimaginables pour arriver où ils en étaient aujourd’hui, et à ce titre ils étaient aussi dignes d’être loués que les plus grands héros. Il serait prodigieusement tragique si leur histoire devait s’achever ainsi, devant les portes d’Esgaroth, à mourir de faim car les peuples de l’Ouest leur auraient refusé l’aumône.

L’Elfe avait eu ce qu’il souhaitait en donnant la parole à Nevä et Pantea, et il était désormais temps pour lui d’insister pour faire plier l’accusation. Sa cible fut naturellement Wudburn, qui avait été particulièrement ému par la tirade qu’il venait d’entendre, et qui s’était mis à reconsidérer profondément sa vision des Orientaux. Il était la faille dans la défense, le point faible de tout l’argumentaire du comte, et la cible idéale d’une démonstration en règles. Sigvald insista sur un point précis, une faille dans le raisonnement de Wudburn : comment avait-il pu comprendre ce que les Rhûnedain pouvaient dire, puisqu’ils ne parlaient pas la langue commune ? Les nobles qui se trouvaient autour du comte, et qui avaient écouté toute la conversation avec attention, ne purent que se ranger derrière l’argument du bon sens, abandonnant peu à peu le comte à sa tentative de contrer l’arrivée de ces étrangers. Ils n’aimaient pas davantage les gens de l’Est, mais ils ne souhaitaient pas être ceux dont on se souviendraient qu’ils avaient été parmi les plus radicaux, ceux qui avaient refusé assistance à une horde de miséreux en haillons qui venaient quémander un peu d’aide.

Saule sentit le changement d’atmosphère dans la salle, et il lâcha un soupir de résignation :

- Je suppose que monsieur Wudburn a pu se tromper sur son interprétation, après tout. Il semble désormais évident que monsieur Wudburn n’étant pas un traître à son propre peuple, il n’a jamais eu connaissance de la langue des gens de l’Est.

L’accusation contre Sigvald était à peine voilée, et d’une grande violence, mais Saule n’avait plus que cela désormais. L’insulte et le mépris, car il se savait battu. Il poursuivit :

- Le peuple d’Esgaroth n’est ni lâche ni cruel, et si vos intentions sont pacifiques, gens du Rhûn ou non, nous ne vous ferons pas une guerre meurtrière qui aboutirait à la destruction de votre peuple. Je comprends que vous parlez au nom d’un groupe plus large, cependant, et vous comprendrez sans peine que je ne puisse pas donner asile à tant des vôtres au sein de notre belle cité. Je suis chargé de faire respecter l’ordre public, et bien que votre histoire vous fasse paraître fort respectable, je ne peux accepter votre parole en seule garantie. L’accès à Esgaroth demeurera donc fermé à vos compagnons, même si vous trois, en qualité d’émissaires et de représentants des… Affranchis – c’est bien ça ? – bénéficierez d’un sauf-conduit qui vous permettra de rejoindre le Castel afin de traiter avec moi.

C’était une concession honnête, les anciens esclaves ne pouvaient décemment pas espérer mieux en la circonstance. Il restait encore un détail important à régler cependant : Saule avait expliqué à Nevä et ses compagnons où est-ce qu’ils ne pourraient pas se rendre, mais il ne leur avait pas encore dit explicitement où ils seraient autorisés à s’installer :

- Afin de vous permettre de vous reposer, je vous autorise à titre exceptionnel et temporaire à débarquer à l’Ouest du Lac, au Sud de la Rivière de la Forêt. Il vous sera naturellement interdit de vous aventurer plus loin dans le territoire d’Esgaroth sans autorisation, et cette situation demeura ainsi tant que je n’aurai pas donné d’ordre contradictoire, et dans l’attente de directives plus précises de la part du Roi Gudmund de Dale, notre suzerain à tous, qui sera seul à même de statuer quant à votre avenir ici. Je n’ai qu’une seule condition : puisque vous affirmez que vous n’êtes responsable en rien des disparitions qui ont eu lieu sur le lac, alors je veux que vous me rameniez la tête du coupable. C’est à cette seule condition que vous pourrez bénéficier de l’accueil du peuple d’Esgaroth, et que vous pourrez librement vous installer sur ces terres. Repartez, Dame Nevä. Prévenez votre peuple que vous avez obtenu la mansuétude du comte Dauert Saule d’Esgaroth, et que vous devez cette décision à l’intercession de Sire Sigvald de la Forêt Noire. C’est sa responsabilité qui est engagée en votre nom à tous, et dans l’intérêt des relations entre Eryn Lasgalen et le royaume de Dale, je vous encourage à ne pas faire de vagues.

Saule n’ajouta pas un mot, et il congédia d’un geste de la main ces émissaires qui venaient de si loin, et n’en revenaient pas de leur chance. Sitôt qu’ils furent sortis, ils se laissèrent aller à pousser un immense soupir de soulagement, et Nevä se laissa même aller à quelques larmes nerveuses qui contrastaient avec son sourire ravi. Elle adressa quelques mots à Sigvald, que Pantea traduisit :

- Elle vous remercie infiniment, Elfe. Vous avez sauvé le peuple des Affranchis, et vous avez gagné son amitié. Grâce à vous, la justice a été rendue.

Pantea elle-même semblait exulter, et elle prit Nevä dans ses bras en dansant sur place, cédant à une folie passagère. Elles étaient belles à voir, et l’homme masqué qui les escortait se laissa aller à applaudir avec elle, heureux de pouvoir cesser de fuir. Cependant, il leur fallait encore trouver et tuer la bête qui rôdait dans le lac, ce qui ne serait pas une mince affaire…


~ ~ ~ ~


La matinée était déjà bien avancée quand ils quittèrent le Castel. Sigvald avait à faire, pourtant la fatigue ne tarderait pas à le gagner, tant il avait vécu de choses éprouvantes, sans pouvoir se reposer. Même les Eldar avaient leurs limites. Il n’eut pas trop le choix de ses priorités, car on vint bientôt le trouver avec de mauvaises nouvelles.

- Sire, avait lancé un messager, nous avons tout tenté pour votre compagnon, le Seigneur Achas, mais nous ne sommes pas en mesure de le guérir. On m’a envoyé vous chercher car il semblerait que ses heures soient comptées.

La nouvelle avait fait l’annonce d’une douche froide à la compagnie des Rhûnedain, qui avaient insisté pour suivre Sigvald. Ils avaient attendu dehors, pendant que ce dernier pénétrait dans la maison de soin où l’Elfe avait été placé en toute urgence. Ses draps étaient encore rougis de sang, à l’endroit où aurait dû se trouver sa jambe. Il ne restait plus qu’un moignon de chair sanguinolente, pudiquement recouvert par le drap. Une telle blessure aurait tué un homme dans la minute, mais la constitution toute elfique de l’archer lui avait permis de survivre assez pour être ramené à Esgaroth. Hélas, son cas était trop grave. Il n’y avait guère que dans une grande cité des Elfes qu’on aurait pu le soigner, mais ils n’auraient jamais le temps d’y arriver.

- Sigvald, fit-il d’une voix éteinte en voyant son compagnon arriver.

Il invita l’Elfe renégat à s’asseoir sur un coin du lit, et lui souffla :

- Est-ce que vous avez tué cette chose ? Il ne faut pas la laisser faire de mal à quiconque, Sigvald. Ni au peuple d’Esgaroth, ni à Delaynna. D’accord ? Promettez. Promettez-moi !


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