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Sujet: Tous les fleuves ont une source
Qewiel

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Rechercher dans: Les Prairies   Tag qewiel sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: Tous les fleuves ont une source    Tag qewiel sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptyMar 9 Fév 2016 - 15:31
Suivre l'eau, s'arrêter sous un arbre lorsqu'il pleut, continuer sa marche et recommencer. Je ne savais plus où j'étais et vu ce qu'il s'était passé il y a quelques jours, la foi me manquait pour aller de l'avant. La seule chose que je savais était qu'il fallait que je continue vers l'ouest et là la seule chose qui me venait à l'esprit était de remonter vers le nord tout en longeant le grand cours d'eau qui n'avait pas tous les jours la même puissance. Des fois il m'arrivait de regarder au loin vers l'ouest, mais les grandes plaines de cette contrée me faisaient étrange. J'avais été habituée aux marais et aux bois, pas à de vastes étendues d'herbe allant encore plus loin que là où pouvait porter mon regard. J'avais peur. Et la nuit, il me le faisait comprendre : lorsqu'il apparaissait, je ne pouvais m'empêcher d'avoir un frisson qui me parcourait l'échine. Sa tenue noire, son regard perçant que je ne pouvais que deviner puisque je ne pouvais pas voir son visage, la façon dont il se tenait, son silence pesant... La seule chose dont j'avais envie était de me recroqueviller sur moi-même et de faire en sorte qu'il ne soit pas dans mon champ de vision. Je n'avais pas tué de personne aujourd'hui et les trois personnes qui s'étaient éteintes sous mes actes pesaient dans ma mémoire plus que tout autre chose. Alors pourquoi vouloir me les rappeler de sa présence ?

Assise au bord de l'eau, j'admirais le soleil levant et les douces couleurs caressant les plaines et se reflétant sur l'eau du fleuve. Tout en songeant à toute la poésie qui pouvait se trouver dans ces premiers rayons de soleil de la journée, je mâchais tranquillement de la viande cuite au petit feu de bois, un rongeur qui avait eu la mauvaise idée de passer par là en fin de nuit. Ce n'était pas ce qu'il y avait de meilleur, mais au moins cela tenait un peu au ventre. Cela ne suffirait pas pour la journée, mais peut-être que je verrais enfin un lieu plus propice à la chasse ou à la cueillette. Et peut-être que je trouverais de quoi me refaire un bâton de marche, un qui tienne bien la route et que je pourrais graver selon les rites ancestraux.

Je finis mon repas, me levais et m'étirais puis, après avoir regardé autour de moi le vide gênant de ces terres, je repris ma route. Les heures passèrent, symbolisées par le soleil qui toujours plus se hissait vers son zénith pour après redescendre vers le lointain. Puis, au bout d'un moment, je vis au loin une silhouette. Ou plutôt deux, un homme et un cheval. Enfin un homme... si, en m'approchant, je pouvais clairement voir que ce n'était pas une femme et je me doutais que ce n'était pas un elfe. Bon... qu'est-ce que je fais ? Il n'y a pas d'endroit par où je pourrais passer de sorte à ce qu'il m'oublie ?

"Hé, qui va là ?"

Mince... Les Valar devaient vraiment se donner à coeur joie de me mettre dans des situations difficiles et où la mort était reine ! Que Llyod, Cervan et Kenod me protègent d'eux... Je n'ai jamais eu tant besoin de ces trois esprits depuis que les orcs ont décimé le clan. J'arrêtais d'avancer, fixant avec méfiance l'être qui s'avançait désormais vers moi. Je jetais quand même un regard en arrière afin de vérifier si c'était bien à moi qu'il s'adressait. Oui. Bon. Alors allons-y, de toute façon il n'arrêterait pas de me regarder facilement. Et puis peut-être que ce n'était pas une mauvaise personne... enfin pour le coup je ne me faisais pas trop d'espoirs. Et s'ils avait de mauvaises intentions me concernant ? S'il faisait partie des cavaliers qui me recherchaient pour je ne sais quelle raison ? Je n'en savais rien... en fait pour l'instant je n'avais pas envie de me battre. Que l'on m'explique dans quel problème on m'avait placée et puis qu'on me laisse tranquille, ce serait le mieux. Enfin... quoi qu'il en soit, je finis par me ravancer, ma main serrant le manche de la dague faute d'avoir un bâton en main. Plus nous nous rapprochions, plus mon coeur battait avec force. Puis enfin, nous nous retrouvions l'un en face de l'autre, à seulement quelques pas. Je le dévisageais quelque peu, attendant sa réaction, et faisant attention à sa forte carrure, ses bras musclés, ses yeux noirs - trop noirs ? - ainsi que sa longue chevelure brune. Il se passa un moment puis, remarquant qu'il ne semblait pas me chercher outre mesure, je commençais à reprendre ma marche tout en le contournant.
#Qewiel
Sujet: Le passé n'existe que si on le regarde
Qewiel

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Rechercher dans: Les Prairies   Tag qewiel sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: Le passé n'existe que si on le regarde    Tag qewiel sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptyDim 6 Sep 2015 - 23:40
Le silence était lourd à mes oreilles. Calme, mais lourd. Je ne savais plus vraiment quoi faire et la seule chose que j'arrivais à faire était de m'appuyer contre un arbre, assise au milieu de nul part. Mon esprit avait eu le temps de s'affaisser pendant la course et, en ce moment où le soleil terminait son apparition pour laisser place à la lune, je ressentais mon corps faiblir et la chaleur remonter en moi, souvenir de mes journées de fièvre. Il faudrait que je me ménage maintenant... même si je me doutais que les cavaliers ne tarderaient plus à venir me chercher. Et je ne désirais plus monter sur le cheval : je n'avais aucune maîtrise sur lui. Aussi je me disais que je marcherai, le cheval près de moi s'il le désirait. En attendant je finis par regarder ce qu'il y avait dans le sac appartenant à Validna... couverture, quelques vivres sèches et une pierre rouge très belle... mais étrange. Je retournais dans ma main le petit objet chaud et lisse, me demandant ce que cette pierre pouvait bien faire dans ce sac. La couleur qu'elle prenait face aux rayons du soleil ainsi que ses reflets me faisaient penser à une grande goutte de sang par laquelle passait de la lumière et, sur un autre plan, au collier de ma mère. De quoi était faite cette pierre ? De quoi était fait le pendentif ? Des questions qui n'auraient certainement jamais de réponse... Après avoir contemplé l’œuf de pierre, je plaçais la pierre dans la besace qui appartenait autrefois à mon père. Quelque chose me disait que cette petite chose avait son importance, une rareté dans un monde trouble. Et ce qui était important n'était jamais placé dans un endroit qui pourrait être facilement perdu.

La nuit passa, le sommeil me prit sans même que j'eus à le chercher. Au petit matin les nuages étaient teintés d'un magnifique rose, me laissant un instant béate face au paysage, et le cheval était toujours là. Validna avait dû l'habituer à ce qu'il reste auprès d'elle pendant qu'elle dormait, peut-être même avait-elle réussi à entrer en communion avec lui, pour qu'il ne se soit pas éloigné de moi. Ou peut-être était-il lui-même perdu, ce qui était tout aussi envisageable. Quoi qu'il en soit, je me relevais, m'étirais et prit une portion de viande séchée restée dans le sac. Tout en la mordant à pleines dents je pris mon bâton et me mis en marche vers l'ouest, faisant en sorte que l'animal me suive.

Après quelques heures nous arrivâmes devant un fait de la nature qui m'impressionna grandement : une large et très longue étendue d'eau qui coulait, doucement, de gauche à droite. Alors que le cheval s'avançait directement vers l'eau pour aller boire, je m'écartais un peu de lui pour regarder alentour : de l'autre côté de ce qui devait être un fleuve s'ouvraient de vastes plaines ainsi que des collines. L'ouest... c'était par là-bas que je devais aller. Avec mon bâton j'investiguais la faible partie du fleuve où j'étais, avant de regarder à nouveau autour de moi et de m'agenouiller pour plonger mes mains dans l'eau fraîche, les relever en coupe et me désaltérer. Après avoir répété le geste de nombreuses fois je me relevais, me demandant sincèrement s'il existait un moyen d'aller de l'autre côté. Peut-être quelqu'un avait-il construit un pont assez grand ? Ou peut-être y aurait-il un endroit moins profond ? Malheureusement je n'y connaissais rien, aussi je me contentais de suivre le fil de l'eau.

C'est alors que je le vis : grand, majestueux, souverain, bien plus beau que ce dont je pouvais me souvenir. Cervan, l'esprit du cerf... Cette vue splendide m'arracha un premier espoir de sourire ainsi que des larmes qui brouillèrent ma vue. Il était là, venu pour me montrer le chemin. Lui qui avait choisi de me guider à partir du jour du Vewm, il avait répondu à mon appel alors même que je n'étais plus dans les marais... j'étais perdue et voilà qu'il me soutenait, qu'il me démontrait par sa présence que je n'avais pas fait un choix condamnable au village humain. J'essuyais mes larmes et m'approchais de lui ; j'avais envie de le remercier, de lui sauter au cou... même si au fond de moi je savais très bien impossible : Cervan ne se laissait qu'en de très rares moments approcher suffisamment près pour pouvoir être touché. Il s'éloigna mais ne s'enfuit pas. Je baissais la tête, les épaules encore chargées du fardeau de passés proche et lointain. Le cerf s'éloigna encore un peu et entra dans l'eau, continuant sans se formaliser de trous ou de quelconques dangers jusqu'à avoir traversé le fleuve. Je le suivis sans me poser de questions, appelant d'un "Hieval !" rapide - "ch" était trop dur à prononcer - la monture de Validna et regardant juste un instant si elle me suivait avant de mettre les pieds dans l'eau, là où était entré Cervan. Le cerf me regardait, attendant que je le suive. Je ne pouvais que répondre à son invitation silencieuse. Incitant mon compagnon d'infortune à me suivre, j'entrais dans l'eau tout en espérant que le courant ne serait pas trop fort... je ne savais pas réellement nager. Lors de cette traversée, la dague de Validna avec laquelle j'avais tué le cavalier fut lavée de son sang ; je fus plongée jusqu'aux épaules et je profitais de traverser l'eau pour me défaire du sang et de la poussière qui décoraient mon visage d'enfant. J'en profitais même pour mouiller une bonne fois mes cheveux. Trempée des pieds à la tête, je me mis étrangement à rire lorsque je rejoins la terre ferme et que le cheval m'eut rejointe. Nous étions partis pour une longue marche, Cervan faisant attention à ce que nous le suivions toujours.


~~~~~~

Je regardais, recroquevillée derrière un rocher, la scène étrange qui se déroulait devant moi. J'étais interdite, subjuguée même... la musique était comme les chants de mon enfance, chargée d'émotions, agréable à l'oreille ; Cervan, lui, avait continué jusqu'à un campement où se trouvaient quelques personnes. Quatre, au total, dont l'un fut approché par l'esprit. Je n'en revenais pas, que quelqu'un puisse le toucher, sans qu'il ne recule. Je ne pouvais qu'y voir un signe, sans vraiment comprendre lequel. Etait-ce que je pouvais faire confiance à cet humain ? Ou bien avait-il quelque chose de particulier... dans son cœur ? Son sang ? Ou bien l'animal en lui-même connaissait-il cet humain ? Tant de questions auxquelles je n'avais pas de réponses mais qui, déjà, plaçaient cet être aux oreilles rondes haut dans ma curiosité autant que dans mon estime. Le jeune homme se retourna, regarda dans ma direction puis me fit signe. Un signe que je reconnus comme étant une invitation à venir, dans les gestes d'ici. M'avait-il vue ? Je n'en savais rien. Je tournais la tête et vis le cheval, fort à l'aise, en train de brouter de l'herbe. Je l'avais oublié lui... et je ne lui en voulais pas d'avoir voulu se montrer. Après tout, il était avec Validna jusqu'alors, c'était déjà quelque chose qu'il m'ait suivie jusqu'ici... sans même savoir où j'allais exactement.

Confiante en Cervan, je finis par me lever et m'approcher du campement. La musique s'était arrêtée et les différentes personnes se rassemblaient en un cercle. Puis, sans que je ne comprenne pourquoi - ne pouvant comprendre leurs paroles - tous se tournèrent vers moi. Je me sentis alors petite, étrangère... j'avais alors l'impression que je n'aurais pas dû être là. Et pourtant, je n'avais pas de mal à comprendre que le cinquième bol avait été rempli à mon intention. Je regardais Cervan et inclinais doucement ma tête, autant par respect que pour le remercier. Contrairement à l'autre, je n'osais pas m'approcher plus de lui, le toucher. Peut-être en aurais-je l'occasion tout à l'heure. En attendant, je me forçais à avancer vers les humains. Je n'étais pas vraiment à l'aise, je ne savais pas trop comment me comporter. Et, surtout, je me rappelais ce que m'avais enseigné Validna : on ne pouvait pas remercier tout le monde et il fallait se méfier. Cela sans compter que je me doutais que les cavaliers me cherchaient toujours, je m'étonnais d'ailleurs qu'ils ne m'aient pas retrouvée, et je ne souhaitais pas mettre des personnes de bien en danger. Harlinde avait certainement déjà payé pour m'avoir soignée et Validna... j'espérais du fond de mon cœur que l'elfe ne soit pas morte à cause de moi.

Arrivée devant les quatre êtres je m'inclinais, épée toujours sur le dos, dague à la ceinture et bâton à la main. Fortement armée, en somme. Je n'osais pas lire dans leurs yeux ce qu'ils pensaient de moi, et j'avais encore moins envie de constater qu'ils me croyaient être une enfant. Ne constatant aucun refus de la part des quatre personnes, je m'assis parmi eux et prit le bol de soupe dans mes mains. Je les regardais sincèrement, droit dans les yeux, esquissa un signe de tête et me remémora le mot que Validna m'avais appris.

"Merci.

J'attendis un peu avant de commencer à boire le breuvage. Des questions ne tardèrent pas à être posées, mais je ne les compris aucunement. Alors je posais ma main sur mon front, la fit tourner et la posa sur mon cœur.

- Qewiel."

Peut-être qu'en donnant mon nom, ils comprendraient que je ne parlais pas leur langue mais que j'essayais tout de même d'établir une conversation avec eux.
#Qewiel
Sujet: Les rencontres forgent le caractère [PV Qewiel]
Ryad Assad

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Rechercher dans: Le Rhovanion   Tag qewiel sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: Les rencontres forgent le caractère [PV Qewiel]    Tag qewiel sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptyLun 25 Mai 2015 - 14:38

La jeune elfe était complètement perdue. Validna l'avait compris immédiatement, quand elle l'avait vue se réveiller, et qu'elle avait perçu à quel point elle était désorientée. La situation n'était pas la seule en cause, même s'il fallait bien reconnaître qu'elle avait dû subir des choses affreuses avant d'arriver là, et que cela aurait traumatisé n'importe qui. Elle émergeait soudainement de plusieurs jours de captivité pour se retrouver libre de ses mouvements, dans un endroit qui lui était de toute évidence parfaitement inconnu, auprès d'une femme qu'elle n'avait jamais vue. Déboussolée, elle l'était, et c'était parfaitement compréhensible. Toutefois, il y avait quelque chose de plus. Sa façon de se comporter, sa méfiance constante vis-à-vis du monde qui l'entourait… Elle était par trop différente ce que l'Elfe connaissait pour qu'elle n'y vît pas un signe troublant. En temps normal, un jeune Eldar dans une situation pareille se serait empressé de poser mille questions, et de demander l'aide d'une sœur et amie. Mais l'inconnue, qui paraissait ne pas comprendre un traître mot de Commun, était différente. Déterminée à garder le silence, elle se comportait comme un petit animal sauvage… comme si le monde entier était un danger potentiel pour elle. Et de fait, elle n'était pas loin de la vérité. Elle accepta la couverture de bonne grâce, répondant à un besoin primaire qui était de se protéger du froid ambiant, mais lorsque Validna lui demanda de se rapprocher, elle prit grand soin de rester de l'autre côté du feu, qui agissait comme une barrière naturelle entre elles.

La femme sourit. Elle trouvait cette attitude à la fois amusante et intrigante. En effet, elle avait tant d'années d'expérience derrière elle que ce n'était pas un simple feu de bois qui risquait de l'arrêter, si elle décidait de vouloir du mal à sa petite inconnue. Elle pouvait bondir souplement par-dessus les flammes qui s'élevaient en langues orangées, et fondre sur elle en moins de trois secondes. A la course, elle était redoutable, et même si la petite parvenait à la distancer, elle n'irait jamais plus vite qu'un cheval lancé au galop… surtout pas sur un terrain aussi plat et nu. Bref, elle n'avait aucune chance de lui filer entre les doigts. Il était toutefois intrigant de la voir essayer de se rassurer, se raccrocher au moindre petit détail pour tenter de retrouver une certaine forme de maîtrise de son environnement. Elle n'avait pas tardé à remarquer les corps étendus sur le sol, que Validna avait rassemblés et éloignés un peu, afin de ne pas laisser la puanteur de leur chair en décomposition les incommoder. La guerrière avait été particulièrement attentive à sa réaction, et avait parfaitement noté qu'elle n'était pas choquée outre mesure par la vue de ces trois individus étendus là. Etait-ce parce qu'elle avait une rancœur particulière à leur endroit ? Etait-ce parce qu'elle avait déjà eu l'occasion d'être exposée à une scène de violence qui avait rendu son âme insensible à ce genre de visions ? Difficile à dire pour l'instant, mais elle était demeurée quelques secondes à les observer fixement sans broncher, avec une froideur rare pour quelqu'un d'aussi jeune.

Le silence qu'entretenait jeune fille fut rompu peu après le pain, et Validna fut satisfaite de voir qu'elle pouvait tout de même s'exprimer. Elle avait été mise au courant que l'Elfe ne parlait pas de langue connue, mais elle avait soupçonné que ce n'était qu'un artifice de la part d'un trafiquant d'êtres vivants, qui lui aurait fait passer une muette pour une rareté. Les Elfes incapables de parler étaient rares, certes, mais ce n'était pas pour cela qu'elle était venue. Ainsi donc, Qewiel était son nom. Intéressant. Elle avait articulé chaque syllabe avec une attention toute particulière, mais Validna – qui avait beaucoup voyagé au cours de sa longue vie – nota immédiatement qu'il y avait dans ses mots un accent chantant et pas désagréable à l'oreille, qu'elle n'avait pas entendu depuis des lustres. Pourtant, elle avait rencontré beaucoup d'Elfes, et très peu d'entre eux avaient ce timbre très particulier, qui l'avait instantanément fascinée quand elle l'avait entendu pour la première fois. Cela remontait à des années maintenant, à une époque où sa vie était très différente. Les vagues surmontées d'écume qui s'échouaient en chuchotant sur le sable fin d'une plage interminable, la silhouette élancée d'un navire à l'horizon dont les voiles d'un blanc immaculé claquaient au rythme du vent de la côte, les chants des marins qui paraissaient donner vie à cet édifice de bois et de cordes qui ondulait sous leurs pieds en se laissant porter par les flots. Ses mains cueillaient les embruns par-dessus le bastingage, et ses cheveux sentaient le sel. C'était il y a bien longtemps…

Validna s'était perdue dans ses rêveries quelques secondes, comme cela lui arrivait parfois lorsqu'elle songeait avec nostalgie à ce passé, ce « avant », qui était à la fois meilleur et bien pire. Elle y réfléchissait de temps en temps, en se demandant si elle ne préférait pas sa vie d'alors. Elle se souvenait de son insouciance, de son ingénuité qui tirait des sourires aux hommes autour d'elle. Elle était la petite Val, leur petite princesse. Ils n'étaient plus, désormais. Ils continuaient à vivre dans son souvenir, et c'était de cette façon qu'ils avaient atteint l'immortalité. Leurs sourires, leurs voix et leurs chansons continuaient à exister dans sa mémoire, et ne s'éteindraient pas tant qu'elle serait capable de respirer.

- Qewiel répéta Validna après ce silence étrange. Enchantée.

Elle revint à ses affaires – qui consistaient pour l'heure à éplucher une orange –, et laissa la jeune Elfe croquer dans le morceau pain qui n'était plus aussi tendre qu'au premier jour, mais qui était loin d'être sec. C'était consistant et revigorant à défaut d'être véritable goûteux. Elle l'avait acheté deux jours auparavant, et avait été capable de l'économiser jusque là, elle qui avait pour habitude de se contenter d'un minimum, et de vivre une vie presque ascétique. La vie de campagne, sans nul doute. Elle leva les yeux, en voyant que son invitée étrange ne s'éloignait pas immédiatement comme elle l'avait supposé, et déposa les pelures sur les braises rougeoyantes, là où les flammes étaient les moins voraces. Presque par magie, l'air s'embauma d'une douce odeur fruitée, qui tira à la guerrière un demi-sourire. Elle glissa un quartier entre ses lèvres, et observa silencieusement la jeune fille qui s'était mise à dessiner dans le sol à l'aise d'un bâton.

Elle avait dans son attitude un quelque chose qui n'était pas de l'ordre de l'enfant, et elle ressemblait bien plus à une adulte en mal de communication qu'à une jeune fille perdue. Elle ne dessinait pas une maison, un soleil, ou bien la représentation de ses parents. Ce qui apparaissait progressivement sous les yeux de Validna, c'était une carte de la Terre du Milieu. Quelque peu maladroite, quelque peu imprécise, mais tout de même assez bien réalisée pour qu'il fût possible de reconnaître l'Anduin qui allait du Nord au Sud, les différentes chaînes de Montagne qui découpaient le continent, et les principales forêts qui l'occupaient. Elle finit par mettre un point final à son croquis, avant d'indiquer la carte et de lancer un signe de tête à Validna. Celle-ci mit une poignée de secondes à comprendre que cette façon d'incliner la tête était sa manière à elle de l'interroger frontalement. Elle comprit en voyant son regard insistant, et finit par tendre la main pour qu'elle lui donne son instrument de dessin. En le récupérant, la guerrière le garda en main un instant, et l'agitant légèrement devant elle, elle dit :

- Bâton. Bâton.

Puis, joignant le geste à la parole pour mimer ce qu'elle voulait dire, elle ajouta :

- Petit bâton. Petit.

Elle laissa la jeune fille assimiler ces quelques mots qui lui seraient bien inutiles en société, mais qui seraient la base de leur communication. Car si elle voulait s'en sortir sur ces terres parfois inhospitalières, elle devrait fatalement apprendre à parler une langue que quelqu'un pouvait comprendre. Ne serait-ce que pour demander son chemin, pour mendier de la nourriture si elle se retrouvait isolée. La guerrière n'envisageait pas de lui faire un lexique complet, mais c'était précisément le genre de détails qui faisait la différence entre la vie et la mort. Quand elle avait voyagé en pays étranger, au cours de ses nombreux périples, elle avait toujours pris soin d'apprendre quelques mots basiques pour pouvoir se débrouiller, afin de ne pas se retrouver complètement démunie. Le Commun était parlé partout, mais dans certaines régions les dialectes locaux avaient pris le pas sur la langue des Hommes, et il fallait pouvoir s'adapter. Répondant aux interrogations pressantes de la jeune fille, Validna les désigna d'un geste large de la main, embrassant l'entièreté du paysage autour d'eux. Elle désigna enfin un point de son bâton, qui représentait environ où ils devaient se trouver. Le Sud du Rhovanion, grosso modo.

Etait-ce là qu'elle pensait se trouver ? Etait-ce l'endroit où elle souhaitait se rendre ? Etait-elle proche de sa famille ? Validna n'avait pour le moment aucun moyen de l'interroger plus avant, et elle se résolut à faire preuve de patience. Si des gens étaient à la recherche de la jeune fille – des gens qui auraient pu être bien intentionnés à son égard –, elle n'en avait pas entendu parler. Elle savait seulement que dans certains milieux dans lesquels elle laissait traîner ses oreilles, la rumeur d'une jeune Elfe « étrange » avait circulé. Impossible de savoir qui avait eu vent de la nouvelle, et encore moins de savoir si en ce moment même des individus étaient en train de les chercher. C'était la raison pour laquelle Validna avait préféré ne pas tarder, et s'empresser de récupérer la mystérieuse inconnue, afin de la mettre en sûreté. Depuis la chute de l'OCF, des forces étaient en mouvement partout, et il valait mieux prendre l'initiative plutôt que de se laisser avoir par des concurrents de plus en plus agressifs et de plus en plus dangereux. Pour l'heure, elle pouvait se satisfaire d'avoir été la première à la découvrir, ce qui n'était pas du luxe. Les choses auraient pu tourner tout à fait différemment…

De toute évidence, cette réponse parut suffisante à Qewiel, qui n'était certainement pas en état d'en comprendre davantage. Validna aurait pu lui indiquer l'endroit où elle avait reçu le message l'informant de l'existence de la petite rousse, lui montrer l'endroit où elle comptait l'emmener pour la mettre en sécurité, ou même lui repasser le bâton pour lui demander de quelle région elle était originaire. Mais sans mots, c'était encore une communication trop difficile, et trop imprécise. Elles risquaient de partir sur un quiproquo, et il valait mieux ne pas trop s'aventurer sur un terrain glissant quand faire preuve de patience était tout aussi efficace. La guerrière était âgée et expérimentée, elle n'avait pas un besoin pressant de comprendre le monde qui l'entourait, et elle savait que tôt ou tard elle finirait par obtenir les réponses qu'elle cherchait. Et si elle n'y parvenait pas, quelqu'un d'autre saurait. Celui qui savait toujours. Qewiel, toutefois, paraissait vouloir encore des renseignements, et sa question muette porta assez logiquement sur le corps des individus qui étaient étendus par terre. L'Elfe les avait disposés sans grâce, l'un à côté de l'autre, et n'avait pas pris la peine de les recouvrir. Elle avait vu tellement d'horreurs dans sa longue vie que ce n'étaient pas trois corps qui allaient la repousser. La plus jeune, néanmoins, paraissait soucieuse de comprendre quel avait été leur sort. Validna prit la parole, même en sachant pertinemment que c'était peine perdue :

- Oui, j'ai tué ces hommes.

Sa voix était froide, et on sentait une profonde détermination derrière chacun de ses mots. Son invitée ne pouvait avoir aucun doute sur ce que cette voix glaciale révélait : ce n'était pas la première fois qu'elle prenait une vie, assurément, et elle ne regrettait pas son geste le moins du monde. Pourtant, au regard d'un individu normal, il s'agissait d'une véritable boucherie. Elle reprit :

- Ils te voulaient du mal. Ce n'étaient pas des gens bien. Pas des… Mince, comment te faire comprendre ça…

Elle haussa les épaules, résignée. Il faudrait du travail pour pouvoir entretenir une véritable conversation avec la jeune fille, mais elle paraissait vive et éveillée, particulièrement réceptive. Les Elfes étaient généralement doués pour les langues, et elle devait déjà s'habituer aux sonorités particulières du timbre de Validna. Elle comprendrait bientôt le sens de ces syllabes qui pour l'heure devaient ressembler à du charabia pour elle :

- Je suppose que c'est à toi, pas vrai ?

En parlant, la guerrière attrapa un objet qui se trouvait derrière elle, et le présenta à Qewiel, de sorte qu'elle pût le voir. Il s'agissait d'une superbe épée ouvragée, indubitablement de facture elfique. Un objet que n'auraient pas pu obtenir ces trois malandrins, même après dix vies de leur travail répugnant. Ils avaient dû le dérober à la jeune fille, dont la réaction indiqua très clairement que l'arme ne lui était pas étrangère. Avant qu'elle eût le temps de dire ou de faire le moindre geste, Validna éloigna l'arme de sa légitime propriétaire, et la dégaina à demi, pour observer la lame. Elle était en très bon état, quoiqu'il paraissait évident pour un œil exercé qu'elle n'avait pas servi depuis quelques temps. Le fil était toujours tranchant, cela dit, résultat des heures de travail d'un maître forgeron sur l'acier qui constituait désormais cette lame de belle facture. Légère et équilibrée, elle devait avoir une histoire aussi riche que celle qui la portait actuellement. Elle avait vu des batailles, et fait couler le sang, mais pour une raison inexplicable, elle se trouvait à présent dans les mains d'une enfant. Validna avait toujours eu un contact particulier avec les armes. Un claquement sec retentit lorsqu'elle rangea la lame dans son fourreau, avant d'enchaîner :

- Pour le moment, je vais la garder avec moi. Je préfère éviter de voyager avec une inconnue armée à mes côtés. Tu peux conserver le reste, si tu veux.

Les mots étaient peu clairs, mais les gestes étaient explicites. L'épée retrouva sa place auprès de la guerrière, loin de Qewiel, tandis que la première indiquait du doigt à la seconde un petit sac qui se trouvait non loin. En fouillant à l'intérieur, elle y trouverait ses effets personnels, que les bandits avaient pris soin de garder avec eux pour en tirer un bon prix. Ils avaient au moins eu l'intelligence de ne pas les vendre à la pièce, conscients que si leur protégée était réellement un prix de choix, alors ils avaient tout intérêt à la vendre avec tout ce qu'elle emportait sur elle. De riches collectionneurs pouvaient dépenser une véritable fortune pour un bijou apparemment anodin. Parmi les effets personnels que pourrait retrouver la petite Elfe aux cheveux de feu, il y avait son bâton de marche et son poignard. Si Validna avait jugé utile de la priver de son épée, elle avait de toute évidence considéré qu'armée d'un couteau, l'inconnue ne représenterait pas vraiment une menace pour elle. Fallait-il y voir une marque d'arrogance ? Ou peut-être était-ce de l'inconscience ? A moins que ce ne fut un moyen de gagner la confiance de Qewiel. Seule la jeune fille pouvait le décider.

Revenant à des considérations plus urgentes, la guerrière s'empara d'une pomme dans son sac, et la jeta à son invitée. Elle en saisit une pour elle-même, et croqua dedans d'un air distrait, la gardant de temps en temps entre ses dents pour réchauffer ses mains auprès des flammes. Il faisait tout à coup très frais au dehors. Un vol de corbeau passant de la lune brillante attira leur attention, et la guerrière resta un moment à les observer, comme si elle cherchait à déchiffrer leur ballet complexe et magnifique. Manger leur fit du bien, et occupa quelque peu leurs pensées, les détournant du silence gênant qui s'installait entre elles. L'impossibilité de communiquer entièrement pouvait poser problème, mais c'était paradoxalement un bon moyen de savourer le calme et la paix de la nuit environnante, qui les entourait de ses bras ténébreux. De nombreux dangers devaient rôder non loin, mais pour l'heure elles n'avaient rien vu et rien entendu. La fonte des glaces avait fait retourner les loups du Nord sur leurs territoires de chasse habituels, et les prédateurs naturels ne se déplaçaient d'ordinaire pas dans de telles étendues dépourvues d'arbres. Ils risquaient bien davantage de tomber sur des menaces bipèdes, que la guerrière ne craignait pas particulièrement. Elle avait l'habitude de voyager seule, et elle savait se défendre. Les trois cadavres qui dormaient non loin en étaient la preuve. Après avoir partagé un dîner frugal, les deux femmes ne tardèrent pas à s'allonger pour dormir. La fatigue gorgeait leurs muscles, et elles devaient prendre du repos pour le lendemain. Validna savait que Qewiel devait avoir ses propres plans – enfin, probablement –, mais elle n'avait pas d'autre choix que de l'emmener avec elle. Et pour cela, pas besoin de la forcer : elle avait deviné au premier coup d'œil qu'elle suivrait immanquablement la destination de son épée, à laquelle elle paraissait attachée. Pour cette raison, la guerrière décida de s'endormir en la gardant entre ses bras, de sorte que si son invitée avait dans l'idée de partir, il lui faudrait forcément la réveiller.

C'était en même temps une sorte de test. Validna était curieuse de connaître le caractère de la jeune Elfe qui l'accompagnait, et elle était persuadée que celle-ci tenterait quelque chose à la nuit tombée. Après tout, elle avait un poignard, et elle pouvait s'emparer du cheval de l'Elfe pour filer. Elle avait l'air farouche et dégourdie, si bien qu'il n'était pas inenvisageable de la voir tenter sa chance toute seule. Aurait-elle le cran d'aller défier celle qui était venue la sauver ? Préférerait-elle faire preuve de patience en attendant une opportunité plus propice ? Elle serait rapidement fixée. Ce qui était certain, c'était que la redoutable combattante était une habituée de ce genre de situations, et son sommeil était particulièrement léger. Elle pouvait se réveiller en une fraction de seconde, et se tenir prête au combat. Qewiel n'avait pas la moindre chance d'échapper à des siècles et des siècles d'entraînement constant, qui avaient fait de Validna une arme vivante. Cette dernière lui avait toutefois laissé toute latitude pour agir… simplement pour voir de quoi elle serait capable…

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Sujet: Rencontre entre deux êtres bien différents.
Qewiel

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Rechercher dans: Le Rhovanion   Tag qewiel sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: Rencontre entre deux êtres bien différents.    Tag qewiel sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptyMar 17 Mar 2015 - 13:35
Il y eut un temps pendant lequel je ne sus si celle qui me faisait face me comprenait vraiment. Il y eut un blanc, encore. Le petit animal, le gaan, vint alors sur l'épaule de la femme aux oreilles rondes et fit un petit bruit assez caractéristique des félins. Je ne compris pas ce qu'il dit mais il me sembla alors qu'un lien existait réellement entre le gaan et elle. Arrivait-elle à le comprendre, comme s'ils parlaient la même langue ? Ce n'était pas mon cas en tout cas. Quoi qu'il en soit je restais là, espérant une réponse, essayer de connaître celle qui m'était inconnue. Il se passa encore quelques secondes, puis celle en robe prononça un mot, un qu'elle avait en fait déjà prononcé : Telsia.

Ma main se baissa, enfin je comprenais, à la fois contente d'avoir réussi à instaurer un dialogue entre nous deux, à la fois dépitée de comprendre que dès le départ elle parlait de son prénom... Et le clan ? Faisait-elle seulement partie d'un clan ? Savait-elle seulement qui pourrait l'aider dans sa quête de l'Ouest ? J'en doutais... Je baissais la tête, cherchant rapidement quoi dire, quoi lui faire comprendre. N'arrivant pas trop à savoir quoi faire, je m'écartais un peu plus d'elle et après avoir regardé où en était le soleil je lui montrais du doigt l'ouest, tendant bien le bras pour lui faire comprendre que c'était cette direction que je souhaitais désigner, pas les arbres. Après allait y avoir le problème de faire comprendre que je posais une question. Je fermais mon poing n'indiquant pas la direction, le mettant à hauteur de mon visage, pour montrer que je posais une question. Cela ne fut visiblement pas compris, aussi... je soupirais, tout en haussant les épaules et en  regardant l'ouest. Comment pourrais-je lui faire comprendre ?
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