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Sujet: L'appel à l'égorgement
Esthel

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Rechercher dans: Cair Andros   Tag arion sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: L'appel à l'égorgement    Tag arion sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptyDim 7 Juin 2015 - 23:06
[désolé du retard]

Le sang d'Arion battait ses tempes avec la furie d'une tempête hivernale. Il ne parvenait pas à en croire ses yeux et ses oreilles : il était plongé dans l'action. Elle l'enveloppait tout entier, perturbait ses sens et troublait son jugement. Les trompettes de la gloire tintaient déjà à ses oreilles. Lui qu'on appelait de manière sarcastique « La légende », il allait enfin pouvoir montrer ce qu'il valait ! Son esprit s'emplissait d'actes de gloire. Il se voyait déjà triompher d'un dragon, lui tranchant le cou d'un geste vif, son fidèle acier gondorien décrivant un arc élégant dans l'air, avant que …

- Arion !

Une voix peu amène le tira de ses rêveries. Le capitaine de la citadelle, qui l'encourageait à mener ses hommes. Alors, la brume des songes se dissipa violemment, et il se vit tel qu'il était. L'un des petits rochers auxquels devaient se raccrocher les soldats pour que la ligne ne se brise pas. L'un de ces petits maillons faillibles qui devaient transmettre les ordres et le courage de supérieurs qui, eux, n'avaient pas besoin de titres pour prétendre à la légende … Arion eut soudain conscience de sa propre faiblesse, de son incurie. Les ordres du capitaine lui traversèrent l'esprit comme un trait fulgurant. Il entendait les hurlements, le tumulte de la guerre. Tout cela était beaucoup moins beau que ce qu'il s'était imaginé.

Il songea un moment à s'enfuir.

A laisser les quelques hommes qu'il avait en charge se débrouiller seuls. A les laisser se battre pour leur vie, alors même qu'elle était déjà perdue. Il chancela. Et sentit alors, glissé contre sa poitrine, son petit carnet. Celui-là même dans lequel il se rêvait une autre vie, celle de la Légende. Les chants qu'il y avait consigné emplirent son esprit, couvrant la réalité d'un voile héroïque qui lui permit de reprendre pied.

- Bien, commandant, ce sera fait !

Il avait répondu d'une voix forte, qu'il espérait sans tremblements. Il allait devoir faire ses preuves, entrer dans la légende. Devenir celui qu'il avait toujours rêvé d'être – même avec quelques kilos en trop et un faible pour la bonne bière. Mais le poids de l'inexpérience pesait lourd sur ses épaules pourtant musculeuses. Il avait peur de faire un faux pas, mais il n'avait pas le choix. Regardant autour de lui, il harangua brièvement ses hommes pour les rassembler. Il réfléchit un instant. S'il fallait couper le pont avant que le bastion cède …

- Allez, messieurs ! Quatre prennent des haches. Murs de boucliers pour protéger les sapeurs !

Les hommes tremblaient. Ils savaient que la mission qu'on leur avait confiée n'était pas des plus sûres. Ils savaient que leurs chances étaient faibles de survivre. Arion jeta un œil du côté du corps de garde. Il semblait si frêle, si mal protégé. Comme une barque ballotée sur les flots déchaînés d'une mer noire et profonde. Arion savait que si le petit bâtiment tombait – et il allait tomber – ce serait la débandade, une fuite totalement anarchique, qui serait fatale à la mission des sapeurs. Il fallait tenir le corps de garde assez longtemps pour permettre aux sapeurs d'achever leur tâche. Il fallait – Arion en eut l'intime conviction, peut-être faussée, mais au moins honnête – qu'il aille en personne leur apporter son aide. Qu'il se montre digne du grade de sergent qu'il n'avait jamais réellement mérité – le pensait-il.

- Vous deux, avec moi. Boucliers autour de moi ! Et vous deux, aussi. En carré, messieurs, et filons au corps de garde !

L'adrénaline semblait avoir anesthésié tout réflexe d'autoprotection chez Arion. Il leva son arme, inspiré, pour encourager ces quatre hommes qui partiraient au charbon avec lui. Deux d'entre eux, il les connaissait depuis longtemps. Auprès du feu, ils s'échangeaient leurs histoires, leurs rêves. Arion se sentait coupable de mettre ainsi leurs vies en danger. Mais en même temps, il préférait tomber à leurs côtés, tout pénétré des idéaux de gloire héroïque qu'il était. Les deux hommes lui emboîtèrent le pas sans rechigner. Les deux autres, il fallut les convaincre un peu plus habilement. Arion aurait bien rallié plus d'hommes à sa mission, mais il n'était pas sûr de pouvoir en convaincre plus. Il s'en remettait à leur bonne volonté.

Dépassant les sapeurs d'un pas rapide, il se dirigea vers le corps de garde en courant, à moitié couvert par ses hommes. S'ils arrivaient tous sains et saufs jusqu'au corps de garde, ils pourraient répliquer de quelques flèches. Les hommes positionnés là-bas étaient chichement équipés. Sans aide de soldats entraînés, ils ne tiendraient vraiment pas assez longtemps. Arion eut le sentiment que tout cela était bien vain. Bien désespéré. Mais les individus en face semblaient déterminés. Autant leur montrer de quoi Gondor était capable.

Le sergent jeta un bref coup d'oeil en arrière. Les sapeurs et leurs protecteurs semblaient faire du bon boulot – même s'ils avaient mis du temps à se mettre en position. Il se sentit fier de ses hommes, des soldats sans expérience qui, pourtant, n'hésitaient pas à mettre leur vie en jeu pour suivre ses ordres. Plein de fierté, il se sentit un peu plus digne de son titre humoristique. Envahi par un soudain sentiment étrange, mêlé de peur et de colère, Arion hurla, levant son arme à bouts de bras. Les quelques hommes qui l'entouraient tentèrent de conjurer la peur de la même manière, dans cette grande fuite en avant qu'on appelle la guerre. Hommes contre hommes. Et le corps de garde, toujours plus près.
#Arion
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