6 résultats trouvés pour Blanche

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Sujet: À tout rompre
Forlong

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Rechercher dans: Les Ruelles du Premier Cercle   Tag blanche sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: À tout rompre    Tag blanche sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptyJeu 8 Avr 2021 - 2:04

Felian était partagé. D'un côté l'excitation d'avoir réussi à franchir les portes de la Cité Blanche était palpable; il était encore incrédule face à la manière dont la fortune lui avait souri. Cette elfe, rencontrée par hasard à Osgiliath, s'était avérée être la clé de leur réussite en plus de lui avoir sauvé la vie. Dame Blanche quant à elle était une preuve vivante qu'il y avait du soutien pour leur cause au sein de l'armée du Gondor et de la noblesse du royaume. De l'autre côté...il se sentait écrasé par l'énormité de leur tâche. Six cercles de pierre antique les séparaient encore de Cartogan, et il ne savait même pas quoi faire si jamais ils parvenaient à lui faire face. Vivement qu'Eradan reprenne le commandement...

Il se surprit en train de regarder Namarien d'un air absent; la guérisseuse semblait vouloir parler, mais pour cela il leur fallait d'abord arriver jusqu'à un endroit sûr.

La cité avait changé pendant cette poignée de jours qu'il lui avait fallu pour faire l'aller-retour entre Minas Tirith et l'Emyn Arnen. Les rues étaient à moitié désertées à l'exception des nombreux soldats et une atmosphère lourde et tendue pesait sur la ville, comme si Minas Tirith était sur le pied de guerre. Profitant de l'indulgence étonnante du capitaine Erelas et du fait qu'ils pouvaient se déplacer dans les ruelles du Premier Cercle avait une liberté relative, Felian commença à formuler le début d'un plan d'action.

Ils finirent par arriver à l'auberge du Nez Creux; deux hommes et deux femmes à la place des huit chevaliers qui devaient venir épauler Eradan. L'homme à la tête du Cor Brisé allait être déçu. Lorsqu'ils se retrouvèrent dans la même chambre et après avoir soigneusement vérifié que personne n'écoutait à la porte, Felian répondit à Dame Blanche:

-Madame, vous avez joué votre rôle à merveille. Mais nos ennuis ne s'arrêtent pas là. Je savais que l'interdiction du port d'armes allait être un problème, mais la fermeture des cercles intérieurs de la Cité Blanche est un obstacle aussi grave qu'inattendu. Je ne sais même pas où trouver Eradan dans ces circonstances...


-Eradan a dit à mon époux qu'il comptait stationner avec ses hommes dans une aile temporairement abandonnée de l'Université de Minas Tirith. Le département d'alchimie est tombé dans la disgrâce et a perdu en grande partie les subventions du Palais depuis qu'ils ont accidentellement causé l'incendie du bâtiment. - répondit Blanche.

-L'Université...mais c'est au deuxième Cercle. Nous voilà séparés à nouveau d'Eradan par une muraille! Mais concentrons nous sur un problème à la fois. Il faut qu'on rentre en contact avec Capitaine Neige et ses compagnons, ils avaient promis qu'ils essayeraient d'organiser des armes. Je ramène déjà des renforts bien plus maigres que prévu, je n'irai pas voir Eradan les mains vides! Karl, j'ai une mission pour toi. Rends-toi discrètement à la taverne du Peregrin, pas très loin de la Grande Porte, et vérifies chez l'aubergiste s'il n'y a pas eu de message laissé pour moi ces derniers jours. Le tavernier me connaît...donnes-lui ces pièces d'or et dis-lui que tu viens de la part du seigneur Valdoré.

Le jeune chevalier se leva, toujours prêt à l'action, et impatient à l'idée de pouvoir faire ses preuves. Avant qu'il ne quitte la pièce, Felian rajouta d'une voix sérieuse:

-Et Karl...fais attention aux poignards cachés. Les paroles étaient sombres, mais le souvenir de la tentative d'assassinat à Osgiliath était encore très fraîche. Ils avaient des ennemis puissants qui savaient plus sur leur mission et sur leur localisation qu'il n'aurait pu espérer. Lorsque tu reviendras, frappe quatre fois à la porte. Un court, un long, un court un long.

La discussion reprit lorsque Karl referma la porte derrière lui.

-Eradan est un des rares hommes à pouvoir demander une audience auprès du roi Méphisto à n'importe quel moment. Il fait après tout partie du groupe des héros qui ont ramené le prince Chaytann à Minas Tirith, ainsi que le traître Warin en chaînes afin qu'il soit jugé. Mais avec la situation actuelle et en vue de la nature de notre mission je pense qu'il préfère rester discret et, si possible, incognito. Ce sera donc probablement à nous de le rejoindre. Peut-être que ce sera possible une fois que l'on obtiendra le laisser-passer...

-Je crains que dans les circonstances actuelles, nous risquons d'être escortés directement vers les Maisons de Guérison, qui se trouver dans un cercle plus haut que l'Université...Vous pourrez peut-être essayer de vous séparer de moi au deuxième cercle et partir vers l'université...mais ce n'est pas quelque chose que moi je puisse faire. Comme vous le savez, vous pouvez compter sur mon aide et celle de mon époux. Néanmoins, il y a des apparences que je dois maintenir à tout prix, afin de ne pas risquer ma réputation et la position de mon époux. Il y a plusieurs manières de servir le Gondor, et Nuril peut faire beaucoup de bonnes choses en tant que second du Commandant d'Osgiliath...Je devrai me diriger vers les Maisons de Guérison avec le blessé, et aider à contenir la maladie qui semble avoir atteint la Cité.

Dame Blanche semblait clairement gênée, mais Felian hocha de la tête, comme pour la rassurer. Il y avait des gens d'action, comme Namarien et lui, qui pouvaient se permettre de risquer leur vie pour le bien commun, ou d'agir dans l'obscurité. Mais il y avait aussi d'autres, qui agissaient dans la lumière et se devaient de respecter un code de conduite strict.

-Bien bien bien...beaucoup d'éléments à prendre en considération alors que j'ai l'impression que nous sommes forcés d'agir presque à l'aveugle, sans savoir exactement comment rejoindre Eradan et Neige. Dame Namarien, vos bonnes idées nous ont permis d'arriver jusqu'à là, alors permettez-moi de vous appeler une fois de plus à l'aide. Nous avons réussi à rentrer dans Minas Tirith, mais le reste de mes hommes est encore coincé à l'extérieur. Y a t'il un moyen pour qu'il nous rejoignent? Et que ça soit avec eux ou sans, la grande question reste comment passer inaperçus   d'un cercle à l'autre.

La discussion continua encore pendant un certain temps, car leur problème était complexe et Felian, bien qu'un peu gêné par la situation, avait déjà pu apprendre à respecter les opinions et idées des deux femmes.

Quelques instants passèrent, lorsque soudainement ils furent interrompus par un frappement à la porte. Crac...crac...deux battements. Ce n'était pas le code convenu, et il était d'ailleurs sans doute trop tôt pour que Karl ait le temps de revenir du Péregrin.

Ils étaient dans la chambre de Namarien, Felian ne dit donc rien mais il se releva, tendu, à la recherche d'une arme improvisée et finit par attraper le chandelier métallique posé sur la table...

#Felian #Blanche
Sujet: À tout rompre
Ryad Assad

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Rechercher dans: Les Ruelles du Premier Cercle   Tag blanche sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: À tout rompre    Tag blanche sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptyLun 8 Fév 2021 - 13:42
Minas Tirith…

Enfin.

La place principale du Premier Cercle s’ouvrait devant les yeux de Namarien, qui ne put que constater à quel point le Gondor était prêt à la guerre. D’ordinaire, ces lieux étaient traversés par des voyageurs venus de tous les royaumes libres de la Terre du Milieu. Il y régnait une atmosphère joyeuse, alors qu’on s’échangeait des nouvelles, qu’on se souhaitait la bienvenue ou au contraire bon voyage. Les gens se prenaient dans les bras, se tapaient dans le dos, se saluaient chaleureusement, et se bousculaient pour se frayer un chemin vers les quartiers où ils résidaient. Les nobles, vers le haut de la ville, et les plus pauvres dans les ruelles innombrables des niveaux inférieurs. Mais aujourd’hui, il n’y avait nulle trace de cette effervescence populaire.

Deux douzaines d’hommes patrouillaient à travers la place, qui avait été renforcée de barricades pour l’occasion. Des soldats en armes et en armure, le visage fermé et sévère, marqué par un pli soucieux. Même les superbes statues équestres semblaient tristes, et leur mutisme ne faisait qu’accroître le sentiment oppressant, alors que les lieux étaient paradoxalement déserts.

Quelques soldats s’approchèrent des nouveaux venus pour contrôler qu’ils n’avaient pas d’armes sur eux, ce qui était la procédure habituelle quand on pénétrait à Minas Tirith ces jours-ci. Namarien et Blanche furent contraintes de descendre de cheval, et leur statut de femme ne leur épargna pas le déplaisir d’avoir à sentir des mains étrangères parcourir leur corps à la recherche de lames cachées. Toutefois, le professionnalisme de ces hommes était appréciable, et ils n’eurent pas le moindre geste déplacé, se montrant respectueux de leurs visiteurs tout autant que de Felian, Thédeor et Karl.


Diligemment, Erelas les conduisit vers ce qui ressemblait à un petit dispensaire de fortune, où quelques blessés étaient étendus.

- Vos blessés peuvent se reposer ici, le temps que l’autorisation de pénétrer vers les niveaux supérieurs ne vous parvienne. Il y a fort à parier que cela prenne un peu de temps, mais des guérisseurs passent fréquemment ici, et ils vous apporteront le matériel nécessaire. D’ici là, n’hésitez pas à vous reposer… Je ne peux que vous recommander l’auberge du Nez Creux. Vous continuez tout droit dans cette direction, et vous tournez à gauche à la huitième rue. La plupart des habitants se sont réfugiés un peu plus haut dans la ville, mais il reste encore quelques crasseux des bas-fonds, alors soyez prudentes.

A la manière d’un guide leur présentant les différentes facettes de la ville, le capitaine leur désigna les différentes sections de ce niveau :

- La place centrale est réservée aux militaires, et vous aurez besoin d’un motif valable pour vous déplacer de l’autre côté du Premier Cercle, ou pour monter au deuxième niveau. Des contrôles stricts ont été mis en place à chaque échelon, et vous devrez vous justifier à chaque fois que vous voudrez grimper.

Il aurait pu se dispenser de ce dernier conseil, mais ce fut plus fort que lui :

- Essayez de ne pas trop attirer l’attention sur vous, dans la mesure du possible. La situation est tendue, à Minas Tirith, et personne ne souhaite qu’elle s’envenime encore.

C’était un avertissement à peine voilé, qui pourtant ne prenait pas la forme d’une menace. C’était comme si le capitaine devinait la raison véritable de leur présence ici, ou en tout cas qu’il percevait quelles pouvaient être les conséquences d’une mission menée à l’insu des autorités. Elles avaient cherché à mentir pour entrer à Minas Tirith, ce qui signifiait qu’elles ne faisaient pas confiance à la hiérarchie militaire… un mal bien commun ces derniers temps. Il en ignorait peut-être la raison profonde, mais il savait que les troupes royales ne prendraient pas à la légère ce qu’elles verraient comme des actions séditieuses.

- Mesdames, avez-vous d’autres questions, avant que je m’en retourne à mes obligations ?






#Felian #Blanche
Sujet: Irremplaçables
Ryad Assad

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Rechercher dans: Osgiliath   Tag blanche sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: Irremplaçables    Tag blanche sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptyLun 8 Fév 2021 - 13:41

Minas Tirith n’avait sans jamais paru aussi menaçante à une fille du Gondor, et pour la première fois de son existence, Blanche éprouvait une crainte sincère à se trouver ainsi devant cet immense édifice de pierre. Elle se sentit écrasée par le gigantisme des lieux, et ne put s’empêcher d’imaginer ce qu’avaient dû penser les ennemis du Gondor qui, à travers les âges, avaient systématiquement échoué à enlever la plus belle cité des Hommes. Elle se représentait très bien leur terreur profonde, alors même que flèches et rochers ne volaient pas dans sa direction avec l’intention de lui ôter la vie.

- Rester calme… répéta-t-elle en écho aux paroles de l’Elfe. Rester calme…

Elle savait que beaucoup dépendait d’elle, et elle ne voulait pas être la responsable de l’échec de leur mission. Tout à coup, elle avait l’impression que le sort de tout le royaume pesait sur ses épaules, et la perspective de devoir porter le poids de cette culpabilité pour le restant de ses jours ne lui donnait que plus de courage pour affronter l’avenir.

- Rester calme…

Inspirant profondément, elle fit le vide dans son esprit, comme elle avait appris à le faire avant d’accomplir quelque tâche difficile qui requérait la plus parfaite concentration. Jusqu’à présent, il ne s’était agi que de guérir quelques blessures, recoudre quelques plaies, et veiller sur des hommes qui se montraient toujours d’une extrême courtoisie avec elle. Aujourd’hui, elle entrait dans une toute autre dimension. Ses pensées allèrent à son royaume, à sa famille… aux enfants qu’elle n’avait pas encore… C’était pour eux qu’elle était là. C’était en leur nom qu’elle transgressait les lois du Gondor, et qu’elle acceptait de mettre en péril sa propre existence.

Elle espérait seulement que Nuril ne s’en ferait pas trop pour elle.

Tandis que Blanche s’avançait pour aller à la rencontre de leur interlocuteur, le capitaine Erelas, Felian s’efforça de jeter un coup d’œil discret pour voir comment évoluait la situation. Homme d’action, habitué à manier l’épée plutôt qu’à rester – littéralement – allongé en retrait, il avait beaucoup de mal à accepter de ne pas savoir, ne pas contrôler, ne pas être en mesure d’intervenir si nécessaire. Il devait se reposer sur deux femmes dont il ignorait à peu près tout, sinon qu’elles avaient en elle autant de courage que les plus vaillants des chevaliers. Mais cela suffirait-il ? Sauraient-elles trouver les mots pour convaincre l’officier venu à leur rencontre de les laisser pénétrer dans Minas Tirith ?


Il vit Namarien s’approcher, juchée sur sa monture.

Pendant un instant, il se demanda si elle venait pour lui parler, pour lui adresser quelques mots après leur drôle de rencontre quelques heures plus tôt, quand il l’avait surprise à danser au milieu des hommes du régiment de Pelargir. Elle lui avait jeté un regard tellement…

Froid ?

Il n’avait pas pu s’empêcher de se sentir mis à l’écart, pour ne pas dire rejeté. Ce n’était pas exactement le genre de sentiments qu’il aurait voulu emporter avec lui à la veille d’un épisode aussi crucial que celui qu’ils allaient vivre, mais il fallait croire que les Elfes et les Hommes étaient trop différents pour se comprendre. Il réalisait douloureusement à quel point l’immortalité la coupait de ce qui faisait battre son cœur à lui. La peur de mourir, la peur de voir ses compagnons mourir et disparaître dans l’inconnu… là où il ne pourrait peut-être jamais les rejoindre. Namarien, quant à elle, sembler flotter au-dessus de tout ça, sans doute rassérénée par la certitude de rejoindre les plaines de Valinor quand viendrait l’heure pour elle de quitter la Terre du Milieu. Quel besoin y avait-il de paroles d’adieu ou de réconfort quand l’idée même de « fin » n’avait pas de sens à ses yeux ?

La froideur de leur dernier échange silencieux lui pesait, et il s’en voulait maintenant de ne pas lui avoir dit ce qu’il avait eu envie de lui exprimer à ce moment-là… Lui dire qu’il avait adoré la voir danser ainsi, et que même si c’était la solitude qu’elle recherchait, il n’y avait rien de plus beau que d’avoir des compagnons fidèles, des amis, des alliés, et gens sur qui compter, a fortiori avant de plonger dans la bataille. Il aurait voulu lui dire que tous ces hommes du régiment de Pelargir auraient volontiers donné leur vie pour défendre leur royaume, et qu’avant l’heure fatidique, leur compagnie était parmi les plus nobles qui fût. Et peut-être aurait-il voulu lui dire aussi qu’il était heureux, à quelques heures d’une mort quasi-certaine, d’avoir pu la voir enfin telle qu’elle était vraiment…

Mais cela, elle ne le saurait probablement jamais.

Il détourna le regard, de honte ou de crainte, et s’efforça de ne pas croiser son regard alors qu’elle se penchait vers Karl pour essayer de le rassurer quelque peu. Le jeune chevalier, démuni sans ses armes et son savoir-faire martial, redevenait l’enfant qu’il n’avait jamais cessé d’être. Son regard naïf, qui constituait l’une de leurs meilleures armes pour tromper les gardes, révélait la profondeur de son désarroi, alors qu’il s’apprêtait à partir sauver le Gondor sans arme et sans armure.

S’ils survivaient à cela, on écrirait sans doute des ballades à leur sujet.

La complainte de Karl, le chevalier sans armure.

Namarien se retourna bientôt pour faire face à l’officier, dont la voix porta finalement jusqu’aux oreilles de Felian. Celui-ci se figea instantanément sur place en l’entendant, et son cœur manqua un battement quand il l’entendit se présenter. « Capitaine Erelas ». Il étouffa un juron qui sinon aurait probablement condamné leur petite expédition, et se tourna vers Thédeor, qui adressa le même regard à son chef. Erelas ? Le capitaine de la Grande Porte en personne ?

Il se tendit, écoutant la réponse de l’officier :

- Dame Namarien Lasgalen de Vertbois, vous avez fait un long voyage jusqu’au Gondor, et je vous remercie d’accorder vos bons soins à ceux de mon peuple qui sont dans le besoin. Si plus d’âmes charitables comme la vôtre et celle de Dame Osenhorn foulaient la Terre du Milieu, les militaires comme moi auraient la vie beaucoup plus douce.

Erelas était attentionné, pour ne pas dire charmant, mais il ne fallait pas oublier qu’il était à même de décider ou non si les portes de la cité s’ouvriraient sur leur passage. Sa décision en la matière était presque incontournable, à moins d’en appeler directement au général Cartogan – ce qui était naturellement hors de question – ou bien de faire un recours devant le Haut-Roy Mephisto lui-même. Or, le souverain de ces terres s’était notoirement retiré de la vie publique depuis quelques temps, et il n’aurait certainement pas quitté sa retraite pour une affaire aussi triviale. Il fut un temps, cependant, où les souffrances de son peuple ne lui étaient pas totalement indifférentes, mais la perte d’un enfant pouvait changer l’homme le plus honorable.

Le capitaine, quant à lui, semblait partagé. Il appartenait à cette catégorie d’hommes droits et justes pour qui la vie d’un individu, qu’il fût prince ou roturier, méritait qu’on tentât de la sauver. S’il avait été seul à décider, les portes de Minas Tirith auraient été ouvertes à tous les fils du Gondor qui demandaient asile derrière les remparts de la forteresse… Cependant, il avait reçu des directives très précises de la part du général Cartogan, et à plusieurs reprises il avait dû éconduire des infirmes, des blessés et des indigents qui venaient avec des requêtes similaires. Aucun, cependant, ne s’était présenté accompagné d’une guérisseuse elfe qui offrait ses services aux Maisons de Guérison. Cela méritait d’être pris en considération.

Il s’approcha du chariot, pour jeter un œil sur la blessure de Thédeor, simplement pour la forme, mais la première chose qu’il vit fut le regard de l’autre blessé. Un regard qui ne ressemblait aucunement à celui d’un paysan ou d’un ouvrier d’Osgiliath… Felian était sans doute un grand chevalier, un guerrier d’exception, mais c’était un bien piètre acteur, et un très mauvais menteur. En voyant apparaître le visage du capitaine Erelas, il n’eut pas le réflexe de baisser la tête ou de faire même semblant de dormir… Au lieu de quoi, il le fixa dans les yeux, le défiant involontairement du regard, et attirant immédiatement l’attention sur lui.

Le silence se fit.

Un silence glaçant.

Blanche ne tarda pas à comprendre de quoi il retournait… De toute évidence, Erelas et Felian se connaissaient, ou du moins s’étaient déjà vus par le passé. Peut-être à l’occasion d’un contrôle de routine, peut-être au cours d’un des dîners mondains auxquels les Chevaliers du Cor Brisé assistaient parfois… Quoi qu’il en fût, ils n’étaient pas des inconnus l’un pour l’autre.

- Capitaine Erelas, je…

Il leva la main, coupant la jeune aristocrate dans son élan, sans quitter Felian du regard. A cet instant précis, le chevalier regretta de ne pas avoir pris son épée avec lui. Il ignorait ce qu’il aurait bien pu en faire, car il ne se voyait pas tuer Erelas sur-le-champ, et ensuite forcer le passage jusqu’au Septième Niveau de Minas Tirith à la seule force de son bras, mais au moins il aurait été rassuré de pouvoir tenir de quoi se défendre si on venait l’arrêter.

- Capitaine… insista Blanche.

- Vous voulez entrer dans la Cité Blanche, c’est bien ça ? Accompagnées de votre assistant et de ces deux blessés ?

Les deux femmes échangèrent un regard, sans trop comprendre. Erelas lui-même ne savait pas exactement ce qui se jouait ici. Il savait parfaitement les risques qu’il prenait… qu’il prenait encore… Mais l’intime conviction l’emportait sur toute forme de prudence, et il souffla :

- Je crois que votre requête est fondée… Minas Tirith ne saurait tourner le dos à deux guérisseuses, et j’ai le sentiment que ces blessés ne seront pas une charge trop importante pour les Maisons de Guérison.

Sans rien ajouter, il fit volte-face, et cria à l’attention de ses hommes derrière les créneaux :

- Ouvrez la porte !




__________


A suivre par ici !


__________

#Erelas
Sujet: Irremplaçables
Ryad Assad

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Rechercher dans: Osgiliath   Tag blanche sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: Irremplaçables    Tag blanche sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySam 6 Fév 2021 - 12:57

La nuit qu’ils passèrent ne fut pas des plus reposantes. Felian connaissait la guerre depuis longtemps, il avait affronté des dangers qui auraient fait vaciller le plus vaillant des combattants, et pourtant il appréhendait toujours le début des hostilités. Peut-être encore davantage depuis le sinistre épisode de Pelargir, qui l’avait marqué à vie… Sans doute car, justement, il s’en était sorti alors que tant d’autres étaient restés étendus dans les rues de la cité portuaire, le visage figé dans une expression de surprise incrédule, alors qu’une lame en acier venait mettre un terme à leur existence.

Il se retourna sur sa couchette.

Les images de cette soirée défilaient dans son esprit, comme s’il essayait de faire l’inventaire de ses souvenirs heureux avant la fin. Le visage apaisé de Blanche, qui écoutait tranquillement Dame Namarien alors qu’elle donnait une brève leçon à Karl. L’air concentré de ce dernier, qui s’efforçait de retenir le nom des simples ainsi que leur usage… Il avait apprécié ce moment de convivialité, leur dernier repas partagé ensemble, dans une quiétude toute relative, malgré l’ombre effrayante de la Cité Blanche qui, une fois le jour tombé, avait surtout l’air sinistre et inexpugnable. En jetant un regard vers le dernier niveau, il se demandait comment ils parviendraient à rejoindre Eradan, et à déloger le général Cartogan…

Entre eux et lui, se dressaient des centaines de soldats de l’armée régulière, qui leur opposeraient une farouche résistance à chaque étage de la cité. Par la ruse ou la force, leurs chances d’accéder à leur cible étaient bien minces, et impliqueraient de créer une diversion à la hauteur de la tâche titanesque qu’ils entendaient entreprendre. Et même si tout se passait comme prévu, même s’ils parvenaient à rallier le dernier niveau, ils devraient encore faire face aux Gardes de la Citadelle… les meilleurs combattants du Gondor, dévoués corps et âme à la protection des hauts dignitaires de Minas Tirith… Felian était un bon chevalier, un épéiste talentueux, mais il savait ne pas pouvoir rivaliser bien longtemps avec ces hommes aux compétences prodigieuses. Il avait déjà eu l’occasion de s’entraîner avec un vétéran de la Garde, et avait eu l’impression d’être un enfant dans l’arène, face à un adulte accompli.

Un soupir s’échappa de ses lèvres, alors qu’il continuait à chercher une position confortable.

Le visage de Namarien lui revint en mémoire, alors qu’il la croisait avant de regagner sa tente. Il se souvenait parfaitement de ses traits, figés dans une expression à la fois grave et relâchée, comme si elle avait parfaitement conscience de ce qui se jouerait dès le lendemain, mais qu’elle préférait ne pas y prêter attention, et se laisser happer par la beauté du moment.

Les Elfes et leur mélancolie…

Il aurait bien voulu, lui aussi, pouvoir observer la nuit mouchetée d’étoiles scintillantes, et y trouver le réconfort qu’il cherchait désespérément à cette heure tardive. Même s’il avait ouvert les yeux, il n’aurait vu qu’une toile de tente, banale, sans charme et sans forme, exactement l’image qu’il se faisait de sa propre existence et de la mort qu’il rencontrerait peut-être demain, en essayant de changer quelque chose au cours des choses… Les étoiles avaient disparu de son horizon. Faute de pouvoir les contempler, il se concentra sur le visage de l’Elfe, et essaya de puiser dans le souvenir qu’il avait d’elle un peu de sérénité… un peu de force…

Juste assez pour passer la nuit.


~ ~ ~ ~


Privé de son armure, Felian se sentait comme nu. Le vent qui glissait sur ses bras, et s’engouffrait dans sa tunique de chanvre, lui donnait l’impression d’être retourné en enfance, avant que le poids des responsabilités ne vînt s’abattre sur ses épaules. Il ne s’était jamais rendu compte à quel point cette cotte de mailles le rassurait, auparavant… Et c’était bien peu de choses à côté de son épée, qui lui manquait comme s’il avait perdu un membre. Il ne cessait, par réflexe, de la chercher à son côté.

- Si vous voulez être crédible, maître Felian, lui glissa Blanche, efforcez-vous de ne pas chercher votre arme quand nous arriverons devant les gardes. Une telle attitude leur mettrait à n’en pas douter la puce à l’oreille.

Il hocha la tête, et se morigéna intérieurement, en essayant de faire attention. Thédeor lui adressa une petite tape amicale sur l’épaule, comme pour lui dire que ce n’était rien, et ils échangèrent un regard en biais. Felian ne put s’empêcher de voir qu’il avait changé depuis la veille. Dans son regard, le désespoir avait cédé la place à une résolution nouvelle, sans doute liée à Namarien, qui paraissait avoir le don de trouver les mots justes pour mobiliser les hommes et leur inspirer des actes de bravoure. Le chevalier se permit un petit sourire, qui se transforma bien vite en une grimace de douleur.

Ils étaient allongés tête-bêche, dans un chariot exigu qui les chahutait violemment, malgré le rembourrage de linges qu’on avait installé pour essayer de rendre leur voyage un peu plus confortable. Felian y avait pris place à peu près en forme, mais il ne doutait pas qu’en débarquant il serait à peine capable de marcher, son dos ayant été pilonné par le bois qui semblait décidé à lui briser les reins.

- Nous sommes bientôt arrivés, fit Blanche, comme si elle lisait dans ses pensées.


L’aristocrate, qui chevauchait en tête en compagnie de Namarien, s’efforçait de rester calme, mais à mesure que leur petite troupe approchait des murs de la Cité Blanche, elle sentait son excitation monter. Elle se tourna vers l’Elfe, et lâcha sur un ton mi-amusé mi sérieux :

- Si vous connaissez une prière elfique qui nous aiderait à franchir les grandes portes de mithril, c’est le moment.

L’ombre des tours de garde se pencha bientôt sur les deux femmes, et quelques visages au sommet des remparts se tournèrent dans leur direction, de toute évidence interloqués. Une voix glaciale descendit des murailles :

- Halte là ! Les Grandes Portes de Minas Tirith sont closes, par ordre du Général Cartogan. Retournez d’où vous venez.

Non sans jeter un dernier regard à Namarien, Blanche répondit :

- Je suis Blanche Osenhorn d’Imloth, mon mari est capitaine dans l’armée du Haut-Roy, en poste à Osgiliath. Je suis accompagnée par une guérisseuse elfe, et son apprenti… Nous venons répondre à l’appel de Dame Dalia de Ronce, et offrir nos services aux Maisons de Guérison. Nous amenons également deux blessés, qui ont besoin de soins urgemment…

Il y eut un long silence, puis la voix leur répondit finalement :

- Attendez ici…

Blanche s’efforça de contenir son anxiété :

- Nous y sommes… C’est le moment de vérité. Si nous faisons le moindre faux-pas, nous n’aurons pas d’autre chance. Nous devons simplement jouer notre jeu sans crainte, et ne rien faire de suspect.

Elle se tourna vers Karl, qui conduisait l’attelage contenant Felian et Thédeor, et se rendit compte qu’il marmonnait tout seul, en essayant de se remémorer les noms des plantes qu’il avait pu apprendre la veille auprès de Namarien. De toute évidence, il était très angoissé, ce qui ne manquerait pas d’attirer l’attention des gardes. Blanche chargea l’Elfe de le rassurer quelque peu, tandis qu’elle se rendait disponible pour le cavalier solitaire qui venait à leur rencontre afin de les inspecter. Elle fit aller sa monture sans sa direction, et inclina légèrement la tête.

- Dame Osenhorn, enchanté, je suis le capitaine Erelas, de la Grande Porte. On m’a fait savoir que vous veniez pour assister aux Maisons de Guérison… C’est fort généreux de votre part. Cependant, dans la période actuelle, nous avons ordre de ne laisser entrer personne sauf nécessité absolue.

- Capitaine, je vous assure qu’il s’agit d’une nécessité absolue. Deux hommes vaillants qui ont besoin qu’on s’occupe d’eux dans les plus brefs délais, et nous n’avons pas le nécessaire pour les soigner à Osgiliath. En échange de ce service, nous proposons de mettre nos compétences à profit à Minas Tirith, où il se dit que les besoins sont grands.

Il fronça les sourcils légèrement, mais ne répondit pas directement à sa question voilée :

- Votre réputation vous précède, ma Dame. On raconte que vous avez obstinément refusé de quitter Osgiliath, et que vous avez aidé de votre mieux la cité à préparer ses défenses, veillant sur les hommes du rang comme les officiers avec la même bienveillance. Votre contribution serait plus que bienvenue à Minas Tirith… Mais votre amie… une elfe vous dites ? Permettez-vous que je l’interroge ?

Blanche ne pouvait décemment répondre par la négative, et le capitaine Erelas s’approcha de Namarien, la saluant d’un geste élégant de la tête :

- Ma Dame, je suis le capitaine Erelas, ravi de vous rencontrer. Dame Osenhorn me fait savoir que vous souhaitez également entrer à Minas Tirith pour vous rendre utile aux Maisons de Guérison… Pardonnez mon manque de tact, mais je serais curieux de savoir ce qui pousse une Elfe à se préoccuper soudainement du sort des simples mortels que nous sommes… Les vôtres se font très rares de nos jours. On dit que le sort des Hommes les indiffère, et qu’ils se soucient essentiellement de leurs affaires, abandonnant les anciennes alliances. Vous comprenez sans doute que votre présence m’interpelle.

Il croisa les mains sur le pommeau de sa selle, et attendit patiemment la réponse.
Sujet: Irremplaçables
Ryad Assad

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Rechercher dans: Osgiliath   Tag blanche sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: Irremplaçables    Tag blanche sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptyJeu 12 Nov 2020 - 16:32

Namarien avait pris soin de se présenter comme étant une guérisseuse, un élément qui pourrait se révéler particulièrement utile pour la suite s’ils souhaitaient convaincre le commandant Mevan de les assister. Felian appréciait grandement l’inventivité de l’Elda, sa capacité à s’adapter aux situations de manière fluide, sans mettre en péril la mission d’importance qu’il devait accomplir. Il lui jeta un bref regard, comme pour lui faire comprendre que c’était là une excellente initiative. Il fallait dire que la renommée des guérisseurs elfiques n’était plus à faire, et qu’elle pouvait sans le moindre doute tromper des gardes qui n’y connaissaient rien, et qui seraient étonnés par ses qualités médicales. Tromper la redoutable Dalia de Ronce, qui dirigeait les Maisons de Guérison, serait une autre histoire, mais n’y étaient pas encore. S’ils avaient la chance d’en arriver là, parfaire leur couverture serait le dernier de leurs soucis.

Cependant, malgré l’habileté du chevalier et de l’Elfe, malgré leur détermination sans faille, malgré l’appui du capitaine Osenhorn, ils durent se rendre à l’évidence : entrer à Minas Tirith ne serait pas une mince affaire…

La sécurité dans la capitale du Gondor était une affaire de la plus haute importance, bien avant les tristes événements de la prise de Cair Andros, et les récents développements avaient poussé les autorités à accroître encore leur vigilance et leur surveillance. Il était difficile de savoir s’il s’agissait là d’une réaction à la menace orientale qui était arrivée d’Outre-Anduin, ou s’ils entrevoyaient déjà les ramifications d’un traître positionné au sommet de la hiérarchie militaire du Gondor, prêt à utiliser toutes les ressources à sa disposition pour se maintenir au pouvoir.

Dans un cas comme dans l’autre, ils devaient garder à l’esprit que Minas Tirith n’était plus telle qu’ils avaient pu la connaître. Ce lieu de paix et de détente, où se côtoyaient artistes, intellectuels, nobles et gens du commun, militaires et civils, avait retrouvé sa fonction première de forteresse, dernier bastion d’un royaume menacé sur ses frontières. La peur habitait les murs, se répandait dans les ruelles, se cachait sous chaque pavé, apparaissait furtivement dans le regard des sages comme des plus jeunes. Il y avait encore du bon dans le cœur des Hommes, à condition de faire abstraction de leurs sentiments les moins honorables, mais les plus compréhensibles.

Felian savait ce qui l’attendait.

Il l’avait déjà vu à Pelargir. Il avait conscience qu’avant la fin de cette affaire, l’épée risquait d’être tirée, et le sang risquait de couler. On ne tranchait pas la tête du serpent sans prendre le risque de s’exposer à ses crochets. Ce fut avec cette idée bien sombre en tête que Felian quitta la tente du commandant, lui adressant une nouvelle fois ses remerciements chaleureux pour son aide. La politesse de cet homme était même à l’épreuve de sa déception la plus terrible.


Le commandant Mevan avait néanmoins choisi de retenir Namarien pour l’interroger plus avant, à propos de sujets qui semblaient s’éloigner des préoccupations de la petite compagnie de chevaliers, mais qui en réalité y étaient liés étroitement. La réponse négative de l’Elfe parut peser sur les épaules de l’officier, qui s’affaissèrent légèrement, tandis que son regard se troublait, voilé par le doute et l’inquiétude.

- Ce n’est rien, fit-il sombrement, avant de revenir sur ses paroles. Enfin, si… Mais…

Il n’hésita pas longtemps. Namarien était une Elfe elle aussi, et il trouvait curieusement réconfortant de se confier à une immortelle, en particulier à propos de ce sujet qui lui tenait beaucoup à cœur.

- Vous êtes la deuxième représentante des Premiers Nés que je rencontre, Dame Namarien. La deuxième en très peu de temps, à vrai dire… exactement là où vous vous trouvez vous-même. Dame Lithildren…

Une pause. Comment le formuler ?

- … est une personne qui m’est chère. J’ai eu l’occasion de la rencontrer il y a peu, et elle aussi souhaitait entrer à Minas Tirith. Je n’ose pas supposer des motifs qui ont pu l’amener à vouloir pénétrer dans la plus grande cité des Hommes, mais je soupçonne que vous poursuivez une quête parallèle, sinon similaire. Elle avait dans le regard la même flamme qui brûle dans le vôtre.

Il s’appuya sur le bureau qui était le sien, rompant involontairement avec l’image très disciplinée et rigoureuse qu’il s’était efforcé d’afficher devant le capitaine Osenhorn et Felian. Il présentait un visage de lui beaucoup plus humain, plus jeune, et résolument moins « noble » que celui des aristocrates qui s’exerçaient dès leur plus jeune âge à maintenir l’illusion du contrôle en permanence.

- Elle est entrée à Minas Tirith, et malgré toutes mes sollicitations – discrètes, cela va de soi – je n’ai pas eu la moindre information à son sujet. J’ignore si elle va bien, j’ignore si elle est encore en vie, et si elle a réussi à retrouver l’homme qu’elle cherchait. Un certain Nallus, membre de la Société des Chercheurs, de l’Université de Minas Tirith…

Tous ces indices qu’il lui confiait pourraient peut-être l’aider à trouver des réponses plus tard, et à localiser Lithildren.

- Je suis préoccupé à son sujet… Si vous parvenez à trouver un moyen d’entrer à Minas Tirith, si vous parvenez à la trouver… faites en sorte qu’elle s’en sorte… Dites-lui que je ne lui en veux pas, et que je comprends…

Ces paroles étaient sibyllines, mais de toute évidence elles devaient avoir du sens pour l’intéressée. Le commandant remercia Namarien en lui serrant les deux mains, dans un geste assez familier, avant de l’enjoindre à retrouver ses compagnons pour monter le camp et passer la nuit.


~ ~ ~ ~


L’Elfe finit par localiser ses compagnons, après avoir erré quelque peu dans le camp des troupes de Pelargir. Il fallait dire que des hommes en armes, ce n’était pas ce qui manquait ici. Ils étaient des centaines, tous uniques, et pourtant si uniformes. Des hommes à peu près du même âge, souvent haut de taille, le bras fort, les cheveux longs et bruns, comme ceux de Felian. Rares, cependant, étaient ceux qui dégageaient la même noblesse, la même force, et la même gentillesse. Pour beaucoup, leurs regards dévoilaient une profonde lassitude, une sorte d’incompréhension permanente, et un désir bien naturel que quelque chose advînt. N’importe quoi, pourvu que cela leur permît de rompre la monotonie d’un quotidien par trop rébarbatif.

Elle trouva ses chevaliers légèrement à l’écart du gros de la troupe, rassemblés autour d’un feu de bois crépitant autour duquel ils tendaient leurs mains pour profiter de la chaleur réconfortante des flammes. Il faisait encore assez doux à cette heure, la chaleur diurne peinant à se dissiper, mais quand viendraient la nuit et le vent, le froid risquait de s’installer rapidement. Ils Karl et Hallbrecht étaient affairés à monter une seconde tente, plus petite que la première, et le premier ne put s’empêcher de sourire fièrement à Namarien en la voyant arriver :

- Nous vous avons installée confortablement, noble dame. Votre tente ne partira pas avec le vent, je vous le garantis.

Hallbrecht eut un sourire amusé, et ajouta :

- Heureusement que j’étais là pour vérifier tes nœuds.

Ils se taquinèrent ainsi sans malice, davantage pour dissiper la tension qui régnait dans leur groupe à la suite de l’annonce de la terrible nouvelle selon laquelle l’entrée dans la forteresse leur était interdite. C’était un moyen comme un autre de parler d’un sujet plus léger, de rire un peu à la veille de ce qui pouvait peut-être devenir leur dernier jour. Cependant, leurs rires forcés ne cachaient pas aussi bien qu’ils l’auraient voulu leurs mines attristées et peinées.

Felian était pour le moment introuvable sur le camp, et on signala à Namarien qu’il était parti avec le capitaine Osenhorn pour régler une affaire urgente dont ils n’avaient rien dit. Personne ne savait exactement quand ils allaient revenir, ce qui laissait un peu de temps à l’Elfe pour veiller sur Thédeor. Le vétéran serrait les dents, mais la souffrance qu’il ressentait était bien réelle, à mesure que les effets des produits administrés à l’Elfe se dissipaient. Fort heureusement, l’aide-de-camp du commandant Mevan avait pris soin de leur faire amener de quoi s’occuper du blessé : bandages, plantes et simples en tout genre, décoctions destinées à calmer la douleur, de même que de l’eau claire pour nettoyer le tout.

- Je vous donne beaucoup de souci, Dame Namarien, fit Thédeor en essayant de faire abstraction de ce que l’Elfe faisait à sa jambe. J’aurais voulu que vous puissiez me voir debout… vous auriez eu une bien meilleure image de moi.

Ses ongles étaient enfoncés dans ses paumes à s’en faire saigner, mais il s’efforçait de présenter un visage aussi neutre que possible, même s’il était pâle comme un linge. Sa voix, entrecoupée de hoquets de douleur mal contenue, se voulait aussi claire que possible :

- Vous savez… Je comprendrais que Felian me laisse en arrière…

Faisait-il référence à la conversation entre Namarien et Felian à Osgiliath, quand elle l’avait sévèrement rabroué à propos de son plan ? Ou était-il seulement en train de dire ce qui lui passait par la tête pour combattre la douleur ?

- Je ne pourrais pas lui en vouloir, vous savez… Nous sommes des Chevaliers du Cor Brisé… Nous avons… aïe ! Nous avons voué nos vies à défendre celles des autres et… et… Blessé, je ne suis qu’un fardeau… Je le sais… Tout le monde le pense…

Il respirait de plus en plus vite, regardant l’Elfe droit dans les yeux pour ne pas voir l’état déplorable de sa jambe.

- Peu importe qu’il m’abandonne ici… ou à Osgiliath… Je m’en sortirai… Vous savez, j’en ai vu d’autres, hein ? Il eut un rire sec : Et Felian aussi. Il sait ce que c’est que d’emmener des hommes dans une mission périlleuse, et de les voir mourir les uns après les autres, sans rien pouvoir faire… Beaucoup des nôtres sont tombés à Pelargir… Felian s’en est sorti, de peu. Je crois qu’il préférerait me laisser derrière avec une chance de survivre, plutôt qu… que… Plutôt que de conduire un homme blessé à une mort certaine…

Il rejeta la tête en arrière, essayant de contenir les ondes de souffrance qui irradiaient dans sa jambe alors que Namarien arrivait au terme de l’opération. Rien de ce qu’elle lui donnait contre la douleur ne semblait avoir d’effet, mais il se refusait à se laisser endormir : c’était comme si, dans un accès de lucidité, il voulait lui confier des paroles d’une extrême importance. Il lui saisit le poignet par réflexe, le serrant de toutes ses forces, sans s’en rendre compte :

- C’est un homme bien… Et je suis sûr qu’il n’est pas responsable, pour Pelargir… Même si lui croit le contraire… Et vous aussi vous êtes quelqu’un de bien… Vous aussi…

Il y eut soudain un profond relâchement dans le corps de Thédeor, qui s’affaissa en arrière. La douleur avait eu raison de lui, et sa conscience s’était repliée au plus profond de son esprit pour y échapper un temps. Il retomba mollement sur le sol, mais sa respiration d’abord saccadée devint progressivement plus profonde et plus régulière. Il était épuisé, à en juger par la sueur qui coulait sur son front… comme s’il avait couru toute la distance entre Osgiliath et Minas Tirith. Et dans un ultime effort, il avait tenu à lui dire qu’elle était une bonne personne.

Namarien eut le temps de terminer de s’occuper de son patient dans le calme, car chaque membre de la compagnie souhaitait se reposer après une journée aussi éreintante. Ils avaient pris la route très tôt, et il leur semblait avoir commencé leur voyage depuis une semaine, tant leur traversée de l’Anorien avait été mouvementée. Une tentative d’assassinat qui avait pris l’un d’entre eux, une course poursuite dans les rues d’Osgiliath, puis une longue traversée jusqu’au Rammas Echor, et désormais la nouvelle que leur entrée dans la Cité Blanche était compromise… C’était beaucoup, émotionnellement, et tous piquaient du nez, soucieux de récupérer après tout ça. L’Elfe avait tout le loisir de vaquer à ses différentes occupations sur le camp, profitant des rations généreusement distribuées par la garnison de Pelargir, et du confort de la tente qui avait été montée pour elle, dans laquelle elle pouvait s’isoler si elle le souhaitait. Il restait encore le feu, fascinant et apaisant, autour duquel les hommes se rassemblaient pour bavarder quelque peu.

Il fallut encore un moment avant qu’ils vissent enfin revenir Felian et Nuril. Le premier allait également à cheval, probablement un qu’il avait emprunté, car il était harnaché comme ceux des soldats, et ressemblait à s’y méprendre à un destrier taillé pour la guerre. La nuit était tombée, mais ils pouvaient les voir serpenter entre les feux allumés sur la plaine. Felian, noble et fier comme un véritable Chevalier du Cor Brisé, avait de l’allure sur ce beau cheval qui le supportait. Ces deux hommes, la fine fleur du Gondor, portaient avec eux l’espoir. Ce fut Namarien la première qui devina, dans la pénombre qui ne semblait pas la gêner autant que ses compagnons, que le capitaine du Gondor n’était pas seul sur sa monture. Quelqu’un se tenait en croupe, une femme dont la beauté le disputait à la grâce.

Elle mit pied à terre avec élégance, lissant les plis de sa robe, avant de prendre place aux côtés de Nuril. Ce dernier, qui semblait particulièrement rasséréné en sa présence, la présenta aux hommes de Felian et à Namarien :

- Chevaliers, noble dame, laissez-moi vous présenter mon épouse, Blanche Humblétoile… Je vous avais promis une personne de confiance, la voici.

Elle s’inclina légèrement, et les chevaliers lui rendirent un salut plein de déférence.

- Je suis honorée de vous rencontrer, fit-elle d’une voix douce, tous et chacun d’entre vous. J’aurais aimé faire votre connaissance dans d’autres circonstances, mais enfants du Gondor nous sommes, et nous répondons tous à l’appel du devoir quand il nous convoque.

Les chevaliers hochèrent la tête avec vigueur, inspirés par ces paroles pleines de courage et de force. Blanche n’avait pas pour elle le bras capable de manier une épée, mais son âme semblait forgée dans le même acier que celui des héros. Nuril l’observait avec une admiration sans limite, soudainement très effacé derrière cette femme qui pourtant paraissait discrète. Elle s’approcha de Namarien, et s’inclina devant elle plus bas qu’elle ne s’était inclinée devant les autres.

- Enchantée, Dame Namarien. J’ai eu le loisir d’entendre le récit de vos exploits, dans la bouche de Maître Felian qui vous tient en très haute estime.

Elle eut un petit sourire énigmatique, et Felian parut tout à coup très mal à l’aise.

- Il a aussi dit que sans vous, ses hommes ne seraient peut-être pas parvenus jusqu’ici. Peut-être trouverez-vous également une idée nous permettant d’entrer à Minas Tirith.

- Je n’en doute pas le moins du monde, ajouta Felian plein de confiance. Dame Namarien a pour elle l’expérience des Eldar, et cela nous confère un grand avantage.

Le soutien du chevalier était précieux dans ces circonstances, mais aussi une grande responsabilité. Felian était un homme de guerre, un soldat, qui pouvait faire face au danger, mais il ne sentait plus à la hauteur de la mission de commandement qui lui avait été confiée. Il ne souhaitait rien d’autre que de pouvoir transmettre le flambeau à Eradan, pour mettre son épée et son destin à son service. La perspective de pouvoir se reposer sur Namarien l’apaisait inconsciemment, mais était-ce la bonne décision ? Une Elfe, parce qu’elle était une immortelle, pouvait-elle résoudre tous les problèmes qu’ils allaient rencontrer ? Ne valait-il mieux pas l’expérience et les connaissances d’un homme du Gondor, qui comprenait les hommes et femmes qui allaient se dresser sur leur chemin ?

Seul l’avenir le leur dirait.

#Blanche
Sujet: Qu'ont-ils apporté de la terre effondrée ?
Ryad Assad

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Rechercher dans: Osgiliath   Tag blanche sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: Qu'ont-ils apporté de la terre effondrée ?    Tag blanche sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptyJeu 15 Fév 2018 - 13:40
Tag blanche sur Bienvenue à Minas Tirith ! Blanch10


Il faisait déjà jour depuis fort longtemps quand Nuril s'éveilla d'un sommeil qui n'avait rien de réparateur. Il commença par s'agiter sur son couchage, agitant les bras comme s'il essayait de chasser un mauvais rêve. Son front était plissé, ses traits soucieux, et bien que ses yeux fussent encore enfermés dans de bien tristes souvenirs qui venaient le hanter en songes, il n'en demeurait pas moins affecté. Blanche, qui avait passé la nuit auprès de son époux, s'était éveillée sans se souvenir de s'être endormie. Elle avait été terrassée par la fatigue nerveuse, et elle s'était assoupie quelques instants alors que les premières lueurs du soleil commençaient à poindre à l'horizon. Quelques heures de sommeil volées, et maintenant que midi était là, elle se retrouvait curieusement désorientée. Les rayons de l'astre solaire l'aveuglaient, et elle mit un moment à retrouver ses esprits, à se souvenir d'où elle était, et de ce qu'elle devait faire…

- Nuril… Souffla-t-elle en voyant son époux qui ouvrait timidement les yeux.

Il était épuisé, et probablement assoiffé, si bien qu'avant même de lui laisser le temps d'ouvrir la bouche, elle lui tendit un gobelet contenant de l'eau, dans lequel elle l'aida à boire. Il se désaltéra comme un malheureux égaré dans les déserts brûlants du Sud, et ce ne fut que lorsque sa tête retomba sur l'oreiller qu'il parut se rendre compte que c'était sa chère et tendre qui se tenait là, penchée sur lui.

- Blanche ? Interrogea-t-il, comme s'il n'en croyait pas ses yeux.

- C'est moi, répondit-elle en cachant son émotion.

Il était en vie. Elle ne pouvait pas s'empêcher d'éprouver une joie sincère, profonde, mais qu'elle savait aussi être égoïste. Elle se sentait coupable de pouvoir prendre la main de son compagnon, de pouvoir entendre le son de sa voix, quand tant de femmes n'auraient plus jamais ce privilège. Il eut un sourire léger qui flotta sur son visage émacié et barbu :

- Nous avons donc réussi… Alessa… ?

- Saine et sauve. Elle se repose probablement à l'heure qu'il est.

Il soupira de soulagement, probablement satisfait d'avoir réussi à mener sa mission à bien. Il essaya de se redresser, mais Blanche l'en empêcha doucement, en lui rappelant son épaule blessée qui demanderait encore du repos avant d'être parfaitement rétablie.

- Je dois voir mes hommes, je dois m'assurer qu'ils vont bien.

- Nuril…

Il se figea. Il connaissait bien son étoile, et il savait déceler dans son ton la gravité de la situation. En cherchant son regard, il la vit détourner les yeux, et il comprit bien rapidement que ses espoirs de ramener ses hommes en vie s'étaient évanouis. Un sentiment d'injustice le saisit, et il serra les poings sans mot dire, les mâchoires serrées. Blanche avait déjà versé trop de larmes, et elle se contenta de rester là, tête basse, incapable de rien ajouter. C'était une tragédie dont le Gondor n'avait pas besoin. Elle prit la main de son époux dans la sienne, et ils restèrent là un moment, silencieux, acceptant progressivement la réalité à mesure que le jour entrait dans la pièce et les enveloppait d'une lumière presque irréelle.

- Pourquoi ont-ils tiré ainsi, mon étoile ? Pourquoi ?

Chercher à comprendre était naturel. Alessa n'avait-elle pas agi de la même manière la veille ? Blanche s'efforça de rassembler ses pensées, et d'offrir un récit cohérent à son époux, en espérant répondre à ses principales interrogations. Elle lui fit part de l'attaque aussi soudaine que brutale des Orientaux sur Cair Andros, de la panique qui s'était répandue au Gondor par la suite. Elle lui raconta comment on avait clos les portes d'Osgiliath, et condamné toute la rive Est de l'Anduin pour empêcher une nouvelle attaque. Elle lui expliqua l'arrivée de milliers d'hommes venus de tout le royaume, rassemblés à Minas Tirith et dans une moindre mesure à Osgiliath pour défendre la cité fluviale. Elle lui raconta la population évacuée, les départs précipités de ceux qui croyaient l'attaque imminente et qui craignaient pour leurs vie. De ses yeux, la jeune femme avait pu constater la fragilité des Hommes, dans leur empressement à protéger leurs biens et leurs maigres richesses, au détriment de la solidarité qui normalement devait les souder. Il y avait eu quelques pillages, des abus, des disputes, des conflits. Elle avait aussi vu le meilleur : de riches marchands acceptant de prendre sous leur aile des orphelins déshérités qui sinon risquaient d'errer dans les rues. Ils les avaient ramenés dans leurs domaines à l'intérieur du pays, pour leur permettre d'échapper à la violence des combats, si Osgiliath venait à être attaquée. Elle lui raconta tout ceci, sa peur, son trouble, mais aussi sa détermination à rester dans la cité et à aider comme elle le pouvait. Nuril savait à quel point elle avait été brave de rester alors que les vents de la guerre faisaient trembler même les guerriers les plus hardis. Il s'en voulait de ne pas avoir été là tout ce temps…

- Tu aurais dû rejoindre ta famille, Blanche. Ils doivent se faire du souci.

Elle ne nia pas l'évidence, mais répondit simplement :

- Nous restons en contact, ils m'ont dit qu'ils respectaient ma décision, mais qu'ils espéraient ton retour rapide. D'après mon père, tu es le seul à pouvoir me convaincre de quitter Osgiliath.

- Me voilà désormais. Tu vas pouvoir te mettre à l'abri à Minas Tirith.

Elle fit « non » de la tête :

- Je suis plus utile ici. Et je ne crois pas que la Cité Blanche soit beaucoup plus sûre. De toute façon, il existe un plan pour nous faire évacuer la ville par l'Anduin, en ralliant Pelargir avec les quelques derniers navires qui n'ont pas quitté la ville. Le gouverneur de la cité a insisté pour que les civils qui se sont portés volontaires pour prêter main-forte à la défense de la ville aient une place garantie à bord. Mais je ne comptais pas embarquer sans toi…

- Parce que tu es folle, répondit Nuril avec un sourire.

Il leva les yeux au ciel en essayant de digérer toutes ces nouvelles. La guerre au Gondor, la panique, la mort qui avait frappé. En tant que militaire, il imaginait très bien la réaction des autorités : verrouiller le pays, renforcer les places fortes, et attendre l'assaut inévitable. Il n'y avait guère d'autre option, les Gondoriens n'étant pas particulièrement adeptes des combats en plaine. Certes, la cavalerie était une arme puissante qui pouvait renverser des batailles, mais dans les circonstances, il était plus facile de compter sur les imposants remparts de pierre des villes fortifiées. Les sept niveaux de Minas Tirith ne tomberaient pas facilement. C'était le plan le plus sensé. Tandis qu'il s'absorbait dans ses réflexions, Blanche l'interrogea timidement :

- Nuril, je sais que ta mission doit rester secrète… mais tu reviens de l'Orient lointain, et tu as probablement vu de quelle force disposent nos ennemis. Crois-tu que nous ayons une chance contre eux ? Crois-tu que le Gondor survivra à cette nouvelle guerre ?

Le guerrier tendit la main, et caressa la joue de son épouse. Il savait combien il était difficile d'être tenu dans l'ignorance, et il jugea que s'il ne pouvait rien dire des détails de sa mission, il n'était pas pour autant tenu au secret concernant ce qu'il avait pu voir durant son voyage. Blanche avait toujours apprécié les récits, et il soupçonnait qu'à son inquiétude sincère se rajoutait une curiosité dévorante vis-à-vis de ces mondes lointains et hostiles. Il commença :

- Les hommes que nous avons affronté dans les forêts d'Ithilien ne ressemblent pas aux Orientaux que nous avons vu en Rhûn, mon amour. Ceux de l'Est lointain affectionnent l'or et les parures, et ils semblent être des adversaires féroces et disciplinés. Ceux que nous avons vu dans les forêts semblaient davantage… désespérés. Il y a à l'Est une grande force qui sommeille, et il est certain que toute la puissance de ce royaume pourrait menacer notre vie ici. Toutefois, la Reine Lyra ne semblait pas belliqueuse : elle nous a accordé une audience, et nous a très bien reçu. Je reste persuadé qu'elle n'est pas notre alliée, mais les hommes qui ont déferlé sur Cair Andros se comptent, dit-on, en dizaines de milliers. Si la Reine du Rhûn voulait vraiment envoyer une telle force à notre rencontre, je crois qu'elle aurait envoyé ses meilleurs officiers pour la commander, et qu'elle aurait peut-être pris part au voyage. Elle aurait également su qu'il n'était pas utile de concentrer toutes ses forces sur Cair Andros, et elle aurait habilement saisi Osgiliath également, pour isoler Minas Tirith.

Il marqua une pause dans son récit. Son expertise militaire et sa désormais bonne connaissance du Rhûn le poussaient à réfléchir, et il trouvait que les choses ne collaient plus si bien que ça. Des Orientaux qui n'en étaient pas vraiment, des guerriers à la fois déterminés mais également désespérés qui n'avaient rien à voir avec les soldats disciplinés et très bien entraînés qui avaient encadré le moindre de leurs déplacements à l'intérieur de Blankânimad… Non, il y avait des choses qui ne collaient pas. Blanche profita de ce qu'il méditait sur le problème pour le relancer :

- Tu penses donc que cette attaque n'est pas l'œuvre du Rhûn ?

- J'en suis persuadé. Et je suis aussi persuadé que l'État-major est arrivé à la même conclusion depuis longtemps. Ce que je ne comprends pas, c'est pourquoi ils préfèrent maintenir le peuple dans l'ignorance de ces choses, en lui faisant croire qu'il s'agit d'Orientaux… Que cela reste entre nous, Blanche, mais notre voyage vers l'Est cherchait à établir des liens plus solides avec le Rhûn pour contrer une menace commune.

La jeune femme s'agita :

- Et tu penses que ces hommes surgis de nul-ne-sait-où seraient cette « menace commune » ? Tu penses que c'est contre eux que nous devons lutter ?

- Je l'ignore, mon étoile… Il y a encore beaucoup de choses que je ne comprends pas. Toutefois, quelque chose d'étrange se trame, et le silence du Gondor à ce sujet ne peut que m'inquiéter.

#Nuril #Alessa #Blanche
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