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Sujet: La Demeure dans les Fondations
Ryad Assad

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Rechercher dans: Ruines d'Ost-in-Edhil   Tag holric sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: La Demeure dans les Fondations    Tag holric sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptyLun 10 Juil 2017 - 23:50
Les coups de pioche répétés que Lithildren jetait contre la pierre résonnaient dans la pièce, assortis de ceux de ses infortunés camarades qui s'épuisaient à la tâche. Ils avaient le visage sale, les mains usées, les yeux fatigués. Toutefois, au-delà de tout, on lisait une ambition dévorante. Ils savaient que leurs efforts pouvaient changer leur existence à jamais, s'ils mettaient la main sur les fameux trésors de la cité cachée. Travailler dur, ils savaient le faire : pour la plupart, ils étaient des fermiers, de simples paysans à qui la vie n'avait pas permis de connaître une autre activité que cultiver la terre, et s'occuper des brebis. Du moins, avant qu'on vînt les engager pour s'enfoncer dans le passé, et en extraire les secrets. L'homme qui se trouvait à côté de l'Elfe était Arnorien, comme tous les autres ouvriers. Il avait déjà entendu parler des Premiers Nés, naturellement, mais là où il vivait il n'avait jamais eu l'occasion d'en voir de ses yeux. Pour lui, se trouver aussi près d'une créature de légende était presque aussi grisant que la perspective d'être couvert d'or de la tête aux pieds, et de rentrer chez-lui pour annoncer à sa famille que leur destin allait changer à jamais. Ce fut lui qui montra à Lithildren comment creuser convenablement, en utilisant toute la force de son bassin pour économiser celle de ses bras, et ainsi ne pas s'épuiser à la tâche. Le mouvement ressemblait à celui qu'il utilisait pour couper du bois, l'hiver. Il n'avait pas mis longtemps à s'y faire.

Dans les conditions affreuses qui étaient les leurs, il était impossible de conserver la notion du temps. Parfois, par réflexe, il levait les yeux en espérant vainement y trouver le soleil dont la position aurait pu lui indiquer vaguement combien de temps il devrait encore s'échiner avant de pouvoir se reposer. La pierre sombre lui renvoya ses interrogations en pleine figure, et il se résigna à ne pas poser la question aux gardes qui surveillaient la salle. C'étaient eux qui décidaient quand ils devaient terminer, et parfois il semblait aux ouvriers qu'ils tiraient un peu sur la corde pour les faire excaver toujours plus profondément. Mais ils ne se plaignaient pas, car la perspective de découvrir le trésor les unissait dans leur lutte. Et puis ils avaient noué des liens avec les combattants. Quand les Elfes avaient attaqué, c'étaient eux qui s'étaient interposés et qui avaient donné leur vie. Ils s'étaient battus comme des fauves, et avaient repoussé jusqu'à présent toutes les tentatives des oreilles-pointues de les déloger. Manier la pioche était une chose, mais cela ne permettait pas de survivre face à une épée ou à un arc…

- C'est bon les gars ! Finit par lâcher Jessp après ce qui semblait être quelques heures. Reposez-vous un peu. Quelqu'un a trouvé quelque chose ?

Il y eut des grognements de soulagement, et les hommes abandonnèrent leur équipement sur place, avant de s'étirer largement. Ils avaient les épaules en feu, les bras tremblants à force d'encaisser les ondes de choc qui leur faisaient vibrer les os. Tout ce qu'ils souhaitaient pour l'heure, c'était s'allonger et dormir. Fort heureusement, leurs compagnons guerriers avaient préparé le repas, et ils se mirent rapidement en ligne pour recevoir leur pitance. L'Elfe semblait perdue, et son voisin immédiat qui avait déjà décidé qu'il la prendrait sous son aile lui fit signe de venir se caler devant lui dans la file.

- Vous allez bien dormir ce soir, plaisanta-t-il. Puis, constatant que la jeune femme n'avait pas de quoi se restaurer, il cria : une assiette pour la dame !

Il y eut une vague agitation, quelques visages se tournèrent dans leur direction, et puis un des gardiens s'approcha finalement de Lithildren pour lui déposer une écuelle et une cuillère de bois entre les mains. Il n'avait pas la même bienveillance que l'ouvrier, et il ne lui adressa qu'un regard méchant et méfiant, comme pour lui dire « cette assiette est à moi, elle s'appelle 'reviens' ». Le message était clair.

- Vous en faites pas, ils sont toujours un peu comme ça.

Bizarrement, ce type semblait n'avoir rien à faire ici. Il n'avait pas le même comportement que les autres, et sa propension à se montrer sympathique avec des gens qui pouvaient apparaître comme ses ennemis ou de potentiels concurrents était surprenante. Lithildren pouvait en penser ce qu'elle voulait, mais il était difficile de ne pas s'attacher à ce sourire chérubin suspendu à cette grande carcasse aux muscles saillants. L'Elfe finit par arriver devant la marmite où avait cuit un ragoût à l'odeur amère. On lui en servit une bonne louchée, et on lui fourra un quignon de pain sec avec. Le tout avait l'air incroyablement consistant, à défaut d'être spécifiquement ragoûtant. L'ouvrier qui prit sa suite essaya bien de négocier une ration supplémentaire, mais on la lui refusa purement et simplement :

- Allez, quoi. Je suis quand même plus grand que la dame. Plus large aussi. Je devrais avoir plus, non ?

- Oh tu me fatigues, répondit l'autre en claquant le couvercle de la marmite.

Un rire plus tard, l'ouvrier était venu s'asseoir auprès de Lithildren. Cette dernière aurait pu vouloir retrouver Oropher, mais les gardes s'étaient disposés soigneusement entre elle et lui, et ils ne semblaient pas décidés à les laisser ensemble. A dire vrai, c'était assez compréhensible. Accueillir deux ennemis potentiels au milieu de leur camp était déjà un véritable risque, et ils ne pouvaient pas décemment les laisser concocter un plan. La meilleure façon de procéder était encore de les isoler pour les garder sous contrôle.

- Holric. C'est comme ça que j'm'appelle.

L'ouvrier, encore. Il enfonça sa cuillère dans le ragoût, et commença à manger avec appétit et – plus surprenant – l'air d'aimer ce qu'il y avait dans son assiette. Il devait bien être la seule personne du camp à se satisfaire de cette nourriture de fortune qui restait sur l'estomac et avait un goût si prononcé qu'on ne souhaitait même pas connaître la recette. Mais c'était tout ce qu'il y avait au menu, et il fallait s'en contenter.

- Et c'est quoi votre nom à vous ?

Curieux sans être trop inquisiteur, Holric paraissait être un type bien qui, pour des raisons qui devaient lui appartenir, s'était embarqué dans une aventure qui le dépassait de très loin. Il montra bientôt du doigt Oropher, en commentant :

- Votre mari a l'air d'intéresser le patron. C'est pas souvent qu'il s'agite comme ça depuis…

Il hésita. Puis rougit. Puis recommença à manger avec appétit. Il n'avait pas sa langue dans sa poche, et peut-être qu'avec quelque effort il serait possible de lui extorquer des informations utiles. Le genre d'informations qui permettrait aux deux Elfes de prolonger leur séjour en Terre du Milieu, et de – peut-être – goûter de nouveau à la lumière. Mais il fallait procéder avec doigté, car les gardes non loin veillaient au grain…


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Pendant que Lithildren mettait son corps au service de la quête que poursuivaient ces hommes perdus dans les cavernes du passé, Oropher avait le luxe de se reposer et de discuter avec leur hôte. Du moins, si l'on pouvait appeler « luxe » le fait de subir un interrogatoire retors entre les griffes d'un esprit aussi désireux de glaner le moindre détail de sa vie personnelle que réticent à lui confier quoi que ce fût. Il eut un sourire froid quand l'Elfe lui demanda humblement son nom, et répondit sans sourciller :

- Vous donner mon nom… ? Audacieux… Audacieux… Ha… Non… Je ne donne pas… Vous… eh bien… Vous l'apprendrez bientôt… Oui… Bientôt…

Il leva la main, en observant une chevalière ouvragée en or qu'il portait sur l'auriculaire, et, alors qu'elle captait les rayons lumineux que jetaient les torches, poursuivit :

- Pourquoi nous… presser… hm ? Vous et moi avons… comment vous dire… tout notre temps…

Il découvrit ses dents, devenant soudainement plus effrayant. On aurait dit un monstre au visage difforme, dévoré par une sorte de folie furieuse qui le hantait. Les ombres jetées sur ses rides creusées faisaient émerger une violence et une rage profondément enfouies. L'apparition disparut soudainement, et il tendit un doigt fatigué droit vers le visage de l'Elfe.

- Je sais que vous dites… hm… vrai… Je le vois… Je le sens… Vous avez les yeux d'un… d'un meurtrier. Cependant…

Sa phrase resta en suspens. Une éternité. Il sembla s'absorber dans ses pensées un instant, comme s'il se remémorait quelque chose qu'il avait oublié depuis longtemps et qui était de la plus haute importance. D'une main, il fit approcher l'homme qui gardait Oropher, et lui souffla :

- Jessp… Qu'il vienne…

L'intéressé hocha la tête, et s'éclipsa, laissant le vieillard seul avec l'Elfe brisé. Il semblait ne pas craindre une tentative de sa part de se rebeller. Probablement qu'il considérait que la position de Lithildren ne permettait pas à Oropher de tenter quoi que ce fût. S'il essayait de s'en prendre à quiconque ici, elle perdrait la vie avant d'avoir eu le temps de comprendre pour quelle raison ses geôliers avaient soudainement décidé de revenir sur leur parole. Et réciproquement. L'homme cligna des yeux, comme s'il émergeait d'un rêve, avant de poursuivre :

- Cependant… Vous êtes un piètre… menteur… Cela aussi, je le vois… Ha…

Une pause.

- On lit en vous… comme dans… eh bien… comme dans un livre… Ces Elfes ne vous croiraient pas… Ils se méfient… oui… toujours…

L'homme n'avait pas tort. Après tout, les Elfes qui se trouvaient à l'extérieur des ruines venaient de voir deux groupes distincts pénétrer dans la cité perdue qu'ils s'étaient mis en tête de protéger. La confiance n'était plus de mise… Ils ne pouvaient pas vraiment dire que la situation était à leur avantage, et ils ne se jetteraient pas tête baissée dans un piège au risque de voir leurs derniers espoirs de chasser les intrus être balayés. Surtout que l'idée de s'enfoncer trop profondément dans les ténèbres semblait les mettre mal à l'aise. Avaient-ils quelque chose à voir avec la créature qui semblait rôder dans les ombres ? Un maléfice des Premiers Nés pour s'assurer que quiconque s'introduirait dans les souterrains le paierait de sa vie ? Ils en étaient capables, assurément. Leur détermination à conserver pour eux seuls les trésors du passé était à nulle autre pareille. Sauf peut-être celle du chef des mercenaires, avec qui discutait toujours Oropher. L'homme semblait avoir la maîtrise de ses nerfs, mais dans ses yeux brûlait une vigoureuse flamme que rien ne paraissait pouvoir éteindre. Il était évident qu'il ne quitterait pas les lieux sans avoir trouvé ce qu'il cherchait. Les deux interlocuteurs tournèrent la tête en voyant Jessp revenir vers eux.

- Monsieur, vous m'avez fait appeler ?

- Exact… Je voudrais que vous… eh bien… que vous enquêtiez sur… la chose… Monsieur Oropher ici présent vous… comment dire… conduira…

Un froncement de sourcils de la part de Jessp, qui était de toute évidence un homme dévoué mais qui n'avait pas particulièrement envie de vérifier si les dires des deux Elfes étaient vrais. S'ils avaient bien été attaqués par une créature, alors il valait mieux la laisser où elle était plutôt que de commencer à chercher querelle. Pourtant, il savait au fond de lui que pour la sécurité de leurs installations et pour assurer le chemin du retour, ils devraient tôt ou tard se confronter à ces tunnels sombres. Autant faire en sorte de savoir ce qui les attendait.

- Bien monsieur… Combien d'hommes souhaitez-vous que je prenne avec moi pour cela ?

- Autant… qu'il vous plaira…

- Je vois, fit le combattant en jetant un regard circulaire à ses troupes et aux ouvriers. Il acheva de compter mentalement, et revint à son chef : J'irai seul avec le prisonnier. Nous ne sommes pas assez nombreux pour risquer plus d'une vie. Et puis nous serons sans doute plus discrets comme cela.

Le vieil homme hocha la tête en tendant un doigt vers Jessp :

- Très juste… Ha… Vous ne manquez pas de… courage… Ne le perdez pas… en route… Pensez au trésor… Gardez le trésor… dans vos pensées…

Il partit d'un rire fatigué qu'il accompagna d'un geste de la main qui signifiait que l'entrevue était terminée. Oropher ne comprit peut-être pas immédiatement, mais Jessp avait l'habitude et il saisit fermement le bras du prisonnier pour l'emmener au loin. Il ne valait mieux pas déranger leur chef quand il avait envie de se reposer ou de se plonger dans ses pensées… L'Elfe était encore fragile sur ses jambes, et son compagnon désigné le lui fit remarquer sans prendre de gants :

- Nous devons arpenter des tunnels difficiles d'accès, et si ce que vous dites est vrai il nous faudra peut-être échapper à une créature meurtrière. Vous pensez que vous pourrez y arriver ?

La question était sincère, mais la situation ne donnait pas vraiment le choix à Oropher. Il était mené à la baguette par les désirs du chef des mercenaires, et il n'était pas stupide au point de croire qu'une invitation polie n'était pas une injonction ferme et menaçante. S'il se défilait, c'était Lithildren qui en paierait le prix fort. Il pouvait la voir de là où il se trouvait, attendant son tour pour prendre son repas. Mais impossible d'aller lui parler pour l'heure. Il n'y aurait pas d'adieux, si jamais la mission devait mal tourner. Jessp, qui paraissait davantage sensible à l'état de santé de son coéquipier qu'à son bien-être mental, poursuivit :

- Nous allons nous reposer en même temps que les ouvriers. Cela nous donne un peu plus de six heures pour dormir. Ça ira ?

Son insistance en disait long sur l'état de fatigue qu'affichait l'Elfe… et sur ses chances de survie, s'il croisait de nouveau la chose qui rôdait dans les ruines.

Tout ça pour un foutu trésor !


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