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Sujet: Les rencontres forgent le caractère [PV Qewiel]
Ryad Assad

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Rechercher dans: Le Rhovanion   Tag validna sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: Les rencontres forgent le caractère [PV Qewiel]    Tag validna sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptyLun 25 Mai 2015 - 14:38

La jeune elfe était complètement perdue. Validna l'avait compris immédiatement, quand elle l'avait vue se réveiller, et qu'elle avait perçu à quel point elle était désorientée. La situation n'était pas la seule en cause, même s'il fallait bien reconnaître qu'elle avait dû subir des choses affreuses avant d'arriver là, et que cela aurait traumatisé n'importe qui. Elle émergeait soudainement de plusieurs jours de captivité pour se retrouver libre de ses mouvements, dans un endroit qui lui était de toute évidence parfaitement inconnu, auprès d'une femme qu'elle n'avait jamais vue. Déboussolée, elle l'était, et c'était parfaitement compréhensible. Toutefois, il y avait quelque chose de plus. Sa façon de se comporter, sa méfiance constante vis-à-vis du monde qui l'entourait… Elle était par trop différente ce que l'Elfe connaissait pour qu'elle n'y vît pas un signe troublant. En temps normal, un jeune Eldar dans une situation pareille se serait empressé de poser mille questions, et de demander l'aide d'une sœur et amie. Mais l'inconnue, qui paraissait ne pas comprendre un traître mot de Commun, était différente. Déterminée à garder le silence, elle se comportait comme un petit animal sauvage… comme si le monde entier était un danger potentiel pour elle. Et de fait, elle n'était pas loin de la vérité. Elle accepta la couverture de bonne grâce, répondant à un besoin primaire qui était de se protéger du froid ambiant, mais lorsque Validna lui demanda de se rapprocher, elle prit grand soin de rester de l'autre côté du feu, qui agissait comme une barrière naturelle entre elles.

La femme sourit. Elle trouvait cette attitude à la fois amusante et intrigante. En effet, elle avait tant d'années d'expérience derrière elle que ce n'était pas un simple feu de bois qui risquait de l'arrêter, si elle décidait de vouloir du mal à sa petite inconnue. Elle pouvait bondir souplement par-dessus les flammes qui s'élevaient en langues orangées, et fondre sur elle en moins de trois secondes. A la course, elle était redoutable, et même si la petite parvenait à la distancer, elle n'irait jamais plus vite qu'un cheval lancé au galop… surtout pas sur un terrain aussi plat et nu. Bref, elle n'avait aucune chance de lui filer entre les doigts. Il était toutefois intrigant de la voir essayer de se rassurer, se raccrocher au moindre petit détail pour tenter de retrouver une certaine forme de maîtrise de son environnement. Elle n'avait pas tardé à remarquer les corps étendus sur le sol, que Validna avait rassemblés et éloignés un peu, afin de ne pas laisser la puanteur de leur chair en décomposition les incommoder. La guerrière avait été particulièrement attentive à sa réaction, et avait parfaitement noté qu'elle n'était pas choquée outre mesure par la vue de ces trois individus étendus là. Etait-ce parce qu'elle avait une rancœur particulière à leur endroit ? Etait-ce parce qu'elle avait déjà eu l'occasion d'être exposée à une scène de violence qui avait rendu son âme insensible à ce genre de visions ? Difficile à dire pour l'instant, mais elle était demeurée quelques secondes à les observer fixement sans broncher, avec une froideur rare pour quelqu'un d'aussi jeune.

Le silence qu'entretenait jeune fille fut rompu peu après le pain, et Validna fut satisfaite de voir qu'elle pouvait tout de même s'exprimer. Elle avait été mise au courant que l'Elfe ne parlait pas de langue connue, mais elle avait soupçonné que ce n'était qu'un artifice de la part d'un trafiquant d'êtres vivants, qui lui aurait fait passer une muette pour une rareté. Les Elfes incapables de parler étaient rares, certes, mais ce n'était pas pour cela qu'elle était venue. Ainsi donc, Qewiel était son nom. Intéressant. Elle avait articulé chaque syllabe avec une attention toute particulière, mais Validna – qui avait beaucoup voyagé au cours de sa longue vie – nota immédiatement qu'il y avait dans ses mots un accent chantant et pas désagréable à l'oreille, qu'elle n'avait pas entendu depuis des lustres. Pourtant, elle avait rencontré beaucoup d'Elfes, et très peu d'entre eux avaient ce timbre très particulier, qui l'avait instantanément fascinée quand elle l'avait entendu pour la première fois. Cela remontait à des années maintenant, à une époque où sa vie était très différente. Les vagues surmontées d'écume qui s'échouaient en chuchotant sur le sable fin d'une plage interminable, la silhouette élancée d'un navire à l'horizon dont les voiles d'un blanc immaculé claquaient au rythme du vent de la côte, les chants des marins qui paraissaient donner vie à cet édifice de bois et de cordes qui ondulait sous leurs pieds en se laissant porter par les flots. Ses mains cueillaient les embruns par-dessus le bastingage, et ses cheveux sentaient le sel. C'était il y a bien longtemps…

Validna s'était perdue dans ses rêveries quelques secondes, comme cela lui arrivait parfois lorsqu'elle songeait avec nostalgie à ce passé, ce « avant », qui était à la fois meilleur et bien pire. Elle y réfléchissait de temps en temps, en se demandant si elle ne préférait pas sa vie d'alors. Elle se souvenait de son insouciance, de son ingénuité qui tirait des sourires aux hommes autour d'elle. Elle était la petite Val, leur petite princesse. Ils n'étaient plus, désormais. Ils continuaient à vivre dans son souvenir, et c'était de cette façon qu'ils avaient atteint l'immortalité. Leurs sourires, leurs voix et leurs chansons continuaient à exister dans sa mémoire, et ne s'éteindraient pas tant qu'elle serait capable de respirer.

- Qewiel… répéta Validna après ce silence étrange. Enchantée.

Elle revint à ses affaires – qui consistaient pour l'heure à éplucher une orange –, et laissa la jeune Elfe croquer dans le morceau pain qui n'était plus aussi tendre qu'au premier jour, mais qui était loin d'être sec. C'était consistant et revigorant à défaut d'être véritable goûteux. Elle l'avait acheté deux jours auparavant, et avait été capable de l'économiser jusque là, elle qui avait pour habitude de se contenter d'un minimum, et de vivre une vie presque ascétique. La vie de campagne, sans nul doute. Elle leva les yeux, en voyant que son invitée étrange ne s'éloignait pas immédiatement comme elle l'avait supposé, et déposa les pelures sur les braises rougeoyantes, là où les flammes étaient les moins voraces. Presque par magie, l'air s'embauma d'une douce odeur fruitée, qui tira à la guerrière un demi-sourire. Elle glissa un quartier entre ses lèvres, et observa silencieusement la jeune fille qui s'était mise à dessiner dans le sol à l'aise d'un bâton.

Elle avait dans son attitude un quelque chose qui n'était pas de l'ordre de l'enfant, et elle ressemblait bien plus à une adulte en mal de communication qu'à une jeune fille perdue. Elle ne dessinait pas une maison, un soleil, ou bien la représentation de ses parents. Ce qui apparaissait progressivement sous les yeux de Validna, c'était une carte de la Terre du Milieu. Quelque peu maladroite, quelque peu imprécise, mais tout de même assez bien réalisée pour qu'il fût possible de reconnaître l'Anduin qui allait du Nord au Sud, les différentes chaînes de Montagne qui découpaient le continent, et les principales forêts qui l'occupaient. Elle finit par mettre un point final à son croquis, avant d'indiquer la carte et de lancer un signe de tête à Validna. Celle-ci mit une poignée de secondes à comprendre que cette façon d'incliner la tête était sa manière à elle de l'interroger frontalement. Elle comprit en voyant son regard insistant, et finit par tendre la main pour qu'elle lui donne son instrument de dessin. En le récupérant, la guerrière le garda en main un instant, et l'agitant légèrement devant elle, elle dit :

- Bâton. Bâton.

Puis, joignant le geste à la parole pour mimer ce qu'elle voulait dire, elle ajouta :

- Petit bâton. Petit.

Elle laissa la jeune fille assimiler ces quelques mots qui lui seraient bien inutiles en société, mais qui seraient la base de leur communication. Car si elle voulait s'en sortir sur ces terres parfois inhospitalières, elle devrait fatalement apprendre à parler une langue que quelqu'un pouvait comprendre. Ne serait-ce que pour demander son chemin, pour mendier de la nourriture si elle se retrouvait isolée. La guerrière n'envisageait pas de lui faire un lexique complet, mais c'était précisément le genre de détails qui faisait la différence entre la vie et la mort. Quand elle avait voyagé en pays étranger, au cours de ses nombreux périples, elle avait toujours pris soin d'apprendre quelques mots basiques pour pouvoir se débrouiller, afin de ne pas se retrouver complètement démunie. Le Commun était parlé partout, mais dans certaines régions les dialectes locaux avaient pris le pas sur la langue des Hommes, et il fallait pouvoir s'adapter. Répondant aux interrogations pressantes de la jeune fille, Validna les désigna d'un geste large de la main, embrassant l'entièreté du paysage autour d'eux. Elle désigna enfin un point de son bâton, qui représentait environ où ils devaient se trouver. Le Sud du Rhovanion, grosso modo.

Etait-ce là qu'elle pensait se trouver ? Etait-ce l'endroit où elle souhaitait se rendre ? Etait-elle proche de sa famille ? Validna n'avait pour le moment aucun moyen de l'interroger plus avant, et elle se résolut à faire preuve de patience. Si des gens étaient à la recherche de la jeune fille – des gens qui auraient pu être bien intentionnés à son égard –, elle n'en avait pas entendu parler. Elle savait seulement que dans certains milieux dans lesquels elle laissait traîner ses oreilles, la rumeur d'une jeune Elfe « étrange » avait circulé. Impossible de savoir qui avait eu vent de la nouvelle, et encore moins de savoir si en ce moment même des individus étaient en train de les chercher. C'était la raison pour laquelle Validna avait préféré ne pas tarder, et s'empresser de récupérer la mystérieuse inconnue, afin de la mettre en sûreté. Depuis la chute de l'OCF, des forces étaient en mouvement partout, et il valait mieux prendre l'initiative plutôt que de se laisser avoir par des concurrents de plus en plus agressifs et de plus en plus dangereux. Pour l'heure, elle pouvait se satisfaire d'avoir été la première à la découvrir, ce qui n'était pas du luxe. Les choses auraient pu tourner tout à fait différemment…

De toute évidence, cette réponse parut suffisante à Qewiel, qui n'était certainement pas en état d'en comprendre davantage. Validna aurait pu lui indiquer l'endroit où elle avait reçu le message l'informant de l'existence de la petite rousse, lui montrer l'endroit où elle comptait l'emmener pour la mettre en sécurité, ou même lui repasser le bâton pour lui demander de quelle région elle était originaire. Mais sans mots, c'était encore une communication trop difficile, et trop imprécise. Elles risquaient de partir sur un quiproquo, et il valait mieux ne pas trop s'aventurer sur un terrain glissant quand faire preuve de patience était tout aussi efficace. La guerrière était âgée et expérimentée, elle n'avait pas un besoin pressant de comprendre le monde qui l'entourait, et elle savait que tôt ou tard elle finirait par obtenir les réponses qu'elle cherchait. Et si elle n'y parvenait pas, quelqu'un d'autre saurait. Celui qui savait toujours. Qewiel, toutefois, paraissait vouloir encore des renseignements, et sa question muette porta assez logiquement sur le corps des individus qui étaient étendus par terre. L'Elfe les avait disposés sans grâce, l'un à côté de l'autre, et n'avait pas pris la peine de les recouvrir. Elle avait vu tellement d'horreurs dans sa longue vie que ce n'étaient pas trois corps qui allaient la repousser. La plus jeune, néanmoins, paraissait soucieuse de comprendre quel avait été leur sort. Validna prit la parole, même en sachant pertinemment que c'était peine perdue :

- Oui, j'ai tué ces hommes.

Sa voix était froide, et on sentait une profonde détermination derrière chacun de ses mots. Son invitée ne pouvait avoir aucun doute sur ce que cette voix glaciale révélait : ce n'était pas la première fois qu'elle prenait une vie, assurément, et elle ne regrettait pas son geste le moins du monde. Pourtant, au regard d'un individu normal, il s'agissait d'une véritable boucherie. Elle reprit :

- Ils te voulaient du mal. Ce n'étaient pas des gens bien. Pas des… Mince, comment te faire comprendre ça…

Elle haussa les épaules, résignée. Il faudrait du travail pour pouvoir entretenir une véritable conversation avec la jeune fille, mais elle paraissait vive et éveillée, particulièrement réceptive. Les Elfes étaient généralement doués pour les langues, et elle devait déjà s'habituer aux sonorités particulières du timbre de Validna. Elle comprendrait bientôt le sens de ces syllabes qui pour l'heure devaient ressembler à du charabia pour elle :

- Je suppose que c'est à toi, pas vrai ?

En parlant, la guerrière attrapa un objet qui se trouvait derrière elle, et le présenta à Qewiel, de sorte qu'elle pût le voir. Il s'agissait d'une superbe épée ouvragée, indubitablement de facture elfique. Un objet que n'auraient pas pu obtenir ces trois malandrins, même après dix vies de leur travail répugnant. Ils avaient dû le dérober à la jeune fille, dont la réaction indiqua très clairement que l'arme ne lui était pas étrangère. Avant qu'elle eût le temps de dire ou de faire le moindre geste, Validna éloigna l'arme de sa légitime propriétaire, et la dégaina à demi, pour observer la lame. Elle était en très bon état, quoiqu'il paraissait évident pour un œil exercé qu'elle n'avait pas servi depuis quelques temps. Le fil était toujours tranchant, cela dit, résultat des heures de travail d'un maître forgeron sur l'acier qui constituait désormais cette lame de belle facture. Légère et équilibrée, elle devait avoir une histoire aussi riche que celle qui la portait actuellement. Elle avait vu des batailles, et fait couler le sang, mais pour une raison inexplicable, elle se trouvait à présent dans les mains d'une enfant. Validna avait toujours eu un contact particulier avec les armes. Un claquement sec retentit lorsqu'elle rangea la lame dans son fourreau, avant d'enchaîner :

- Pour le moment, je vais la garder avec moi. Je préfère éviter de voyager avec une inconnue armée à mes côtés. Tu peux conserver le reste, si tu veux.

Les mots étaient peu clairs, mais les gestes étaient explicites. L'épée retrouva sa place auprès de la guerrière, loin de Qewiel, tandis que la première indiquait du doigt à la seconde un petit sac qui se trouvait non loin. En fouillant à l'intérieur, elle y trouverait ses effets personnels, que les bandits avaient pris soin de garder avec eux pour en tirer un bon prix. Ils avaient au moins eu l'intelligence de ne pas les vendre à la pièce, conscients que si leur protégée était réellement un prix de choix, alors ils avaient tout intérêt à la vendre avec tout ce qu'elle emportait sur elle. De riches collectionneurs pouvaient dépenser une véritable fortune pour un bijou apparemment anodin. Parmi les effets personnels que pourrait retrouver la petite Elfe aux cheveux de feu, il y avait son bâton de marche et son poignard. Si Validna avait jugé utile de la priver de son épée, elle avait de toute évidence considéré qu'armée d'un couteau, l'inconnue ne représenterait pas vraiment une menace pour elle. Fallait-il y voir une marque d'arrogance ? Ou peut-être était-ce de l'inconscience ? A moins que ce ne fut un moyen de gagner la confiance de Qewiel. Seule la jeune fille pouvait le décider.

Revenant à des considérations plus urgentes, la guerrière s'empara d'une pomme dans son sac, et la jeta à son invitée. Elle en saisit une pour elle-même, et croqua dedans d'un air distrait, la gardant de temps en temps entre ses dents pour réchauffer ses mains auprès des flammes. Il faisait tout à coup très frais au dehors. Un vol de corbeau passant de la lune brillante attira leur attention, et la guerrière resta un moment à les observer, comme si elle cherchait à déchiffrer leur ballet complexe et magnifique. Manger leur fit du bien, et occupa quelque peu leurs pensées, les détournant du silence gênant qui s'installait entre elles. L'impossibilité de communiquer entièrement pouvait poser problème, mais c'était paradoxalement un bon moyen de savourer le calme et la paix de la nuit environnante, qui les entourait de ses bras ténébreux. De nombreux dangers devaient rôder non loin, mais pour l'heure elles n'avaient rien vu et rien entendu. La fonte des glaces avait fait retourner les loups du Nord sur leurs territoires de chasse habituels, et les prédateurs naturels ne se déplaçaient d'ordinaire pas dans de telles étendues dépourvues d'arbres. Ils risquaient bien davantage de tomber sur des menaces bipèdes, que la guerrière ne craignait pas particulièrement. Elle avait l'habitude de voyager seule, et elle savait se défendre. Les trois cadavres qui dormaient non loin en étaient la preuve. Après avoir partagé un dîner frugal, les deux femmes ne tardèrent pas à s'allonger pour dormir. La fatigue gorgeait leurs muscles, et elles devaient prendre du repos pour le lendemain. Validna savait que Qewiel devait avoir ses propres plans – enfin, probablement –, mais elle n'avait pas d'autre choix que de l'emmener avec elle. Et pour cela, pas besoin de la forcer : elle avait deviné au premier coup d'œil qu'elle suivrait immanquablement la destination de son épée, à laquelle elle paraissait attachée. Pour cette raison, la guerrière décida de s'endormir en la gardant entre ses bras, de sorte que si son invitée avait dans l'idée de partir, il lui faudrait forcément la réveiller.

C'était en même temps une sorte de test. Validna était curieuse de connaître le caractère de la jeune Elfe qui l'accompagnait, et elle était persuadée que celle-ci tenterait quelque chose à la nuit tombée. Après tout, elle avait un poignard, et elle pouvait s'emparer du cheval de l'Elfe pour filer. Elle avait l'air farouche et dégourdie, si bien qu'il n'était pas inenvisageable de la voir tenter sa chance toute seule. Aurait-elle le cran d'aller défier celle qui était venue la sauver ? Préférerait-elle faire preuve de patience en attendant une opportunité plus propice ? Elle serait rapidement fixée. Ce qui était certain, c'était que la redoutable combattante était une habituée de ce genre de situations, et son sommeil était particulièrement léger. Elle pouvait se réveiller en une fraction de seconde, et se tenir prête au combat. Qewiel n'avait pas la moindre chance d'échapper à des siècles et des siècles d'entraînement constant, qui avaient fait de Validna une arme vivante. Cette dernière lui avait toutefois laissé toute latitude pour agir… simplement pour voir de quoi elle serait capable…

#Qewiel
Sujet: La reconquête ?
Ryad Assad

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Rechercher dans: Fondcombe   Tag validna sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: La reconquête ?    Tag validna sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptyLun 27 Jan 2014 - 15:08

Des ruines fumantes, et des cadavres abandonnés aux corbeaux. Voilà en quelques mots à quoi ressemblait la belle ville de Valdol, désormais que l'Ordre venait d'y passer. Les troupes qui avaient combattu pour s'en emparer avaient été autorisées à rejoindre Imladris pour prendre du repos, suivant le contingent de Lammâth, qui était venu en personne pour poser son regard sur les ravages causés par ses hommes. Des troupes d'Ald'ar, seuls Validna, Oropher et Elrohir étaient restés là. Trois elfes, qui avaient la charge d'une cinquantaine de combattants arrivés en renfort. Cela faisait beaucoup d'hommes, mais Lammâth avait visiblement envie de consolider sa position autour de Fondcombe, et de compliquer la tâche des elfes qui allaient naturellement chercher à récupérer leur cité. Une ville fortifiée sur leur route serait un obstacle de taille, et il faudrait sans nul doute beaucoup de sacrifices de leur part pour s'en emparer. C'était la raison pour laquelle Validna, qui commandait ce détachement, avait insisté pour mettre les troupes qui lui étaient confiées au travail sans tarder. Elle avait distribué ses ordres avec une précision militaire qui ne laissait place à aucune contestation, et ils s'étaient tous mis à l'ouvrage avec la crainte d'attirer sa colère.

Ils commencèrent par déblayer les artères principales de la cité, et par acheminer des vivres. Il fallut pour cela rassembler les cadavres qui avaient été brûlés par Ald'ar, et les entasser dans un coin. Beaucoup d'habitations avaient souffert du feu, et ils s'emparèrent sans hésiter de tout ce qui pouvait encore être utile pour se rassembler dans les rares demeures qui étaient encore intactes. Une bien maigre consolation. En deux jours, ils avaient réussi à rendre la ville de nouveau habitable, et ils s'occupèrent de la fortifier quelque peu. Ils savaient très bien qu'elle était trop grande pour être défendue sur les remparts, et qu'ils finiraient tôt ou tard par être débordés. Toutefois, Validna confia aux deux frères elfes qui la secondaient la tâche de barrer certaines rues, de sorte à créer un tracé unique, sur lequel ils disposèrent de nombreux pièges et obstacles. Il s'agissait de barricades de fortune derrière lesquelles ils pouvaient se cacher et décocher des nuées de flèches, et qui pouvaient leur permettre de tenir le coup, même en infériorité numérique. Ils avaient fait en sorte de protéger leurs flancs en tirant des charriots, des caisses et des tonneaux remplis de pierres. A cinquante, la tâche avait été rapide, et bientôt la ville se transforma en une petite forteresse.

Toutefois, l'attaque des elfes survint bien plus tôt que quiconque l'avait prévu. Validna était occupée à superviser les troupes qui consolidaient la porte Ouest, celle par laquelle les envahisseurs étaient les plus susceptibles de passer, tandis qu'Elrohir et Oropher s'occupaient de travailler sur la porte Est. Ils avaient beaucoup moins d'hommes qu'elle - car personne n'imaginait qu'une attaque sérieuse aurait lieu de ce côté -, et ce fut malheureusement sur eux que se porta le premier assaut. La femme elfe était en train d'examiner l'ouvrage réalisé, quand elle entendit un cor de détresse appeler à l'aide. Un cor de l'Ordre. Immédiatement, elle sentit que cet assaut n'était pas un assaut de petite taille, et que l'armée des elfes venait d'arriver. Probablement que grâce à des chefs au charisme exceptionnel, ils avaient réussi à se réorganiser, à se regrouper, et à établir un plan d'action pour organiser la reconquête de leur cité. Mais Validna n'entendait pas les laisser faire. D'une voix puissante, elle rassembla ses troupes qui paraissaient perdues :

- Aux armes ! Aux armes ! Rejoignez vos postes !

L'elfe n'avait pas chômé dans son plan de défense, et elle avait invité les guerriers à se préparer en cas d'attaque, pour être certaine qu'ils sauraient réagir le moment venu. Elle n'imaginait pas qu'il viendrait aussi vite, toutefois. Les guerriers qu'elle commandait, au lieu de se porter au secours des troupes d'Oropher et d'Elrohir, qui devaient être sérieusement malmenées - ils avaient eu la malchance de subir une attaque surprise -, se retranchèrent derrière la première ligne de défense qu'elle avait mise en place, et s'emparèrent de leurs armes. Malheureusement, ils n'avaient pas mis d'arcs en place à cet endroit précis, et il leur faudrait donc combattre à l'épée et à la lance, pour repousser leurs ennemis. Comme elle l'avait prévu, l'attaque sur la porte Est n'était qu'une diversion, et un groupe d'elfes chargea au triple galop sur leur position. Probablement que s'ils n'avaient pas pris soin de se barricader, ils auraient été balayés par la puissance des étalons elfiques qui se déversèrent dans la ville comme autant de porteurs de mort au poitrail puissant.

Les sabots claquaient contre les pavés, en produisant un bruit de tonnerre qui résonnaient dans la tête des défenseurs. Les guerriers de l'ordre, une trentaine, serrés les uns contre les autres, brandirent alors leurs lances au niveau des yeux des chevaux. Ceux-ci, malgré les exhortations de leurs cavaliers, freinèrent considérablement, refusant de se jeter sur un mur de lames. Ce fut ainsi que la charge fut brisée, malgré la très nette infériorité numérique des défenseurs. Validna poussa alors un rugissement de rage, et elle tendit son bras, lançant son arme comme un javelot dans la poitrine d'un cavalier en armure. La lance se ficha dans son flanc, et il tomba à bas de son destrier en rugissant de douleur. Les autres guerriers de l'Ordre, moins audacieux, se contentèrent de repousser les cavaliers, qui essayaient de se frayer un chemin au fil de l'épée. Comprenant qu'ils ne pourraient pas passer ainsi, ils mirent tous pied à terre, et chargèrent droit sur les barricades, boucliers dressés.

- Tenez bon ! Cria Validna avant l'impact.

Les épées frappèrent les boucliers, les armures crissèrent sous les coups, tandis qu'une mêlée inextricable se déroulait. Les combattants s'agglutinaient sur un espace d'une taille ridicule, pressés les uns contre les autres, ayant à peine l'espace pour manier leurs armes. Les assaillants, désavantagés par la préparation des défenseurs, déplorèrent la perte de plusieurs des leurs, avant de pouvoir réussir à enfoncer progressivement les barricades. D'un grand coup de pied, un elfe jeta à terre un tonneau, ouvrant un passage dans la ligne. Validna arriva immédiatement pour le combler, et blessa au bras et au côté son adversaire, qui recula, couvert de sang. La guerrière dansait comme une déesse, et elle éclipsait naturellement tous ses compagnons qui luttaient pour leur vie avec acharnement. Elle virevoltait, courait là où elle voyait une brèche, et donnait de la voix pour encourager ceux qui faiblissaient. Les soldats de l'Ordre paraissaient galvanisés par sa présence, par son charisme, et par son exemple. Ils redoublaient d'ardeur, et bien qu'ils ne tuassent pas toujours leurs ennemis, ils parvenaient à les faire reculer, à bloquer efficacement leur progression.


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Sighild se battait au cœur de la ruelle, entourée par plusieurs guerriers venus reprendre Imladris. Mais elle se heurtait à la muraille de lames des troupes de l'Ordre, qui menaçaient de la tuer à chaque fois qu'elle approchait. Elle devait se tourner de droite et de gauche pour bloquer les attaques, et faire attention aux estocades et aux lances qui parfois jaillissaient plus loin que prévu. Mais bientôt, ses compagnons réussirent à ouvrir une brèche, que les séides de l'Ordre ne parvinrent pas à défendre très longtemps. Peu à peu, les assaillants pénétrèrent derrière ce premier rideau, et Sighild faisait partie de ceux-là. S'avancer ainsi au milieu de ses ennemis n'était pas sans risque, et elle fut assaillie par un de ses adversaires, un guerrier humain mais très talentueux, en livrée noire et blanche. Il voulut la prendre par surprise, mais elle dévia son attaque, et riposta avec un coup de poing. L'homme porta la main à son nez meurtri, mais heureusement pas cassé, avant de revenir à la charge. Il frappa plusieurs fois, forçant la magicienne à reculer. Il attaquait tant et si bien qu'elle n'avait pas le temps de riposter. Et puis soudainement, il lui donna un grand coup de talon dans la cuisse, pour la déstabiliser.

Sighild trébucha, et il s'avança pour l'achever. Toutefois, il était trop prêt, et il ne pouvait pas manier son épée correctement. Les yeux emplis d'une détermination féroce, il la chargea alors, et lui donna un coup de genou dans les côtes. L'impact sourd lui laisserait probablement une vilaine trace bleue pendant quelques jours, mais il avait surtout eu pour conséquence de lui couper un peu le souffle. D'une poussée brutale, il la renvoya dans les bras d'un de ses compagnons, qui se saisit d'elle. La distance venant de se creuser, le guerrier de l'Ordre en profita pour reprendre une garde convenable, ajuster sa prise sur son épée, et charger à nouveau droit sur la magicienne. Cette fois, il entendait bien en venir à bout.


~~~~


Validna avait l'impression terrible de devoir colmater un millier de brèches avec seulement ses deux mains. Elle allait porter main-forte sur le flanc gauche, pour empêcher ses compagnons d'être débordés, mais immédiatement elle sentait le flanc droit faiblir. Elle s'y élançait alors, ferraillant comme une tigresse, réussissant à blesser grièvement un de ses adversaires, pour mieux voir tous ses compagnons reculer d'une demi-douzaine de mètres en un bel ensemble. Ils formaient une ligne compacte, et tous avaient troqué leurs lances pour des épées, plus maniables dans ces espaces exigus. Les hommes étaient sur plusieurs rangs, tant la rue était étroite, et ils combattaient comme de beaux diables, essayant de maintenir un semblant de cohérence. Leurs adversaires, quant à eux, progressaient en enjambant les morts et les blessés qui gémissaient derrière eux, poussant toujours plus loin leur avantage. L'elfe songea un moment que c'était une belle façon de mourir, héroïquement et pour une cause désespérée. Elle aurait pu donner sa vie de cette manière, périr à un contre cinq ou un contre dix, en espérant que son nom ne serait pas oublié de sitôt. Peut-être que Corbeau aurait parlé d'elle à ses proches, mentionnant la bravoure dont elle avait fait preuve au crépuscule de son existence.

Mais en pensant à Corbeau, elle se dit qu'il ne voudrait pas la voir mourir ainsi. Il avait toujours dit qu'il voulait qu'elle vécût le plus longtemps possible, et elle espérait bien le satisfaire sur ce point. Regardant autour d'elle, elle vit que tout espoir était perdu ici. La porte principale était prise, ainsi que leur première ligne de défense. Peut-être que des renforts allaient arriver pour épauler les assaillants, et s'ils restaient ainsi exposés, ils finiraient par tomber sous le poids du nombre. Leur seule chance était de rejoindre la seconde barricade, et de reformer leur ligne, de se regrouper derrière des protections qui leur fourniraient un avantage considérable :

- On se replie ! On se replie ! Cria Validna en donnant un coup de coude à son adversaire.

Les guerriers de l'Ordre réussirent à rompre le combat avec brio, et ils s'élancèrent en courant dans les rues de la cité. Il n'y avait qu'un seule chemin à suivre, toutes les autres artères étant bouchées, mais leurs adversaires ne prendraient probablement pas le risque de courir après eux ainsi. Ils ne connaissaient pas la ville, et craindraient peut-être un piège. Les guerriers de l'Ordre coururent à en perdre haleine, semant progressivement les assaillants, et ils se jetèrent littéralement derrière la seconde protection. Une charrette, des barricades de fortune, et cette fois : des arcs. Une vingtaine d'arcs pour la vingtaine d'hommes qui restaient. Déjà un tiers d'entre eux avait succombé au premier assaut. Validna fronça les sourcils, essayant de réfléchir à une solution pour se sortir de ce piège. Elle s'empara de son cor, et souffla dedans à pleins poumons. Quelques minutes passèrent, avant qu'un cor ami répondît. Ainsi, le groupe d'Oropher et Elrohir était toujours en vie, et ils luttaient toujours. Tant mieux. Il fallait espérer qu'ils tiendraient le choc. La femme elfe saisit une flèche, et l'encocha sur la corde de son arc, à l'instar de chacun de ses hommes.

Tous semblaient épuisés, et portaient des blessures plus ou moins graves. Elle voyait de la lassitude dans leurs yeux, et une part de crainte. Mais elle était consciente qu'ils n'abandonneraient pas leur poste, et qu'ils lutteraient jusqu'au bout si elle le leur demandait. Elle sentit qu'ils avaient besoin d'être motivés, d'être rassurés, et comme ils la regardaient tous dans l'attente d'un discours réconfortant, d'un mot agréable ou d'une harangue digne d'un vétéran aigri, elle consentit à jouer ce rôle, quand bien même elle ne se sentait pas à l'aise :

- Vous tous ! Est-ce que j'ai l'air d'avoir peur ? Hmm ?

Ils la dévisagèrent, sans vraiment comprendre au départ. Ils connaissaient ses traits pour l'avoir déjà observée, pour avoir l'occasion de la côtoyer, mais c'était la première fois qu'ils lui faisaient face dans une situation aussi dangereuse. L'issue pouvait fort bien être fatale pour eux tous. Et pourtant, en la regardant, ils purent constater qu'aucune peur n'était lisible sur son visage. Celui-ci était calme, détendu, ses yeux étaient concentrés mais guère inquiets, et son attitude n'était pas plus rigide que d'habitude. Elle vit alors quelques sourires rassurés, quelques hochements de tête déterminés, et quelques regards fiers et impatients de pouvoir tuer. Tant qu'elle n'aurait pas peur, elle parviendrait à leur insuffler cela. Elle inspira profondément, et essaya de ne pas penser à la pression qu'elle venait de mettre sur ses épaules. Alors, elle vit les elfes venus reprendre Imladris se présenter à l'angle de la ruelle, boucliers en avant. La seconde d'après, sans qu'elle eût besoin de crier le moindre ordre, une volée de flèches partit en ligne droite. La bataille reprenait.
Sujet: [Villages environnants] Le sac de Fondcombe.
Ryad Assad

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Rechercher dans: Fondcombe   Tag validna sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: [Villages environnants] Le sac de Fondcombe.    Tag validna sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptyJeu 25 Juil 2013 - 16:48
Tag validna sur Bienvenue à Minas Tirith ! Edonia10

Aliénor se tenait dans les rangs des soldats de l'Ordre, écoutant les directives énoncées par Ald'ar Omenuir, le chef de l'expédition. Il s'était placé face à ses hommes, et leur parlait comme un général à ses troupes. Une troupe qui n'avait cependant pas la cohésion d'une armée, loin de là. Parmi les guerriers rassemblés là, se trouvait Corbeau, notamment. L'elfe semblait hors de tout contrôle, et s'il se pliait au jeu, cela semblait être simplement parce que cela l'amusait. Il semblait trouver un plaisir inexplicable à se trouver là, aux côtés de son esclave, obéissant aux ordres. Mais ce n'était pas parce qu'il s'était positionné du côté des simples soldats qu'il avait perdu son autorité, son charisme, et sa capacité à rallier les gens à lui. Aliénor, bon gré mal gré, lui était totalement soumise, et elle n'avait d'autre choix que de le suivre où qu'il se décidât à aller. Mais elle n'était pas la seule dans cette situation. Le boucher, bien qu'il fût terriblement difficile de lire quelque chose sur ses traits inquiétants, paraissait ne pas éprouver envers lui le mépris habituel qu'il éprouvait pour les autres êtres vivants...ou  morts. Mais ils se gardaient bien tous deux de s'afficher ouvertement l'un à côté de l'autre, et ils gardaient soigneusement leurs distances lorsqu'ils étaient en public. Cet état de fait ne s'appliquait néanmoins pas à tout le monde, et plus particulièrement à Validna. La guerrière elfe semblait demeurer dans l'ombre de Corbeau, et elle se comportait avec lui comme si attirer son attention, recueillir de sa part des félicitations, était la chose la plus importante de tout l'univers. Autant d'électrons libérés par la présence de Corbeau, qui pouvaient dès lors agir à leur guise, et qui menaçaient de plus en plus sérieusement l'équilibre fragile de la compagnie.

Mais d'un autre côté, Ald'ar disposait toujours de l'avantage numérique, et sur les quinze membres de la compagnie, seuls quatre - en comptant Corbeau - menaçaient de lui tourner le dos à un moment donné. Et même s'ils comptaient dans leurs rangs la redoutable Validna, l'énigmatique boucher du Khand, et le mystérieux Corbeau, il n'en demeurait pas moins qu'il était possible de les neutraliser. Les autres combattants n'avaient peut-être pas encore perçu à quel point le groupe risquait de se scinder, mais ils étaient suffisamment entraînés, disciplinés, pour ne pas dire conditionnés, qu'ils répondraient dans la seconde à l'ordre émanant de Ald'ar ou de Nunne. Cela donnait au chef de l'expédition un avantage considérable, mais qu'il était difficile de préserver. En effet, peu à peu, le nombre de ses fidèles s'amenuisait, et il n'avait toujours aucune preuve tangible que quelqu'un cherchait à le trahir, ou à l'évincer. Il ne pouvait pas agir impunément contre un Neleg, mais dans le même temps, il ne pouvait pas rester inactif. Pour le moment, toutefois, il avait misé sur le mauvais cheval en la personne du boucher. Il avait cru que ce dernier, vraisemblablement incapable de s'attacher, pourrait servir d'arme parfaite contre l'elfe. Il n'aurait jamais pu prévoir que le boucher, pour la première fois de sa vie, se sentît proche de la cible qu'on lui avait assignée. Une coïncidence terrible qui avait fragilisé la position de Ald'ar, et qui l'obligeait à agir différemment pour reprendre le contrôle de son groupe.

Ainsi, ce fut d'une voix forte qu'il déclara à ses hommes qu'ils passeraient la nuit en dehors des limites de la ville. A priori, les habitants d'Echtebourg n'étaient pas des guerriers, et ils avaient une philosophie de vie plutôt pacifique. Mais il fallait savoir se méfier de ceux qui apparaissaient les moins dangereux. Nul ne pouvait rester insensible à voir son village envahi par des troupes étrangères, et lorsque l'on voyait sa terre foulée par des gens considérés comme des ennemis, on avait tendance à se rebeller, même lorsqu'on était un pacifiste convaincu. Il n'était pas question pour les guerriers de l'Ordre de fournir une opportunité en or à un révolté zélé, même si les risques étaient faibles. Après avoir terminé de donner ses consignes, Ald'ar ordonna à tous qu'il était l'heure de partir, et les combattants se hissèrent en selle, avant de reformer la colonne qui mit le cap vers la sortie du village. Ils marchèrent pendant une bonne vingtaine de minutes, jusqu'à se trouver suffisamment éloignés d'Echtebourg pour voir venir tout individu suspect, mais en même temps ils demeuraient suffisamment proches pour rallier le village rapidement en cas de nécessité. Nul ne savait quelle impérieuse nécessité pouvait les pousser à se rendre là-bas, mais il valait mieux se tenir prêt à tout. Le campement sortit de terre en quelques minutes, monté par les mains habiles des membres de l'expédition. Les chevaux furent placés à l'écart du centre, où serait allumé un feu, mais ils demeuraient toutefois dans la lumière, et à quelques mètres seulement des tentes, de sorte qu'il demeurât très difficile de s'en approcher sans éveiller l'attention des sentinelles. Les tentes furent disposées en cercle, et chacun s'occupa d'animer les lieux. Certains allèrent chercher du bois sec, pour faire partir le feu qui servirait au repas commun, tandis que d'autres quadrillaient le périmètre, pour étudier au grand jour la configuration des lieux, afin de ne pas se retrouver surpris à la nuit tombée par les ombres, les creux et les bosses du relief qui les entourait. Parmi les guerriers, certains semblaient heureux d'avoir passé une journée sans perdre de membre de leur compagnie, tandis que d'autres, absorbés dans leurs pensées, paraissaient regretter qu'aucun villageois n'eut eu le cran de sortir une arme.

Dans cet univers guerrier, Aliénor se sentait toujours aussi peu à sa place. Elle avait l'impression que les soldats l'avaient finalement acceptée. Peut-être parce qu'elle était avec Corbeau, et que nul ne voulait le contrarier lui. Elle se plaisait à croire que c'était plutôt parce qu'elle avait fait ses preuves en tant que négociatrice, et que même si elle ne combattait pas, son expertise était capitale pour le succès de la mission. Elle ne se faisait cependant pas d'illusions, et elle était pleinement consciente du fait que personne ne la respectait vraiment dans cette compagnie. A l'exception de Nunne, peut-être. Elle le chercha des yeux, et le trouva affairé avec les autres soldats, occupé à vérifier que le camp était parfaitement sécurisé. C'était peut-être une habitude de militaire, ou un réflexe conditionné, car aux yeux de la jeune femme, il n'y avait pas de danger particulier. Les alentours semblaient calmes, Echtebourg semblait être un village tout à fait accueillant, et il ne paraissait y avoir aux alentours d'Imladris que la paix et la tranquillité. Ils n'avaient croisé aucun animal dangereux depuis leur départ, et les seules présences que la jeune femme avait notées étaient celles de mulots qui s'enfuyaient dès qu'ils sentaient approcher les lourds chevaux qui martelaient le sol de leurs sabots. Cela dit, elle n'avait pas l'entraînement militaire qui permettait de déceler des dangers là où un civil ne voyait rien d'anormal, ni la vue prodigieuse des elfes qui leur permettait de repérer les menaces bien avant les Hommes. La jeune femme avait décidé de profiter un peu de l'air frais du soir, tout en sachant bien que la nuit allait une nouvelle fois être difficile. Elle appréciait de voir le ciel étoilé apparaître peu à peu, et elle se régalait du crépitement du feu qui dansait au milieu du camp, projetant des ombres à la fois inquiétantes et attirantes. Cela lui permettait d'oublier pour un temps la situation dans laquelle elle se trouvait, et de plonger dans ses pensées, le seul refuge qu'il lui restait.

Pendant qu'Aliénor se livrait à une séance d'introspection, Corbeau déambulait dans le campement. Il souriait à tous les gens qui croisaient sa route, et s'il dérangeait par son l'aura de mystère qui l'entourait, nul ne pouvait se plaindre de son comportement. Tous le trouvaient sympathique, et il savait entretenir ce sentiment, en échangeant quelques mots avec chacun, trouvant toujours les paroles les plus justes pour plaire. Il était avec des guerriers, aussi il était facile de trouver des sujets de conversation à entretenir. Il leur posait quelques questions sur la prise d'Imladris, compatissait à leur peine lorsqu'ils évoquaient des compagnons tombés au combat. Avec d'autres, il parlait de la famille, de la vie en général, de leurs rêves et de leurs espoirs. Il n'en disait jamais long sur lui, en apprenait toujours beaucoup sur les autres, sans jamais donner l'impression de forcer la personne à parler. Ce faisant, il s'installait dans le groupe, et sans se créer des alliés solides, il se mettait dans une situation où personne n'avait particulièrement envie de l'éliminer. Au bout d'un moment, son chemin croisa presque par hasard celui du boucher. L'homme vaquait à ses occupations, et Corbeau toussa discrètement pour s'annoncer, et ne pas surprendre celui-ci. Le Khandien se retourna, et l'elfe lui demanda d'une voix innocente - suffisamment fort - comment il allait. Les hommes du camp levèrent la tête, surpris de voir quelqu'un oser venir discuter avec le boucher, mais ils n'entendirent pas Corbeau ajouter, plus discrètement :

- Allons parler.

Ils s'éloignèrent sans trop se faire remarquer, mais sans se cacher non plus, si bien que tout le monde savait que Corbeau était avec le boucher. Cela ne dérangerait personne, mis à part Ald'ar s'il venait à l'apprendre. Une fois que les deux hommes furent certains que personne ne pouvait les entendre, l'elfe sourit de toutes ses dents, et souffla :

- Que ne faut-il pas faire pour un peu d'intimité, n'est-ce pas ? Mais je ne dois pas m'égarer, nous n'avons guère le temps de divaguer si nous ne voulons pas attirer l'attention.

Il se retourna brièvement, et observa le campement. Ald'ar se tenait dans sa tente, probablement occupé à penser au lendemain. Nunne demeurait dans le campement, mais avait-il remarqué que le boucher et Corbeau s'entretenaient ? Difficile à affirmer avec certitude. L'elfe reprit :

- Je voudrais en apprendre plus sur vous, boucher. Mais ne vous détrompez pas. Votre passé vous appartient, et je n'ai nul besoin de savoir quelles ont été les embûches que vous avez rencontrées sur votre chemin. Même nos noms n'ont plus d'importance, désormais. Ce qui compte, c'est que vous êtes sur la voie, et je suis curieux de savoir pourquoi, dans quel but. Lorsque j'étais jeune, j'avais l'impression que la seule chose qui comptait était le présent, le petit plaisir même éphémère. Mais je me trompais, et j'ai compris qu'il fallait garder le regard tourné vers l'avenir.

Il leva les yeux, et regarda dans le lointain, comme si à l'horizon, au-delà du village qui semblait baigné dans les ombres, il pouvait discerner quelque chose que lui seul était en mesure de percevoir. Et sur son visage d'albâtre, un petit sourire se mit à flotter, comme celui du marin qui, perché sur le gaillard d'avant, profite des embruns qui lui caressent le visage en songeant à tous ceux qui n'ont jamais pris la mer. Se tournant vers le boucher, il conclut :

- Quel est l'avenir que vous vous voulez construire, mon ami ? Racontez-moi...

#Corbeau #Validna #Oropher
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