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Sujet: Si Vis Pacem...
Ryad Assad

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Rechercher dans: Albyor   Tag shangza sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: Si Vis Pacem...    Tag shangza sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptyVen 8 Aoû 2014 - 16:34
Soupir las.

Il était épuisé, et chacun de ses pas était plus difficile que le précédent. La roche sous ses pieds, crissait chaque fois que sa botte de cuir se posait dessus, et c'était bien la seule chose avec sa respiration haletante qui rompait le calme des lieux. Malgré l'altitude, il se trouvait encore dans une zone d'ombre, le soleil n'étant visible que lorsqu'on s'élevait encore de quelques centaines de mètres. Pourtant, derrière lui, de minuscules points lumineux bien trop lointains pour être discernés avec précision, marquaient l'emplacement d'Albyor, la Cité Noire. La puissante forteresse bâtie à flanc de montagne ressemblait à une masse de ténèbres peuplée de milliers de feux, et on ne distinguait même pas les maisons des contreforts rocheux. Tout au plus percevait-on la langue sinueuse du fleuve, gris plutôt que noir, sur laquelle couraient des navires qui se succédaient en une file presque ininterrompue, apportant leur précieuse marchandise jusque dans la capitale universelle de l'esclavage. D'aucuns auraient pu penser qu'il n'y avait rien de bon ici, mais ce n'était pas son avis. Faisant jouer ses épaules pour rajuster les sangles de son sac, tournant le dos à la majestueuse ville qui l'avait vu naître, il continua son ascension, pas après pas.

Autour de la ville, le relief était montagneux, et seulement deux d'entre elles étaient dignes d'attention. La première surplombait directement la cité, et il était possible de rallier le sommet en seulement quelques heures de marche. Des marches avaient été taillées pour en faciliter l'accès, et le chemin en lui-même n'avait plus rien du pèlerinage qu'il était jadis. C'était un axe fréquenté par les bonnes gens, par l'aristocratie, et plus uniquement par les fidèles les plus convaincus qui entreprenaient l'expédition pieds nus pour montrer leur dévotion. Tout en haut, en effet, se situait un des plus importants temples dédiés à Melkor, qui avait gagné en importance depuis que la Reine avait imposé le Dieu à tous ses sujets. C'était toutefois un endroit malsain et désagréable, qu'il fallait être particulièrement courageux pour oser affronter. On y célébrait des messes sombres, et on y pratiquait des rituels des temps anciens qui nécessitaient, disait-on, du sang humain. Les esclaves y avaient toujours été acheminés, mais aujourd'hui on voyait des processions entières d'hommes et de femmes destinés à être sacrifiés.

Le second pic sur lequel un voyageur pouvait s'attarder se trouvait un peu plus loin de la cité proprement dite, et un peu moins haut que le temple Sharaman. La montagne était beaucoup moins fréquentée, assurément, et le voyage était donc paradoxalement plus long. Il fallait trois longues journées de marche pour parvenir jusqu'au sommet, en passant par un chemin sinueux et étroit qui courait sur le flanc du mont colossal qui s'élevait vers le ciel. Nulle marche taillée cette fois, seulement un mince chemin qui n'avait jamais été entretenu, et qui menaçait de s'effondrer parfois. Les dangers étaient nombreux pour se rendre au sommet, mais la récompense en valait la peine. D'une nature toute autre que le temple Sharaman, le monastère de Saprâh était un lieu de paix et de détente, où chacun pouvait venir pour y trouver la sérénité. Les prêtres qui se trouvaient là étaient au service de leurs invités, et vivaient des dons généreux qu'ils recevaient des individus qui venaient se réfugier sous leur toit. Un échange de bonté, en somme, qui n'impliquait pas de verser le sang.

Cela faisait deux jours entiers qu'il marchait, dans l'objectif de rallier ce temple en espérant sincèrement y trouver des réponses aux questions qu'il se posait, aux questions qui le hantaient. Alors que ses pas le menaient toujours plus haut, il commença à sentir l'odeur caractéristique du monastère : l'odeur de sel que l'on ne trouvait nulle part ailleurs. Inexplicablement, on avait l'impression de se trouver au bord de mer, et les mouettes qui volaient au dehors en projetant leur ombre devant les pieds du voyageur ne permettaient pas d'infirmer cette première impression, bien au contraire. Il sourit en percevant les effluves marines et iodées, et cela lui redonna du baume au cœur, le poussant à avancer encore pendant quelques temps, avant de commencer à chercher un abri pour la nuit. A l'exception des premières heures de la journée, il faisait perpétuellement sombre sur ce flanc de la montagne, et il n'était jamais aisé de savoir quand s'arrêter. Dès lors, il valait mieux être prudent, et localiser un endroit approprié pour se reposer, car lorsque la nuit s'emparait du ciel, c'était comme si les ombres s'abattaient sur les lieux en une seconde. Tout à coup, on se rendait compte qu'on ne voyait plus rien, et qu'il n'y avait pas d'autre solution que de dormir au milieu du chemin... ce qui n'était pas recommandé.

En effet, beaucoup de choses rôdaient la nuit dans ces montagnes. Des créatures volantes, d'autres rampantes, d'autres encore courantes. Elles se tapissaient dans des grottes le jour, et sortaient quand la Lune était haute pour venir se nourrir. Certaines n'étaient pas plus grandes que la main, d'autres pouvaient atteindre la taille d'un cheval d'après certaines histoires. Toutes, quoi qu'il en fût, étaient mortellement dangereuses si on n'y prenait pas garde. Il était difficile de faire la part des choses entre la superstition et la réalité, mais il était déjà venu ici une fois, et ce qu'il y avait vu l'avait incité à faire preuve d'une grande prudence. Il y avait des choses cachées dans la nuit, et elles n'étaient pas que le fruit de l'imagination de conteurs en quête de sensation. Profitant de ce que le soleil n'était pas encore tombé, il continua sa progression, et aperçut à sa grande surprise un attroupement un peu plus haut sur la route. On aurait dit un convoi, composé d'une demi-douzaine de personnes environ. Il n'était pas rare de voir des pèlerins se rassembler pour s'attaquer ensemble à l'ascension, mais en règle générale ils ne s'immobilisaient pas ainsi au milieu du sentier, l'air perplexe.

A mesure qu'il gravissait la pente raide, il pouvait distinguer les détails de la scène. De toute évidence, quatre des hommes étaient des porteurs, à en juger par leur tenue : ils étaient habillés comme des esclaves, et avaient le dos voûté de ceux à qui on confie une lourde tâche chaque jour que Melkor fait. Les deux autres étaient probablement leurs maîtres. Un homme et une jeune femme, en grande discussion devant ce qui semblait être l'objet de leurs tracasseries. Une voiture à porteurs, de toute évidence hors de prix, qui paraissait renversée, et dont l'une des prises se trouvait dans le vide, inaccessible. La situation paraissait compliquée pour les voyageurs : l'objet était lourd, et il fallait la force de quatre hommes pour le transporter. Trois ne suffiraient pas à remettre le carrosse sur le chemin, qui de toute façon se faisait de plus en plus étroit, et qui se révélerait inutilisable. Considérant la qualité de la route, la pente, et les virages incessants, il était déjà miraculeux qu'ils eussent été en mesure d'arriver si loin. Essayer davantage serait folie. Mais c'était là les considérations d'un homme qui avait déjà eu l'occasion de se rendre au temple : qu'en serait-il des autres ?

Ils finirent par le repérer, naturellement - il ne cherchait pas particulièrement à se cacher, et les pèlerins avaient pour coutume de renoncer à toute intention malveillante en entamant l'ascension -, et l'homme se porta à sa rencontre, laissant la jeune femme au bon soin des esclaves qui se rapprochèrent d'elle comme pour la protéger. Comme il était de coutume, quand un roturier rencontrait quelqu'un qui était de la noblesse - ou qui du moins semblait en être, car l'individu avait davantage l'air d'un étranger que d'un oriental -, il salua le premier, et se présenta d'une voix claire quoique mesurée... la nuit approchait :

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- Salutations messire ! Je m'appelle Shangza, d'Albyor. Vous avez l'air dans une mauvaise posture, puis-je vous apporter mon aide ?

Il avait levé les mains bien en évidence, signe universel de paix, et bien qu'il conservât un sabre à la ceinture, il ne semblait pas menaçant. Surtout pas à un contre six, alors qu'il paraissait quelque peu fatigué par sa marche. De toute évidence, cela devait suffire à l'homme, qui le laissa approcher tout en le surveillant du coin de l'œil. Cette attitude était normale partout, surtout que Shangza commençait à croire que lui aussi était un roturier, et qu'il était plutôt une sorte de garde du corps pour la jeune femme qui se tenait derrière, en retrait, encadrée par ses quatre esclaves. Ils paraissaient épuisés, mais dans leur regard brillait une lueur de détermination féroce. Ils ne laisseraient personne la toucher, dussent-ils tous y laisser la vie. Portant la main à son front, l'homme d'Albyor lança courtoisement :

- Mes respects, mademoiselle.

Il ne la voyait pas très bien à cause de l'obscurité, mais elle lui paraissait suffisamment jeune pour être appelée ainsi sans risque. Il lui adressa un sourire amical, que ses vingt-six ans rendaient presque charmeur. A vrai dire, il était loin d'être laid, même si sa beauté naturelle était estompée par un fardeau invisible qui semblait reposer sur ses épaules. Déposant son sac sur le sol, il s'approcha du carrosse, qui était en équilibre instable, même s'il ne menaçait pas de tomber de lui-même dans l'immédiat. Il était possible de le tirer à la force des bras pour le remettre sur la route - ce qui serait éreintant et fastidieux, mais il ne faudrait pas compter l'emporter plus haut. Shangza fit le tour de la scène, se penchant parfois pour examiner la situation, et il resta examiner le tout pendant quelques longues et silencieuses minutes, avant de lâcher :

- Je pense qu'on peut régler ça. Si nous associons nos cordes, nous devrions pouvoir dégager votre carrosse. Il nécessitera quelques réparations, mais rien d'insurmontable. Par contre, je pense que nous devrions réfléchir à cela demain.

Il s'était approché de son sac, pour le charger de nouveau sur ses épaules. De toute évidence, il ne considérait pas qu'on pût opter pour une autre solution que la sienne, et si quelqu'un était d'avis de tenter le sauvetage du carrosse en l'instant, il n'y prêterait pas son concours. Levant les yeux vers le ciel, il essaya de voir à travers les nuages sombres si la nuit était déjà tombée. C'était difficile à dire, mais il devenait de plus en plus difficile de se repérer, et il n'avait aucune envie de traîner dans les parages quand l'obscurité serait totale... ce qui devrait arriver d'ici peu de temps.

- J'ai repéré un endroit où on devrait pouvoir se cacher, un peu plus bas... Suivez-moi.

Et, sans attendre, il commença à descendre. A dire vrai, il se fichait un peu de savoir si quelqu'un allait venir avec lui ou non. Ce qui lui importait présentement, c'était de rejoindre un abri sûr. Il avait repéré un renfoncement dans la roche, où il était possible de se glisser discrètement, et qui était invisible depuis l'extérieur. Les créatures les plus grosses ne pouvaient s'y faufiler, et celles plus petites pouvaient être bloquées par un simple sac, ou quelques vêtements roulés en boule. Mais encore fallait-il y arriver, car descendre une pente raide était particulièrement difficile quand on voyait à peine où on mettait les pieds. En tête, Shangza essayait de ne pas glisser, et de limiter le crissement de ses pieds sur la roche. Il s'arrêta un instant pour reprendre son souffle, et constata que les crissements continuaient. On aurait dit un raclement régulier contre la pierre, comme les pieds d'un voyageur... ou les pattes d'un prédateur. Et étrangement, ils ne venaient pas de derrière lui.

- En arrière ! Cria-t-il tout bas. En arrière, ne faites pas de bruit !

Ce qui se trouvait devant lui, il n'en avait aucune idée, et il ne voulait pas le savoir. Tout ce qui comptait, c'était de s'enfuir avant d'être repéré. Se retournant prestement, il fit de grands gestes pour inviter les silhouettes qu'il ne parvenait pas à reconnaître à faire demi-tour. Il reconnut le garde du corps à qui il avait parlé un peu plus tôt. Il se tenait à côté de la jeune femme, ne la lâchant pas d'une semelle, conscient des risques qu'ils encouraient. La situation n'avait pas encore dérapé, et ils avaient encore un peu de temps devant eux, mais la tension était palpable. Shangza lui saisit le bras pour attirer son attention :

- Passez devant, et trouvez-nous une cachette. Et surtout, n'allumez pas de torches ! Allez !

Dans le lointain, un hurlement étrange se fit entendre. Cela ressemblait à un loup, mais ce n'en était pas un. Leur imagination respective leur faisait imaginer des créatures terrifiantes, et Shangza songea à un loup immense, difforme et incroyablement rapide, venu pour les traquer. Il préférait ne pas voir sa théorie se confirmer, et il emboîta le pas au groupe qui remontait péniblement le chemin. Sa main s'était instinctivement refermée sur le manche de son sabre, mais il ne l'avait pas encore dégainé, comme si en s'abstenant, il repoussait le moment fatidique du combat. Tant qu'il n'aurait pas sorti son arme, cela signifiait qu'ils étaient en sécurité, et c'était mieux ainsi. Dans un silence de plomb, ils remontèrent la pente, chacun ouvrant les yeux à la recherche d'un abri. Shangza, qui fermait la marche, se retourna en entendant une créature renifler le sol dans son dos. De toute évidence, ils n'avaient pas été assez discrets. Pressant les esclaves en les poussant dans le dos, il siffla à voix basse :

- Vous avez trouvé quelque chose ? Dépêchez-vous !

Une vague de crainte s'était emparée de lui. Mais comment aurait-il pu en être autrement ? En dépit de tout ce qu'il avait vécu, il n'était pas préparé à affronter une menace dont il n'avait aucune idée. Quand la mort se présente sous une forme inconnue, sérénité et calme s'évanouissent. On confie alors sa vie à n'importe qui : un étranger à peine rencontré, et une jeune femme bien mystérieuse.

#Shangza
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