Fort heureusement, la ville d'Esgaroth ne comptait aucune armée digne de ce nom, les troupes régulières étant d'anciens civil recrutés par le Comte et formés plus ou moins profondément dans l'art du combat. S'ils portaient de solides armures, ils ne s'en montraient guère dignes pour la plupart, quoi que certains fussent coriaces et valeureux. Comme on dit, l'habit ne fait pas le moine...
Pour cette raison, et malgré leur infériorité numérique initiale, les chevaliers de la Flèche Noire et leurs alliés prirent peu à peu l'avantage sur leurs ennemis. Les sept acolytes se battaient comme des lions, tailladant et tuant, chacun dans leur style caractéristique: les gestes virevoltants et athlétiques de Kivan, les coups lourds d'Yrudïn et l'agilité de Galarïn, les coups mesurés et efficaces de Seodoc, la haute prestance de Baradur. Peu à peu les rangs adverses s'éclaircissaient, mais le Comte était introuvable.
Pourtant, Sirion avait sans doute raison lorsqu'il s'intéressa ardemment à cette petite porte de bois verni, arrivant à la hauteur du cou d'un homme. Le tyran, averti de leur projet, avait dû se cacher là derrière ou fuir par cette issue, accompagné de ses proches conseillers.
Kivan l'avait bien compris. Et, puisque les ennemis encore debout étaient plus clairsemés, il se risqua à une traversée presque aveugle de la pièce, jusqu'à la porte. Une fois arrivé, il tourna la poignée. Verrouillée. Une ruade ne put pas même la faire céder. Petite, épaisse, solide, inexpugnable, seule la clef adéquate pouvait permettre d'en franchir le seuil.
A cet instant, beaucoup d'évènements survinrent.
L'armoire de bois massif qui faisait face au lit à baldaquin fut secouée de l'intérieur, et l'une de ses grandes portes s'ouvrit lentement, d'où sortit une petite silhouette rabougrie et craintive...
Himling sauta au sol et s'agenouilla devant eux. Il tressaillit à la vue de Sirion et marmonna quelques paroles presque inaudibles dans ses sanglots:
"Pitié! Ayez pitié! Je ne vous ai jamais fait de mal... je voulais juste... sortir de prison. Pitié... je peux vous aider! Je sais... où se trouve le Comte et la clef... qui vous permettra de l'atteindre."Au même moment, un soldat du Comte opportuniste profita de la légère inattention de Baradur, occasionnée par cette soudaine apparition du vieillard, pour tenter un traître coup dans le dos du Capitaine de l'Ordre. Tenant son épée des deux mains, il la leva par-dessus sa tête.
La vie de l'instigateur du coup d'état ne tenait plus qu'à un fil...
#Himling