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 Pour une bouchée de pain.

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Ryad Assad
Espion de Rhûn - Vicieux à ses heures perdues
Espion de Rhûn - Vicieux à ses heures perdues
Ryad Assad

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Pour une bouchée de pain. EmptyDim 5 Jan 2014 - 19:06
Le Rude Hiver, qui s'était abattu sur l'ensemble de la Terre du Milieu, s'était emparé de toute chaleur dans les terres au Nord. Les voyageurs qui revenaient péniblement du Sud racontaient déjà que certains tronçons des fleuves du Harad avaient été aperçus gelés... Inutile donc de préciser que le long du Rhimdath, les températures avaient chuté dramatiquement. Les rares personnes qui s'étaient installées là souffraient durement de la pénurie de nourriture, et beaucoup avaient fui vers le Sud, dans l'espoir de trouver quelque assistance. Certains étaient restés, toutefois, et entretenaient la vie dans ces terres désolées. Ils survivaient comme ils le pouvaient, puisant parcimonieusement dans les réserves de nourriture qui allaient s'amenuisant, achetant ce qu'ils pouvaient aux peuples des terres glacées du Nord, ou encore aux elfes de Vertbois. La situation était difficile, et l'auberge appelée sobrement "Chez Mary" représentait peut-être le seul espoir d'une bonne partie des habitants de la région, et des voyageurs perdus dans ces régions désertes.

Mary était une femme d'une cinquantaine d'années, qui travaillait dur dans sa petite auberge. Elle avait un caractère bien trempé, et elle était connue et respectée dans les environs immédiats. Mais elle était devenue bien plus importante depuis que le Rude Hiver s'était installé. Elle avait en effet accueilli progressivement tous les gens habitant les environs qui avaient refusé de quitter la région. Au départ, les chambres avaient été suffisantes, et elle avait été heureuse de voir autant de clients, même s'ils étaient amenés à elle par la famine et le désespoir. Mais bientôt, son établissement devint le seul encore viable, et tout le monde vint s'y rassembler. L'auberge devint une sorte de refuge, un ilot au milieu des glaces et des tempêtes de neige, où on pouvait trouver un bon feu de bois, et avec de la chance un repas chaud. Les habitants des villages voisins étaient environ une soixantaine dans l'auberge, et Mary n'avait pas tardé à les mettre à contribution.

Elle avait créé une forme de solidarité touchante dans l'adversité, et les hommes avaient dégarni leurs propres maisons, pour mettre en commun ce dont l'auberge pouvait avoir besoin. Les tas de bois avaient été rapatriés à dos d'âne, pour alimenter la grande cheminée. Chacun avait amené ses réserves de nourriture, et Mary avait été intraitable : ceux qui ne partageraient pas équitablement n'avaient rien à faire chez elle. Forte de son caractère, elle avait envoyé des hommes négocier avec les Lossoths du grand Nord, et elle avait reçu un peu de nourriture de leur part, en échange d'autres biens. Chacun avait dû se serrer la ceinture, et beaucoup de paysans avaient dû s'improviser chasseurs pour essayer de faire survivre la petite communauté, dans cet espace trop étroit. Les voyageurs n'étaient pas rares : des gens qui cherchaient à gagner Dale, et qui pensaient trouver des navires le long du fleuve. Ils ne restaient en général pas très longtemps, et ils continuaient leur chemin à pied. Mary n'était pas certaine que tous allaient survivre à leur périple, mais il était évident que toute bouche supplémentaire à nourrir était un poids pour les siens.

Et pourtant, sa porte ne restait jamais close, et elle avait bon cœur. Elle accueillait tous les voyageurs, quelle que fût leur origine, quelle que fût leur race, tant qu'ils acceptaient de se plier aux règles de partage de la communauté. Mais certains, bien entendu, refusaient ces règles, notamment les bandes en maraude dans le Nord. La bataille du Nord avait fait rage depuis longtemps déjà, mais des mercenaires déserteurs, des serviteurs du Mal vaincus et désirant échapper à la mort avaient fait de cette région un lieu où il ne faisait pas bon se promener sans armes. Ils avaient rançonné les paysans, au départ, espérant gagner de l'argent facilement, survivant grâce aux récoltes qu'ils pillaient. Mais finalement, l'hiver n'était pas passé, et les terres n'avaient plus donné de blé, les arbres plus de fruits. Il leur avait donc fallu se rabattre sur Mary, qui les avait chassé bien vite. En effet, avec l'or qu'ils avaient pillé, ils entendaient s'offrir une part qui dépassait de loin celle allouée à chaque réfugié. Devant la réaction de Mary, ils avaient préféré battre en retraite, mais ils avaient juré de se venger. Une promesse qu'ils devaient tenir un jour.

Mais pour l'heure, dans la petite auberge, il régnait une ambiance détendue malgré les difficultés. Des couchettes étaient installées dans la grande salle, les chambres abritaient les familles avec des enfants, et tout le monde s'affairait à préparer le repas. Il y avait des nains, des hommes, et même une elfe de Vertbois, qui participait aux tâches avec tout le monde. Celle-là n'était pas là depuis bien longtemps, et était vraisemblablement en voyage. Elle était arrivée juste après un homme qui ressemblait à un rôdeur, bien qu'il ne portât aucun blason pour montrer son appartenance. Et puis il y avait ce nain étrange, également, que personne n'osait vraiment approcher. Il n'avait pas l'air méchant, pourtant. Ces trois-là étaient les derniers à avoir rejoint l'auberge, et Mary les avait à l'œil. Elle ne faisait plus confiance sans réserve aux nouveaux arrivants, même si elle appréciait de les voir aider la communauté de leur mieux.

Le repas fut festif à défaut d'être copieux. On joua de la flûte, on chanta quelque peu, et puis on veilla devant le feu. Certains adressèrent des prières aux Valars, en espérant que l'hiver prendrait fin rapidement. Des suppliques qui ne semblaient pas parvenir aux oreilles des dieux, pour l'instant. Et puis, alors que tout semblait annoncer une fin de journée tranquille, les choses basculèrent brutalement. La porte qui menait à l'extérieur s'ouvrit à la volée, et une douzaine d'hommes pénétrèrent dans l'auberge en hurlant. Une femme se mit à crier à son tour, de terreur cette fois, et un vent de panique se répandit au milieu de ces simples gens, confrontés à ce qui était bel et bien une attaque de bandits. Les hommes, dépenaillés et qui semblaient manquer cruellement d'expérience, n'en était pas moins déterminés et dangereux. Ils avaient encoché des flèches, et l'un d'eux tenait même une arbalète. Ils balayaient la foule du regard, à la recherche du moindre geste suspect. Si un seul s'avisait de tenter quoi que ce fût, les traits partiraient sans tarder. Et même si le responsable n'était pas tué, il faudrait compter douze morts parmi des innocents : de simples fermiers, leurs femmes et leurs enfants.

- On se calme ! Tonna un homme qui paraissait être le chef de ces brigands. On se calme, et on la ferme !

Le silence revint immédiatement. Un silence pesant, angoissé :

- Je vais vous expliquer comment ça va se passer : deux de mes hommes vont aller récupérer vos vivres, et vous allez les laisser faire, c'est clair ? Si vous résistez, vous savez ce qui vous attend...

Il n'y avait pas le choix. Même si les villageois étaient moins nombreux, la perspective de voir des enfants être assassinés était pire encore. Il valait mieux baisser la tête et se montrer patient. Pendant ce temps, deux des bandits vidaient le garde-manger de Mary, qui regardait la scène avec, au fond du regard, une sourde colère. Elle les vit faire des allers-retours, tandis qu'ils chargeaient leurs chevaux, et au bout d'un moment, elle ne pût en supporter davantage.

- Allez-vous vraiment nous condamner à la mort ? Allez-vous vraiment nous laisser là, affamés, simplement pour votre bon plaisir ? Ne vous rendez-vous pas compte que nous en avons besoin, de ces vivres ?

Elle s'était levée, et s'était approché du chef. Ce dernier avait intimé du geste à ses hommes de continuer à surveiller la foule. Il répondit :

- Mais nous aussi, nous en avons besoin. Les temps sont durs, et nous n'avons pas le choix !

- Assassins !

Mary était une femme sanguine, et elle ne pouvait plus se contrôler. Elle tenta de frapper le brigand, mais il avait vu venir son geste. Il écarta son assaut, et lui empoigna fermement les cheveux, avant de glisser une lame sous sa gorge. Des hommes dans la foule se levèrent, mais les archers leur crièrent de se rasseoir. Leurs armes les rendaient très persuasifs, et la vague d'indignation qui avait failli embraser la situation retomba comme un soufflé. Le chef lança alors à l'attention de Mary, aussi bien qu'à celle des hommes qui avaient voulu la défendre :

- Je vous conseille de ne pas me défier ! Je n'ai pas l'intention de tuer qui que ce soit, mais ne me poussez pas à bout !

Sa prisonnière, en réponse à ses propos, lui cracha au visage. Pendant un instant, il parut évident qu'il allait l'égorger pour l'exemple. Mais il retint son bras, au grand soulagement des réfugiés. Au lieu de quoi, il la tira avec lui vers l'extérieur. Sous leurs yeux, la femme était prise en otage, ainsi que leurs vivres. Les deux hommes avaient fini de vider leur garde-manger, et les voilà qui repartaient désormais.

- Ne bougez pas ! Criaient les bandits. Restez où vous êtes ! Ne tentez rien de stupide !

Et ils s'en allèrent, un par un, comme des ombres. Ils grimpèrent sur leurs montures, et filèrent droit vers le Nord, là où devait se trouver leur campement. Malheureusement, ils avaient aussi emporté tous les chevaux qui se trouvaient là. Probablement qu'ils entendaient les manger quand leurs réserves auraient été consommées. En attendant, ils laissaient l'auberge avec quelques rares provisions que Mary avait eu le bon sens de cacher, mais sans possibilité de survivre bien longtemps. Les enfants se mirent à pleurer, tandis que leurs mères essayaient de les réconforter. Les hommes, quant à eux, étaient au comble du désespoir : sans nourriture, sans chevaux, ils ne pouvaient plus rien espérer.

- Nous sommes perdus, crièrent certains. Nous sommes condamnés !

Un autre, un vieillard qui avait des larmes dans la voix, demanda :

- Et notre pauvre Mary qui est aux mains de ces ignobles monstres ! Elle qui seule s'est battue pour nous ! Qui osera aller lui porter secours ?

- Par ce froid ? Répondit un autre. Sans chevaux ? Nous ne sommes même pas des guerriers ! Tu voudrais que nous laissions nos femmes et nos enfants seuls, pendant que nous partons Eru sait où ? De toute façon, leurs traces auront bientôt disparu... C'est une quête vaine...

Un silence pesant s'abattit sur la salle, et la flamme dans l'âtre vacilla, comme l'espoir dans le cœur de ces hommes. Il leur fallait quelqu'un pour raviver la lumière, qui puisse leur redonner foi en l'avenir... Quelqu'un qui soit prêt à défier l'Hiver pour eux...


Membre des Orange Brothers aka The Bad Cop

"Il n'y a pas pire tyrannie que celle qui se cache sous l'étendard de la Justice"
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Lovir Dirileth
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Pour une bouchée de pain. EmptyDim 5 Jan 2014 - 20:24
Lovir était revenu vers l'Est, aux alentours du Rimdath. Avec, bien qu'il se le cachait, l'espoir étouffé de croiser Miriah. Sept ans. Sept an que la communauté avait banni le jeune garde nocturne. Sept ans d'errance. Entre l'Est et l'Ouest pour son corps, dans une prison de silence et de vengeance bridée pour son esprit. Cette rage qui, toujours depuis la condamnation, ne cessa de croître, grandissante en son cœur comme un volcan endormis. Pour éviter de laisser choir un tel potentiel malfaisant, il se privait de boisson, de bon temps, de facilité et de relation positivement prolifique. Chaque souffrance de plus sustentait l'aspect le plus vindicatif de sa personne.

Il ne croisa, ni Miriah, ni gibier. Et c'était la première fois que la chasse lui fut infructueuse. Ce n'est pas son tir qui lui manquait, mais bien le daim qui, tout comme lui, cherchait le moyen de se nourrir et migrait au Sud pour dévorer quelques résidus de steppe. Hùdhùm, son cheval de trait, s'affaiblissait. A jeun depuis trop longtemps, il ne tenait plus les marches soutenues. Il leur fallait revenir à l'Ouest, trouver vivres et confort. Lovir savait qu'il y avait cette auberge, courageuse de tenir tête aux climats peu propice à l'épanouissement d'un tel commerce. Mais jamais il ne s'y était rendu. Il évitait ce genre d'endroit. Des malfrats, lâches, pillaient sans vergogne les commerçants de passage et les prospecteurs solitaires comme Lovir qui séjournaient dans ces lieux. Mais cette fois, la faim devenait insoutenable et une marche vers l'Ouest dans cet état serait rapidement devenu dangereux.

Alors il était là dans cette taverne. Son cheval se trouvait dans une petite écurie de fortune, aux structures en bois tremblantes, craquantes sous les brises, trop violentes ces temps ci. L'animal se contentait d'un peu de foin presque givré. Son ami, Lovir, quant à lui, était venu avec un peu de bois sec, maigre ressource dans les alentours, afin d'alimenter le feu dont personne ne pouvait se passer dans cette auberge. Ce geste lui avait valu sa place et une assiette correctement fournie. Afin d'éviter les regards des plus curieux, Lovir s'était mis à table avec deux couples de fermiers. Il s'était présenté, mais n'était pas aller plus loin que ces quelques civilités. Et ce n'était pas pour déplaire aux bons gens attablés avec lui. Ils se méfiaient, ça se lisait sur leur visage.

Lovir termina promptement sa collation et, plongé dans une profonde introspection, il frottait entre son pouce et son index la pointe d'une flèche elfique qu'il portait en pendentif. Souvenir amer d'un passé qui jamais ne lui paraîtra lointain. Il se stoppa net lorsque le porte dont le bois agonisa d'être si durement négligé, s'ouvrit violemment. Il remarqua - et il en était de même pour tous les clients - le ton acerbe employé par cet homme qui paraissait être le meneur et la malveillance avec laquelle cette douzaine de pillards balayaient la salle du regard. De façon académique, Lovir jaugea le danger. Combien, armes, armures, comportement. Quelques-uns de ces hommes semblaient être de bien mauvais archers. Peut-être était-ce la peur, la honte ou encore une formation incomplète, car pour certains, la prise n'était pas fiable sur leur armes respectives.

La menace lui semblait bien trop importante. Et au regard des gens présents, une échauffourée finirait en massacre. L'arc de Lovir se trouvait dans un sac en toile de jute, ainsi que ses flèches et leur carquois. Il posa une main délicate et discrète sur ce dernier et son cœur se mit à battre plus fort. Il inspira profondément sans chercher pour autant à paraître serein. Sans quoi, les hommes auraient pu prendre ceci comme un défi.

Lorsque ce qui semblait être leur chef, empoigna fermement la chevelure de la propriétaire, Lovir serra les dents et attrapa le poignet du fermier, son voisin de table, qui allait se lever. Il lui fit comprendre par un regard - à l'émeraude moucheté de nuances écarlates dues aux flammes de la cheminée - qu'il devait garder son sang froid. Il appuya sa demande par un « non » de la tête presque imperceptible. Il laissa ainsi les bandits faire leur besogne et quitter les lieux.

Lovir resta dans le silence, lorsque chacune des personnes présentes exprimaient leurs inquiétudes et leur colère. Lorsque le silence retomba enfin et aux regards de ces gens désarmés et indignés, Lovir se leva silencieusement. Il attrapa son sac, le laissa pendre dans son dos, le tenant d'une seule main au niveau de l'épaule puis s'avança vers la porte. Il l’entrouvrit, jeta un œil dehors : il n'y avait rien. Si ce n'est un froid mordant et une spirale de fine brume portée par une légère brise. Il ouvrit davantage.

- Hùdhùm ! lacha-t-il avec stupeur en remarquant que son ami avait disparu. Il serra les dents et se tut. Personne n'avait à savoir qu'il venait de perdre à la fois son ami le plus fidèle et les quelques babioles qu'il souhaitait vendre à l'Ouest. Il les avait perdu, mais il se jura que ça l'était temporairement. Il rentra et remarqua le regard de certains, vide d'espoir et pour d'autres, à la limite d'une indignation qui n'attendait qu'à éclater. Il resta debout, face aux clients. Il laissa un long silence et entreprit de proposer quelque chose.

- J'ai... il remarqua qu'il parlait bien peu fort pour une soixantaine de personne, il haussa le ton, enleva son capuchon et reprit, j'ai peut-être une idée. Là encore il laissa un long silence. Si l'on ne fait rien, j'ai beaucoup à y perdre, comme vous, mais suffisamment pour risquer ma vie. Je propose que quelques personnes, capables de faire la même chose, en état d'assurer une traque prompte et silencieuse, me suivent. Il pose son sac et en sort son arc artisanale à l'allure rustique. Vous savez comme moi qu'il est impossible de faire appel à une autorité compétente dans cette région. Nous devrons nous y coller nous même, ou entamer un départ qui pour beaucoup serait... il regarde le paysan âgé qui était à sa table, ...dangereux. Et je crois savoir qu'il on une femme à qui nous devons notre repas ce soir et pour d'autres, plusieurs.

Lovir n'était ni un héros, ni un bon samaritain. Mais il avait en réalité trop à y perdre. Afin d'éviter d'être seul, il joua la carte d'un engagement personnel pour cette éphémère communauté. Il s'éclaircit la voix, mit son arc en bandoulière et sortit ses flèches et son carquois. J'ai besoin d'un petit groupe, trois ou quatre personne pas plus. S'il y a des archers, c'est... ...mieux. Nous devrons partir maintenant. Comme l'a souligné... il cherche un client du regard qu'il ne trouve pas, quelqu'un tout à l'heure, les traces seront très vite recouverte et par un temps pareil, c'est notre unique chance. Je suppose qu'il n'ont pas du partir bien loin. Il leur faudra faire une pause rapidement, le froid s'intensifie et les vents se lèvent. Vous... vous me trouverez à côté de la cheminée...

Il quitta l'entrée de l'auberge pour s'asseoir près du feu et s'équiper en vitesse, en espérant que quelques personnes le rejoindraient.
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Lenwest
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Pour une bouchée de pain. EmptyLun 6 Jan 2014 - 17:19
Depuis quelques temps, Lenwest avait songé à revenir dans la forêt noire, lieu de sa naissance. Elle voulait revoir ces paysages, ces arbres. Elle voulait retrouver la bonne humeur et la gaieté des fêtes qui pouvaient s'y organiser. Elle se souvenait de ces gros chênes, aux pieds desquels elle aimait s'asseoir, pour écouter la douce chanson des oiseaux, pour admirer les reflets brillants du Ridmath qui s'écoulait en faisant des clapotis doux à entendre, ou pour sculpter son arc. C'est décidé, Lenwest s'engagea dans une longue expédition, en direction de la forêt noire.

Le voyage dura plusieurs jours, qui ne se passa sans trop d'embûches. Mais quand elle arriva, elle se rendit compte que le Rude Hiver avait aussi atteint cette région de la Terre du Milieu. Tout n'était plus vert, comme avant, mais blanc. La neige avait tout recouvert. Il n'était plus question de s'asseoir au pied d'un de ces gros chênes enneigés, mais plutôt de marcher pour trouver un endroit où s'abriter. Elle ne savait pas par où aller, elle ne reconnaissait pas le paysage: elle ne l'avait jamais vu recouvert de neige. Elle choisit donc de longer le Rimdath.

Il ne lui fallut pas plus d'une heure de marche pour trouver une auberge, nommée "Chez Mary", qui avait l'air vraiment accueillante et très chaleureuse. Elle est entrée, et la propriétaire, Mary, l'accueilli. Cette femme inspirait confiance à Lenwest, celle-ci la trouvait très courageuse. La propriétaire lui'expliqua le principe de cette auberge, et, en prenant sa part de travail, Lenwest eut droit à son assiette et à une couchette. Il y avait là plusieurs famille, dont une maman, et son bébé qui était malade. Elle portait une sorte de haillon pour vêtement, et n'avais pas de chaussures. Son bébé n'était recouvert que d'une simple couverture. La jeune elfe eut pitié d'eux. Elle discuta avec cette femme, et l'a aidé à soigner son enfant, grâce à ses connaissances en matière de médecine elfique. Elle s'est vite attachée à cette petite famille, et eux, ils avaient besoin d'elle.

Un jour, des brigands sont venus leur voler tous leurs vivres. Quand Lenwest les a vu rentrer, elle voulait réagir, mais ne voulais pas causer une bagarre, dans l'auberge de la femme qui l'avait si bien nourri, si bien logé. Elle ne pouvait pas comprendre comment des mercenaires comme eux pouvaient piller ces personnes. Elle voyait tous ces visages appeurés, ne sachant pas quoi faire, ne sachant pas quoi dire. Sa fureur était encore plus grande, lorsqu'ils sont repartis, emmenant avec eux Mary, lui faisant du mal. Qu'allaient faire tous ces pauvres gens, maintenant que Mary n'était plus là et qu'ils n'avaient presque plus de nourriture. Il fallait réagir.

Dans la salle, un homme s'est levé. Il demandait à ce qu'un petit groupe l'accompagne, à la poursuite des pilleurs. Lenwest ne voulait pas abandonner cette femme, mais elle voulait aider tous ces gens, qui n'avaient plus de quoi manger cet hiver. Elle ne connaissait pas cet homme. Mais, vu sa réaction, il avait de bonnes intentions. C'est décidé, elle allait partir.  Elle prépara son arc, son carquois et ses flêches et, se dirigea vers la cheminée. Elle s'arrêta devant l'homme et lui dit:

- Je viens avec vous!
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Mandür
Soldat Nain
Mandür

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Pour une bouchée de pain. EmptyLun 6 Jan 2014 - 21:08
Il n'est pas rare que je décide de voyager vers d'autres contrées que celles que contiennent les territoires nains, et c'est ce que je me suis décidé à faire. J'arrive ainsi, devant une auberge, qui, il faut le dire, est fort sympathique. Un peu de repos ne me ferait pas de mal, et mon besoin de manger est devenu très grand après tous le parcours que j'ai pu traverser. Je décide donc, de rentrer, et de m'asseoir à une table. Comme toute les auberges, il y a du bruit, du mouvement, des cris, beaucoup trop pour moi en tout cas, bien qu'habituellement c'est encore pire, on pourrait même dire que c'est calme si on compare celle-ci à d'autres. La femme qui s'occupait de celle-ci se nomme Mary si j'ai bien entendu les discussions de certains et certaines. Elle a l'air sympathique, mais peut-être qu'elle est comme les autres, à vrai dire, je n'attends plus rien de personne. En tout cas, je trouve qu'elle tient bien l'auberge, et elle a un air très accueillant. Puis je tourne mon regard vers l'Homme assis en face de moi, qui me regarde avec méfiance, surtout à cause de ma Hache que j'ai amené jusqu'ici. Je dis avec un très large sourire que s'il n'avait reçu qu'un seul objet pour héritage de ses parents, peut-être qu'il le garderait très près de lui. Après ces propos, son visage change, et décide de me laisser définitivement tranquille. Puis l'aubergiste avance jusqu'à moi, je lui commande avec politesse un plat des plus simples, mais qui peut très aisément remplir un ventre. C'est avec un sourire chaleureux qu'elle décide de partir le chercher. Et bien que malgré tout, je la vois gêné, comme ayant un petit peu peur de ma présence, comme si j'étais difforme, je dois dire que c'est un moment heureux de ma vie. Il ne m'est que peu de fois arrivé qu'on ne me pose des questions sur mon comportement, sur le fait que je n'ai pas de barbe, et il est tout simplement très rare qu'on ne m'ait pas fait de remarque désobligeante. Même si son regard montrait quelque fois une certaine crainte, et je crois même qu'elle me surveillait, c'était mieux que rien, après tout j'avais l'habitude, et de bien pire qui plus est. L'aubergiste revient avec le plat. Je la remercie, puis mange la nourriture servie que je trouvais très bonne, mais que je mangeai calmement. Après avoir fini de manger je me mets à lire un livre sur l'évolution des relations entre les différents peuples de la terre du milieu, très intéressant ma foi. Pendant ce temps, beaucoup de personnes faisaient la fête, des gens de toute les races je dois dire. Tous le monde semblait heureux d'être ici. La danse, la chanson, et les récits étaient au menu de cette auberge, et bien que je n'aimai pas le bruit, je trouvai cela fort plaisant. Voir tous ce monde de bonne humeur ne me dérangeait point du tout. Il me semble que beaucoup sont ivres d'ailleurs, ce qui par contre me dérange plus. Soudain je vois entrer un groupe de personnes, et du premier coup d’œil, je peut dire qu'aucun ne me parait sympathique. Je regarde ce qui semble être leur chef, et je peut dire que c'est bien la confirmation même que ceux-là ne sont pas là pour faire de bonnes actions. Puis, il se met à parler. Non seulement il est en effet là pour faire des mauvaises actions, mais en plus il me fait vomir. Sérieusement, ceux qui se croient puissant et capable de tout car ils ont l'avantage physique m'ont toujours dégoutté. Je décide d'attendre avant d'agir, ils sont trop nombreux, et si on veut les avoir, il faut être prudent. Je vois Mery intervenir, avec un courage que j'admire. Elle ne se laisse pas faire, et va jusqu'à cracher sur le chef de la bande. J'ai acquis une prudence, qui m'empêche en ce moment même de l'applaudir, à vrai dire, j'ai très envie de le faire, mais si je le fais, je ne pourrais aider à la sauver. Je me retiens donc. Je regarde avec honte ces bandits fouiller tout ce qu'il reste à ces pauvres gens, et emmener cette pauvre femme avec eux. Je n'ai pas honte de ce que j'ai fais, mais j'ai honte de faire partie de ce monde. Au final, ce sont toujours les meilleurs qui se mettent en danger, ce serait tellement plus amusant si c'étaient les pires... Je n'aime aucune race, et peu de chacun de ses gens, mais je suis de l'avis que bien que je ne dois faire confiance qu'à moi même, que l'aide doit être apportée à tous ceux qui en ont besoin. Et en l’occurrence, elle se doit de l'être. Je me lève de la table, je ne regarde personne, et je sors de l'auberge. Enfin, je rejoins le groupe de personnes qui a décidé de venir en aide à cette pauvre femme.
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Ryad Assad
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Ryad Assad

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Pour une bouchée de pain. EmptyLun 6 Jan 2014 - 23:32
Un, deux, trois, ils iront au bois.

Un, deux, trois, pas un de plus. Parmi les villageois rassemblés dans l'auberge, davantage terrorisés et abattus que choqués et révoltés, pas un n'avait trouvé le courage de se lever avec les voyageurs pour leur prêter main-forte. Les raisons invoquées étaient bonnes, et auraient dû dissuader les trois aventuriers - l'homme, l'elfe et le nain - de se lancer dans pareille folie. Premièrement, la nuit était bien avancée, et il était fou de vouloir s'enfoncer dans ces terres glacées, alors que les températures allaient continuer de chuter brutalement. Deuxièmement, espérer rattraper des cavaliers avec les couches de neige qui recouvraient les environs, c'était aussi fou que de vouloir défier un poisson à la nage. Ils avaient plus de chances de finir morts de froid que de rencontrer les brigands. Enfin, il paraissait insensé de vouloir se frotter à une douzaine de pillards, à un contre quatre. Même si les hommes qui avaient dérobé les vivres ne paraissaient pas être de professionnels, ils n'en demeuraient pas moins nombreux et dangereux. Les chances de succès étaient infimes, voire même inexistantes. Et pourtant, cela ne décourageait pas les trois compagnons d'infortune, rassemblés autour d'une même cause par un caprice du destin.

Ils ne se connaissaient pas, et pourtant ils allaient devoir compter les uns sur les autres plus que jamais. Car dans cet enfer immaculé, seule une cohésion parfaite les sauverait d'une mort certaine. Et pourtant, comment pouvaient-ils décemment cohabiter, eux qui semblaient si différents ? Ils n'avaient, semblait-il, aucun point commun, mais peut-être que cette aventure était ce qu'il leur fallait pour s'en découvrir... ou se rendre compte qu'ils avaient eu tort. Toutefois, l'échec ne pouvait signifier que la mort, et s'il s'avérait en fin de compte qu'ils ne pouvaient pas travailler ensemble, ils allaient le payer de leur vie.

Les paysans s'étaient rassemblé autour d'eux, pour leur souhaiter bon courage. On leur donna des vêtements chauds pour la route, et on leur prépara un sac contenant des couvertures, de quoi espérer survivre à une nuit d'hiver. On ne put guère leur donner de vivres, et ils devraient se débrouiller pour chasser en route, ce qui risquait toutefois de leur faire perdre du temps. Quelques villageois essayèrent de leur expliquer comment se repérer dans les bois, mais il semblait qu'aucun n'avait de connaissances suffisantes pour leur garantir un retour à la civilisation. Ils risquaient fort de se perdre s'ils s'enfonçaient entre les arbres, sous le ciel nocturne, et de ne jamais revoir un visage familier ou amical. Il y eut des adieux pleins d'émotion retenue, des accolades à la fois encourageantes et profondément déstabilisantes. Les trois aventuriers furent salués comme des guerriers partant affronter une mort certaine, et devant lesquels on baissait humblement la tête, comme pour saluer le courage de ceux qui s'opposent en dépit du bon sens à l'injustice, à la violence et à la mort.

Ce fut ainsi que les trois compagnons se retrouvèrent seuls, à prendre la route qu'avaient empruntée les brigands. Les premières traces étaient simples à suivre, car les chevaux étaient nombreux et formaient un cortège qui déplaçait un bon paquet de neige. Les sabots avaient laissé un profond sillon, qui partait en ligne droite vers le Nord, s'enfonçant entre les arbres. Ce fut ce chemin que les trois aventuriers suivirent. Très rapidement, le terrain se fit de plus en plus pentu, et le bon rythme qu'ils avaient acquis fut brisé. Les arbres furent leur meilleur secours, car en prenant appui sur eux, il était possible de gagner quelques mètres précieux, qui coûtaient cher en énergie. Même pour l'elfe, ce ne fut pas une partie de plaisir. Si son peuple savait progresser sur la neige sans s'y enfoncer, les bourrasques de vent terrible qui filaient entre les arbres, serpentant comme des reptiles à la recherche du moindre morceau de chair qu'elles pouvaient mordre, menaçaient de la faire tomber à chaque instant. Des flocons qui tombaient du ciel en tourbillonnant étaient pris dans les rafales, et leur fouettaient le visage, les empêchant de voir à plus de quelques mètres devant eux. Et pourtant, ils suivaient toujours la piste, qui semblait aller en s'amenuisant : ce qui signifiait qu'ils perdaient du terrain sur leurs cibles.

La nature semblait se dresser comme un obstacle face à eux. Parfois, la glace cédait sous leurs pieds, et ils s'enfonçaient dans des trous plus ou moins profonds. L'aide des deux autres étaient alors nécessaire pour éviter qu'un des membres de leur trio ne disparût dans une crevasse. Parfois, c'étaient des arbres morts, étendus en travers de leur passage, qui leur bloquaient la route. Il fallait les escalader, ce qui signifiait s'extirper de plusieurs centimètres de neige, enjamber un obstacle qui alors paraissait immense, tout ça dans l'espoir de gagner de précieuses secondes sur les bandits. Dans ces conditions, l'espoir est difficile à entretenir, balloté qu'il est par le vent, menacé par le froid, et étouffé par la nuit. Pourtant, ils continuèrent. Chacun devait avoir ses propres raisons de ne pas abandonner. Etait-ce par fierté envers les autres ? Etait-ce parce qu'ils étaient réellement motivés pour retrouver Mary ? Avaient-ils des motifs qui n'appartenaient qu'à eux ? Quoi qu'il en fût, ils continuèrent à avancer.

Bientôt, ils arrivèrent au sommet de la petite colline qu'ils venaient de franchir. Il leur avait fallu plusieurs heures, alors qu'en temps normal, ce n'était l'affaire que d'une vingtaine de minutes. L'altitude les exposait encore plus aux vents violents qui se déchaînaient, qui hurlaient à leurs oreilles, et ils suivirent la piste de moins en moins évidente. Elle descendait sinueusement entre les troncs, et s'enfonçait dans les ténèbres de cette forêt interminable. Ils poursuivirent leur route, de plus en plus harassés, mais sans s'arrêter. Leur courage était admirable, et leur détermination aurait fait rougir de honte certains des plus grands héros de jadis. Pourtant, malgré tous leurs efforts, ils finirent par perdre la piste des chevaux. La neige tombait de plus en plus, et elle avait recouvert les traces qu'ils avaient suivi de plus en plus péniblement jusqu'à ne plus les voir. Ils essayèrent bien de retrouver un signe du passage des cavaliers, mais ce fut en vain, et ils essayèrent de conjecturer sur la direction à prendre. En vérité, ils se trompèrent de chemin. La fatigue, la lassitude, et peut-être la faim qui les tenaillait avaient émoussé leur lucidité, et ils étaient désormais bien incapables de retrouver leur route.

Ils étaient en plein milieu de la nuit, perdus, transis de froid, se demandant quelle était la marche à suivre. Peut-être commençaient-ils désormais à regretter d'avoir quitté le confort douillet de l'auberge Chez Mary ? Ils devaient se trouver bien bêtes maintenant qu'ils étaient piégés dans cet univers hostile, alors qu'ils auraient tout aussi bien pu fermer les yeux. C'était ce que tout le monde faisait, en Terre du Milieu. Personne ne leur aurait tenu rigueur s'ils avaient refusé de courir après une chimère, s'ils avaient sagement pensé à leur propre intérêt avant de vouloir défendre leur prochain. Ainsi allait le monde, et ils l'apprenaient à leurs dépens. Le désespoir était un fléau encore plus terrible que la peur, car il rongeait de l'intérieur, et ne donnait aucune force pour se sortir de situations horribles. Il affaiblissait le corps et l'esprit, rendait chaque pas immensément difficile, chaque respiration profondément douloureuse. L'air froid et vif qui s'infiltrait dans leurs poumons semblait ne plus leur apporter d'oxygène, bien qu'ils ne fussent pas vraiment haut, et il paraissait les brûler de l'intérieur sans pour autant les réchauffer. C'était comme inspirer des morceaux de verre coupants comme des rasoirs, qui étaient pourtant nécessaires à leur survie, comme ne cessait de leur répéter la partie rationnelle de leur esprit. Partie rationnelle qui diminuait de plus en plus, au profit de leurs pensées propres.

Ces situation étaient propices à la réflexion, et l'esprit semblait libre de vagabonder librement, maintenant qu'ils étaient plus près de la mort qu'ils ne l'avaient, peut-être, jamais été. Leur subconscient se rendait compte que c'était le moment où jamais d'envahir le devant de la scène, et qu'il était l'heure de se laisser aller à divaguer, à délirer, à regretter...

Et puis ils la virent.

Ténue, d'abord. Vacillante. A demi cachée derrière les arbres. Une petite lumière qui paraissait ridicule au milieu de l'océan de noirceur qui se déversait autour. Dans ce monde bicolore, cette pointe orangée paraissait merveilleuse, et ils furent attirés par elle, par toutes ses promesses : la chaleur, une présence humaine, peut-être même un bon repas et une boisson chaude. Il y avait de bonnes chances pour que ce furent leurs ennemis, mais en étaient-ils conscients ? Et le cas échéant, s'en souciaient-ils réellement ? Ils retrouvèrent un nouvel élan, un nouveau souffle, et ils se ruèrent presque en avant, courant, trébuchant, comme si la petite étincelle d'espoir pouvait s'éteindre à tout moment, s'ils ne la saisissaient pas dans leurs mains glacées, aux doigts ankylosés. Cette lumière, c'était leur dernière chance, ou peut-être leur ultime combat. La seule façon de le savoir, c'était d'aller vérifier.


~~~~


Un joyeux feu de camp brûlait, et au-dessus était en train de cuire le corps d'un animal. Il s'agissait probablement d'un lapin qui avait eu le malheur de sortir de son terrier. Il avait été attrapé rapidement, et il terminait désormais en brochette. A côté de l'âtre, une silhouette solitaire se réchauffait les mains. Une cape de peau était posée sur ses épaules, et lui donnait un aspect massif, trapu. Sur le sol, non loin, reposait une hache de guerre d'une taille respectable. Elle ne ressemblait à rien de ce qu'on fabriquait dans les grands royaumes, et il s'avérait en réalité que cette arme avait été fabriquée par une tribu appartenant aux peuples du Grand Nord, les Lossoths. L'individu qui se trouvait là, parfaitement silencieux, ne put manquer d'entendre le vacarme que produisait la progression de trois individus désespérés et éreintés. Une main gantée se referma bien vite sur le manche d'une hache qui semblait avoir vu couler le sang à plusieurs reprises, et la cape retomba sur le sol neigeux au moment où les trois aventuriers déboulaient dans le minuscule campement.

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- Qui êtes-vous ? Grogna son occupante légitime. Et que voulez-vous ? Répondez !

Elle était seule, mais elle était mieux reposée et mieux réchauffée. La provoquer n'était certainement pas une bonne idée. Il allait leur falloir négocier à la place, et utiliser des arguments convaincants, s'ils ne voulaient pas être chassés.


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Pour une bouchée de pain. EmptyMar 7 Jan 2014 - 1:05
« Je maudis. Quoi ? Je ne sais. Mais je maudis. » C'est d'abord ce qu'il se répéta en boucle, silencieusement, lorsqu'il se rendit compte qu'il perdit définitivement les traces d'Hùdhùm, son cheval. Il était avec eux c'était certains et l'archer aurait reconnu l'empreinte de ses sabots entre un millier d'autres. Il n'eut pas à se plaindre des deux compagnons qui le suivait. Il avait bien remarqué ce « nain » s'il en était un, étrange, silencieux et pensif mais vaillant. Et que dire de cette femme Elfe. Peu de choses en réalité. Lovir ne leur accordait aucune confiance. Juste assez pour faire confiance au destin quand à leur nature profonde. Il ne croyait pas risquer sa vie en leur présence, contrairement au milieu de ce blizzard cinglant. D'ailleurs, il eut dit que ces dernières vingt-quatre heures étaient faites pour l'humilier. Lovir n'avait pas l'habitude de perdre une proie. Pas plus qu'il n'avait pour coutume de séjourner dans une auberge. Voilà ce que coûte un repas chaud en compagnie d'une petite communauté. Ah ces communautés, Lovir ne comprends toujours pas qu'il en est maudit. Et ce depuis sept années d'alternance entre la solitude de la prospection dans ces terres désolées et la vente de ses quelques babioles dans des villages à peu près civilisés. Mais il n'allait pas plus loin, que cette routine suffisante. En tout cas, il la regrettait cette routine. « Quel idiot fais-je... maudite auberge. ». Il n'en voulait pas tant aux pillards. Il lui suffisait d'observer le linceul blanc, mortel, qui recouvrait toute chose aux alentours, pour comprendre qu'il suffisait d'une once d'intelligence pour basculer facilement dans le vol et le pillage. Ou alors de tenter l'ultime exode vers des terres plus chaudes et risquer mains dangers tout aussi « mordant » que le froid.

Mais ses plaintes étouffées cessèrent bien vite. Les brises cinglantes qui s'engouffrait entre les mailles trop grosses du textile de son capuchon, coupait net à toutes sortes de pensées, si ce n'est celle de survivre. Mais Lovir n'est pas né de la dernière pluie. L'ancien capitaine de la Garde Nocturne est le digne descendant des Forestiers et par extension des hommes du Nord. Il a longtemps parcouru le long du Rimdath et les instructions élémentaires de survie sont devenu des automatismes avec le temps. Ses mains, sont, avec son esprit, les deux choses qu'il se devait de préserver du froid et de l'inaction. Il avait déchiré une partie de sa couverture pour en faire de très épaisses mouffles. Le prospecteur était archer, avant même d'être quoique ce soit. Il se jura, comme il jura à son instructeur dès l'âge de six ans, de toujours prendre son arc comme la première et la dernière clef de sa survie, en tout genre de milieu. Et ce froid glacial ne faisait pas exception.

De plus, le prospecteur fit rapidement le rapprochement. Il se trouvait dans le même état que la semaine qui suivit son exil, sept années plus tôt. Désarmé, impuissant, errant, inquiet, incertain. La différence cette fois et qu'il était accompagné. Mais quelle importance.

Alors que sa lucidité s'amenuisait et qu'il luttait pour échapper aux réflexions les profondes et aux introspections mortelles et aveuglantes, il vit ce que ces camarades virent aussi. Tous trois marchèrent dans le silence. Règle d'or de la traque et  ce, peu importe les conditions. L'espoir. C'était ce qu'il cru voir. Mais l'espoir, Lovir s'en était déjà fait une idée par le passé. Et à mesure qu'ils avançaient vers lui, Lovir ne dérogea pas à sa propre règle. La prudence.

C'est cette silhouette, féminine, encore que sous cet accoutrement très imposant, on eut facilement dit qu'il s'agissait d'un homme, et que la voix trahit qui ouvrit le dialogue. Ce que Lovir fut, lui parut plus dur que jamais. Et c'était pourtant le geste qu'il avait, toute sa vie durant répéter une centaine de fois, quasi-quotidiennement. Il se saisit d'une flèche, dont le carquois avait changé de position. Il se trouvait presque à l'horizontale au niveau de ses hanches. Lovir savait que par se froid, il valait mieux limiter les mouvements s'il fallait décocher. Mais il eut dit que ses os eux mêmes étaient givré. Ses muscles agonisaient en silence et le simple geste de sortir une flèche de son carquois, de la placer dans la fenêtre de tir de son arc très affecté pas le gèle, lui causa une peine qu'il n'aurait jamais soupçonné possible.

- Nous... il ne parvient pas à déglutir plus. La femme qui les avait interpellé n'avait surement rien entendu, mais avait pu remarquer qu'autour de ses lèvres gercées, sa barbe d'un mois avait bougé et que de la fine neige en était tombée. Il remarqua cette hache, imposante et peu amicale.

Comme excité par le danger, les sens altérés et la pensée courte et peu efficiente, il essaya de bander son arc à plusieurs reprises. Il tituba même un instant vers l'arrière avant de se stabiliser à quelque mètre de l'interlocutrice. Surement pour la première fois de sa vie, derrière l'arme qu'il connaissait si bien, il avait l'air pitoyable. Il y parvient non sans grogner et pointa la flèche vers la silhouette sombre. Il resta ainsi, espérant que l'Elfe, ou que le nain, puissent répondre à sa place, car il ne le pouvait.
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Lenwest
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Pour une bouchée de pain. EmptyMer 8 Jan 2014 - 18:13
Quand Lenwest avait accepté cette expédition, elle ne s'imaginait pas ce qu'elle devrait surmonter. Le froid, le vent, la neige, les engelures, seuls ces mots trottaient dans son esprit. Le vent glacial lui frigorifiait les oreilles et lui bleuissait le bout du nez. Elle essayait, au mieux, de cacher ses mains sous ses différentes couches qui la recouvrait, et qui devait la protéger du froid. La neige lui transperçait ses chaussures et lui mouillait ses pieds. Des flocons se posaient dans ses cheveux relevés en chignon, lui faisant une chevelure châtain parsemée de petites tâches blanches. Les aventuriers devaient passer certains obstacles, qui épuisaient tous leurs efforts. Lenwest était fatiguée, essoufflée, elle n'en pouvait plus. Elle repensa alors à cette femme, qui essayait de sauver la vie de son nourrisson avant de s'occuper de la sienne. En repensant à eux, Lenwest reprit des forces, elle retrouva son courage, et se jura de ne jamais abandonner ce voyage. Elle se jura de revenir à l'auberge avec de la nourriture, autant qu'il en faudrai pour nourrir toutes les bouches qui s'y trouvent.

Lenwest accompagnait un homme. Il était mystérieux, sombre. Sa cape, avec son capuchon qui recouvrait sa tête n'arrangeait pas les choses. Elle ne lui parlait pas. Elle n'était pas très bavarde, encore moins avec un homme qu'elle ne connait pas. Même si en prenant la poursuite des  brigands, il avait  été courageux et brave, il n'inspirait pas confiance à Lenwest. Il lui paraissait malhonnête et fourbe. Elle se méfait. Et puis, il y avait ce nain. Un nain sans barbe! Qui avait déjà vu ça? En tout cas, pour Lenwest, c'était la première fois! En plus, les elfes et les nains ne s'entendent pas. Lenwest le savait bien et, ce ne serait pas elle qui lui parlerait! En vérité, elle ne parlait pas beaucoup, seulement avec des personnes qu'elle connait bien et en qui elle a confiance. Il se trouvait que là, justement, elle n'avait pas confiance en ses compagnons de route. Mais c'était pour une bonne cause qu'elle voyageait avec eux. En plus, elle ne pouvait compter que sur eux si elle se retrouvait dans une situation délicate. Il pouvaient lui sauver la vie! Et puis, ce n'est pas parce qu'elle n'avait pas confiance en eux qu'elle ne les sauverait pas. Au contraire, Lenwest les aidera jusqu'au bout. Elle espérait qu'ils s'entraideraient mutuellement.

En voyant cette lueur orangée vaciller au loin, Lenwest ne put ressentir que de la joie. Elle allait enfin pouvoir se réchauffer. Elle pressa le pas pour y parvenir le plus vite possible. Mais quand elle arriva, elle s'arrêta net. Cette femme lui faisait peur. Elle était imposante. Sa hache ne la rassurait pas moins. Quand cette femme leur parla, elle voulait répondre mais n'y arriva pas. Enfin, prenant son courage à deux mains, elle réussit à sortir quelque mots.
-Bon...bonjour, je me nomme Lenwest.
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Mandür
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Mandür

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Pour une bouchée de pain. EmptyMer 8 Jan 2014 - 19:51
Ma parole, les Humains et les Elfes sont d'une rapidité qui m'impressionnent au plus haut point. Et je puis dire que c'est fort impoli et irrespectueux! D'accord, au début ils ne pouvaient pas savoir qu'un Nain les suivrait, c'est pourquoi ils me distançaient déjà de quelques mètres à ce moment là. Mais ils ont dû s'apercevoir que je les suivais, et malgré tout ils n'ont pas faibli leur marche. Non seulement un Nain ça n'avance pas vite, mais en plus si vous rajoutez à ça toute une Histoire qui a laissé de très longues cicatrices qui ne sont pas favorables à tout ce qui est lié à la rapidité, je dois dire que c'est fort difficile pour moi de les rattraper. Certes, on marche tous silencieusement, et nous ne courrons pas, mais malgré tout je ne peux réussir à les rattraper. Et j'ai énormément de retard car oui, la faiblesse des Nains dans la vitesse ne se limite pas qu'à la course mais aussi à la marche, et même silencieuse. Si vous rajoutez à cela qu'on est obligé de passer par des chemins rocheux, en plein Hiver, avec de la glace partout et que les vents sont forts, c'est très fatiguant. Mais je me permets de pardonner ces deux-là qui traquent avec moi les voleurs, car si certes, ils s'en fichent complètement que je suis dans l'obligation de faire un effort physique considérable, c'est justifié. Leur vitesse est dû à l'envi de sauver cette pauvre Dame qui s'appelle Mary. A leur place, je ferais sans doute pareil. Et honnêtement, je n'attends jamais rien de personne, alors au fond, ça m’indiffère.

Et je dois dire que malgré mes efforts, je n'ai pas encore rattrapé cet Homme et cette Elfe. Je m'en suis même éloigné encore un peu plus. Je suis très fatigué, mais j'ai vécu pire, et surmonterais cette tâche. Et honnêtement, je suis capable de me montrer endurant, et il faut que je le sois, surtout devant une Elfe. Il ne faut pas que je paraisse faible devant un membre de cette race de Hautains et d'orgueilleux. Ce serait très pitoyable, et je n'ai pas envie d'être en position de difficulté face à elle.

Je continue de marcher pendant quelques temps, puis je vois soudainement mon groupe s'arrêter, et je me demande bien pourquoi. A mon avis, il doit y avoir une raison, en effet, s'arrêter après avoir fait tant d'efforts pour pourchasser ces Bandits, ce serait vraiment d'une idiotie abyssale. Et là, je pense que je serais en droit de m'indigner, après tous ces efforts que j'ai fais pour que je ne m'éloigne pas trop d'eux. Enfin, je les rejoint, et je vois pourquoi ils se sont arrêtés. Une femme, qui n'a pas l'air très commode, est devant nous avec une hache à côté d'un feu de camp. Elle demande successivement qui on était, ce que l'on voulait, et évidemment une réponse! L'Homme essaye en premier de parler, mais ne pouvant échapper à la lâcheté des gens de sa race, ne sait dire mot. Encore un qui lorsqu'il a une supériorité de force sur quelqu'un sait trouver du courage et se croit puissant, mais ne sait dire mot devant quelqu'un de plus fort encore! Puis je regarde l'Elfe. Au départ, elle aussi ne dit mot. Puis, enfin, grâce certainement à l'orgueil des Elfes, elle finit par dire son nom. Lenwest... Ce n'est qu'un avis personnel, mais je dirais que ce n'est pas un vilain nom. Il faut avouer que de ce côté là, ils ont de l'imagination.

Mais rien de plus, elle n'eu pas le courage de répondre à l'autre question que l'étrange Femme avait posé. C'est pourquoi je me dois d'apporter une réponse. A vrai dire, je n'en n'ai pas envie. Mais il le faut, car personne n'a osé. Je n'ai pas peur, je ne sais si c'est parce-que je me reconnais en cette femme. Les gens sont terrorisés par elle, ils la trouvent bizarre, n'osent pas l'approcher, ni lui répondre, et peuvent se moquer d'elle par derrière. Je ne sais pas non plus si c'est du fait qu'il n'est plus très facile de me faire peur de part ce que j'ai vécu, ou même si ce sont les deux raisons que je viens de citer, mais ce qui est certain, c'est que la crainte ne m’atteins pas, alors que la compassion oui. Et en même temps, il ne faut pas la brusquer, sinon elle risquerait de s'énerver. C'est pourquoi j'essaye de faire de mon mieux pour lui apporter une réponse correcte, mais sincère:

"Bonsoir ma chère Dame, je vous prie de bien vouloir excuser mes deux compagnons. Vous voyez, les gens ont facilement peur et sont irrespectueux. Ceux qui ont un mode de vie ou de pensée différent ne connaissent pas que des bonnes considérations de la part de ceux qui les entoure ou qui les rencontre. Je l'ai moi même vécu par le passé, mais j'en dis trop. Mon nom ne vous servirait à rien, mais si vous en avez réellement besoin, vous pouvez insister pour que je vous le donne. Nous ne vous voulons aucun mal, aucun. Nous somme tous simplement à la recherche d'une pauvre femme, enlevé, et prise en otage par des voleurs. Le monde est malheureusement rempli de malheurs comme celui-ci. Je pense que vous pouvez facilement le comprendre. Je ne parle que très peu, et mes compagnons de route ont du s'en apercevoir d'ailleurs, mais je juge aujourd'hui que l'importance est capitale, c'est pourquoi j'use énormément de la parole aujourd'hui. Et bien que je ne sois pas sûr de votre alignement, je vous prierait de bien vouloir nous aider. La moindre petite aide serait bien accueillie, et si vous avez vu des personnes emmenant une femme innocente avec eux, je vous demanderai de bien vouloir nous indiquer par où ils sont passés. Pouvez-vous le faire?"
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Ryad Assad
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Pour une bouchée de pain. EmptyJeu 9 Jan 2014 - 22:41
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Trois voyageurs. Rien de plus.

Un moment, elle avait cru qu'il s'agissait de bandits, car leur allure n'avait rien d'amène. Ils portaient tous des armes, même s'ils ne les brandissaient pas de manière menaçante, et il était plus prudent sur ces terres sauvages de faire preuve de davantage de méfiance que de pas assez. Dans bien des cas, on tombait sur des individus qui semblaient inoffensifs, et qui en réalité n'étaient que des tueurs sans pitié. L'inverse était vrai également, et on pouvait rencontrer des gens effrayants, qui en fait étaient tout sauf agressifs. Mais ce n'était pas le pire : d'autres choses, plus sombres, parcouraient les glaces. Et ces choses-là, il valait mieux ne pas les rencontrer. L'attention de la jeune femme revint aux trois voyageurs. Ils formaient un groupe bien insolite. Un homme, une elfe, et un nain. Une compagnie aussi hétéroclite ne pouvait être poussée à s'unir que par la nécessité, car il était de notoriété publique que les elfes et les nains se détestaient cordialement, et que les hommes préféraient souvent vivre entre eux. Il fallait se méfier de la nécessité, car elle poussait les individus à des actions extrêmes. La faim pouvait conduire les gens au meurtre. Et vu comme ils regardaient la nourriture qui cuisait lentement au-dessus du feu, ils auraient volontiers sacrifié sa vie pour une bouchée de pain. C'était la raison pour laquelle elle gardait sa hache en mains.

Elle leur avait demandé ce qu'ils venaient faire là, ainsi que leur identité. Si la formulation n'était pas des plus polies, les interrogations étaient légitimes, et elle n'entendait rien partager avec eux tant qu'ils n'auraient pas au moins eu la décence de se présenter. Le premier, l'homme, semblait épuisé et gelé. il ne trouva pas le courage d'aligner deux mots. Tels étaient les gens du Sud, guère habitués à la neige et aux climats polaires. Il fallait être né dans ces régions glacées pour savoir les appréhender. Le territoire de chasse de la jeune femme s'étendait jusqu'aux limites des terres blanchies par la neige. Avec le Rude Hiver, elle avait pu descendre bien plus au Sud, à la recherche de ses proies, et elle faisait naturellement davantage de rencontres. Parfois, elles se passaient bien, parfois non. Mais dans tous les cas, elle arrivait à s'en sortir. Alors ceux-là, elle ne les craignait pas. La femme elfe semblait un peu plus en forme que son compagnon, et elle trouva la force de prononcer son nom. Rien de plus. Ils devaient avoir parcouru une longue distance pour être épuisés à ce point, et elle se demandait d'où ils pouvaient bien venir, et depuis quand ils marchaient ainsi. Elle n'osait toutefois pas montrer trop d'intérêt pour leur cas, de peur qu'ils trouvassent un moyen d'exploiter sa curiosité contre elle.

Le nain, enfin, répondit pour eux tous. Il était aussi essoufflé que les autres, mais il devait être moins sensible aux conditions climatiques affreuses. Peut-être que son corps petit et râblé conservait mieux la chaleur que les corps grands et élancés des être sylvestres et des hommes du Sud. Elle l'écouta jusqu'au bout, sans quitter du regard les trois membres de leur groupe. Il parlait beaucoup, avec emphase, et elle avait peur qu'il s'agît d'une ruse pour détourner son attention. Et il était vrai que ça marchait plutôt bien. Il était difficile de se concentrer sur ce qu'il racontait tout en gardant à l'œil ses deux compagnons. Toutefois, elle était de nature méfiante, et elle n'avait jamais rencontré un nain aussi bavard. Une bonne raison pour ne pas baisser sa garde. Cela dit, elle n'avait jamais non plus rencontré de nain sans barbe. Elle allait de surprises en surprises, aujourd'hui.

Elle écoutait avec attention ce petit être qui, au travers de ses paroles, essayait de faire ami-ami avec elle. Il cherchait à la convaincre plus ou moins subtilement qu'ils étaient pareils, qu'ils pouvaient se comprendre, et qu'ils pouvaient s'entraider. Mais il n'avait encore rien demandé. Ce qu'il devait vouloir d'elle en échange devait être énorme, sans quoi il aurait simplement supplié pour pouvoir partager son repas. Mais en fait de repas, il voulait surtout des informations. Il cherchait à localiser des bandits qui couraient vers le Nord, et il souhaitait qu'elle lui indiquât l'endroit par où ils étaient passés. Le regard de la jeune femme se fit dur tout à coup, et il s'assombrit encore malgré l'obscurité ambiante. Elle répondit d'une voix grave :

- Vous cherchez une douzaine d'hommes, sur des chevaux, c'est ça ? Ceux qui amènent des montures sans cavaliers avec eux.

Elle n'eût pas besoin qu'ils répondissent pour comprendre qu'elle avait visé juste. De toute façon, à cette heure de la nuit, personne ne déambulait dans les forêts du Nord. Et en une nuit, il avait fallu qu'elle croisât deux groupes distincts. Il ne pouvait pas s'agir d'une coïncidence, et ils ne pouvaient pas s'être trompés. Le discours du nain avait quelque peu adouci son tempérament, maintenant qu'elle comprenait qu'ils étaient à leur poursuite. Elle ne supportait pas ces bandits qui parcouraient ses terres, et si elle en avait eu la possibilité, elle les aurait massacrés jusqu'au dernier. Voir d'autres individus le faire ne la dérangeait donc pas plus que ça. Mais ils n'y arriveraient jamais :

- Vous ne les rattraperez pas... Ils ont trop d'avance sur vous, et vous ne me semblez pas savoir où aller.

Elle essaya de deviner à l'expression de leur visage ce que cette nouvelle leur causait. De la peine ? Peut-être un peu. De la colère ? Etait-ce vraiment de la colère ? Elle n'aurait su le dire. Il y avait un mélange d'émotions tel qu'elle ne pouvait pas déterminer ce qui dominait le plus chez eux. Mais de toute évidence, ils étaient désireux de les rattraper. Aussi ajouta-t-elle, avant qu'ils eussent eu le temps d'ajouter quelque chose :

- Mais moi, je sais où ils se trouvent.

Elle vit qu'elle avait capté leur attention, aussi poursuivit-elle avec un sourire sans joie :

- Ce sont des voleurs et des tueurs, qui se sont établi sur nos terres. Ils chassent notre gibier, et mettent mon peuple à genoux. Ils sont passé par ici il y a peut-être une heure, et ils ont pillé la réserve de nourriture que j'avais cachée. Ces loups n'ont aucune morale !

Elle s'était légèrement emportée, et elle s'en voulut presque. Elle ne supportait pas l'injustice qu'ils apportaient sur ces terres pacifiques, et elle avait l'impression qu'ils semaient la discorde et le chaos partout où ils passaient. Ils se fichaient  des règles établies des siècles auparavant, et se servaient comme ils l'entendaient, même s'ils devaient condamner à la mort tout un peuple. Ces envahisseurs devaient être chassés, et elle pensait avoir trouvé un moyen commode de le faire. Ces trois aventuriers pouvaient lui fournir l'appui dont elle avait besoin pour nettoyer cette vermine. Ce ne serait qu'une épine enlevée parmi tant d'autres, mais cette mince victoire en appellerait sûrement d'autres.

- Je peux vous aider à les retrouver, si vous le souhaitez. Je peux partager mon repas avec vous, et vous conduire ensuite là où ils sont établis. Mais vous devez me faire une promesse : lorsque nous les trouverons, nous les attaquerons et nous les tuerons. Ceux qui voudront s'enfuir seront épargnés... les autres seront massacrés.

Le regard de la jeune femme était inflexible. Il était évident que ce marché était le seul qu'elle pouvait accepter. A voir le campement qu'elle avait, aucun bien matériel ne pouvait avoir de la valeur à ses yeux, et seule la survie de son peuple comptait. Les aventuriers devaient faire un choix, mais il était certain que jamais ils ne retrouveraient les brigands sans elle. Ils pouvaient soit s'en retourner, en espérant retrouver leur chemin, et ne pas mourir de froid et d'épuisement, ou bien partager le feu et le pain de cette inconnue, et se lancer avec elle dans une quête qui les mènerait nécessairement au conflit. Tout espoir de régler ce problème diplomatiquement venait de s'envoler, mais après tout ne s'était-il pas déjà envolé quand les brigands avaient sorti leurs armes ? Quand ils avaient enlevé Mary ? Les choses étaient allées trop loin, désormais, et personne n'était prêt à reculer. En s'engageant sur cette voie, les trois aventuriers savaient au fond d'eux-mêmes qu'ils allaient devoir tuer pour vaincre.

La jeune femme les regarda tour à tour. Elle ignorait comment ils prendraient leur décision. Peut-être avaient-ils besoin de se concerter pour trouver quoi faire, peut-être avaient-ils un chef ? Elle ne savait pas. Mais comme ils ne réagissaient pas, elle abaissa sa hache, et leur lança :

- Approchez du feu, en attendant. La langue de votre ami est gelée, et il serait injuste qu'il ne puisse pas parler.

Elle adressa un sourire amusé à l'homme, et s'assit à la place qui était la sienne, posant sa hache sur le sol, à portée de main. Tous prirent place autour du feu, qui commença à leur procurer un peu d'apaisement et de chaleur. C'était un réconfort bienvenu, mais qui ne les empêchait pas de devoir répondre. La jeune femme, maintenant qu'ils étaient tous en cercle autour des flammes, posa une main sur sa poitrine, et se présenta enfin, comme la coutume l'exigeait :

- Kristvina, c'est ainsi qu'on me nomme.

Elle n'ajouta rien, et les laissa à leurs pensées et à leurs conversations. Mais ils devaient faire vite... le repas seraient bientôt prêt.


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Lovir Dirileth
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Pour une bouchée de pain. EmptyJeu 9 Jan 2014 - 23:57
La pointe de sa flèche, gelée et toujours entre ses phalanges et la fenêtre de tir de son arc, se dirigea en quelques secondes vers le sol, le temps pour le Nain vaniteux de faire sa tirade. Lovir ne quitta pas des yeux la Nordique. Les propos de Mandür résonnèrent en lui comme un protocole pré-travaillé, opportuniste et suffisant. Mais il reconnaissait au fond de lui, l'incroyable résistance du nain. Cette réflexion lui renvoya son propre reflet dans un miroir de pensée. Lovir aurait pendant toutes ses années, apprit à résister aux dures lois de la nature, à traquer du gibier dans des conditions déplorables, à trébucher le long de monts rocheux, à s'humidifier longuement dans un camouflage en surfaces de rivières pour aujourd'hui, d'un hiver trop rude, être capable de si peu de choses. Ne s'était-il pas ramollis durant ces années d'exil ? Était-ce la prospection ?

Certainement pas. Maintes fois il dû affronter le courroux d'occupants illégitimes, dans d'anciennes ruines et de sombres cairns. Maintes fois il fut délesté de précieuses ressources en répondant toujours par une traque astucieuse et efficace. C'est d'ailleurs fort de cette expérience qu'il proposa à l'audience fraîchement pillée, de lancer une traque derrière ces bandits. Ce mot, la « traque » ne signifiait pas une simple poursuite pour lui. Elle était l'aboutissement de longues années de formation, de mise en pratique et d'acharnement. Et là encore, en ce jours glacial, il se trouvait être impossible de garder une trace. Les anciens de sa communauté avaient-ils raisons ? Les Hommes de la Lisières sont ils les pions d'un destin joueur, qui tantôt donne de bien bonnes fortunes et tantôt de bien mauvaises faiblesses. « Non Lovir... » se disait-il intérieurement, « tu ne peux te cacher derrière des fables pour camoufler ton incompétence ». Il s'en voulut. Mais rapidement, les propos de la Nordique le ramena à la réalité.

Il constata d'ailleurs qu'il avait complètement baissé son arme. Les propos tenus par la Nordique l'enfonça un peu plus dans sa profonde - mais étouffée - colère, d'avoir perdu les traces de leur proie. Il avait déjà oublié les civilités du nain et il se mettait intérieurement une gifle pour se remettre une bonne fois pour toute dans la réalité. Il se rapprocha subtilement d'elle et du feu, à mesure qu'elle exprimait son mécontentement de voir sur ce qu'elle osait appeler les terres de son peuple, une bande de couards. Mais rapidement il comprit, avant même qu'elle ne fasse sa proposition, qu'il s'agissait là d'une chance non négligeable. Quand enfin elle avoua savoir où se trouvaient les malandrins, Lovir tiqua. Il arrêta d'avancer vers le feu et vers cette femme. Comment pouvait-elle le savoir ? Si elle le savait, pourquoi n'était-elle pas allé quérir de l'aide pour mettre un terme à ces chevauchées insolentes et insupportables ? Des questions qu'ils n'avaient pas forcement l'envie de poser. Non par crainte, ou pas courtoisie, mais par volonté. Il n'en avait pas envie. Ce qu'il voulait c'était reprendre des forces, décider de la suite des événements et tirer Hùdhùm de cette galère.

Il écouta attentivement sa proposition. « Je peux vous aider à les retrouver, si vous le souhaitez. Je peux partager mon repas avec vous, et vous conduire ensuite là où ils sont établis. Mais vous devez me faire une promesse : lorsque nous les trouverons, nous les attaquerons et nous les tuerons. Ceux qui voudront s'enfuir seront épargnés... les autres seront massacrés. ». Telle fut sa suggestion. Lovir ignorait tout des peuples du Grand Nord, mais - si tout du moins elle en était une digne représentante - ils n'était manifestement pas très subtiles. Là n'était pas l'idée d'une traque, que s'en faisait l'archer exilé. Quand le gibier est en surnombre, mieux vaut, par de discrets procéder, semer le trouble et la discorde, le temps d'en occire suffisamment pour que les proies restantes perdent tout sens de l'orientation et du devoir. Il en toucherait deux mots le moment venu. Néanmoins son aide était inévitable, il en avait fort bien conscience. Peut-être que Lovir n'était simplement pas un chien de guerre, mais bien une faucon qui, quand il s'en sent capable, s'en va retirer la vie parcimonieusement.

Il ne se fit pas prier deux fois et s'installa près du feu. Il se mit entre l'Elfe et la Nordique, non par choix. Il gardait un oeil sur cette Kristvina qui venait tout juste de se présenter. Il attendit quelques temps, observa ses deux compagnons de voyage. Il devait reconnaître une chose, le prospecteur, c'est qu'il trouvait ses compagnons forts, vaillants et résistants Il sentit le besoin de leur avouer, mais c'eut été de bien inutiles paroles. D'autres sujets plus urgents attendaient et d'ailleurs, l'urgence était ce qui pressait Lovir. Il se contenta donc de sourire à Lenwest, la gratifiant d'un regard respectueux et en fit de même au nain sans barbe qui brillait quelques minutes plus tôt, devant Kristvina. Il revint enfin vers cette dernière. Il perdit son léger sourire. Il posa son regard vert émeraude, peu commun aux gens de sa « race » dans celui de la Nordique et on pouvait y lire de la reconnaissance, mêlé a de la prudence. Il se délia enfin la langue.

- Merci Kristvina. Il se frotta les cuisses avant de poser les poignets sur ses genoux, les mains ballantes, bien emmitouflées. Il accompagna sa présentation par une légère révérence de la tête, je suis Lovir. Lovir Dirileth.

Il n'en dit point plus, deux ou trois minutes durant. Il appréciait le feu crépitant et l'odeur d'une viande qui ne tardait plus à être suffisamment cuite, dont les vapeurs s'insinuaient dans ses narines, même gelées. Il reprit et lança le sujet que chacun, il le pensait, avait en tête :

- Vous savez, je ne crois pas qu'une attaque frontale soit la meilleure des solutions. Avant même de nous dire où ils se trouvent, je pense qu'il serait judicieux de tous nous mettre d'accord sur la méthode employée. Il se tut un instant, regarda tour à tour les trois personnes présentes. Sans quoi nous risquerions d'être promptement brisé, sachant que nous n'avons pas l'avantage du nombre. Il accompagnait désormais ses paroles avec des gestes calmes. Il faut être précis, rapide et peu visible. Le but étant qu'ils ne puissent clairement nous dénombrer.

Une sensation étrange lui engourdit l'esprit. Cette petite séance, qui précédait une marche armée, le replongea dans le passé. Le temps où il fut contraint, mais avec beaucoup d'enthousiasme, à encadrer des hommes, pour beaucoup dors et déjà endurcis. Ce temps où, officier de la Garde Nocturne, il défendait la lisière et la fragile communauté. Avec la solitude et les sept années d'errance, il avait perdu de son éloquence pourtant appréciée par ses hommes. Mais il gardait cette voix, légèrement granuleuse, sereine mais concise qui le vieillissait parfois.

- Nous profiterions du doute et de l'invisibilité temporaire pour paraître nettement supérieure, tant en nombre qu'en méthode. Il posa son regard sur l'imposante hache de Kristvina. Nous mettrons à profit la polyvalence de nos armes, qui là aussi pourrait un temps faire croire à l'ennemi qu'il a à affaire à une véritable force organisée. Naturellement, l'assaut final proviendrait de toutes les directions. Il dessina avec la pointe de son arc dans la neige, un cercle et quatre flèches équitablement espacées, provenant du Nord, du Sud, de l'Est et de l'Ouest.

Il soupira, contempla son dessin, puis ses compagnons.

- Ce n'est pas infaillible et fort basique, mais je sais qu'il faut qu'on soit tous d'accord sur la finalité de l'entreprise.

Il tenta de capter la réaction de Lenwest, puis de Mandür et enfin de Kristvina.
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Lenwest
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Pour une bouchée de pain. EmptyDim 12 Jan 2014 - 20:03
Ce nain m'a vraiment éttoné!! Paralysée par la peur et par le froid, je n'avais pu dire que mon nom à cette femme. Mais le nain, ne montrant aucune trace de peur ou, ne montrant pas qu'il faisait froid, avait fait beaucoup plus. Il avait prononcé un étonnant discours. Même si il ne disait pas forcément du bien de nous, il avait donné à Kristviana les réponses qu'elle désirait entendre.

Mon premier point de vue de Kristvina n'était plus ce que je pensais d'elle maintenant. Grande, sombre, l'aspect froid et menaçant, elle me donnait des frissons qui me donnaient vraiment froid dans le dos. Mais elle nous a finalement donné de précieux renseignements qui ne m'enchantèrent pas.

En entendant que les brigands avait plus d'avance que ce qu'on imaginait, un peu d'espoir et de courage me quitta. Mais ce n'est pas cette annonce qui me fera renoncer. Je me suis promis de ne jamais abandonneralors, je n'abandonnerai pas. Je poursuivrai ces pillards jusqu'à ce qu'on arrive à les rattraper, à sauver Mary et à récupérer nos vivres.

J'avais de plus en plus froid à rester debout, sans bouger. Alors quand Kristviana nous invita à nous asseoir auprès du feu, je ne me le fis pas dire deux fois. Je suis allée m'asseoir vraiment vite comparée à Lovir. Lui, parraissait méfiant, alors que moi, je ne pensais qu'à me réchauffer! Une fois tout le monde installé, je me retrouvai entre Lovir et le nain. J'installai mon arc, mon carquois et mes flèches à mes pieds. Peu à peu, au fur et à mesure que le temps passe, je sentais la douce chaleur du feu qui envahissait doucement mon corps. Franchement, cela faisait une éternité que je n'avais pas été aussi heureuse devant un feu. En plus, celui-là faisait un agréable bruit de craquement. J'aimais bien regarder les couleurs virer du jaune au rouge, regarder les flammes qui se disputait la place la plus haute et les étincelles s'envoler vers le ciel.

Kristvina nous proposa un marché. Elle acceptait de nous accompagner si en échange, on lui promettait de tuer les personnes qu'on poursuivait. Je n'étais pas vraiment ravie de savoir qu'on sera à l'origine d'une bataille. Je cherchais donc une quelque réponse en croisant le regard de mes camarades. Mais en les regardant, je mes rendis compte qu'on avait pas vraiment le choix. Lovir ayant compris la même chose que moi proposa un plan. Je l'écoutais attentivement et, je trouvai son idée intéressante. Quand il nous demanda si on acceptait sa proposition, je fis un signe de tête, montrant mon accord.
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Mandür
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Pour une bouchée de pain. EmptyLun 13 Jan 2014 - 18:40
Je ne sais pas pourquoi, mais j'ai l'étrange impression que Kristvina nous dévisage et nous examine. Elle doit sans doute craindre que nous disions des mensonges, ce qui est son droit. En tout cas ce que je vois, ou ce que je crois voir, c'est que cette femme regarde nos vêtements et notre armement, et qu'elle nous vise du regard. Tout en étant très attentive et très à l'écoute de nos propos, sa méfiance est grande. A vrai dire je ne pense pas qu'elle ait désormais une grande opinion de ma part, doit me prendre pour un opportuniste, et comme quelqu'un qui ne soit pas franc. Le plus important en tout cas, c'est que j'ai peut-être atténué sa colère. Mais, sans doute à cause de sa longue solitude dans les montagnes, elle ne reste pas moins très froide. En tout cas, cela ne l'empêche pas d'avoir de la bonne volonté, et ainsi d'espérer pouvoir nous aider. Mais une phrase ne me plait pas. En effet, lorsque Kristvina, paroles après paroles, prononce le verbe dont l'infinitif est "tuer" en désignant les voleurs, mon trouble devient grand. Non pas que je sois étonné, vu que venant d'une femme qui n'a jamais connu le monde civilisé ou très peu, il n'y a aucune anomalie à ce genre de comportement. Mais la mort est pour moi un sujet très tabou. Quelle que soit la raison d'un meurtre, il n'est pas acceptable, je suis toujours parti de ce principe là. Si je suis soldat malgré cela, c'est que je pense que l'assassinat est la dernière des solutions, et qu'on peut toujours trouver un moyen pour l'éviter. Je ne peux pas parler là maintenant, à cette femme, je l'énerverais mais j'espère que l'Homme et l'Elfe feront tout eux aussi pour éviter une telle chose, bien que je n'ai que peu confiance.

Enfin, le représentant de la race Humaine parle. Il présente à nous tous sa tactique, partant déjà du principe qu'une attaque est obligatoire. Bien que la fin, justifie les moyens, c'est à dire que la libération de Mary, justifierai la mort des bandits, je pense qu'il faut une autre méthode. Mais je ne peux pas convaincre quelqu'un ici, sachant que l'Elfe est d'accord avec l'Homme, et que le caractère de Kristvina l'induira forcément à être en accord avec lui. Il faut que je m'y fasse, le monde ne connait que la cruauté et le sang. Tous des barbares, tous! Pourtant une tactique permettrait d'éviter ceci. Déjà rien que le fait qu'on soit dans le noir ne me plait pas. Mis à part Kristvina, qui pourra s'y repérer? En effet, nous n'avons pas même pensé à notre capacité de combat lorsque le soleil est couché, et la nuit levée, que nous désirons prendre par surprise les Brigands pendant cette partie de la journée. C'est très irréaliste, et très sincèrement, je ne suis pas sûr que nous arriverions à nos fins! Personnellement j'ai une tactique, qui non seulement me parait bien plus réalisable, mais en plus serait bien plus juste. Kristvina est notre atout. Mais dans la nuit, les bandits ne la verraient pas très bien, cela ne renforcerait en rien sa capacité à inspirer la crainte. Attaquer en plein jour, permettrait aux bandits d'être encore plus terrifiés par elle. Et je dois dire que moi aussi j'ai une tête à faire peur, là-dessus on peut me faire confiance. J'ai une très grande résistance et j'imagine que cette chère Dame des montagnes aussi. Si tout simplement, on laissait nos ennemis nous frapper si jamais ils ne s'étaient pas enfuis avant, et qu'ils voyaient que ça ne donnaient aucun effet sur nous, cela ne pourrait que renforcer leur peur. Bien sûr, ce serait très illusoire, on aurait tous deux mal si on recevait un coup de gourdin, mais on aurait la force de ne rien faire transparaître... Le problème est que personne ne pourra vouloir cela. Et surtout pas Krisvina. Je la comprends, ces bandits ne font que lui voler de la nourriture depuis toujours, comment pourrait-elle accepter leur survie? Non, elle ne peut pas penser une seule seconde à cela. Ce serait trop facile, et ils recommenceraient sans doute ce qu'ils font depuis toujours. On est face à un réel problème, qui n'en n'est pas un d'ailleurs pour mes compagnons.

Puis, le repas n'ayant pas commencé, je me décide à m'isoler quelque part. Je trouve en face de moi une pierre, sur laquelle je m’assoie. Je me mets à penser. Au final, serais-ce moi le lâche, serais-ce moi qui ait tort? En effet, je n'accepte sans doute pas la réalité de la vie. La mort est inévitable, et elle doit être utilisée pour résoudre énormément de problèmes. Si on ne fait que penser à ce moralisme, on oublierait qu'on doit passer par là pour aider ou sauver des gens. Est-ce par là finalement que l'on doit passer pour résoudre les choses? Suis-je juste un lâche qui n'admets pas la réalité, et qui par peur de faire quelque-chose de mal, ne fais pas le bien autour de soi? Malgré le fait que je pense, que j'essaye de me remettre en question, je ne change pas, et je crois que personne ne peut changer cela, car j'ai toujours été comme ça. Mon opinion se développe, mais reste la même, ma pensée évolue et reste dans sa globalité ce qu'elle était. Je crois que ne peux tout simplement pas retirer quelque-chose de mon caractère, lorsqu'une idée y est rajoutée, elle y reste. Je continue ainsi mes pensées sur cette pierre, car bien que cela ne sert à rien, j'ai ce besoin de réfléchir en ce moment même. Enfin, je me mets à regarder les alentours dans la nuit noire; à observer des parties de montagnes où je n'étais jamais allé jusqu'à présent, puis tourne mon regard vers le groupe.
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Ryad Assad
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Pour une bouchée de pain. EmptyLun 13 Jan 2014 - 20:50
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Les voyageurs étaient éreintés, cela se voyait, et aucun d'entre eux ne fit de cérémonie lorsque la guerrière des terres du Nord leur proposa de s'installer autour de son feu de camp. Ils prirent place comme ils le purent, sur les bûches disposées là, où les pierres qui traînaient. Elle n'avait pas l'habitude de rencontrer des gens, et encore moins des personnes qu'elle invitait à partager son repas, mais il était de coutume chez elle de toujours garder de la place pour d'éventuels pauvres âmes perdues. Ce soir, elle avait fait fort en trouvant trois d'entre eux. Les pauvres tremblaient de tout leur membres, et ils mirent un moment à retrouver l'usage de leurs doigts, et celui de la parole. A moins que ce ne fût parce qu'ils préféraient rester silencieux, et considérer intérieurement sa proposition. Elle n'était pas pressée, et savait que le temps jouait pour elle : c'étaient eux qui souhaitaient rattraper les brigands.

Pendant qu'ils essayaient de se réchauffer, elle les observa tour à tour. L'homme, d'abord, paraissait retrouver quelques couleurs. Il était très différent de ceux du Nord, à tous les plans. Sa silhouette était plus fine, moins trapue, et il entretenait une barbe avec un soin que la jeune femme n'avait que rarement vu. Chez ceux qu'elle connaissait et qui la portaient, c'était surtout un fouillis dans lequel ils entrelaçaient des perles, des bibelots décoratifs et des amulettes censées les protéger. Rien avoir avec le soin méticuleux que ce sudiste mettait à arranger sa pilosité. Kristvina détourna rapidement le regard, espérant qu'il n'avait pas surpris son œil curieux, et ne préférant pas qu'il s'imaginât quoi que ce fût à son sujet. Elle ne connaissait pas les coutumes des autres gens de la Terre du Milieu, et elle ne voulait pas se montrer inutilement impolie, ou indiscrète.

Elle passa donc à la femme elfe, qui elle aussi tranchait avec ce qu'elle avait eu l'occasion d'observer. Pour toutes les créatures mortelles, les Premiers Nés semblaient irréels de beauté et de prestance, et la jeune femme se sentit éblouie. C'était la première fois qu'elle rencontrait quelqu'un de sa race, et elle avait du mal à ne pas la regarder franchement, de haut en bas. Elle était svelte, autant qu'il fût possible d'en juger avec les chaudes pelisses qu'elle portait, et chacun de ses mouvements était gracieux et élégant, sans que cela parût lui coûter le moindre effort. Quant à sa voix, elle était douce et envoûtante, presque ensorceleuse. Alors, Kristvina se souvint de ce qu'on lui avait dit à propos des Immortels : il fallait se méfier d'eux, car bien qu'ils parussent sages et puissants, ils servaient leurs propres intérêts uniquement, et ce parfois au détriment des autres. Elle se détourna, craignant d'avoir été abusée par un sortilège, et posa les yeux sur le nain.

Des nains, elle en avait vu plusieurs au cours de ses périples. Elle s'était déjà aventurée près de leurs demeures souterraines, et avait eu l'occasion de converser avec certains des leurs, et même de faire un peu de troc. Mais celui qu'elle venait d'accueillir était tellement différent des autres, qu'elle peinait à croire qu'il fût de la même race. Il était bien plus petit que ses congénères (il lui arrivait à peine à la hanche, alors qu'elle n'était pas bien grande !), et il ne portait pas la barbe pourtant caractéristique des siens. Elle avait appris que la barbe, pour un nain, était presque sacrée, et elle ne comprenait pas que celui-ci refusât de la porter. A moins qu'il n'eût pas le choix ? Elle n'avait jamais entendu parler d'une telle affliction, mais peut-être était-il victime d'un quelconque charme qui l'en privait. Mais ce n'était pas la seule chose qui était étonnante chez lui : en plus de son air vieux, il paraissait avoir offert sa tête à un gobelin enragé. Ses traits étaient marqués, presque déformés, et il n'avait plus rien de beau - si "beau" était un adjectif qui pouvait convenir à un nain. Craignant qu'il ne s'offusquât de son étude, elle orienta bien vite son regard dans une autre direction, celle de son repas en l'occurrence, et s'assura qu'il cuisait bien.

Elle en était là dans ses pensées, essayant de ne pas s'intéresser de trop près à ses compagnons de voyage, comme si elle ne voulait pas s'attacher à eux inutilement, quand soudain l'homme prit la parole. Il lui apprit qu'il s'appelait Lovir Dirileth, ce qui ne l'avançait pas vraiment, mais qui était déjà un bon début. Elle s'attendait à ce qu'il continuât, mais il n'ajouta rien avant quelques minutes, pendant lesquelles elle crut qu'ils allaient tous s'endormir les uns après les autres, tant ils paraissaient épuisés. Et puis finalement, il revint au sujet qui les concernait tous, et qui intéressait particulièrement la femme du Nord : les brigands.

Elle l'écouta très attentivement, sans rien montrer de ce qu'elle ressentait en entendant ses paroles. Elle se contenta d'ingurgiter les informations qu'il lui envoyait, et d'essayer de les retenir. Au bout d'un moment, elle jeta un regard en coin aux deux autres, afin de voir ce qu'ils en pensaient. Ils ne disaient rien non plus, mais ne perdaient pas une miette de l'exposé. L'elfe paraissait relativement d'accord avec le plan que Lovir était en train de construire sous leurs yeux à tous, tandis que le nain semblait un peu moins enthousiaste. On aurait presque dit qu'il voulait intervenir pour les convaincre de ne pas attaquer les brigands, mais il se retint. Kristvina, qui n'avait jamais rencontré de nains qui refusât d'aller au combat quand il en avait l'occasion, demeura intriguée un bref instant, avant de revenir aux explications de l'homme. Il venait d'achever son dessin dans la neige, et conclut son argumentaire tranquillement, laissant la parole à qui la voulait. L'elfe hocha la tête silencieusement, faisant signe qu'elle était d'accord. Le nain ne manifesta aucune réaction, plongé dans des pensées qui n'appartenaient qu'à lui.

Sentant que c'était à son tour de répondre, la jeune femme s'éclaircit la voix :

- C'est un plan sage, qui ne leur laissera aucune chance. Si nous les prenons par surprise, nous minimiserons grandement les risques... Nous ferons selon votre idée, et nous réussirons si les ancêtres le veulent.

Elle hocha la tête solennellement, comme si elle venait de passer un pacte sur sa vie. Mais l'avait-elle fait avec son peuple, qu'elle jurait de défendre, ou bien avec Lovir ? Et si pacte il y avait, qu'impliquait-il au juste ? Elle n'en dit rien, et se laissa aller à un sourire apaisé comme elle en avait rarement. La perspective d'aller écraser les brigands lui réchauffait le cœur, et même si la lutte promettait d'être difficile, elle ne pouvait pas s'empêcher de penser que ce pouvait être une victoire importante : pour montrer à tous que ces brigands n'étaient pas invincibles, et qu'ils ne pouvaient agir impunément. Un faible nombre, mais avec la force d'une cause juste, pouvait renverser des montagnes. Kristvina sortit la viande du feu, et souffla sur le lapin pour le refroidir quelque peu. Elle tira vivement un poignard d'un étuis accroché contre sa poitrine, et entreprit de découper la bête en quatre parts égales. Maintenant qu'ils s'étaient engagés - à part le nain, mais il ne semblait pas vouloir faire marche arrière - à la suivre et à l'aider, elle respecterait sa part du marché, et les nourrirait dans la mesure du possible. Les brigands ayant pris ses maigres vivres, elle n'avait plus que ça à leur offrir, mais elle le fit de bon cœur.

Elle n'avait rien qui ressemblait à une assiette, ou à des couverts, et ils durent user de leurs mains, en essayant de ne pas se brûler. Lorsque cela arrivait, ils n'avaient de toute façon qu'à plonger les doigts dans la neige à leurs pieds pour dissiper instantanément toute douleur. Le seul avantage de ce temps exécrable, probablement. Ce ne fut pas un festin, loin de là, mais après être passés dans la tourmente du Rude Hiver, c'était probablement mieux que rien. Le simple fait d'avoir quelque chose de chaud dans l'estomac procurait un réconfort certain, et Kristvina se sentait incroyablement bien, même si elle n'avait pas eu une portion conséquente. Une fois qu'ils eurent terminé, ils jetèrent leurs restes dans l'âtre qui chanta joyeusement, transformant en volutes de fumée les restes du lapin.

- Allons dormir, leur suggéra-t-elle. Demain, une longue route nous attend, et je vous avez besoin de repos.

Elle éteignit le feu en jetant de grosses poignées de neige dessus, et soudainement la nuit s'abattit sur eux. Ils s'étaient peut-être cru en sécurité dès lors qu'ils avaient trouvé un peu de lumière, mais le retour soudain de l'obscurité les ramena à la réalité. Ils n'étaient rien face à l'immensité de la forêt, à la noirceur de la nuit, et à la froideur de l'hiver. Et les dangers que ces trois puissances combinaient, même s'ils ne les voyaient pas, rôdaient autour d'eux, menaçant de les emporter s'ils ne prenaient pas garde. Soudainement, il sembla que les arbres étaient devenus menaçants, et il n'y avait même pas assez de lumière pour que l'elfe y vît quoi que ce fût. C'était comme s'ils étaient rentrés dans une sombre grotte, avec l'impression dérangeante d'être épiés par des yeux non humains. Des bruits étranges se faisaient parfois entendre autour d'eux, mais ils ne pouvaient les identifier.

- Par ici, chuchota Kristvina.

Elle s'était soudainement mis à parler à voix basse, et c'était le signe qu'il fallait faire le moins de bruit possible. Elle prit la main de Lovir, et l'enjoignit à faire de même avec ses compagnons. Une fois qu'ils eurent constitué une chaîne qui ne se romprait pas, elle les guida quelques mètres plus loin. La distance était courte, mais il leur fallut enjamber un arbre mort et éviter un rocher saillant avant qu'elle ne s'arrêta enfin, devant ce qui ressemblait à un trou de renard. Elle déblaya l'entrée vigoureusement, projetant de la neige un peu partout, puis invita les aventuriers à se glisser dedans. Dans l'obscurité, et pour des gens qui n'étaient pas habitués, cela devait paraître bien curieux, mais elle ne leur laissa pas vraiment le choix.

Ils tombèrent à l'intérieur pêle-mêle, sans grâce, sans savoir où ils étaient, dans une obscurité encore plus inconfortable que celle de la forêt. Ils se trouvaient en réalité dans un abri construit sous la neige et sous la glace, qui était étonnamment chaud par rapport aux températures extérieures. Les peuples des neiges connaissaient ces techniques depuis des générations, mais les autres peuples non, car elles n'en avaient pas l'utilité au quotidien. Il fallait une certaine technique pour ce genre de réalisation, mais surtout une bonne connaissance de la neige. La petite caverne n'était qu'un abri de fortune censé les abriter pendant une nuit : un endroit pour des chasseurs, en somme. L'ouverture qu'ils venaient de franchir était leur seule source de lumière, et la jeune femme s'empressa de réduire cet espace, pour lui redonner l'aspect d'un simple terrier, tout en ménageant une arrivée d'air suffisante. Elle se retourna, et tâtonna pour trouver ses compagnons. A l'aveugle, elle reconnut Lenwest à ses cheveux soyeux :

- Ici, là, vous pouvez vous allonger là... Si vous voulez une couverture supplémentaire, elles sont juste à vos pieds.

Elle la guida jusqu'à ce que l'ensorceleuse fût allongée, puis elle se tourna vers les autres. Ses doigts atterrirent sur le visage du nain, et elle faillit l'éborgner. Elle s'excusa à voix basse :

- Pardon, maître nain. Si vous me donnez votre nom, je vous promets de ne plus recommencer.

Ce trait d'humour léger, bien que prononcé à voix très basse, détendit un peu l'atmosphère. Elle le poussa gentiment en avant, et finit par l'installer dans un coin où elle lui intima de s'allonger. Avant qu'il n'eût protesté, elle s'empara d'une couverture, et la lui donna. Elle était bien trop grande pour lui, mais il n'aurait pas à passer la nuit seul. Se retournant, Kristvina tendit les mains précautionneusement, et finit par les refermer sur la barbe de Lovir. Elle se sentit rougir, mais l'obscurité totale lui fournissait une protection fort bienvenue contre la gêne, et elle s'empressa de guider l'homme jusqu'au nain. Elle les força à s'allonger collés l'un à l'autre, sans se soucier de savoir si cela leur plaisait. Il s'agissait de préserver le peu de chaleur qu'ils pouvaient générer, et de la partager si possible. Le nain semblait mieux résister aux basses températures que l'humain, et ils trouveraient tous les deux un équilibre.

Sans hésiter, en dépit de l'obscurité, Kristvina s'approcha de l'elfe, et s'allongea à ses côtés, collée à elle. Depuis longtemps, elle avait appris à vivre ainsi, et elle n'éprouvait plus aucune gêne à se retrouver aussi proche de quelqu'un qui ne lui était particulièrement familier. Elle pouvait néanmoins comprendre que cela pût être différent pour les autres, et elle espérait qu'ils parviendraient à trouver le sommeil malgré tout. De son côté, elle décida de fermer les yeux, et laissa ses autres sens se déployer. Non loin, elle perçut des bruits de pas dans la neige : plusieurs créatures qui allaient lentement. Elle pouvait deviner, malgré la distance, qu'ils reniflaient le feu de camp, qu'ils cherchaient à savoir où se trouvaient ceux qui l'avaient allumé. Les pas se rapprochèrent de leur position, et elle lâcha un "chut" presque imperceptible, afin d'être sûre que personne ne prît le risque de trahir leur cachette. Les pas passèrent au-dessus d'eux, et des ombres fugitives apparurent furtivement à travers l'entrée de leur tanière. Ce qui se trouvait au-dessus, quoi que cela pût être, ne s'attarda pas, et les pas s'éloignèrent vivement.

La jeune femme se détendit perceptiblement, et se laissa doucement gagner par le sommeil qui lui tendait les bras. Elle s'endormit sans même s'en rendre compte, sa respiration prenant un rythme régulier et dégageant un souffle chaud dans le cou de l'elfe.


~~~~


La nuit se passa sans encombre, et ils ne furent importunés par aucune créature nocturne. C'était déjà un point positif. Kristvina se réveilla relativement tôt, mais elle perçut qu'elle n'était pas la seule à avoir émergé de son sommeil. Toutefois, elle ne bougea pas, et essaya de ne pas s'agiter inutilement. Elle entendait les autres remuer, comme s'ils hésitaient entre se lever et essayer de se rendormir :

- Restez allongés, leur souffla-t-elle. Il fait jour, mais il fait encore trop froid pour sortir. Profitez de la chaleur tant que vous le pouvez.

Elle préférait attendre que les températures extérieures se fussent un peu radoucies, car elle savait que la morsure du froid après une bonne nuit de sommeil pouvait être fatale. Ils n'avaient probablement pas l'expérience de ce genre de choses, mais elle sentait clairement que leurs quatre corps dans un espace aussi confiné avaient clairement réchauffé l'atmosphère. Il faisait franchement bon, et ils pouvaient savourer consciemment ce petit plaisir. Au bout d'un moment, la jeune femme se leva et rampa à l'extérieur. Ils entendirent ses pas qui décrivaient un cercle autour de leur position, et puis qui revinrent. Elle passa la tête par l'ouverture, et leur lança sans plus faire attention au volume de sa voix :

- Aucun danger, vous pouvez sortir ! Dépêchons, nous avons encore beaucoup de route.

Elle les aida à se hisser à l'extérieur, puis retourna dans son terrier, pour y récupérer les couvertures, les plier, et les ajouter à son barda. En fait, il ne contenait pas grand chose d'autre à part ça. Le plus important, dans les terres glacées, c'était de gérer le froid. Trouver de la nourriture était une affaire mille fois plus simple, quand on avait les idées claires et le corps au chaud. Elle reconstitua son sac avec une facilité héritée de l'habitude, et prit la tête de leur petit groupe, les entraînant droit vers le Nord. Ils passèrent près de leur feu de la veille, mais il n'y avait aucune trace sur le sol qui eût pu indiquer ce qui s'était approché d'eux à la nuit tombée. Ce n'était pas particulièrement rassurant, mais Kristvina semblait sereine, et avec le jour qui se levait de plus en plus, la forêt semblait de moins en moins menaçante. Toutefois, la lumière disparaîtrait tôt dans l'après-midi, et ils devaient se hâter s'ils voulaient pouvoir voyager confortablement.

La jeune femme marchait dans la neige avec une aisance incroyable, et semblait ne pas s'essouffler malgré l'effort certain qu'il fallait pour sortir ses jambes de cette gangue immaculée. Elle essayait de caler son pas sur celui des trois autres, mais il était évident qu'en leur imposant le défi de la suivre, elle les stimulait. En plus, après une bonne nuit de repos, et même s'ils n'avaient pas eu de bon repas ce matin, ils étaient suffisamment en forme pour affronter les glaces. Du moins, c'était l'avis de Kristvina. Elle les sentait un peu tendus, malgré que le soleil brillât sur eux, et elle décida de faire un peu la conversation, pour tuer le temps :

- Je suppose que vous vous connaissez déjà bien, vous qui voyagez ensemble, mais je suis curieuse de savoir à qui j'ai affaire. Que faisiez-vous donc, avant de vous lancer à la poursuite de ces assassins ? Et ne prenez pas cet air effrayé, vous pouvez parler en toute quiétude tant qu'il fait jour.

Elle leur adressa un sourire amusé, et attendit patiemment qu'ils trouvassent le souffle pour lui répondre.

#Kristvina


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Pour une bouchée de pain. EmptyLun 13 Jan 2014 - 22:32
Miriah lui tendait une main. Elle se trouvait allongée sur le dos et son teint pâle, si pâle, témoignait que les forces de son corps s'amenuisaient et laisseraient bientôt s'échapper son âme. Un sombre linceul semblait s'être posé sur son regard. Lovir attrapa vigoureusement de ses deux mains gantées, celle tendue de Miriah. Son cœur se serra alors qu'il vit les lèvres de sa jeune compagne bouger avec si peu de vie, qu'il eut dit que ça sortait de son imagination. Il colla son oreille à cette bouche jadis chaude et réconfortante, lorsqu'elle se posait dans le creux de son cou, à l'ombre du chêne qui trônait au milieu du camp de Lunespoir.

- R... rejoins moi... arriva-t-elle à expirer. Puis elle ne reprit jamais d'inspiration et elle ne devenait plus que l'ombre d'elle même, éternellement.

Lovir étreignit sa frêle petite main et une larme chaude quitta sa joue pour s'écraser lourdement sur le sol. Quel sol... Il lâcha prise malgré l'immense chagrin qui le rongeait et qui lui sommait de rester sur le corps de son amour, des heures et des heures encore, dans l'espoir de la rejoindre par une quelconque volonté divine. Alors que sa vision s'agrandissait, il vit rapidement autour de lui.

Une brume se joignit au tableau déjà sombre. Il reposa son regard sur Miriah, mais déjà, elle avait disparu sous un épais brouillard. Lovir resta immobile, impuissant alors qu'une magie malveillante, manifestement, opérait. Ledit brouillard rampait sur le sol, qu'on ne voyait plus. En revanche, il n'allait pas plus haut que la moitié des cuisses de l'archer. Ce dernier resta bouche-bée, il recula d'un pas lent et incertain et sentit son dos buter sur quelque chose d’infiniment solide. Il eut dit même qu'on venait de lui porter un coup, sans qu'il en soit projeté pour autant. Il se retourna et vit un croc fait de roche, qui faisait peut-être deux fois sa taille. Sa vision s'agrandissant encore, il découvrit avec stupeur qu'il se trouvait au milieu d'un plateau, parsemé de roches qui sortaient de la terre tels des piques et de manière forte irrégulière. Il eut dit qu'il s'agissait d'un piège géant, dépassant les échelles les plus grandes de l'imagination. Un dragon s'y serait blessé et tué, en volant trop bas. Le toit du ciel était sombre, les nuages semblaient être faits de cendre et de particules lourdes, qui tourbillonnaient follement, comme animés par une énergie infernale ou un orage des plus prompts à la formation. Cet endroit lui glaça le sang. Des silhouettes sombres se mit bientôt à serpenter dans la brume et émettaient de courts bruits stridents, très aigus. Ses ombres fantomatiques, s'agitaient de plus en plus violemment et passaient entre ses jambes à vivent allure. Une ombre, celle ci, humanoïde se redresse de sous la brume et se tourna vers lui. Il ne peut l'identifier très clairement, mais d'après le contour qu'il en voyait, il s'agissait de Miriah. Elle se mit à avancer avec une grâce ténébreuse, inquiétante. A quelques mètres à peine, Lovir toujours dos à la roche sombre comme la nuit, tremblait et étouffa un cris lorsque l'ombre de Miriah, menaçante et plus trapues se rua en sa direction, hurlant de sa voix mêlée à d'autres plus graves :

- Rejoins moi !


Lovir écarquilla les yeux et se redressa sur son séant. Il respirait fort, mais pas suffisamment pour réveiller son voisin, le nain imberbe. Il mit quelques secondes à s'assurer qu'il était bien éveillé et à se souvenir de la traque qu'il tentait d'accomplir. Il était bien là, à quelques lieues de la taverne de Mary et non perdu, quelque part en Terre du Mordor, succombant à l'attaque de l'ombre d'une Miriah malveillante. Ce rêve fut le dix-huitième. Il commença à les compter lorsqu'il fut réveillé par le quatrième. A chaque fois, il avait une idée plus précise du lieu où il se trouvait. Mais aucune des ses introspections, pourtant récurrentes et très profondes, ne lui donna une explication, une interprétation, pas même une suggestion. Il chassa rapidement ces pensées, sombres et trop fraîchement sortie du cauchemars, avant de se rallonger. Il remarqua qu'il s'était inconsciemment éloigné de Mandür pendant la nuit et qu'il s'en trouvait à un petit mètre, sans la couette. Il n'en eut pas froid pour autant.

Il resta immobile une petite heure et sentit que le jour se levait au dessus d'eux, malgré une obscurité ambiante, toujours oppressante. Il remarqua rapidement que la Nordique s'était réveillée également. Il ne dit mot. Jusqu'à ce qu'elle se charge de briser le silence elle même.

- Restez allongés, leur souffla-t-elle. Il fait jour, mais il fait encore trop froid pour sortir. Profitez de la chaleur tant que vous le pouvez.

Il garda le silence et attendit patiemment, plongé dans ses pensées, quant au rêve qu'il eut à endurer une énième fois. Au bout d'un moment, la Nordique sortit de leur « terrier » et revint à eux.

- Aucun danger, vous pouvez sortir ! Dépêchons, nous avons encore beaucoup de route. leur dit-elle.

Il saisit sa main pour la deuxième fois et posa son regard d'émeraude sur cette femme. Il en était admiratif. Relativement. Il connut bien des femmes depuis son exil. Même avant, si les femmes de sa communauté étaient formées à la survie et au combat, de façon tout à fait théorique et académiquement, il n'avait pu le constater avec autant de rigueur, qu'en cette Nordique. Lovir était devenu extrêmement volage et à chaque « port » ou presque, il chauffait le lit d'une autre. Qu'elle soit mariée, accompagnée, ou célibataire. Avec le temps, il s'était fait une image des femmes, très négative. Elles étaient fragiles, naïves et capables de choses bien inutile. Cette misogynie, ne s'appliquait qu'aux femmes avec qui il couchait facilement, mais elle dépeignait légèrement sur les femmes en général. Sauf sur les femmes Elfes et... désormais les Nordiques. Kristvina était forte sur tous les plans, elle avait du savoir relatif au froid, du courage et l'esprit d'équipe, c'était évident. Autant de vertu que Lovir n'avait que partiellement. S'il s'était habitué au froid, il ne lui fallait qu'une longue exposition pour entamer ses qualités. De courage il n'en manquait pas, au vu de son « métier ». En revanche, l'esprit d'équipe, il l'avait perdu depuis sept ans. Il préférait errer seul, tant il fut trahit par le passé, lors de prospections accompagnées de personnes diverses. Mais dans ses jeunes années, il fut formé au combat de groupe, à l'issue de quoi il fut nommé Capitaine de la Garde Nocturne. Ce qui aujourd'hui, semblait être revenu. Et cela ne lui plaisait guère. Il pensa en avoir payé les frais durant cette nuit - à trop remué le passé, par ses actes en communauté.

Ils entamèrent une marche vers le Nord. Et Lovir ne sut pourquoi il se sentait plus disposé à la marche qu'avant la rencontre entre eux et Kristvina, mais il ne la lâcha pas d'une semelle. Il la talonnait de près. Nul doute possible, la neige était son terrain de prédilection - à la Nordique. Lovir n'aurait pas été étonné qu'il coule même dans ses veines. Forte heureusement, il s'était assuré du contraire au contact de sa main. Il n'avait aucune idée de ce qu'il paraissait à ses yeux. Ni aux yeux de Lenwest et de Mandür par ailleurs. Il n'en avait cure au départ, mais quelque chose évoluait. Ce ne semblait pas être de l'attachement pour ces personnes, mais pour la première fois depuis longtemps, il avait de la compagnie, autre part qu'en des lieux civilisés. Il souhaitait peut-être avoir une idée de ce qu'il paraissait, aux yeux des voyageurs - souvent hostile à son égard - quand il en croisait. Pour autant, il se tut. Jusqu'à ce que Kristvina lance une discussion, plutôt bienvenue dans ce silence presque religieux.

- Je suppose que vous vous connaissez déjà bien, vous qui voyagez ensemble, mais je suis curieuse de savoir à qui j'ai affaire. Que faisiez-vous donc, avant de vous lancer à la poursuite de ces assassins ? Et ne prenez pas cet air effrayé, vous pouvez parler en toute quiétude tant qu'il fait jour.

Lovir répondit le premier, toujours à un mètre à peine derrière la guerrière du Nord. Il ne s'était pas encore retourné pour voir si ses compagnons suivait d'ailleurs, mais il croyait les entendre non loin.

- Je ne connais ni le Nain, ni l'Elfe, répliqua-t-il en souriant légèrement, les yeux rivés sur les pas de Kristvina. Du moins que depuis notre départ. Ils répondirent à l'appel à la traque que j'ai lancé dans cette taverne, dont Mandür vous a parlé lors de notre rencontre. Je ne sais que cela d'eux, il se retourne enfin vers eux, et cela me suffit pour l'instant.

Lovir observa l'Elfe. Il appréciait énormément son calme et cela lui rappelait l'excellente relation qu'il avait avec les Elfes Sylvestres. C'est d’ailleurs ce qui lui valu son exil. Puis il posa son regard sur le Nain imberbe, Mandür. Il ne savait quoi en penser. Il restait très mystérieux. Et s'il s'était trouvé fort loquace devant Kristvina, il en était rien lorsque Lovir proposa son plan. Pourtant il y songea durement, cela se vit sur son visage. Puis il le vit s'isoler et cela suffit à l'exilé prospecteur, pour se méfier de cet étrange personnage. Il revint aux questions et Kristvina et répondit à la deuxième.

- Pour ma part... il hésita et cela s'entendit dans le son de sa voix. Il voulu mentir, sans savoir pourquoi, il faisait toujours preuve d'une incommensurable précaution envers tout le monde quand il s'agissait de parler de lui. Mais il fit un effort. J'étais et je suis toujours prospecteur. Je... Disons que je récupère ce qui n'appartient à personne, si ce n'est au passé, des babioles en tout genre qui se trouve plus utile chez les bons gens de la ville et des villages. Il garda le silence sur son passé plus lointain. Il sait pourtant, que cela permettrait au petit groupe d'avoir une meilleur estime de lui, plus juste en tout cas. Mais il ne dit mot, car ce passé, il y pensait avec amertume chaque seconde de sa vie.

Il se retourna vers la personne la plus proche de lui, qui s’avérait être Lenwest. Comme s'il passait le mot de Kristvina, il contredit ce qu'il venait de dire juste avant et il sourit sincèrement à l'Elfe :

- Et vous Lenwest ?
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Ryad Assad
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Pour une bouchée de pain. EmptyJeu 30 Jan 2014 - 18:14
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Par rapport aux journées précédentes, il faisait assez beau dans les terres glacées. Le soleil brillait, et pour une fois le ciel était pratiquement dégagé. Les nuages gris avaient cédé la place aux nuages blancs, d'une couleur beaucoup moins menaçante. Le vent qui soufflait paraissait moins agressif, moins brutal, et ils pouvaient avancer un peu plus facilement. Cela ne rendait pas leur périple aisé pour autant, et ils devaient tenir compte du fait que leur périples les menait toujours plus vers le Nord, ce qui signifiait toujours plus loin dans la difficulté. Aussi fou que cela pût paraître, Kristvina semblait ne pas s'essouffler, surmontant tous les obstacles de cet univers qu'elle connaissait bien avec une aisance redoutable. Elle connaissait la neige par cœur, et on aurait dit que ses pieds trouvaient à chaque fois l'angle parfait pour s'y poser sans rester coincé. Il était fort probable que, sur un sol ferme, elle fût totalement déstabilisée, incapable de retrouver ses marques. C'était ce qui faisait d'elle un guide précieux, et une alliée de poids dans ces terres désolées. Elle avait décidé de faire la conversation pour essayer d'aider ses compagnons à penser à autre chose, tout en espérant un peu mieux les connaître. Ce n'était pas en quelques phrases qu'ils allaient devenir proches, mais elle était curieuse de savoir d'où ils venaient.

Ce fut l'homme qui répondit le premier, lui expliquant brièvement qu'il ne connaissait pas les deux autres avant d'avoir lancé la traque. En vérité, ils semblaient touts étrangers les uns aux autres, réunis par un caprice du destin, mais le malheur qui s'était abattu sur eux sous la forme d'une horde de bandits désireux de s'emparer de richesses et de vivres. Cela expliquait sans doute pourquoi ils ne parlaient pas beaucoup entre eux, et pourquoi ils semblaient avoir du mal à agir les uns avec les autres. Ils n'avaient pas de meneur, pas de chef, et ils avaient de toute évidence des vues opposées sur la marche à suivre. Fort heureusement, Kristvina avait réussi à les convaincre d'attaquer le camp des bandits. Elle espérait qu'ils sauraient tenir parole, et qu'ils ne seraient pas aussi lâches que les hommes du Sud qui avaient envahi ses terres.

Lovir enchaîna, évoquant brièvement son histoire et son parcours. Il leur expliqua qu'il était prospecteur. C'était un métier que la jeune nordique ne connaissait guère, mais lorsqu'il lui détailla ce en quoi il consistait, elle fronça les sourcils, légèrement contrariée. Ce qu'il disait faire s'apparentait beaucoup à du vol, une chose répréhensible dans les terres du Nord. La jeune femme savait qu'il en était de même au Sud, et elle ne comprenait donc pas pourquoi il en parlait aussi librement, et pourquoi cela ne semblait pas choquer les deux autres. Elle se dit que c'était elle qui devait avoir mal compris. En effet, il ne paraissait pas être du genre à s'accaparer ce qui appartenait à d'autres peuples simplement par plaisir. Il récupérait des objets utiles, qu'il revendait ensuite pour gagner un peu d'argent. Si tel était le cas, alors il ne devait pas être un de ces profanateurs, qui attaquaient les campements Lossoths, et dérobaient leurs artefacts les plus précieux, pillaient leurs trésors immémoriaux. Les esprits des ancêtres étaient souillés par la présence de ces ennemis des peuples du Nord, et la méfiance était de rigueur envers tous les étrangers, dorénavant.

Lovir passa la parole à l'elfe, Lenwest, qui semblait aller mieux que la veille. Elle avançait souplement sur la neige, ses pas ne s'enfonçant même pas dans son manteau blanc, et elle était de toute évidence en meilleure forme que ses deux compagnons de route. Pourtant, elle ne semblait pas véritablement encline à discourir longuement sur sa propre vie, et elle se contenta de leur expliquer très succinctement d'où elle venait - à savoir la Forêt Noire -, ajoutant qu'elle l'avait quittée plusieurs années auparavant, et qu'elle explorait désormais la Terre du Milieu. Quant à ses motivations, elle n'en dit mot pour l'instant, préférant se concentrer sur leur mission à venir. Le nain, de son côté, leur raconta qu'il venait d'Erebor le puissant royaume des Nains - dont Kristvina n'avait jamais entendu parler -, et qu'il y servait comme soldat. Toutefois, il n'expliqua pas véritablement ce qu'il faisait dans les parages avec le Rude Hiver qui sévissait. Il préférait de toute évidence garder cette information pour lui quelles qu'en fussent les raisons.

La jeune femme, qui écoutait cela avec grande attention, nota dans un coin de sa tête ce qu'elle venait de retirer de leurs explications. L'elfe paraissait mystérieuse, et il était difficile de juger de ses capacités, mais elle faisait preuve d'une certaine assurance, ce qui impliquait deux choses : soit elle incompétente et parfaitement folle, soit elle était une guerrière émérite, lucide sur ses compétences. Et puisqu'elle ne semblait pas dérangée, la seconde option devait prévaloir. Le nain, de son côté, avait affirmé avoir servi dans l'armée. La nordique avait un peu de mal à comprendre de quoi il s'agissait, même si elle savait à quoi le mot faisait référence. C'était un ensemble d'hommes qui se battaient contre d'autres hommes. Elle ne comprenait toutefois pas ce qui les distinguait des autres individus : étaient-ils une armée parce qu'ils étaient meilleurs que les autres ? Si tel était le cas, est-ce que Mandür était plus fort que ses compagnons ? Elle n'aurait su le dire avec certitude, mais il était certain qu'il savait se battre, s'il avait été dans l'armée. Voilà une information qui ne pouvait que la conforter dans l'idée que les bandits qu'ils traquaient ne seraient bientôt plus.

Les quatre compagnons marchèrent ainsi toute la journée, sans faire une seule pause. Quand ils commençaient à souffrir de la fatigue, ou à peiner dans une pente trop raide, Kristvina s'arrêtait et les attendait. Elle faisait parfois marche arrière pour leur donner un peu d'eau, et s'assurer qu'ils tenaient bien le choc. Il n'était pas facile pour eux de boire, avec leurs gants de fortune, mais ils firent de leur mieux pour se désaltérer brièvement, avant de reprendre la marche. La jeune femme les encourageait de la voix régulièrement, par un "allez" qui n'avait rien d'agressif. C'était simplement une manière de leur dire qu'elle était toujours là, et qu'ils pouvaient franchir les obstacles qu'elle-même franchissait facilement - bien qu'elle portât un sac sur le dos. Elle aida par deux fois le Nain à s'extirper de la neige où il s'était enfoncé jusqu'aux aisselles, rattrapa l'elfe presque emportée par une coulée qui l'aurait emportée au loin, et dégagea l'homme d'une fine crevasse où son pied s'était coincé. Elle faisait ça avec le naturel de ceux pour qui ces désagréments sont une habitude davantage qu'une véritable gêne.

Pourtant, malgré son calme apparent, Kristvina ne cessait de jeter des regards en arrière. Au départ, il s'était agi de quelques coups d'œil brefs, qui avaient pu passer inaperçu. Mais désormais, elle prenait plusieurs mètres d'avance, et pendant de longues secondes elle observait derrière les pas des trois autres, cherchant quelque chose. Il était difficile de savoir ce qu'elle regardait ainsi, et encore plus difficile de savoir si elle voyait véritablement quelque chose, mais en tout cas elle n'avait pas l'air particulièrement rassurée :

- Il faut avancer autant que possible pendant qu'il fait jour, allez, leur lança-t-elle pour les encourager.

Elle les fit marcher encore, franchissant des collines qui devaient leur paraître aussi hautes que des montagnes. En fait, elle essayait de gagner le plus de temps possible. Les chevaux avaient davantage de difficulté à attaquer ce genre de terrains, et les bandits préféraient contourner les affleurements rocheux couverts de neige plutôt que de se risquer sur un sol difficile. C'était ainsi qu'ils allaient pouvoir les rejoindre, même si cela signifiait souffrir un peu plus pour l'instant. Le soleil était encore haut dans le ciel, mais Kristvina finit par leur désigner l'endroit où ils feraient halte. Elle avait repéré un petit entassement de neige, dans lequel elle donna quelques coups de pied, pour tester sa solidité. Satisfaite, elle déposa son sac à terre, et s'étira les muscles. Les autres en firent autant, et s'installèrent comme ils le purent à même la neige. La jeune femme demanda à Lenwest et Mandür d'aller chercher de quoi allumer le feu, sans trop s'éloigner du camp. Elle fit signe à Lovir de venir la rejoindre pour commencer à creuser un abri pour la nuit.

- Je vais vous montrer comment on fait : ça pourrait vous servir pour plus tard.

Et ils se mirent au travail. C'était une tâche harassante, mais relativement simple, ce qui leur permettait de discuter pendant qu'ils grattaient et raclaient la neige avant d'y dégager un espace suffisant pour dormir confortablement. Kristvina, malgré la température extérieure, se débarrassa bien vite de sa lourde veste de peau, laissant ses bras nus. L'activité était fatigante, et sa peau était luisante de transpiration :

- Vous devriez faire pareil, à mon avis. Il faut mieux avoir froid maintenant mais avoir des vêtements secs pour la nuit que l'inverse.

Et il était évident qu'elle parlait par expérience. Elle se remit à creuser avec méthode, essayant de ne pas penser à la morsure du froid qui lui donnait l'impression d'être traversée par un millier d'aiguilles d'une finesse incroyable. Au bout d'une demi-heure, ils finirent par aboutir à la création d'une grotte de taille respectable, qu'ils aménagèrent légèrement pour la rendre plus confortable. Elle était basse de plafond, et ils pouvaient à peine tenir assis à l'intérieur. Toutefois, ils avaient prévu assez de place pour pouvoir dormir convenablement, tout en ayant de quoi déposer leurs sacs - ce qu'ils firent d'ailleurs. Ils sortirent de leur abri qui, depuis l'extérieur, ressemblait à un terrier de renard. Ils étaient fourbus, avaient le corps glacé, mais au moins ils pourraient se reposer sans crainte. En rejoignant la surface, ils eurent le plaisir de voir un feu qui prenait peu à peu, et autour duquel s'affairaient Mandür et Lenwest. Kristvina s'empressa de récupérer sa pelisse qu'elle passa sur ses épaules en frissonnant. Elle alla ensuite s'installer face aux flammes, se laissant réchauffer par elles.

Elle sortit d'un petit sac la viande séchée qui constituait ses réserves, et la découpa en quatre parts égales. Le repas serait frugal, assurément : chaque portion tenait largement dans une main :

- A moins de trouver par chance du gibier sur notre route, ce sera notre dernier repas. Savourez-le.

Elle planta la viande sur un morceau de bois, et plaça le tout au-dessus du feu, de sorte à la faire rôtir légèrement. En vérité, elle ne cherchait pas vraiment à faire quelque chose de bon, elle avait surtout envie d'avoir quelque chose de chaud dans l'estomac. C'était un réconfort simple, et elle ne s'en privait jamais, même quand la situation ne s'y prêtait pas. Pour survivre dans le désert glacé du Nord, il fallait être capable de s'accorder ce genre de luxes. Afin de les réchauffer un peu plus, elle sortit un bol en acier, qu'elle remplit d'eau. Elle récupéra un morceau de bois qui n'avait pas totalement brûlé, et le plaça très légèrement à l'écart, à un endroit où il pourrait réchauffer le précieux liquide sans pour autant qu'elle fût obligée de mettre ses mains au milieu de l'âtre pour le récupérer. Elle agissait avec une précision stupéfiante, laissant à penser que c'était un rituel quotidien pour elle, et qu'elle avait répété ces gestes des centaines voire des milliers de fois.

Ils étaient tous silencieux, absorbés par leurs pensées, occupés à récupérer de leur expédition. Même s'ils avaient tenu le choc pendant qu'ils marchaient, le fait de s'asseoir semblait les avoir vidé de leurs forces, et l'elfe somnolait déjà. Kristvina, de son côté, trempait régulièrement un doigt dans l'eau qui continuait de chauffer. Quand elle s'estima satisfaite, elle tira le bol du feu, et le plaça dans la neige. Celle-ci hurla en fondant, et de la vapeur s'éleva en volutes complexes vers le ciel. Désormais, il était possible de boire sans se brûler. Elle passa le bol à Lovir, qui lui-même le passa à l'elfe, qui elle-même le donna au Nain, avant que celui-ci ne revînt à la nordique. Elle termina le bol, savourant ce regain de chaleur bienvenu, même s'il ne s'agissait que d'eau chaude au goût infâme. C'était déjà mieux que rien.

- Bien. Maintenant ne traînons pas, et allons dormir.

Ils ne s'en étaient peut-être pas rendu compte, mais pendant les quelques minutes qu'ils avaient passé à manger, pendant qu'ils réfléchissaient en attendant que l'eau fût prête, la nuit était tombée autour d'eux. Bien que l'obscurité ne fût pas totale, leur feu apparaissait encore comme la seule goutte de lumière sur une toile entièrement noire. La jeune femme leur accorda encore quelques minutes auprès des flammes, comme pour les laisser emmagasiner de la chaleur avant d'aller dormir, puis jeta de grosses poignées de neige au milieu des flammes. Celles-ci les dévorèrent rapidement au début, mais elles fléchirent sous le nombre, et finirent par disparaître complètement, les laissant seuls au milieu de la nuit glacée.

Comme la veille, Kristvina les attrapa et les guida jusqu'à leur petite grotte, où elle les installa. Lovir, qui avait participé à la construction, semblait se déplacer avec plus d'aisance, ce qui n'était pas du luxe pour aider le Nain à trouver l'emplacement qui était le sien. Désormais qu'ils avaient pris l'habitude de ces conditions de vie, ils n'eurent pas besoin de consignes ou de conseils supplémentaires, et ils s'installèrent sans tarder, fermant les yeux presque immédiatement. La nordique, collée à l'elfe pour préserver le peu de chaleur que leurs corps dégageaient, s'endormit presque instantanément, tombant dans un sommeil sans rêves.


~~~~


Kristvina se réveilla au beau milieu de la nuit, dérangée par quelque chose d'inhabituel. Elle se tourna, sans savoir de quoi il s'agissait, puis ouvrit un œil paresseux afin de voir l'origine de son trouble. Elle posa le regard sur le ciel nocturne, où brillaient quelques étoiles discrètes qui ne dispensaient aucune lumière au niveau du sol. Pendant quelques secondes, tout cela lui parut tout à fait normal, jusqu'à ce qu'elle se souvînt d'où elle se trouvait : sous la glace. Ouvrant brutalement les yeux, elle nota que l'ouverture par laquelle ils étaient entrés - et qu'elle avait pris soin de réduire -, était désormais grande ouverte. Et au dehors, des bruits de pas indiquaient clairement que des individus approchaient. Elle se tendit, prête à l'action, mais découvrit bientôt la silhouette du nain, qui se découpait dans l'ouverture. Il vit, de là où il se trouvait, qu'elle était réveillée, et il lui expliqua qu'il était allé satisfaire un besoin naturel.

Elle sentit une vague de soulagement la gagner, et elle referma les yeux... pour les rouvrir dans la seconde. Au moment où ses paupières étaient retombées, elle avait vu apparaître fugitivement la silhouette d'un animal immense, juste derrière le nain ! En une fraction de seconde, l'enfer se déchaîna sur eux. Il y eut un rugissement d'une puissance prodigieuse, couplé aux cris conjugués du Nain et de Kristvina : le premier de douleur, le second d'effroi. La créature avait refermé ses crocs sur la jambe du Nain, et le tirait en arrière. La nordique, qui était la première réveillée et la plus proche de l'entrée, rejeta immédiatement les couvertures et plongea en direction de Mandür. Elle réussit à lui attraper le poignet, mais l'animal tirait avec une telle force qu'elle commença à être happée également :

- Lovir ! Cria-t-elle en désespoir de cause.

Mais c'était vain, car l'homme était déjà debout, ainsi que l'elfe. Ils approchèrent vivement, mais avant qu'ils n'eussent le temps de rien faire, la gueule énorme d'un loup au pelage blanc passa par l'entrée, et claqua juste à côté du visage de Krisvina. La jeune femme avait eu le réflexe de se déporter sur le côté -sans lâcher Mandür -, mais elle était toujours tirée vers l'extérieur, et bientôt sa tête se retrouverait à portée de mâchoire.

- Vite ! Supplia-t-elle alors que sa prise sur le poignet du nain commençait à faiblir.


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Pour une bouchée de pain. EmptyLun 1 Sep 2014 - 17:55
HRP - Je surgis des abysses du forum, pour m'excuser de l'absence. Mais je suis en réalité, davantage honteux de faire ce que trop de monde fait, sur ces communautés de RPïste, venir et repartir. Pour revenir trop longtemps après. Puis repartir sans doute... Plantant les RPistes et pire encore, les MJ qui leadent. Je ne pourrai vraiment me faire pardonner, mais j'ai néanmoins, un court un RP, qui explique de façon RP, ma disparition sur ce présent sujet.

HRPbis - Aussi vous verrez mon personnage suivre la trame que j'avais déjà lancé et dont les administrateurs, modérateurs et MJ, m'avaient autorisé à continuer sur le chat, un soir de Janvier. J'espère que cela est toujours possible.


« Il n'y a pas d’échec, seulement des abandons... »

L'archer se tenait là, parfaitement immobile, légèrement en retrait dans la lisière d'un bois clair. Non loin coulait l'un des rapides agités de la rivière aux Iris. Lovir avait étendu une bâche d'un tissu épais aux mailles si serrées, qu'elle était presque imperméable. Il s'y trouvait en dessous, assit en tailleur sur les feuilles mortes, entouré de fougères ruisselantes. Car en ce jour il pleuvait. D'une pluie lourde, chaude et longue. Les traits d'eau donnaient l'assaut aux végétaux et aux vivants, depuis maintenant une heure et demie. Mais l'homme sylvestre, du moins jadis, appréciait la symphonie d'une forêt, figée et chantante, sous la chute des gouttes. Lui même était parfaitement immobile, comme prit de stupeur par la splendeur du tableau, et la fatigue des éléments.

C'est l'introspection qui le gagna. L'image lointaine d'une Nordique, d'un Nain et d'une Elfe avec qui il partagea peu de jours, sous le Rude Hiver. Sept longs mois s'étaient écoulés depuis ces jours froids. Maintes pluies et maintes journées ensoleillées passèrent entre temps, mais c'est en cette journée ci, que Lovir Dirileth, prospecteur en Terre du Milieu et ancien gardien du Camp de Lunespoir, fit face à sa lâcheté.

Car c'est bien de cela qu'il s'agit. Lenwest, Mandür et Kristvina, n'étaient plus que de lointains fantômes, pour autant, ils résidaient encore parfois dans la demeure de son esprit. D'où lui était venue cette force, ou cette faiblesse, qui lui permit de laisser dans le blizzard ces trois compagnons. Lovir qui lança lui même l'expédition punitive. Lovir qui tenait tant à son compagnon de route, enlevé par ces coupe-jarrets. Lovir qui toujours eu pour pilier philosophique, l'honneur et qui était désormais couvert du déshonneur. Lâche, depuis le jour où, d'une nuit glaciale il prit le soin de se lever dans le silence et de partir vers le Sud. Était-ce la peur ? Le doute ? L'abandon, face au danger et au climat mortel ? Rien de tout ceci, il le sentait.

Car au fond de lui résonnait, depuis le Rude Hiver, un appel lointain, sombre et froid comme la roche du Mordor. Un vent, non physique, le poussait vers le Sud, inlassablement. Ses cauchemars s'intensifiaient et semblaient se nourrir de ses songes les plus obscurs. La raison lui était, à sa conscience, parfaitement floue et difficilement concevable. Qui ? Et pourquoi ? Pourquoi lui ? Qu'est-ce qu'un archer, honteux, par deux fois exilé ? Qu'un simple mortel, homme parmi les hommes. Ni talents innés, ni dons, ni noble sang. Pas même d'héritage, de famille, de communauté. Lovir était une coquille vide, torturé par son sur-moi. Mais il savait que cela ne venait point d'une folie maladive. Il y avait quelque chose, vers ces lames rocheuses, vers ces terres noires qui vibrait et faisait claquer l'air de ses nuits. Qui l'enveloppait d'amertume et de fantasmes inavouables. De conjuration, de traîtrise et de domination. Son cœur s'était refroidit et il avait perdu du poids. Les longues marches auxquelles il se livra sept mois durant, l'usaient et il n'avait jamais le cœur à la chasse. Préférant mendier aux portes des longères et des huttes, qu'il croisait sur sa route. Néanmoins il ne perdit rien de son acuité visuelle et de ses talents d'archer. Il avait l’œil vif et le carquois plein.

Ainsi disparu Lovir Dirileth, aux yeux du Nain, de l'Elfe et de la femme Nordique. Aussi devint-il à leur yeux un faible, un couard. Mais, alors que cela participait à ses tourments, il en souriait aujourd'hui, de machiavélisme.

La pluie cessa, il leva le nez vers les nuages gris et su que ce n'était qu'une question de minutes. Il prit sa besace, roula sa bâche et reprit la route du Sud, longeant la rivière aux Iris, vers Anduin le Grand Fleuve, qu'il suivra à son tour, vers le Sud. Toujours vers le Sud...
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Pour une bouchée de pain. EmptyMar 30 Déc 2014 - 23:07
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Trois mois et une vingtaine de jours plus tard

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Tu ne restes pas ? S’éleva la voix de la fille du tavernier, à peine réveillée, enroulée dans un drap en lin.
Lovir ne daigna pas répondre.

Les premières lueurs du jour traversaient les petits carreaux d'une fenêtre délabrée, semblant transporter dans ses traits de lumières, des volutes de poussières. Le vagabond se tenait droit comme un « i » devant cette fenêtre, totalement nu, les bras croisés, observant le calme d'une lisière d'un petit bois à une centaine de mètres de la longère. La saison était chaude. Un contraste presque surnaturel avec le Rude Hiver que Lovir avait affronté seul un an plus tôt. Une chance qu'il en soit sortit vivant. Car la nature est un adversaire naturel bien plus puissant et imprévisible que n'importe quel stratagème militaire et le Rude Hiver était resté dans bien des mémoires. Il s'était arrêté dans cette petite taverne, qui – en réalité – avait davantage des allures de taudis, ou de repaire de chasseurs, que d'un lieu convivial pour les voyageurs. Mais ça n’empêchait pas les propriétaires de prétendre le contraire.

La jeune femme aux longs cheveux blonds et bouclés se leva, gardant contre son corps nu, fin et élancé, un long bandeau de tissu beige plein d'accrocs.
On pourrait recommencer... lança-t-elle à son amant d'une nuit, tout en se collant à son dos.
Il va revenir, répondit Lovir d'un ton lointain sans lâcher l'horizon du regard. Et je doute qu'il soit ravis de me voir.
Mon père n'est pas un monstre.
Lui, peut-être pas. A l'aune de son propos, l'archer tourna son regard assombrit vers elle, avant de la bousculer légèrement pour attraper ses affaires au pied du lit.

Il se rhabilla sans se hâter plus que ça, avant de s'asseoir enfin sur le lit pour lacer fermement ses bottes.

Tu ne m'as pas demandé comment je m'appelais, renchérit-elle sur un ton inquisiteur.
Pourquoi le devrais-je ?
C'est peut-être la moindre des choses quand on partage une couche. Ainsi qu'une table bien fournie et une toilette.

Il haussa les épaules et se releva. Elle avait l'air blessée, mais s'en cacha du mieux qu'elle le pu en détournant vivement le regard du siens.

Cent vingt jours s'étaient écoulés depuis sa profonde introspection sur les rives de la rivière aux Iris. Son long périple était bientôt terminé, du moins le prologue. Lovir nourrissait toujours les mêmes ambitions. Ses rêves noirs ne le lâchaient plus, mais il avait appris à en éviter l'amertume lorsqu'il était éveillé. Éviter les regards perspicaces qui démasqueraient chez lui son déséquilibre mental et sa tristesse, lui semblait être vital. Sans compter que ces mois de vie presque exclusivement sauvage, l'avait rendu méfiant et de moins en moins enclin à la communication avec ses semblables humains. L'exilé prospecteur avait longé l'Anduin depuis le champs aux Iris et se trouvait maintenant à une centaine de kilomètres au Nord d'Osgiliath, non loin de Cair Andros. Il lui fallut passer quelques fois de la rive gauche à la rive droite, afin d'éviter diverses zones qui lui semblaient hostiles. Notamment la forêt de Lorien. Bien qu'il n'en connaissait que des rumeurs, il préféra rester précautionneux à son égard.

La marche ne fut pas de tout repos. Il aurait pu arriver bien plus rapidement, en faisant plus de trente kilomètres par jour, mais il n'en fit rien, affaiblit par son refus étrange de chasser le gibier. Il mangeait peu et dormait peu. Son corps était faible, mais son appétit sombre pour le larcin et la luxure le poussait à aller d'habitations en habitations. Évidemment, le long de l'Anduin, les moulins et autres cabanons de pêcheurs et de chasseurs ne manquaient pas. Il n'en reste pas moins que Lovir eut a affronter de nombreuses fois la solitude, la vie sauvage et maints nuages porteurs de pluie ou annonciateurs de grands vents. Dans l'idéal, il aurait voulu croiser quelques bateaux en direction du Sud, mais n’ayant pas de réelles destinations, les petites nefs fluviales Gondoriennes n'avaient rien à faire au Nord de Cair Andros.

Lovir enfila son arc en bandoulière et ajusta sa ceinture portant sa dague. Il descendit quatre par quatre les marches dont le bois agonisant craqua lourdement. Il se rendit dans ce qui semblait être le garde-manger et remplit sa giberne de fruits et de légume, ainsi que quelques champignons blancs. La jeune femme comprit bien vite que l'archer se servait librement dans leur bien et descendit à son tour afin de s'interposer. Elle lui barra la route, sur le seuil d'une porte dont les battants avaient été retirés. La jeune femme s'était promptement habillée d'une tunique verte et sombre. Elle avait les cheveux en bataille et le regard sévère. L'archer s'arrêta et eut un sourire qui trahissait son mépris.

Ne joue pas les idiotes pour quelque fruits.

Il ne lui laissa pas le temps de répondre et la renversa sur le côté du revers de la main. Elle tenta de s’agripper à son avant bras mais sa prise glissa sur les canons lisses de Lovir. Il la laissa choir sans se soucier d'elle, mais c'est une soudaine intrusion qui changea la donne. Vraisemblablement le père, ainsi que trois autres chasseurs, venaient de rentrer de la chasse. Sans attendre une seconde, Lovir sortit sa dague et rejeta sa giberne derrière lui. Tout se déroula très vite, le premier homme à rentrer était âgé d'une cinquantaine d'années, grand et fort, les cheveux blonds et bouclés, comme ceux de la jeune femme. Pas de toute, il devait s'agir de son père. Il tenait dans une main un long couteau à dépecer ensanglanté en bien meilleur état que la lame de Lovir, émoussée par l'âge.

Aucun mot ne fut échangé. Les chasseurs semblaient avoir tout compris dès lors qu'ils passèrent tous la porte d'entrée. Le regard furieux du père allaient de sa fille à Lovir frénétiquement. Le pilleur de nourriture gardait son sang froid et faisait mine d'être déterminé – bien qu'il ne connaissait pas vraiment ses chances – tout en resté parfaitement immobile. Une charge éclair fut lancé par le grand blond, hurlant, qui lâcha même les lapins qu'il tenait dans l'autre main tandis que les autres se placèrent en arc de cercle derrière lui. Lovir ré-assura sa prise sur le manche de sa dague et prit une grande inspiration, il esquiva le seul et unique coup d'estoc tenté par la brute. Il y eu quelques secondes de silence, toute la lame du pilleur avait pénétré la chair du chasseur au niveau du foie. Il toussa avant de s'écrouler lourdement juste à côté de sa fille, les yeux se retournant dans leur orbite.

Les trois autres furent abasourdis. Lovir n'en attendait pas moins pour avoir une chance d'en réchapper. Il lança une course soudaine jusque vers la sortie malgré la proximité des chasseurs. Ces derniers n'eurent le temps de sortir leur arme respective et l'un d'eux – le plus proche de la porte d'entrée – parvint à placer un coup de poing sur l'arcade droite du fuyard, mais l’adrénaline à son comble, permit à Lovir de ne pas être déséquilibré. Il continua sa course à grandes enjambées jusque vers la lisière du petit bois qu'il observait quelques minutes plus tôt. Il entendait derrière lui les cris de désespoir de la jeune femme, ainsi que, plus près et visiblement à ses trousses, les injures et les grognements de haine des trois autres hommes. Ils étaient tous les trois bien en chair et leur musculature indiquait qu'ils ne fournissaient guère d'efforts quotidiens, contrairement à leur ami désormais mort, étendu chez lui. Une chance que ce soit le plus dangereux qui se soit lancé sur lui le premier.

Lovir jeta un rapide coup d’œil derrière son épaule afin de jauger la distance qui le séparait de ses suiveurs. Une cinquantaine de mètres déjà. Ses pas firent craquer les premières brindilles du petit bois. Il y entra et fut contraint de réduire sa vitesse par la densité des végétaux, fougères et arbustes qui obstruaient sa course. Néanmoins, l'archer restait un expert des forêts et si les chasseurs ne savaient le suivre en plaine, ils le perdraient rapidement dans ce bosquet. Mais l'excitation meurtrière s'était réveillée en Lovir, il ne pouvait simplement pas se contenter de les semer. Il lui fallait plus. Il rangea tout en courant sa dague et fit basculer habilement son arc afin de le récupérer dans sa main gauche. Il sauta sur un tronc d'arbre couché afin de gagner en visibilité, souffla, conscient qu'il n'avait pas décoché de flèche vers des cibles mouvantes depuis plusieurs semaines, espérant qu'il n'avait rien perdu de son talent. Sa main droite vint chercher une flèche de son carquois, il la plaça promptement, ajusta la trajectoire imaginaire et lâcha la corde. Un bruit sec de textile perforé et de cage thoracique forcée par une pointe en fer retentit dans le silence d'une matinée d'hiver forestière. Le poursuivant le plus proche s'écroula dans sa course juste à la lisière du petit bois.

Il décocha une autre flèche qui siffla en pourfendant l'air ainsi que – au bout de sa course – le flan du cou d'un autre chasseur, lui sectionnant une artère importante. Tendu et crispé, Lovir avait malgré tout perdu du « naturel » dans l’exercice de son art de prédilection, l'archerie. Tant et si bien que son pied manqua de glisser du tronc, humidifié par la rosée du matin et la brume ambiante. Il se détendit et laissa venir le dernier homme, tellement aveuglé par sa colère qu'il ne vit pas directement les corps inertes de ces deux camarades. Lovir inspira, encocha une nouvelle flèche et colla la corde tendue de son arc à sa pommette. Il attendit que la cible constate sa solitude, profitant d'un arrêt de surprise pour viser plus haut cette fois : la tête.

Hélas, l'homme en question pénétra dans le bois à pleine vitesse, grognant comme une bête qui ne pouvait arrêter sa charge. La flèche se logea dans son bas ventre très profondément. Il termina sa course à genoux, tenant de ses de mains le trait, grimaçant de douleur. Lovir replaça son arc et s'approcha de sa victime encore vivante. Il écarta une fougère et s'accroupit, peut-être cinq mètres devant le pauvre homme agonisant. L'archer, les mains ballantes, poignets posés sur ses genoux, chercha son regard, comme pour y voir la mort venir. Sans malveillance, mais curieux. Le moribond leva le nez, la pupille pleine de questions, avant de se laisser tomber sur le côté, accueillit par une mousse barbue moelleuse. Lovir se releva et vint plus près de lui encore. Sa dernière victime de la journée s'éteignit pour toujours, le ciel parsemé de nuages se reflétant dans ses yeux ouverts, brillants et larmoyant, mais inertes.

Le prospecteur se redressa et observa au loin la longère. Pas un bruit, ni un mouvement. Il respirait fort et de la fumée s'échappait de sa bouche à chaque expiration. Il posa le regard successivement sur l'Anduin, plus bas dans la vallée, les trois cadavres puis les bois environnant. Il ferma même les yeux quelques secondes, écoutant le chant du matin, quelques oiseaux d'hiver qui sifflaient ça et là, la brise qui balayait la cime des arbres. Il décida de reprendre sa route, vers Osgiliath, après avoir récupéré ses trois flèches meurtrières. Il lui restait une centaine de bornes. Là-bas il pourra réfléchir à la suite de ses projets. Et peut-être acquérir une meilleure dague.

Il s’encapuchonna et reprit sa marche vers le Sud.


Dernière édition par Lovir Dirileth le Mer 2 Sep 2015 - 20:06, édité 1 fois
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Pour une bouchée de pain. EmptyJeu 1 Jan 2015 - 19:44
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En bleu et italique, les liens cliquables, qui redirigent vers Tolkiendil, pour compléments d'informations.
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Les jambes commençant a faiblir, Lovir décida de s'allonger, le dos contre le tronc d'un Culumalda (voir lien plus bas dans le texte) et d'ouvrir sa giberne dans lequel il piocha quelques baies et fruits qu'il avait pillé deux jours auparavant, avant de commettre un quadruple homicide. A leur vu, l'archer se replongea dans le souvenir de cette matinée. En quatre mois de vie sauvage et de dangers divers, jamais il n'eut à retirer la vie d'un homme. Il y pensait beaucoup, malgré la fatigue et l'usure du corps provoquée par tant de jours loin de la civilisation ou de quelconques autres communautés. Il y pensait en cherchant – en vain – d'être attristé, dérangé d'avoir tué quatre hommes qui légitimement se battaient pour ce qu'il leur était dû, ainsi que la mémoire d'un compagnon.  Au lieu de ça, Lovir ne sentait que de la satisfaction, de pouvoir manger et de n'être inquiété de rien. Les larcins et crimes du genre était monnaie courante pour les lieux loin des royaumes principaux. A cette pensée, le prospecteur se dit qu'il devait désormais retenir ses excès de violences. En effet, le culumalda contre lequel il était adossé, était un grand arbre fin aux feuilles rouge-doré, très peu répandu, que l'on trouvait au nord de l'Ithilien et principalement aux alentours des Champs de Cormallen. Ce qui signifiait qu'officiellement, Lovir se trouvait sur les terres du Gondor.

Il croqua dans une pomme juteuse, bien que déjà ramollie. Le crépuscule répandait tout le lustre de ses feux pardessus les nuages et les températures, fraîches, restaient douces. Les Hivers semblaient ne plus s'entendre les uns les autres en ce début de 4ème Âge. Lovir ne savait en réalité pas encore qu'il en était déjà arrivé sur ces Terres, à quelques milles de Cair Andros, qui se trouvait plein Ouest de sa position. Il sentait qu'il ne tarderait plus à rencontrer la civilisation, au sens le plus urbain qui soit et qu'il devrait désormais répondre du moindre crime découvert par les Gondoriens.

Ce qui était étonnant, étant donné que le vagabond suivait le plus consciencieusement possible son itinéraire sur une carte de l'Anduin, qui partait du Rimdath jusqu'à Minas Tirith, mais plus depuis les deux dernières lunes. Sur cette pensée, il fouilla dans une partie de sa giberne séparée de la nourriture et y sortit la carte, visiblement très fatiguée elle aussi, humide et déchirée à plusieurs endroits. Pourquoi l'avait-elle oubliée ? D'abord la fuite pressée des lieux d'où il tua les quatre hommes, mais surtout ces longues pointes noires et terrifiante qui faisait de l'Est, un horizon d'enfer, inconstant, à la manière d'une gueule de loup gigantesque. Il s'agissait bien sûr, des premières montagnes du Mordor. Jamais il en avait été aussi proche et l'excitation le gagnait furieusement à chaque fois qu'il posa son regard sur elles. « Quelle beauté sombre, se répétait-il souvent, quel vent me pousse à en dépasser les cols ? Quel désir fou, sinon d'autodestruction m'amène à me considérer suffisamment brave pour m'y aventurer ? »

Comme pour accompagner ses réflexions, une brise se leva et balaya les environs tandis que l'astre solaire envoyait l'assaut de ses derniers traits d'or, sur ces montagnes sombres, que l'archer regardait, stupéfié, irradié, ne mâchant même plus sa pomme. Le vent se transforma en bourrasque et fit claquer sa cape contre le tronc d'arbre qui s'agitait doucement, avant de disparaître et de laisser place au silence. Lovir détacha finalement son regard de ses ambitions profondes de l'Est et tenta de retrouver son chemin sur cette carte négligée. A vu de nez – ainsi que de sa position vis à vis des montagnes noires – il était effectivement sur les terres du Gondor. Il la rangea et termina de manger.

Ses muscles étaient tendus, ses habits plein d'accrocs et décolorés faisant écho à son air minable, le teint blafard et son regard assombrit. Il peinait même à serrer ses poings. Il avait toujours ce pendentif, cette pointe de flèche elfique qu'il reçut dans la jambe des années plus tôt et son équipement létal était toujours en parfait été, à l’exception de cette vieille dague indéfinissable, dont la lame encore tachée de sang, n'avait pas été lavée. C'est bien la raison pour laquelle il ne comptait pas se jeter immédiatement à l'assaut des pentes rocailleuses et hostiles, gardienne du Mordor et de ses plaines maléfiques. Il lui fallait se reposer, dans une couche décente, retrouver un équilibre alimentaire convenable et récupérer de toutes ses forces. Et si le destin lui était clément : s'enticher d'une escorte pour le Mordor, sinon de conseils. Il était conscient que ça ne sera pas une mince affaire. Certes pas aussi dangereux que le Mordor lui même, mais tout aussi délicat.
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