Le deal à ne pas rater :
Cdiscount : -30€ dès 300€ d’achat sur une sélection Apple
Voir le deal

 Aurhen "Breithogûr", ranger ñoldorin en quête de pardon

Aller en bas 
Aurhen « Breithogûr »
Ranger Elfe
Ranger Elfe
Aurhen « Breithogûr »

Nombre de messages : 14
Rôle : Ranger noldorin

~ GRIMOIRE ~
- -: Ñoldo
- -: 189 P.A. du Soleil
- -:

Aurhen "Breithogûr", ranger ñoldorin en quête de pardon Empty
Aurhen "Breithogûr", ranger ñoldorin en quête de pardon EmptyLun 4 Mai 2020 - 10:31
Aurhen « Breithogûr » Le temps ne déleste pas du fardeau de la honte…

Nom : Aurhen, sa mère ayant dit de ses yeux qu’ils avaient capturé un éclat de soleil.
Surnom : « Breithogûr », c’est le surnom qu’il s’est lui-même donné puis qu’il a assumé durant de longues années suite à sa défection lors de la défaite de Tumhalad. C’est sous ce nom qu’il a servi le roi Oropher puis, après lui, le roi Thranduil.
Âge : Né en 189 du Premier Âge du Soleil.
Genre : Masculin.
Race : Ñoldo de Nargothrond.
Alignement : Neutre Bon.
Rôle : Ranger Elfe en quête d’un Seigneur.

Équipement :
Des vêtements de voyage à la mode Nandor.
Un arc de Vert-Bois-Le-Grand.
Une épée courte de Vert-Bois-Le-Grand.

Particularité : Son visage porte la marque des guerres passées. Il est rare de voir un membre du beau peuple porter des cicatrices si profondes.
Description physique :

Aurhen est un fier représentant des Ñoldor de Nargothrond : à la fois grand, finement bâti et pourtant solide, il possède de longs cheveux d’ébène comme souvent chez les gens du deuxième peuple des Eldar. Il compte deux singularités tout de même, l’une innée, l’autre acquise. La première, ses deux yeux sont d’un joli doré qu’il a hérité de sa grand-mère paternelle, une dame des Vanya, restée en Aman mais dont le sang s’est soudainement exprimé dans son regard. La seconde, son beau visage est parcouru de cicatrices nettement visibles bien qu’elle n’inspire pas la révulsion, souvenir de sa défaite face à Glaurung, l’immonde ver.

Pour ce qui est de l’habit, il a adopté la mode des Nandor et des gens de la forêt, s’habillant simplement dans des teintes de couleurs qui lui permettent d’aisément disparaître à la vue de quiconque. Habitude de Ranger, il est constamment prêt à pouvoir partir pour de longues marches, une sacoche ou un barda sur le dos.

Description mentale :

Aurhen est bon de nature, malgré tout ce qu’il a pu en penser. Son passé l’a longtemps tourmenté mais il est aujourd’hui capable de l’assumer. Valeureux et altruiste, sa propre défaillance l’a amené à une grande humilité et à ne plus juger son prochain selon l’espèce à laquelle il appartient : s’il a pu incarner la pire lâcheté parmi un beau peuple comme le sien, pourquoi ne pourrait-il pas trouvé d’être profondément bon même chez les Suderons ?

Ayant reçu une éducation de la fine fleur de Nargothrond, il paraîtra facilement raffiné, voire efféminé, aux yeux de gens plus rustres et moins éduqués que lui. Il utilise le plus souvent un langage soigné, parfois fleuri, aime la lecture, et la poésie. Il d’ailleurs lui-même un excellent joueur de lyre mais n’a pas souvent l’occasion d’en faire la démonstration.

Son principal souhait, aujourd’hui, est de retrouver le repentir auprès d’un Seigneur Ñoldo et de redorer le blason de sa famille, dont, d’ailleurs, il ignore en grande partie le destin. Il souhaite plus que tout pouvoir faire amende honorable et montrer enfin que si, autrefois, il a failli, il est aujourd’hui d’une plus noble grandeur d’âme.

Histoire

Soleil inondait les jardins. Les pétales rivalisaient de pourpre, d’ocre et de safran. Les oiseaux mêlaient leurs chants aux notes cristallines de l’eau alors qu’un vent venu du sud jouait les harmoniques avec douceur dans les branchages. Assis sur un banc de pierre, Aurhen se perdait dans ses contemplations. Les lieux, déjà, ne portaient plus les stigmates de la tragédie. Pourtant, ils avaient changé. Les fresques d’Imladris avaient traversé, inchangées, les millénaires. Elles n’étaient plus les mêmes aujourd’hui. Fendeval tout entière, pour dire vraie, avait changé. La présence d’Elrond avait passé. Elle n’était plus la Maison, qu’autrefois, il avait visité.

« Excusez-moi, puis-je vous interrompre ? »

La voix douce le tira de ses pensées. Il détacha son regard des peintures murales et découvrit les grands yeux bleus de son hôte, lesquels étaient encadrés d’or.

« Bien sûr. Comme vous le voyez, je ne suis guère très affairé, et vous n’interrompez rien de plus important qu’une flânerie. »

Ils échangèrent un sourire.

« J’espère ne pas me tromper mais vous êtes bien celui qu’on appelait autrefois Breithogûr ?

– Oui. Bien que j’espère, à partir d’aujourd’hui, porter de nouveau mon premier nom, Aurhen.

– Si c’est votre désir, permettez-moi d’être parmi les premiers à l’employer de nouveau.

– Faites, donc. Même si vous me flattez beaucoup en suggérant d’y voir un privilège.

– Je suis terriblement jeune, quoique j’ose me dire érudit et je n’ai jamais connu que le Troisième Âge et vous, de ce que j’ai cru entendre, avez vu le Beleriand et le monde d’autrefois. Je… J’étais dans la salle du conseil lorsque vous vous êtes présenté. J’ai entendu que vous étiez de Nargothrond. »

Un temps, il n’y eut de nouveau plus que les chœurs de la nature pour combler le silence. Un voile était passé sur le regard mordorée de l’Eldar aux cheveux d’ébène. Après un profond soupir, il répondit :

« Vous avez entendu juste, bien que j’avais laissé le monde l’oublier il y a longtemps. Mais, je réalise que moi-même, j’en sais pour l’instant fort peu sur mon hôte, pas même son nom. Il sourit de nouveau.

– Oui, je manque à toutes mes obligations. Je suis Gliriaur, fils d’Aerlinn. Je suis né et j’ai vécu la plupart de mes années entre la belle Imladris et les grandes forêts de Lórien, mes parents se trouvant partager entre les deux royaumes. A grandir au milieu de ces lieux de légende, je suis tombé amoureux des temps anciens et j’ai consacré ma vie à recueillir les récits et les souvenirs de ceux-ci. Je dois dire que, jusqu’à aujourd’hui, je n’ai que rarement eu l’occasion que de compiler ce qui était déjà connu. J’ai eu l’audace de vous aborder ainsi car n’ayant jamais lu votre nom, j’ose espérer que vous pourriez, pour la première fois depuis longtemps, apporter des éléments véritablement nouveaux. En vérité, j’espérais que vous accepteriez de me raconter votre histoire. »

Le visage d’Aurhen ne masqua pas sa surprise. Il ne s’était jamais imaginé avoir à répondre, un jour, à pareille prière. Les sentiments s’étaient levés soudainement, dans son cœur, et se bousculaient à présent. Il ne savait lequel dominer de la peine, la honte, la colère ou le remord. Comme pour répondre à ce débordement, ses yeux s’embuèrent de larmes. Il détourna le regard mais Gliriaur ne manqua pas de remarquer son bouleversement.

« Veuillez me pardonner. J’ignorais que… Je n’aurais pas dû... Aurhen ne le laissa pas achever. Il leva la main, doucement, pour l’interrompre.

– Non… Non. Vous n’avez nul pardon à demander. J’ai passé trop de temps à fuir les temps anciens qui attisent tant votre curiosité. S’il y a faute, elle est mienne. »

L’effort lui parut considérable mais après de longues inspirations, il parvint à faire refluer la marée de ses émotions et sur son visage ne planait plus qu’un léger sourire nostalgique.

« Je crois que les Valar m’offrent aujourd’hui l’occasion de réparer mes torts, à travers vous. Il faudrait que je sois fou pour être arrivé dernièrement ici en dévoilant mon nom véritable et refuser par la suite d’en porter l’histoire. Bien… Souhaitez-vous commencer à présent ? Son cœur se réchauffa en découvrant l’éclat vif des yeux du jeune érudit. Combien d’années étaient passées depuis que lui-même avait perdu cette fougue ?

– C’est-à-dire qu’il me faudra écrire et que je doute que tant de temps se raconter brièvement, si nous allions dans une des salles d’études ? Je ne doute pas que nous en trouverons une dans laquelle je disposerai d’un pupitre et vous d’un fauteuil.

– Vous êtes enfant de ses lieux et n’en suis qu’un visiteur, je vous suis. »

Le Ñoldo se leva tranquillement et s’adapta au pas de son aimable inquisiteur. A dire vrai, il sentait celui-ci tendu par l’excitation, à la façon d’un Naug venant de piocher, sans trop d’espoir, une pierre et d’y découvrir le début d’une veine de vif-argent ; non pas qu’il se considéra lui-même de cette qualité, mais du moins le jeune Elda semblait le penser. Ils quittèrent le jardin intérieur dans lequel ils se trouvaient, traversèrent d’élégants couloirs et bientôt ils se retrouvèrent dans une salle d’étude qu’Aurhen ne reconnut pas. Gliriaur rassembla quelques feuilles, de l’encre, une plume et, fébrile, invita bientôt sa source à s’épancher :

« Je doute que nous terminions en un après-midi, mais j’espère que vous trouverez le temps, durant votre séjour ici, de me donner au moins toutes les grandes lignes.

– J’ignore quand les Seigneurs pourront me recevoir, à dire vrai… Mais je pense qu’il n’y a pas de hasard et que s’il nous a été donné l’occasion de nous trouver, il nous sera offert le temps de nous dire tout ce que nous désirons nous dire.

– Il faut l’espérer.

– Bien… »

•⬨ Premier Âge de la Soleil ⬨•


Il prit une grande inspiration, ferma les yeux, écouta la voix des merles, des pinsons et des geais que laissait entrer la fenêtre ouverte, la rumeur des cascades, le bruit des bois, et le voilà bientôt qui remontait le fil de mille et mille années ; comme si le fauteuil lui-même, à l’exemple de Vingilótë, avait brisé les chaînes qui l’emprisonnait à la terre, et se retrouvait à faire émerger de nouveau le Beleriand et les fastes de Nargothrond.

« Je n’ai jamais parcouru les terres d’Aman. Je suis né en Endor, dans les jeunes palais de Nargothrond, en la cent quatre-vingt-neuvième année de la Soleil. Mon père était Celemegil, fils de Lamnûr et d’Aragaer, l’une des blondes dames des Vanyar dont j’héritais de façon surprenante des yeux. Ma mère était Heneilian, fille de Côlthela et d’Ivren. Tous, donc, à l’exception de ma grand-mère maternelle, appartenaient aux Ñoldor et de mes grands-parents, tous, sinon Côlthela, étaient des Premiers-Nés, des gens du Lac Cuiviénen.

Lorsqu’ils quittèrent Aman, mes parents emmenèrent avec eux mon frère, né sous la lumière des Arbres, et suivirent leur Seigneur, Finrod, puisqu’ils comptaient parmi ses gens de valeur. Ils participèrent aux premières batailles du Beleriand ainsi qu’à la fondation et l’érection de la belle Nargothrond, capitale du Royaume éponyme que le Roi fonda sur les berges du Sîr Narog. Les travaux avaient pris fin quelques quatre-vingts années avant ma naissance.

Je n’étais pas le premier enfant à naître là, Alfirin, ma sœur aînée, m’avait précédé dès l’an soixante-deux. Dagor Aglareb avait marqué le début du siège d’Angband, les jours semblaient merveilleux alors et ce que nous appellerions plus tard la Longue Paix était proche. C’est en ces temps de sérénité que je grandissais. Mon père, comme mon frère, Tulcambas, avaient prouvé leur valeur dans les batailles que notre peuple avait déjà menées. Vous auriez dû voir les beautés de ville. Les hautes arches, les cascades, les plafonds si élevés incrustés de tant de pierres qu’on aurait cru, à tout moment, aller sous les cieux étoilés. Par endroit, des percées déversaient les chauds rayons de la Soleil jusqu’au cœur de jardins intérieurs magnifiques. Par tout, les artisans avaient sculpté la pierre pour que le Sîr Narog afflue à travers toute la ville. C’était cent et cent fontaines encore, des jets d’eaux chantaient partout, s’élançant en arcs cristallins à travers les airs.

De mes aïeux, seul Côlthela avait traversé l’Helcaraxë aux côtés de mes parents. Nous occupions une vaste maison pleine de vie car mon oncle et mes tantes étaient là aussi. Malheureusement, Lornaeg, frère de ma mère, faisait parti des malheureux à ne pas avoir survécu aux glaces infinies du nord. Mais Ivren, sa compagne, ainsi que Menelmuin, la sœur de mon père étaient là. Celle-ci ne tarda pas à agrandir encore notre famille en se trouvant un compagnon, Airëdil, un des Falathrim voisins. Il disait avoir retrouvé dans ses yeux les profondeurs de la mer. Mes rires se joignirent à ceux de mes cousins et cousines : Main, le poète, Tadui, la superbe, et Telui, que nul n’osait défier l’arc entre les mains. Je recevais l’instruction des gens de la cour de Nargothrond. Mon père, vassal de Finrod et membre de sa garde, s’assurait que je sois à la hauteur de son nom, au moins

Le crépuscule de notre joie, comme celui du tout Beleriand, s’annonça en l’année quatre cent cinquante-cinq. Dagor Bragollach. Nous avions parfois chevauché jusqu’à l’Ard-galen, durant les jours heureux. Tantôt en exercices, l’armée devait rester vigilante, tantôt parce que Père souhaitait rendre visite à quelque cousin éloigné ou ami proche du côté de Barad Eithel. Les plaines semblaient infinies. Une mer de vert balayée par les vents. Nombreux étaient ceux qui vivaient là, sur les terres arables ou élevant de beaux chevaux… Tout cela, en une nuit. Disparu dans les flammes. Angrod et Aegnor, les fils de Finarfin, n’eurent même pas l’occasion de se défendre… Les frontières du Dorthonion, leurs demeures, plus que des cendres. »


Aurhen pris une nouvelle et profonde inspiration. Les doux souvenirs de Nargothrond avaient été aussi vifs que ceux de la plaine enflammée et les visages terribles des réfugiés.

« Sitôt que les messagers parvinrent à nos portes, le Seigneur Finrod sonna le rassemblement de l’armée. Je faisais parti du bataillon de Cavaliers-Archers de Nargothrond. Mon père ainsi que mon frère, récemment intégré à la garde, accompagnèrent le Roi de près. Nous ignorions leur nombre, nous ignorions qu’ils avaient pénétré déjà si loin avant. Nous étions éclatants, rutilants, sûrs de ces centaines d’années de tranquillité et fort du souvenir de Dagor Aglareb. Nous étions… orgueilleux. Et nous avons été punis.

L’armée traversait les marais de Serech, au confluent du cours du Rivil et du Sirion. Nous ne pouvions tenir de formation, l’endroit était parfait pour ce qui a suivi. Il en sortait de partout. Des milliers d’Orcs d’Angband, de Trolls et toutes les engeances de Morgoth. Sauron devait avoir honte, au fond, des misérables vers qu’il envoya contre les remparts de Minas Tirith, lorsqu’il se souvenait des horreurs que son maître avait créé avant lui.

S’il n’y avait eu les gens de Barahir, nous n’aurions pu que constater la mort de tous les nôtres et de notre Roi, encerclé par les marées ennemies. Les Edain parvinrent à ouvrir une brèche, au Sud, et nous pûmes nous retirer. Lorsque je retrouvais atya, il montait un cheval qui n’était pas le sien et le corps de mon frère, sans vie, était sur ses genoux. Les larmes. Son regard. En réalité, deux des miens avaient disparu dans les marais. Même si je n’avais pas à rougir de mes actions d’alors, j’eus donné n’importe quoi, à cet instant, pour être tombé en lieu et place de cet enfant d’Aman.

Revenus à Nargothrond, les choses n’eurent plus jamais l’éclat qu’elles avaient eu. Sous notre demeure, atya fit creuser un mausolée qui accueillit le corps de Tulcambas. Plus encore qu’avant, je devins le centre de son attention et il ne se passait plus un jour sans qu’il s’assurât de ma valeur au combat. Dans son cœur, le besoin de venger la mort de son fils le plus noble, sûrement, prit-il le pas sur l’amour qu’il avait pour nous. L’Ombre avait porté là son coup le plus vil.

Les fils de Fëanor, Celegorm et Curufin, ainsi que quelques-uns de leurs gens, entrèrent à la cour de Finrod durant ces années. En la quatre cent soixante-cinquième année, notre Roi trouva la mort pour préserver celle du descendant de Barahir. Les fils félons de Fëanor avaient eu une large part dans cette triste fin et furent chassés. Orodreth, notre nouveau Roi, put respirer enfin et diriger le royaume sans entrave mesquine. Durant ces années, je me liais d’amitié avec un des grands de la cour, Gwindor, promis de Finduilas, fille de notre Roi. Comme moi, il avait perdu un frère. J’entrais dans sa garde.

J’étais sur les murailles de Barad Eithel, en quatre cent soixante-douze, à ses côtés ainsi que mon père. J’assistais… à l’horrible exécution de Gelmir, son frère, que nous avions tous cru perdu. Il ne tint pas. Il sonna la charge. Je le suivais, et mon père avant moi. Si j’avais un frère à venger, il avait un fils. Nous avons rompu les lignes, mené la charge. Un instant, les forces ennemis nous submergèrent. Nous fûmes arrêtés, au milieu de la plaine, et encerclés. Là, les cors de Fingon résonnèrent et bientôt, sa cavalerie refoula l’ennemi et nous rejoignit. C’est alors que…
Une nouvelle pause. Les oiseaux, comme pour souligner l’instant, s’étaient tus eux aussi. Mon père avait perdu son propre cheval. Il… Alors que Fingon et Gwindor appelaient à poursuivre la charge, il me demanda de lui céder le mien et d’aller porter les nouvelles à la cité. Il invoqua le nom de Tulcambas, son devoir de père… Son regard. Il brûlait. Je cédais. Je descendais de cheval et je courrais à travers la plaine. Je ne le revis plus, ni même son corps.

Je gagnais la ville, transmettais les messages. Du haut des remparts, je voyais surgir les forces cachées de Gondolin et du Roi Turgon. Je demandai un cheval, on me le donna, je rejoignis son armée. Je ne saurais vous décrire la violence des combats. Les chansons ne mentent pas. Vous connaissez l’issu. J’étais toujours parmi les gens du Roi Turgon lorsque les fiers Edain d’Hurin et Huor nous permirent de fuir. Je galopais à bride abattue jour et nuit jusqu’à Nargothrond pour porter au roi Orodreth l’horrible nouvelle du Nirnaeth Arnoeiad et de tous nos morts.

En moi, quelque chose avait commencé de se briser. J’avais vu les Balrogath, les dragons… Pour ma mère, pour les miens, je gardais un visage fier et digne mais déjà, j’avais commencé de désespérer. Comment pouvions-nous… Nous portions la guerre contre un Vala. Le plus infâme, le plus vil, le plus haïssable. Mais il restait un Vala et avait commencé de nous détruire. Un instant, mon horizon s’éclaira lorsqu’en quatre cent quatre-vingts dix, Gwindor passa de nouveau les portes de notre cité. Avec lui allait le fléau de la cité. Cinq années plus tard, il était devenu l’un des plus grands de nos Capitaines et son avis étouffait tout autre. J’avais entendu les messagers d’Ulmo. Lorsque je partais pour les plaines de Tumhalad aux côtés de Gwindor – je refusais de perdre mon ami une nouvelle fois –, c’était avec la certitude funeste que le destin nous frapperait une dernière fois. Nous fûmes totalement dépassés. Main, parti à mes côtés, tomba peu de temps avant la bannière du Roi. C’est alors que je le voyais… L’immonde Ver. Glaurung. Je… »


La voix lui manqua tout à fait. Sa voix avait tremblé avant de s’éteindre tout à fait et alors qu’il ouvrait les yeux pour chasser ces vieilles visions d’horreur et ces prunelles monstrueuses, il se rendit compte de toute la puissance qu’elles conservaient malgré les milliers d’années qui s’étaient écoulées.

« Je…

– Et si nous faisions une pause ? Vous parlez déjà depuis un moment et j’ai besoin d’organiser toutes les notes que j’ai déjà prise. Un peu de miruvor, peut-être, et des fruits nous feraient le plus grand bien ?

– Je vous remercie. C’est la première fois que je parle de ces funestes événements et il faut croire que les avoir gardés enfouies si longtemps n’aura que trop bien conservé leur souvenir. Si vous le voulez bien… Je crois que tout cela est bien trop sombre pour être évoqué sinon à l’aurore, lorsque plusieurs heures d’un clair jour pourront en dissiper les ténèbres. »

L’historien n’insista pas. Il n’était pas la peine d’être Magicien pour deviner la peine qu’éprouvait son hôte. Depuis des centaines d’années, Imladris était un lieu de guérison, elle trouvait une nouvelle occasion en Aurhen de jouer son rôle curateur. Les sombres souvenirs furent chassés par une fin de journée et une nuit de joie, de chants et d’agréables conversations.

« … Ces yeux… Je ne saurais vous les dire. Nous avions déjà perdu. Mon Roi était mort, j’avais perdu Gwindor et Main gisait sous les corps de nos frères… Il me brisa littéralement le cœur et l’âme. Je sautais sur un cheval, j’ignore lequel, et je fuyais, en proie à la plus grande des peurs. En vérité, j’échappais de peu à la mort. Je n’avais pas encore atteint le pont. Ce pont maudit contre lequel le divin Ulmo nous avait prévenu. Les pas de mon cheval ne suffirent pas à couvrir le tumulte des monstres qui me suivaient. Nous étions dans la déroute la plus totale, et j’étais au désespoir le plus noir. Si mon destrier ne m’avait porté, mes jambes n’eussent pu le faire. Alors que je voyais, au loin la route qui menait à notre cité, je décidais de m’en détourner. Tout était perdu et je ne pouvais m’imaginer à nouveau faire face à ce regard. J’ai fui. J’ai abandonné les miens. Plutôt que de marcher dans les pas de mes glorieux aïeux, je portais la honte sur mon nom et sur le sacrifice de mon père, de mon cousin et de mon frère.

Après des heures de galops, mon cheval ralentit. J’errais, au long de l’Andram. Je n’avais qu’une obsession, rejoindre les Ered Luin, les traverser. Mettre des miles et des miles entre moi et ce continent maudit. Je ne m’arrêtais jamais, ou presque. Je poussais la pauvre bête jusque dans ses limites et la perdait au passage des gués du Sirion. Epuisée, elle fut emportée par le courant après s’être effondrée en glissant sur une pierre traitresse. Je poursuivais à pieds, jusqu’en Ossiriand. Je ne m’étais pas retourné, à aucun moment. Je savais que si je détournais les yeux de l’Est, ils trouveraient la colonne de fumée qui s’élevait de ma cité. Les cicatrices qui parcourent mon visage date de cette funeste défaite. Dans ma course effrénée, je n’avais pas pris le temps d’appliquer le moindre baume et les armes noires d’Angband marquèrent durablement ma peau.

Lorsque j’atteignais les berges du Sîr Gelion, je m’écroulais, épuisé. Les Laiquendi me recueillirent et me soignèrent. Je restais parmi eux, et c’est là que j’adoptais pour la première fois le nom de Breithogûr. Je restais parmi une quinzaine d’années, avant que la nouvelle de la chute de Gondolin et de Turgon ne m’effraie à nouveau. Il n’existait plus de remparts entre nous et l’ombre. J’exhortais mes sauveurs à entreprendre la traversée des Ered Luin, quelques-uns me suivirent, beaucoup des autres moururent lorsque Morgoth devint maître du Beleriand.

Nous prîmes les anciennes sentes et bientôt, je suivais les pas de mes aïeux et pénétrais en Eriador. Je n’avais connu que les grandes Cités des Eldar, et la forêt clairsemée de l’Ossiriand. Là, je découvrais le monde sauvage des antiques forêts d’Endor et apprenais à n’y devenir plus qu’une ombre. J’y rencontrais les Bergers, pour la première fois, et je découvris aussi combien la surprise et l’émerveillement étaient des remèdes aux angoisses qui m’étreignaient le cœur. Elles revinrent pourtant. J’ignorais tout de ce qu’il se passait au-delà des montagnes mais je sentis, comme tous les êtres vivants d’Endor, les gémissements du sol et les tumultes de la dernière bataille. Je n’avais aucune idée de l’issue heureuse de cette guerre. Je pris peur de nouveau et fuyais, encore, au-delà des Hithaeglir. Là, je découvrais le Royaume d’Eryn Galen et m’intégrais à son peuple.


•⬨ Deuxième Âge de la Soleil ⬨•


– Ainsi s’achevait pour vous le Premier Âge de la Soleil…

– Et ma première vie avec lui. Il me fallut de nombreuses années, dans le calme de l’Eryn Galen. La forêt était alors bien différente de ce qu’elle est aujourd’hui, bien plus étendues. Elle traversait l’Anduin, tutoyait le royaume de Lórinand, avec lequel nous échangions alors beaucoup. Les centres de vie de l’Eryn Galen n’était pas alors celui qu’on lui connut au Troisième Âge. L’horrible Dol Guldur n’avait pas encore dressé ses funestes tours et nous vivions dans le sud de la forêt : allant tantôt au fil de l’eau de l’Anduin, tantôt nous perdant sous les larges feuilles de ces forêts anciennes. Les temps étaient heureux. L’ombre avait passé. Il y avait là ceux qui se nommèrent les Northmen, habiles à faire jaillir les cultures de la terre, les Onodrims allaient encore, parfois, hors de Fangorn, les Naugrim de Khazad-dûm connaissaient leur plus bel Âge d’Or. La disparition du Noir Ennemi avait laissé la lumière libre de baigner toutes les terres.

Il fallut au moins cela pour guérir mon esprit et mon corps meurtri. Moi qui n’avait jusqu’alors connu que le faste de la pierre blanche et de nos cités, je découvrais le charme de vivre dans les demeures de Yavanna, bercé par la tranquille danse des saisons, dînant sous les étoiles, riant sous les feuilles. Presque sept cents ans passèrent de liberté et de tranquillité. Puis, l’orgueil frappa une nouvelle fois le cœur des descendants de Fëanor. Je ne le savais pas encore, mais, dans l’ouest, de nouvelles discordes naissaient entre les Seigneurs et Celebrimbor décidait de fonder le Royaume d’Eregion tandis que nombreux furent ceux de l’ancienne Doriath à gagner nos terres. Amdír devenait Roi de Lórinand tandis que les miens reconnaissaient du Sinda, Oropher. Pour ma part, je ne me sentais plus le cœur à servir et, peut-être, la peur de renouer avec un passé encore par trop douloureux en reconnaissant d’anciens amis parmi ceux qui venaient avec ce Seigneur, me poussèrent à reprendre la route de l’Est.

C’était un sentiment étrange. D’une main, je désirais fuir mon passé, de l’autre, je tentais de retrouver les pas de mes ancêtres. Allais-je, un matin, moi aussi me réveiller sur les berges de la merveilleuse Cuiviénen ? Si je l’ai fait, en réalité, je l’ignore. J’allais seul, sur les chemins, discrètement, préférant aller de nuit pour ne pas éveiller l’attention. J’allais d’abord le long du Sîr Celdin et gagnait la Mer du Rhûn. Si loin, à l’Est, les gens n’avaient pas oublié les ténèbres et le joug. Ils étaient encore rustres, méfiants et inquiets de l’étranger ; même les rares Eldar à peupler les forêts. Pourtant, ils ne me chassèrent pas, me guidèrent même. Je pense, qu’à vrai dire, ils étaient surtout soucieux que je ne m’attarde pas et j’avais le même souci. Je ne leur en garde aucune rancœur, à vrai dire, leur sens de l’hospitalité était, à l’époque, bien plus aigu qu’il ne l’est aujourd’hui. »


Les deux hôtes s’échangent de nouveau un sourire. L’Est et l’influence durable de l’ombre dans ces confins avaient largement meurtris les peuples et durcis leurs cœurs.

« J’allais au-delà du Rhûn, suivant leurs conseils. Toujours de nuit. Les régions que je découvrais alors n’ont même plus de noms dans nos langues puisqu’elles n’ont plus été de vues de trop longtemps. Je ne m’arrêtais, au bout de ce monde, qu’en rencontrant de hautes et terribles montagnes. Une grande forêt s’étendait à leurs pieds. Des arbres sans plus de noms que les lieux qu’ils coloraient. Je vivais plusieurs vies d’Hommes à l’ombre de ces montagnes du bout du monde. D’autres de nos frères vivaient là. Ils m’évitaient, se cachaient, peut-être mieux que je ne le ferai jamais moi-même. Leur langue était si différente, je ne parvenais jamais, avec si peu de contact, qu’à en deviner quelques bribes.

A force de penser, je finissais par comprendre que ma fuite éperdue m’avait finalement amené au fond d’une gorge. Je ne pouvais plus que m’y perdre, définitivement, ou faire demi-tour pour trouver une autre voie pour ma délivrance – qu’importe l’âpreté du chemin qu’il restait à parcourir.

Je quittais ces lieux sans nom, comme après y avoir déposé mes ombres, et je retrouvais les anciens chemins que j’avais empruntés pour venir jusque-là. Alors qu’à main gauche, je découvrais les dents des Ered Lithui, un mauvais pressentiment m’envahissait. Si les mines m’avaient semblées sévères, à l’aller, j’eus le sentiment qu’un voile s’étendait de nouveau sur les cœurs au retour. Je fus plus rapide, et n’osais m’arrêter guère que le temps de me reposer. Je retrouvais les gens que j’avais quitté et, rapidement, je compris que mon sentiment était fondé. Je ne suis pas fier de ma première réaction. Je contournais nos forêts et parcourais l’Eriador et le Lindon jusqu’aux Mithlond. J’avais d’abord songer à quitter Endor mais lorsqu’enfin mes yeux se posèrent sur ces Havres magnifiques et sur les voiles d’argent et d’or, ma honte fut si grande que je ne pus aller jusqu’au bout de ma pensée. J’errais un temps sur les plages, observant les vagues. Je n’avais pas revu la mer depuis le Beleriand. Je ne pouvais pas rejoindre les miens à l’Ouest avec cette culpabilité et souiller les terres divines. Elle m’ancrait encore en Endor. J’étais de nouveau au fond d’une gorge. Il me fallait trouver un autre chemin.

Après un temps, moins d’une saison, je prenais de nouveau la route et franchissais les frontières sud du Royaume de l’Eryn Galen. Je prêtai allégeance au Roi Oropher et m’intégrai à la Garde de son Royaume, pour être exact, au quatrième groupe de Rangers de l’Amon Lac.

Vous connaissez assez cette partie de l’histoire, j’imagine, et à vrai dire, je ne la vivais que du fond de nos forêts. Alors que le Lórinand accueillait ses nouveaux Seigneurs, le descendant de Fëanor était au faîte de son Art. Ne pouvant conjurer les démons de sa famille, il se méprit de pareille façon et entraîna, dans sa chute, tant et tant d’innocents. Sauron, ce triste reflet de son damné maître, se révéla.

Par chance, le Royaume Sylvestre n’était pas celui contre lequel il dirigeait sa haine et nous n’eûmes pas à subir la plus violente de ses attaques. Notre Roi comprit le péril auquel nous étions exposés et ordonna qu’on abandonnât nos demeures méridionales. Des milliers d’Eldar abandonnèrent leurs maisons pour gagner les Emyn Duir, lesquelles surent nous protéger mieux que nous aurions pu le faire autour d’Amon Lac. L’Eriador était en flammes, Elrond fonda ces lieux, Sauron semblait sur le point de détruire nos royaumes lorsque les Gens de l’Ouest répondirent à notre appel. De nouveau, les ombres refluèrent au Mordor mais dès lors, plus jamais Endor ne connut période aussi heureuse que celle dont nous devions dès lors faire le deuil.

Quand je pense de nouveau à cette période de ma vie, j’ai le sentiment de n’avoir fait que courir de troupes d’Orcs en groupes d’Orcs. Ils ne cessaient de venir s’essayer à nos frontières, comme si les antres grouillants des Ered Mithrim débordaient de ces infectes créatures. Si loin dans le Nord, je ne participais pas autrement aux évènements du monde. Je participais, toutefois, comme mon Seigneur, à la Dernière Alliance contre Sauron.
Les yeux de l’érudit brillèrent encore.

– Vous avez participé à la Bataille de Dagorlad et au siège de Barad-dûr ?

Aurhen, amusé par l’enthousiasme juvénile ne put réprimer un sourire.

– Non… Non… Du moins, de loin. Je faisais partie des bataillons d’éclaireurs et n’était pas amené à être en première ligne. Lorsque nous intégrions les batailles, nous étions dans les rangs des archers, dans les rangs arrières, afin de pouvoir facilement être détachés pour mener des missions de reconnaissance. Lors de Dagorlad je ne… Je n’assistais pas à la fin de notre Roi et de tant de mes semblables… Nous étions en observation, à l’Est de la plaine, guettant l’arrivée des mauvaises gens de l’Est. Je n’apprenais les malheurs de la bataille que plus tard. Quant au Siège de Barad-dûr, à vrai dire, je le passais à parcourir les Ered Lithui et à m’assurer que fort peu des messagers de l’ennemi parvinssent à la traverser. J’étais à des miles de là lorsque Sauron chut pour la première fois. J’en sentais tout de même le souffle jusque dans mes os.

Thranduil était devenu notre Seigneur et nous ramena sous l’ombre tranquille de nos arbres. Lors, nous n’en sortîmes plus qu’en de rares occasions, laissant les Dúnedain s’épanouir dans les plaines du Sud sous le regard bienveillant des Seigneurs de Lórien, et les Northem dans les Vaux de l’Anduin et de la Celduin. Nous étions si peu nombreux, au sortir de Dagorlad… Nous nous repliâmes spontanément sur nous-mêmes, finalement, comme pour prendre le temps de guérir de nos blessures. La cour de ce temps était comme… Un triste souvenir de joie d’antan autour de Lac Amon.

L’Ombre profita de notre peu de vigilance pour gagner le sud de notre forêt. Nous ne pouvions plus parcourir toutes nos terres, beaucoup de choses mauvaises nous échappaient. J’étais de ceux qui s’aventuraient le plus loin. Mes longues années d’errances et les quelques semaines à admirer la crète des vagues éveillaient en moi… Une envie de résister. J’avais couru plusieurs millénaires, j’étais fatigué de fuir les ombres.


– Et vous devez l’être tout autant de les exhumer. Je pense vous avoir suffisamment soumis à la question aujourd’hui et, à vrai dire, j’ai encore une fois accumulé les feuilles à ne plus savoir qu’en faire. Il me faudra l’après-midi pour mettre un peu d’ordre dans tout cela. Si nous en profitions pour aller manger, entendre quelques belles poésies et vous, profiter des charmes d’Imladris ?

– Vous êtes d’une prévenance infinie et je vous remercie. Il est vrai que je commence à me sentir las et me taire enfin pour écouter d’autre parler me fera le plus grand bien. Comme à notre habitude, je me contente de vous suivre docilement. »

Le temps que son hôte s’occupât de son œuvre, Aurhen laissa son regard s’enfuir par la fenêtre, porté sur les ailes d’un bel oiseau qui était resté là un temps. Oui, il n’avait que trop parler, encore. Non pas qu’il le regrettât, simplement… Lui qui avait craint si longtemps de délivrer toute cette histoire se sentait à présent étrangement en paix avec elle. Sûrement la bienveillance de ce jeune Elda, déjà si sage, avait-elle largement contribué à cela.

•⬨ Troisième Âge de la Soleil ⬨•


Cette fois, les deux s’étaient exprimés le besoin de ne pas rester enfermer, même dans les belles maisonnées d’Elrond. La saison était douce, les eaux cristallines, l’air vivifiant. Gliriaur avait empaqueté quelques affaires d’écriture, Aurhen s’était chargé de demander poliment qu’on leur préparât quelques fruits et biscuits. Ils allaient au long des chemins qui descendaient de la cité pour rejoindre le cours d’eau.

« Et… Tout ce temps, vous avez été seul ? Vous m’avez beaucoup parler de Gwindor et des…

– … et des miens à Nargothrond. Ne vous inquiétez pas, vous pouvez en parler librement.

– Bien… Je disais que vous m’aviez beaucoup parler de vos proches du Beleriand, mais depuis, vous n’avez mentionné que peu de noms. Pourquoi ? »

Le Ñoldo ne parvint pas à répondre immédiatement. Il est vrai, il avait longtemps erré seul. Et n’avait lié d’amitié que tardivement. Il avait fallu de longues années passées aux côtés de ses compagnons Rangers pour qu’enfin ils parvinssent à franchir les barrières qu’il avait érigé autour de lui, sans trop s’en apercevoir.

« Je crois qu’il n’y a en réalité pas une seule réponse à votre question. Vous n’imaginez pas la souffrance qu’il y a perdre non pas un proche, mais tout votre monde. Le fait est que je vivais ça deux fois, bien que de loin, lors de Dargolad. Nous étions si nombreux, en partant, si noble dans nos capes et nos armures. C’était presque la forêt elle-même qui avait pris la route du combat. Au retour, nous avions perdu cette splendeur et plus de la moitié des nôtres. De nouveaux, les visages familiers s’en étaient allés. Je crois que le poids des deuils avait trop lourdement pesé sur mon cœur qui n’osait plus s’ouvrir.

Ensuite… J’imagine que la culpabilité continuait d’œuvrer. Quel droit avais-je au bonheur ? Moi, le félon, le traitre, le couard qui avait abandonné ce qu’il avait de plus cher. Je parlais peu, me tenais à l’écart du monde. Seulement, avec le Troisième Âge, les choses changèrent. Nous avions abandonné le sud de nos forêts, face à l’avancée de Sauron, après Dargolad, nous n’étions plus assez nombreux pour les repeupler si loin au sud. Le Roi Thranduil appela à former un corps de Rangers qui s’attacheraient à garder, au mieux, une surveillance sur ses terres, tandis que les autres s’attacheraient à panser les plaies de notre peuple. J’étais de ceux-là, je répondais immédiatement à l’appel. Mon rôle m’avait tenu loin du champ de bataille, je devais alors payer mon propre tribut pour ces gens qui m’avaient recueilli.

Le corps fut formé, nous n’étions pas nombreux et le territoire était immense. Nous fûmes organisés en petit groupe de cinq, chaque groupe se vit attribuer un territoire à surveiller, et régulièrement, nous devions donner de nos nouvelles. Bien sûr, nous étions relevés suffisamment souvent pour ne pas s’épuiser à la tâche mais, progressivement, nous vîmes la forêt devenir dangereuse et nous, toujours pas plus nombreux… »


Alors qu’ils parlaient, ils étaient arrivés sur une berge magnifique sur laquelle le tapis herbeux ne cédait qu’au tout dernier moment le terrain à des graviers blancs et d’argent. Sur l’extérieur d’un méandre, l’eau perdait en force et venait tranquillement clapoter à quelques pas d’eux. Ils s’installèrent à même l’herbe, défirent leur paquet et commencèrent un frugal festin. Après quelques conversations, Gliriaur revint sur le sujet qui les avait réuni.

« Notre escadre était la quatorzième du corps des Rangers du Sud Rhovanion. En son sein, je servais durant de longues années aux côtés de valeureux gens. Iavas, fils de Ross, aux cheveux qui empruntent leurs teintes à l’automne, Rhîw, fils d’Helch, qui porte le nom de son arrière-arrière-grand-père, Laer, fils de Laug, dont le couteau à certainement mordu plus d’Orcs que ce que Gundabad n’en a engendré, et Ethuil… Ethuil, fils de Sâdh, qui était probablement le meilleur d’entre-nous et qui a rejoint les Terres Immortelles. Cela prit du temps, mais ils devinrent mes amis, les plus chers que j’eus de longue date. Nous vivions ensemble, veillons les-uns sur les-autres, toujours. Je ne sais vous dire combien de fois ils me sauvèrent la vie, durant tout cet âge, je ne saurais vous dire combien de fois j’honorais cette dette en les sauvant à mon tour.

Mille ans avaient passé lorsque le sud de nos bois, jusqu’alors simplement retournés à l’état sauvage, furent gagnés par les ombres. D’abord, les animaux au cœur le plus tendre fuirent vers le nord. Ensuite, les loups, autrefois raisonnables, devinrent agressifs et se mirent à nous considérer en ennemi. Enfin, nous remarquâmes des proies à moitié dévorées, parfois même tuées sans être mangées, comme par pure plaisir de la mort. Alors, les monstres survinrent. Des choses innommables et, les plus nombreuses, les araignées, partout. Tous s’étonnèrent et s’attristèrent de ce fléau nouveau. Les plus Grands, parmi les Seigneurs, se réunirent et nous fûmes diligentés pour mener l’enquête. Sept escadres furent envoyées, seulement trois en revinrent, aucune sans dommage. Une sombre forteresse dominait désormais Lac Aman. Les terres d’Oropher, la Maison que j’avais occupée dans les douces heures du Deuxième Âge, tout cela avait été corrompu par une sombre volonté et était désormais le cœur des ténèbres de Taur-nu-Fuin, le Royaume de l’Eryn Galen appartenait au passé. Nous ne pouvions rivaliser face à un si sombre pouvoir, et nous fûmes obligés de nous retirer et de rapporter les tristes nouvelles.

Sur le retour, nous découvrions avec surprise que la lugubre forteresse n’était pas la seule demeure à s’être édifiée sans que nous nous en aperçussions. Une drôle de demeure, néanmoins, pour un drôle de sage. Il se présenta à nous comme Radagast et sa maisonnée comme Rhosgobel. Laug était blessé, il nous proposa l’hospitalité frugale dont il disposait et de prendre soin du bras brisé. C’était un curieux personnage. Il avait la semblance des Edain d’un âge certain, et pourtant, il rayonnait d’une lumière autrement plus ancienne, et plus vive. Il nous parla longuement des enfants de Yavanna et avec passion. Il semblait connaître le nom de chaque oiseau et de chaque plante, et de converser avec tous ses voisins à plumes ou à fourrure, plus qu’avec les Eldar ou les Northmen.


– Vous avez donc croisé la route d’Aiwendil ! Le Magicien Brun ?! Le regard de l’érudit semblait produire sa lumière propre. Aurhen ne put s’empêcher de sourire.

– Oui, oui… Il semblerait. Mais lorsque j’échangeais avec lui sur les mystères du monde et de ses habitants, j’ignorais bien sa nature, et je ne pense pas être sûr de ce qu’elle était encore aujourd’hui. Peut-être en savez-vous d’ailleurs plus que moi.

– Il comptait parmi les Cinq. Ceux qui sont survenus de l’Ouest. Les Istari : Curunir, le Blanc, le chef de leur ordre, puis les Ithryin Luin, les Magiciens Bleus qui disparurent à l’Est, Aiwendil, le Brun, l’ami de tous les enfants de Yavanna et enfin Olórin, le Gris, celui qui sauva l’Ouest… C’est… J’aurais tant aimé pouvoir m’entretenir avec l’un d’eux, j’eus tant de questions…

– Et vous me voyez triste aujourd’hui de n’avoir pu vous céder ma place d’alors, car je n’avais guère de questions à lui poser. Nous ne passâmes guère plus qu’une journée à ses côtés. Ses soins firent merveille et nous pûmes bientôt reprendre la route vers le Palais de Thranduil. Je ne compris que bien des années plus tard ce qu’il me dit alors, presque en riant. « Aucune graine, aucun chêne ne peut pousser bien haut, qu’importe l’ardeur de son cœur, s’il n’a pas d’abord pris soin d’immiscer profondément ses racines. » C’est… »

Le conteur soupira. Ces mots, il les avait oubliés presque aussitôt qu’il les avait entendus. Combien de temps eût-il gagné s’il y avait prêté davantage d’attention ?

« Lorsque nous quittâmes sa demeure, l’ombre que nous avions aperçue loin au Sud nous revint à l’esprit et elle chassa ses sages paroles. Nous n’eûmes pas de mal à revenir sur nos terres, le Nord de la forêt était encore clair, mais cela ne dura qu’un temps et bientôt, nous fûmes constamment harcelés par les monstres que jamais je ne cessais de traquer.

Il n’y a guère d’intérêt à ce que je vous raconte en détails les années qui suivirent, je ne vous apprendrais rien. Nous chassions, aussi bien que nous le pouvions, les horreurs de la forêt pour préserver les nôtres. Le seul événement notable, peut-être, pourrait être ma participation à la Bataille des Cinq Armées, peu de temps après que Smaug, le monstre, mourut et alors que le Royaume d’Erebor retrouvait ses maîtres. Mes compagnons et moi-même n’avions cessé de combattre durant mille et mille années. Nous traversâmes le feu de cette bataille sans subir de pertes, et je n’y jouais pas de rôle qui fut déterminant, n’apercevant les Naugrim que de loin, n’étant pas parmi les proches de Thranduil, notre roi.

C’est le cœur léger que nous regagnâmes le couvert des bois. Les Orcs et les Loups avaient été défaits, de même la menace du dragon. La prospérité sembla s’installer un temps du côté de nos contrées, d’autant que les pestes avaient largement meurtri le pays. »


L’Elda profita de la pause à laquelle invitait le récit pour aller puiser de l’eau dans le courant et en boire de longue et revigorante gorgée. Elle est froide, comme les hautes cimes depuis lesquelles elle cascadait jusqu’à eux, et revigorante.

« Cette trêve ne dura qu’un temps, bientôt, les sortilèges redoublèrent en Rhovanion et aux araignées se joignirent les Orcs. C’est peu de temps après que je venais pour la première fois à Imladris, avec pour charge d’escorter notre Prince, Legolas, à un Conseil parmi les sages auxquels je n’étais pas convié. Le temps que dura ce conseil, je visitais les anciennes salles, admirais les anciennes fresques, et lorsque le Prince se lança dans sa grande épopée, je repartais pour ma part jusqu’en notre Royaume, escortant les autres nobles qui l’avaient accompagné et qui se trouvaient à présent chargés de messages d’importances. A peine nous avions gagné les halls du palais qu’on nous ordonnait de partir à la recherche de Radagast. Nous trouvâmes Rhosgobel abandonnée et malgré des jours à suivre toutes les pistes, nous fûmes impuissants à le retrouver. Bientôt, la guerre se présenta à nos portes et je m’engageais dans la longue Bataille sous les Arbres. Nous étions en terrain parfaitement connu, mes compagnons et moi-même, et le Bataillon de Ranger s’illustra de fort admirable façon. Je pense que c’est là le combat dont je suis le plus fier, où je me montrais le plus preux, malgré les flammes.

Je ne saurais trouver les mots pour vous dire combien les brumes se levèrent rapidement lorsque la Dame de Lórien vint à bout de Dol Guldur. C’était comme si, soudain, l’aube dépassait la crète de l’horizon et que la Soleil éclairait enfin les arbres. Les flammes moururent, comme balayées, et la dernière chasse fut donnée aux Orcs et aux monstres qui avaient trop longtemps hantés nos terres. »


•⬨ Quatrième Âge de la Soleil ⬨•


« Je croyais-là, avoir trouvé l’honneur nécessaire au rachat de mes fautes. Le Roi Thranduil salua la valeur des Rangers et nous décora. Nous festoyâmes longtemps puis, nous sentîmes, plus que nous ne vîmes, le départ des grandes gens pour l’Ouest. Ethuil et moi-même fûmes gagnés par le même désir de prendre également la mer. Nous laissions derrière-nous nos amis, lui sa famille, notre Seigneur, et nous prîmes la route de Mithlond. Là-bas, pourtant, je ne parvenais pas, de nouveau, à mener ma quête à sa fin. Ethuil, compatissant, resta longuement avec moi, repoussant son propre départ. En réalité, j’hésitais tant que bientôt, de nouveaux conflits nous atteignirent. Protégeant les havres de nos hôtes et de nos frères, Ethuil et moi-même nous engageâmes contre le flotte de Pelleaon. Les beaux bateaux firent face aux noirs flottes venues du Sud et nous fîmes front commun avec les Hommes.

La fin fut heureuse, mais il était temps aussi que j’admette que je n’étais pas prêt à partir. Je laissais mon ami prendre la mer, tandis que je restais dix années à reconstruire les Havres et la flotte, aux côtés des gens de Mithlond. Je comprenais enfin les mots d’Aiwendil. Je ne pouvais me sentir plus noble, moi qui continuais de tourner le dos à ma famille et au nom de mon père et de ma mère. Il me fallait renouer avec les héritiers des Seigneurs du Beleriand et enfin, auprès d’eux, faire amende honorable de mes fautes. C’est pourquoi je suis ici, comme vous le savez déjà. »


D’autres conversations, moins graves, firent suite à celles-ci et la Soleil était presque à rougeoyer lorsque soudain un des gens d’Imladris s’approcha pour délivrer son message. Presque sept jours avaient passé depuis l’arrivée d’Aurhen en la Maison Simple et enfin, l’un des grands d’ici se trouvait suffisamment libre pour l’entendre.

GENEALOGIE

Arbre généalogique:

Grand-père paternel : Lamnûr (1050 A.A. – resté en Aman), Ñoldo ; Grand-mère paternelle : Aragaer (1050 A.A. – restée en Aman), Vanya
Grand-père maternel : Côlthela (1050 A.A. – destin inconnu), Ñoldo ; Grand-mère maternelle : Ivren (1134 A.A. – restée en Aman), Ñoldo
Oncle paternel : Airëdil ( ? – destin inconnu), Falathrim ; Tante paternelle : Menelmuin (1269 A.A. – destin inconnu), Ñoldo
Cousin paternel : Main (197 P.A. – 495 P.A.), Ñoldo ; Cousine parternelle : Tadui (257 P.A. – destin inconnu), Ñoldo ; Cousine paternelle : Telui (301 P.A. – destin inconnu), Ñoldo
Oncle maternelle : Lornaeg (1247 A.A. – 1497 A.A.), ; Tante maternelle : Fainelu (1239 A.A. – restée en Aman), Ñoldor
Père : Celemegil (1254 A.A. – 472 P.A.), Ñoldo // Mère : Heneilian (1238 A.A. – destin inconnu), Ñoldo
Frère : Tulcambas (1363 A.A. – 455 P.A.), Ñoldo // Sœur : Alfirin (62 P.A. – destin inconnu), Ñoldo

~~~~~

Comment trouves-tu le forum ? : très joli mais j’avoue que c’est un peu difficile de retrouver toutes les informations les plus fraîches ^^ Mais à la fois, vu l’ancienneté du forum, ce n’est pas étonnant. Peut-être quand même signaler quelles sont les dynamiques qui ne sont plus en vigueur ? Comme la question de l’argent par exemple Smile

Comment as-tu connu le forum ? : Un de vos très anciens (un joueur qui avait été parmi vous vers 2005) m’a soufflé l’idée. Puisque je lui fais toute confiance, je me suis dit que ma première impression d’il y a longtemps à la lecture des règles m’avait amené à une méprise et, effectivement, j’ai à présent hâte de jouer parmi vous.

:copyright: 2981 12289 0
Revenir en haut Aller en bas
Aurhen « Breithogûr »
Ranger Elfe
Ranger Elfe
Aurhen « Breithogûr »

Nombre de messages : 14
Rôle : Ranger noldorin

~ GRIMOIRE ~
- -: Ñoldo
- -: 189 P.A. du Soleil
- -:

Aurhen "Breithogûr", ranger ñoldorin en quête de pardon Empty
Aurhen "Breithogûr", ranger ñoldorin en quête de pardon EmptyJeu 14 Mai 2020 - 12:55
Il est vrai que je pensais l'avoir fait à tort Very Happy Je n'ai pas double posté pour annoncer que j'avais terminé ma fiche ^^ En espérant que la lecture sera agréable. Smile
Revenir en haut Aller en bas
Forlong
Tribun Militaire d'Arnor
Tribun Militaire d'Arnor
Forlong

Nombre de messages : 3365
Age : 32
Localisation : En Arnor
Rôle : Vieux loup au service du Royaume du Nord

~ GRIMOIRE ~
- -: Dunadan d'Arnor
- -: Quarante Ans
- -:

Aurhen "Breithogûr", ranger ñoldorin en quête de pardon Empty
Aurhen "Breithogûr", ranger ñoldorin en quête de pardon EmptyJeu 14 Mai 2020 - 20:56
L'épopée de l'écriture cette fiche s'achève donc Smile Au final, le mot 'groupe' pour désigner l'unité des rangers passe bien pig

La mise-en-page est jolie, le style d'écriture presque poétique mais agréable et facile à la lecture. Je trouve que tu as réussi à garder l'équilibre avec un personnage qui a participé à plusieurs des grands événements de l'histoire de la Terre du Milieu, mais qui n'a pas spécialement été au centre de l'action à chaque fois. Le passage avec Radagast est suffisamment bref et plausible donc je n'y vois aucun inconvénient.

Le personnage semble assez équilibré et garde un potentiel d'évolution in RP.

Je valide donc ta fiche Smile Je t'ai également mis le rang de Ranger Elfe.

Tu peux commencer le jeu, on en discute davantage sur le Discord si tu veux, en attendant je vois que t'as déjà posté pour ta participation au scénario d'Ithilien avec un PNJ.

Bon jeu!

Fofo'



Aurhen "Breithogûr", ranger ñoldorin en quête de pardon Signtest11_1

Membre des Orange Brothers aka The Good Cop
Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé




Aurhen "Breithogûr", ranger ñoldorin en quête de pardon Empty
Aurhen "Breithogûr", ranger ñoldorin en quête de pardon Empty
Revenir en haut Aller en bas
Revenir en haut 
Page 1 sur 1
 Sujets similaires
-
» Maëglin Ancalimë : Elfe déchu en quête de pardon.
» Barbelune d'Erebor
» Geal,ranger du bois.
» Liste et demandes des métiers du Gondor
» Zafura, ranger elfique

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Bienvenue à Minas Tirith ! :: - Communauté - :: Registres :: Créer Vos Personnages-
Sauter vers: