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 Le lion et la souris

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Nathanael
Espion de l'Arbre Blanc
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Nathanael

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Le lion et la souris EmptyLun 11 Jan 2021 - 16:24
Frémissant sous la brise, un chapeau dépassait des plants de tabac. De la route, on devinait les brins de paille qui en formaient le bord et trois plumes d’oie glissées dans une tresse de chanvre. Les plans s’agitaient sous l’assaut de mains habiles avant de reprendre, immobiles, leur garde-à-vous champêtre. L’air tiède descendait des collines de Bourg de Touque, s’écoulait dans les vallons alentour et venait caresser le visage des trois hobbits qui travaillaient ensemble à la récolte de longues feuilles vertes. L’un d’eux releva la tête, surpris, à cette heure matinale, de sentir le sol vibrer au rythme d’un cheval. Le vieux Bolger ne sortait pas le poney avant la fin de matinée et il était bien trop tôt pour le courrier. Braith s’étira sur la pointe des pieds, le nez en l’air, pour tenter de reconnaître l’inconnu qui passait sur le chemin.

— Hé, vous ! Qu’est-ce que vous faites là ? Ce chemin est privé. Vous ne pouvez pas passer.

Le chemin, à vrai dire, n’avait rien de très privé. Tous les hobbits l’empruntaient comme bon leur semblait. Mais les Grandes Gens n’avaient rien à faire là tant qu’on ne leur en donnait pas l’autorisation. Voilà ce que Braith voulait faire entendre par « privé ». Il se planta devant le poitrail du cheval en secouant son chapeau. L’animal s’arrêta sans broncher, renifla les boucles brunes du Hobbit et souffla sur son visage une haleine d’herbe fraîchement mangée. Le hobbit ferma les yeux, fronça les sourcils, mais refusa de bouger. Dans le champ, son père et son oncle s’étaient arrêtés, le visage tourné vers l’étranger. Le même pli déformait le coin de leurs lèvres.

— Je cherche un Hobbit, dit l’inconnu.
— Il n’y a que ça, ici, monsieur. Des Hobbits. Quoi que nous ne nous appelions pas Hobbits nous-mêmes, c’est encore une invention de Grandes Gens. Vous êtes dans la Comté, non loin de Longoulet, plus précisément. Mais soit, quel genre de hobbit cherchez-vous ? Car il y en a de plusieurs sortes et de plusieurs familles. D’ici à Bourg -de-Toucque vous trouverez essentiellement des descendants de la famille du grand Peregrïn, si cela vous parle. Un de nos ancêtres qui est parti assez loin pour voir des elfes et les terres du sud et des hommes, comme vous et des chevaux. Et…

La main de son père se posa sur son épaule. Braith se tut.

— Je cherche un dénommé Mangouste, reprit l’étranger.
— Il n’y a pas de Mangouste, ici. Pas à ma connaissance. Mais si vous voulez des informations, peut-être devriez-vous vous rendre au Dragon Vert. Il se dit tout un tas de choses là-bas. Et vous trouverez de quoi nourrir votre bête et lui donner à boire. Prenez la route principale au nord, jusqu’à Lézeau. Adieu, dit-il et il saisit Braith par la manche pour le ramener entre les rangs de tabac.


Harding fit tourner Silence sur place, ignorant les remarques de l’homme à propos de l’état de son cheval. Tous les poneys qu’il avait croisés sur son chemin étaient aussi bedonnants que leurs propriétaires et les hobbits ne savaient apparemment pas apprécier la musculature d’un animal soumis à un effort régulier. Il nota, pourtant, avec un certain soulagement, que les petites personnes de cette région ne se moquaient pas de son accent et semblaient même partager avec les Rohirrims certaines vieilles expressions familières. Il fit demi-tour et reprit la route principale, accablé par la fatigue de ses dernières semaines de voyage. Il avait espéré trouver rapidement la personne qu’il recherchait, comme si le simple fait de se trouver en Comté marquait la fin de sa quête. Il se trompait. Le pays des semi-hommes n’était rien d’autre qu’une gigantesque fourmilière grouillante de vie. Les trous qu’il avait d’abord pris pour des tertres immenses au milieu des collines s’étaient animés sur son passage, certains hobbits lui jetant un œil curieux, d’autres des propos peu flatteurs. Une mère avait rattrapé son enfant par le col de la chemise et l’avait tiré jusqu’à une petite porte ronde, puis avait disparu dans son trou.

Les propos de Gallen ne l’avaient en rien préparé à ce qu’il voyait. Il s’était imaginé des personnes de petite taille, mais non pas aussi courtes sur pieds que des enfants de cinq ou si étés. Et, à vrai dire, il avait beaucoup de mal à prendre au sérieux des gens qui ne lui arrivaient pas à la ceinture. Il se demanda, un bref instant, si le Vice-Roi ne s’était pas moqué de lui en l’envoyant si loin en terre étrangère et si ce long voyage n’était pas une simple mascarade destinée à le punir pour il ne savait quelle faute. « Pour le Rohan », murmura-t-il pour lui-même. Mais qu’y avait-il ici qui pourrait jamais aider le peuple des cavaliers ? Que pouvait-on attendre d’un peuple d’enfants ? Le roi Fendor, pensa-t-il, aurait ici sa place.

Il sous-estima la distance qui le séparait de Lézeau et ne parvint que tard dans la soirée aux portes du village. Là, un groupe de hobbits armés de bâtons, de dagues et de petits boucliers l’attendaient. Il haussa un sourcil, curieux de voir cet attroupement impromptu. Il descendit de cheval par politesse et tendit une main devant lui, comme pour apaiser un animal blessé et apeuré.

— Paix, petites gens, dit-il. Je viens du…
— Halte !
dit l’un d’eux. Pas un pas de plus ou nous tirons !

Au milieu du groupe, deux archers se mirent en position. Harding recula d’un pas et leva cette fois les deux mains devant lui.

— Êtes-vous avec eux ?
— Eux ?


Il ne comprenait plus rien à la situation. Que le Seigneur des Ténèbres les emporte, ces gnomes ambulants qui l’accueillaient les armes à la main ! Gallen ne lui avait-il pas dit qu’ils étaient un peuple débonnaire aux mœurs douces et faciles ? Qu’il n’aurait qu’à chevaucher parmi eux et demander à trouver Mangouste ? Que les ragots, les rumeurs, portés par le vent, suffiraient à lui attirer l’attention de celui qu’il cherchait ? Que vouliez-vous de moi, Maréchal Mortensen ?

— De longues jambes, comme vous, sont venues fouiller nos Grans Smials et la maison des Mathoms. Tout Bourg-de-Toucque est retourné. Nous autres vérifions que personne ne puisse s’échapper par cette route avec l’histoire de la Comté entre les mains.
— Ils auraient même pris les livres généalogiques !
s’exclama l’un d’eux, le visage rouge de colère. C’est bien la première fois que de grandes gens pénètrent ainsi dans les Smials !
— Je n’ai rien à cacher
, dit Harding.

Et il jeta à leurs pieds ses fontes et ses sacoches de voyage qui renfermaient encore l’odeur du fromage de brebis.

— Je ne sais pas ce qu’est un Smial ou un Matome. Je cherche un endroit où passer la nuit, où manger et où trouver une mangouste.

Au dernier mot prononcé, les hobbits baissèrent leur garde. Le jeune Kalim Boffin n’avait pas menti, en racontant plus tôt dans la journée qu’un drôle de personnage dégingandé traversait la Comté, tout plein de poussière et qui chassait la mangouste. À avoir la tête si près du soleil, ça devait parfois vous brûler l’esprit. L’un des hobbits, une plume au chapeau, ramassa quand même les sacoches pour s’assurer de leur contenu. Il les rendit à leur propriétaire en se pinçant le nez.

— Le Dragon Vert est encore à une heure d’ici. Il y a toujours une ou deux chambres pour les Grandes Gens là-bas. Ils s’écartèrent pour le laisser passer. Mora pourra vous y amener. Pour s’assurer de votre sécurité.

Malgré lui, Harding ne put retenir un sourire.

— Je vous saurai gré de m’accompagner de la sorte, dit-il. On n’est jamais trop sûr.

Le dénommé Mora ouvrit la marche et prit un sentier étroit entre deux maisons pour quitter la route principale. « Un raccourci » marmonna-t-il, apparemment peu ravi de devoir surveiller l’étranger. Harding prit soin de ne pas piétiner les fleurs et les haies qui lui parvenaient à peine au niveau du torse. Silence, lui, se régalait de toutes les feuilles qui dépassaient des massifs et se présentaient sous ses naseaux.

— D’où venez-vous ? demanda Mora sans réussir tout à fait à dissimuler une pointe d’agressivité.
— Du Rohan, dit Harding. Un homme là-bas m’a envoyé jusqu’ici pour y trouver de l’aide.
— Peuh ! Calembredaine ! Les Grandes Gens n’ont pas besoin de nous, si ce n’est pour vous vendre du tabac et quelques bouteilles de Vieux Clôt. Ou pour nous envahir quand leurs maisons brûlent ! Vous ressemblez assez à ces hommes de Bree.
— Qu’est-ce que c’est que Bree ?
— Un village, plus loin à l’est.
Mora franchit une courte doline empierrée et fit des pieds et des mains pour remonter de l’autre côté. Il fit mine d’ignorer quelque temps l’étranger qui le suivait, mais la curiosité le piqua davantage que la méfiance. Quel genre d’aide êtes-vous venu chercher ici ?
— L’homme qui m’envoie m’a juré que vous aviez ici des souvenirs plus lointains que ceux des hommes. J’ai besoin de ces souvenirs. Le Rohan a besoin de se souvenir.
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Le lion et la souris EmptyDim 7 Fév 2021 - 17:17
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La fumée légèrement bleutée de l’herbe à pipe nimbait le plafond et se déplaçait entre les poutres aux mouvements des hobbits qui s’agitaient dans l’auberge. Harding se tenait, tête baissée et épaules voûtées, au milieu de petites gens qui échangeaient les dernières rumeurs à propos du vol commis dans les Grands Smials. Mora lui avait expliqué qu’il s’agissait de nombreux trous et tunnels occupés par une famille de Hobbits et qui contenaient beaucoup de livres et de parchemins à propos de l’histoire de la Comté, mais également de toutes les Terres du Milieu.

— Pourquoi les petits Kûd-Dûkan gardent l’histoire des grandes gens ? demanda Harding en chassant la brume opaque qui lui tournoyait autour de la tête.
— Si nous ne le faisons pas, qui le fera ? répondit Mora en voulant se donner un peu d’importance.
— Parce que nous sommes friands d’histoires et de généalogie, dit un vieil hobbit que les autres appelaient Tolbian. Il est toujours important de savoir d’où l’on vient pour savoir où l’on va.

Un sourire amical se dessina sur les traits du petit homme. Harding toussa et se rapprocha d’une fenêtre ouverte. La brise de fin de journée apportait une fraîcheur inespérée.

— Et pourquoi des Hommes voudraient vos livres ?

Il savait manier l’épée, mais non la plume et lire relevait d’un exploit qu’il n’avait jamais réussi à accomplir. Les lettres lui échappaient, formaient des grappes de sens incompréhensibles qu’il ne déchiffrait qu’avec difficulté dans sa propre langue. Voler des mots, des milliers de mots, n’avait aucun sens pour lui.

— Les livres en eux-mêmes n’ont rien d’extraordinaire, poursuivit Tolbian. Mais ils contiennent beaucoup de vieilles histoires à propos de héros des temps anciens.
— Les héros sont morts.
— Mais sous les tertres ils ne somnolent pas seuls, n’est-ce pas ?


Dans un froncement de sourcils, Harding essaya de démêler les sous-entendus de son petit interlocuteur. Le Vice-Roi lui avait révélé certaines choses à propos d’une Fraternité qui avait dissimulé des armes et des documents par le passé. Il lui en avait appris également plus à propos des tenants et aboutissants de l’Ordre. Pour finir par lui révéler que certaines mains cherchaient à s’approprier du pouvoir pour d’obscures raisons. Est-ce que le Rohan était directement menacé ? Gallen Mortensen lui-même n’en savait rien. Il avait, avec le capitaine Learamn, poursuivi les derniers reliquats de la Couronne de Fer sur les terres du Riddermark. Mais il craignait que d’autres entités puissent viser leur royaume et leur peuple. La Fraternité évoquée lui était inconnue et c’était une des raisons qui l’avaient poussé à envoyer Harding si loin au Nord. Quand Harding lui avait demandé pourquoi il ne demandait pas l’avis du Gondor, Gallen avait évoqué une méfiance sourde envers des élites qu’ils ne connaissaient pas personnellement et dont il ne pouvait deviner les desseins réels. Le Vice-Roi avait donc préféré se tourner vers des amitiés solides et de vieilles connaissances en lesquelles il avait une confiance aveugle.

— Voulez-vous dire que certaines personnes souhaitent s’approprier de vieilles armes ? finit par demander Harding, étonné par la sagacité du Hobbit.
— Ma foi, je n’en sais rien, dit Tolbian, je ne suis qu’un Hobbit. Les Hobbits ne sont pas querelleurs et n’apprécient ni les batailles ni les conflits. Mais si j’étais humain, peut-être ce genre d’idées pourrait-il me traverser l’esprit.
— Hey, l’homme cheval !
héla une voix du fond de l’auberge. L’homme cheval !

Jouant des coudes et de ses pieds poilus, un hobbit s’avança parmi ses comparses et se planta devant Harding. Étonné de le voir si grand, il leva les yeux, perdant un peu de son intrépidité et bégaya.

— Il y a quelqu’un qui vous cherche.

Pointant son doigt dodu vers la porte, Harding suivit du regard une ombre qui se glissa en dehors de l’auberge. Aussi furtive et solitaire qu’une mangouste.
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