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Sujet: Paroles d'ivrognes ?
Esthel

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Rechercher dans: Le Peregrin   Tag esthel sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: Paroles d'ivrognes ?    Tag esthel sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptyMer 4 Mar 2015 - 20:55
[Intro nécessaire pour raccorder mon perso à la cité - mais ensuite, quartier libre !]

La traversée du Pelennor avait été plutôt aisée – et heureusement. La mésaventure de l'embuscade m'avait fatigué plus que de raison. L'angoisse ressentie face à la peur de la mort, mais aussi … Face à la peur de la rupture. J'avais senti ces pulsions reprendre le dessus, l'espace d'un instant, comme l'ombre des légendes d'autrefois, célestes et cruelles créatures qui avaient un instant masqué la lumière du jour de leurs ailes parcheminées. Le retour à la normale avait été rapide, mais je ne pouvais plus m'empêcher, mécaniquement, de faire craquer les jointures de mes doigts dès que possible.

Heureusement, l'ambiance de fête qui semblait bercer le Gondor – le soulagement de l'été approchant et la joie d'un certain mariage royal, du genre de ceux qui permettaient aux plus humbles de vivre par procuration – m'avait facilité les dernières lieues. Un fermier m'avait offert l'hospitalité le soir venu. Il faut dire que, couvert de sang, je faisais peine à voir. Je m'étais écorché en fuyant. Rien de grave, mais le sang du cadavre que j'avais dépouillé avait couvert mes vêtements. Je laissai à l'homme les quelques pièces que j'avais trouvées sur le cadavre en échange d'une chemise propre – l'autre était lacérée et écarlate.

L'homme m'accueillit pour la nuit, m'offrit le repas et le coucher, et m'entretint brièvement des nouvelles du royaume. Les gens du Pelennor avaient un parler si différent de celui des marins ! Plus bourru, mais aussi plus posé. Les marins, toujours entre deux voyages, ne prenaient jamais le temps de baisser la voix, sauf lorsqu'ils devaient comploter – et qu'ils n'étaient pas ivres. Je laissai le paysan et sa famille derrière moi le lendemain matin, nanti d'un petit fromage de chèvre, d'un peu de pain et d'un fruit, de quoi tenir jusqu'à Minas Tirith, mais aussi de choses moins solides. Des conseils, par exemple.

J'arrivai devant les portes de la cité blanche de bon matin. Le soleil ne jouait pas encore avec l'aveuglante pierre blanche, ne scintillait que peu sur les armures des gardes qui grouillaient autour de la porte, grande ouverte, filtrant les entrées avec plus ou moins de soin. Le mariage … Détachant mon regard des murs massifs de la titanesque cité qui m'avait coupé le souffle, je réfléchis à un moyen de faire entrer ma dague dans l'enceinte de la ville. Je répugnais à me séparer d'elle – j'étais déjà si loin de la mer, je n'allais pas me priver d'un moment de plus !

J'attendis patiemment, en retrait, coulé dans l'ombre d'un arbre providentiel, goûtant tranquillement l'air frais du matin tandis que les cohortes marchandes se pressaient, chariots après chariots, pour entrer les premiers dans la ville. L'une de ces charrettes attira mon attention : chargée de tonneaux dont les couvercles tremblaient, elle cahotait sur la route, et heurta une pierre qui fit choir quelques uns de ces fûts. Ce fut l'avalanche de pommes sur la route du roi. Je saisis ma chance :

- Hé, l'ami ! Un coup de main contre une pomme fraîche ?

L'homme, qui menait son chariot seul, sembla ravi de me voir sortir de sous mon abri, grogna et accepta d'un air bourru :

- Ce s'ra même deux qu't'en auras, gamin ! T'm'as l'air ben musclé, v'la qui s'ra vite fait !

Quelques minutes plus tard, les tonneaux étaient remplis, l'homme rasséréné, et la dague cachée sous plusieurs fruits. Je continuai mon chemin aux côtés du maraîcher qui se crut obligé de me raconter sa vie, ses rêves, ses déconvenues. J'écoutais, comme je savais si bien le faire. Nous passâmes les portes sans encombre, après avoir échangé quelques mots avec les gardes. Je quittai mon compagnon d'un instant non sans prendre mon dû – et ma dague, que je glissai dans ma botte sitôt arrivé dans une ruelle un peu plus sombre que les autres.

J'y étais enfin. La Cité Blanche. Celle qui m'offrirait le destin que je méritais. Celui que j'avais toujours mérité, dont la bâtardise m'avait privé. Celui duquel je ne voulais plus être privé, qui était comme la clef de voûte de mon esprit. Il était temps de trouver une bonne auberge. Je m'enfonçai dans la foule matinale, tranchant entre les étals de marchands à la recherche de cette denrée rare et précieuse qu'était une table près d'un âtre accueillant, mais discret.

Après plusieurs minutes passées à prospecter, je trouvai enfin mon bonheur. Une petite taverne discrète, dans les bas quartiers, pas trop sale, mais pas trop propre non plus. La taverne moyenne, qui ne brille ni par sa cuisine, ni par sa réputation, mais qui sait honorer le client qui passe outre la propreté relative de ses couverts. Je poussai la porte d'une main sûre, et pénétrai dans l'auberge, cherchant du regard une table libre – ce qui n'était pas rare, à cette heure du matin, même si l'auberge accueillait déjà une certaine clientèle. Des habitués, très probablement.

Un excès de mégalomanie me saisit brièvement. J'imaginai mon destin. Je pouvais le saisir, presque. Mon premier fief.
#Esthel
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