La maison abandonnée...

D'un pas rapide, Khalid Al Khadiz pénétra dans la bicoque. Elle était aussi minable d'intérieur que d'exterieur, les murs étaient fissurés, le mobilier était attaqué par les champignons et les vers, et le plancher semblait prêt à céder sous le poids des bottes.

La demeure elle-même insiprait la tristesse et le désespoir. Le seul bruit troublant le silence de ce lieu étrange était le balancement d'une chaise. Le guerrier s'en approcha et trouva un vieil homme au regard vide, observant avec fascination la cheminée éteinte.

Le haradrim se pencha et sussura quelques mots à l'oreille de l'ancêtre.

Aramëar...

Sans même le regarder, le viel homme désigna la bibliothèque. Khalid avait compris. "Il" l'attendait. Il s'approcha alors du meuble et tira vers lui un ouvrage poussièreux. Un passage s'ouvrit sur le sol, et il emprunta les escaliers qui semblaient l'emmener dans les profondeurs de la terre...

En descendant les marches, Khalid ne pouvait réfréner une certaine appréhension. Le tunnel était profond, et comme à chaque fois qu'il venait ici, il avait l'impression d'être dévoré par un quelconque monstre souterrain.La lumière se faisait rare, et les dalles étaient visqueuses, si bien qu'il manqua plus d'une fois de dévaler l'escalier comme une pierre roulante.
Arrivé à la fin de sa descente, Le guerrier pénétra dans une sorte de grotte éclairée par des torches encastrées dans les murs. D'étranges symboles ornaient les parois, et l'encre qui fut utilisée pour les peindre ressemble étrangement à du sang frais.
Là, au coeur de cet endroit malsain, devant une sorte d'autel, se tenait un être encapuchonné à l'immense taille, et l'on voyait dans son dos une gigantesque épée aux étranges motifs.

Le colosse salua Khalid d'un mouvement de tête, et celui-ci lui rendit par une agenouillation.

-Khalid, mon enfant, quelle nouvelle m'apportes-tu ? Tout se passe-t-il comme je l'avais prévu ?

Toujours un genoux à terre, l'homme aux deux épées ne pu s'empêcher de sourire.

-Oui, Ô Seigneur. Tout a été fait selon vos ordres. Je... enfin, Nous maîtrisons parfaitement la situation.

Le titan eut un sourire, puis commença à rire pleinement, à gorge déployée, résonnant ainsi dans toute la grotte. C'était un rire cruel et incontrôlable. C'était le rire d'un dément.

C... c'est ici.

Alderic était épuisé. Non seulement Balak l'avait fait pressé durant le trajet, mais en plus il ressentait une violente douleur au poitrail.

Ce fils de chien m'a brisé une côte...

Balak eut un léger sourire. Cette maison était un peu la version "campagnarde" de sa demeure, ce qui l'amusait quelque peu.

Passe devant, Alderic "Oeil-Divin", le maître archer...

Cesse tes moqueries! Si tu ne m'avais pas frappé, j'aurais été bien plus prompt à t'aider!

OUVRE ! te dis-je !

Alderic poussa la porte en maugréant, dévoilant au mercenaire une petite pièce sombre, infesté de vermines végétales et animales. Un son éveilla pourtant la méfiance du mercenaire, une sorte de grincement. Il n'eut pas de mal à repérer la provenance du bruit : une chaise à bascule s'activait lentement, très lentement, et une forme sombre semblait l'occuper.

C'est le gardien des lieux...fais attention!
chuchota l'archer.

Pour toute réponse, Balak saisit sa Double-lame et s'adressa à la présence :

-Je suis Balak le mercenaire ! qui es-tu! et que fais-tu ici!

Le balancement s'arrêta. Une voix déchirée s'éleva du recoin de la pièce.

B...Balak ?

La chose se leva, montrant ainsi au deux compère une silhouette humaine emmitouflée dans d'imposants chiffons.

Tu te souviens de moi, Balak ? Je suis Doyen!

-Doyen ? impossible, tu avais au moins une soixantaine d'année à l'époque ? Ne t'approche pas !

-Hélas Balak, c'est bien lui. Le jour de ton départ, il était de tour de garde. Arkhanos l'a considéré coupable de t'avoir laissé partir.

Oh oui...ce n'est que trop vrai. Mais ce que vous ignorez, jeunes gens, c'est que si je suis encore en vie, ce n'est pas grâce à un accès de conscience de ce pourri d'Arkhanos !

Balak ne parvenait pas à dissimuler sa surprise. Doyen était si vieux...comment aujourd'hui peut-il être encore en vie ?

Non, mes enfants, non... Lorsque ce fils de ouarg a voulu me tuer, Croc-noir lui a dit : "Il y a bien d'autre façon de faire souffir un homme. Si en plus il peut nous être utile, c'est la solution idéale". Alors il s'est amusé avec moi. Je puis vous le dire, les gamins : Croc-noir est un sorcier !!!! mais regardez plutôt :

Et il fit tomber les lambeaux de tissus qui entouraient son corps sale. Alderic eut un haut le coeur, et Balak parut terrifié :
Le vieil homme était encore très musclé, mais ses jambes et son bras gauche étaient couvert d'écailles noires et visqueuse et pourvues de longues griffes recourbées. La moitié de son visage était déformé, et son oeil droit était d'un jaune immonde avec une fente noire en son centre. Un longue queue reptilienne s'agitait derrière son dos, tel un fouet réclamant son lot de chaires tendres.

Je fus son jouet, sa chose. Il me condamna recemment à garder ce lieu et à massacrer tous les intrus qui s'en approcherait. Et malheureusement pour vous... Vous êtes des intrus, mes enfants.

Alderic, prit de panique, alla se cacher dans un coin de la pièce, tremblant comme une feuille d'automne.

Fort bien.

Balak avait dit cela d'un ton calme et assuré. Il saisit Renaissance, se mis en position, et attendit la charge de l'Homme-Saurien.

Viens à moi, Doyen. Viens chercher la mort digne que tu mérites, mon ami.

Et tel deux bêtes enragés, les deux adversaires foncèrent l'un sur l'autre, en poussant d'effroyables hurlements....

Alderic ouvrit un oeil, craintif. La maison abandonnée était teintée d'un silence oppressant, et tout semblait figé. Il s'était évanouis lors du premier choc entre les deux combattants,et bien qu'il ne l'avouera jamais, il n'eut jamais aussi peur de toute son existence. En se relevant, il vit le corps de l'homme-reptile gisant au sol, éventré.

B...Balak ? Tu... tu es là ?

Ici, bougre de lâche!

Se dirigeant vers la voix, Alderic vit le mercenaire assit contre le mur, à demi nu et les chaires à vif, tant les griffes de Doyen lui avait lacérées les chaires et le tissu.

Viens m'aider, couard!

Pour toute réponse, Alderic souria, avant de lui balancer un violent coup de botte en pleine face, l'envoyant se heurter contre un meuble.

Nous sommes quitte désormais.

Attend un peu, mon gaillard...

D'accord, on est quitte. Maintenant aide-moi à me relever.

Voila, voila...Bon tu me crois maintenant ? Bon b'a y a plus qu'à descendre.

Tenant Balak par l'épaule, l'Archer s'avança vers la bibliothèque, d'où il tira vers lui un ouvrage à la reliure rouge. On entendit un craquement sonore, et le passage se dévoila.

-Attend...il y a peut-être un piège...
-Et le gros lézard, c'était quoi d'après toi ? Allez du nerf, on descend!

"Pfff...ça te va bien de faire le brave. Je n'en ai pas finis avec toi, Alderic."

La lumière était rare et les dalles dangereuses, mais les deux compères réussirent tout de même à se sortir de ce sombre escalier. La pièce où ils pénétrèrent était plus glauque encore que la maison, et Alderic alla allumé une torche murale, qui éclaircit une grande pièce, sans mobilier, à part un autel, dans le fond droit, que Balak alla inspecter. D'étranges runes y était gravé et les grandes traînées rouges qui le sillonnait n'étaient autre que du sang séché. Ce genre d'endroit dégoutaît le mercenaire, lui rappelant son douloureux et honteux passé. Une inscription attira particulièrement son attention. Elle était écrite en langage commun, et se trouvait là où seul le maître de cérémonie aurait pu en prendre connaissance. Il disait :

Je suis une ombre du Destin. Nous sommes les éternels témoins…Des
massacres en l'honneur du Seigneur Noir, car nous sommes ses avatars
Qui meurent ou tuent, mais jamais ne faiblissent.

Une larme coula le long de la joue griffée du mercenaire.

Tu avais omis ce passage-là, Khalid. Ainsi tu m'a bel et bien trahis...

Alderic posa une main fraternelle sur l'épaule de Balak, et ce dernier poussa un hurlement sourd, alors que son âme se déchira violemment, brisée par une infinie tristesse.