Un coin tranquille pour discuter

Le voyage n'avait duré que quelques heures en cette après-midi de début d'hiver. Le soleil se couchait de plus en plus tôt et bientôt la nuit tomberait au-dessus des trois cavaliers. Tout autour d'eux des champs de pâture et des arbres aux branches clairsemées des dernières feuilles de l'année. Un vent frais fouettait leur visage au galop, les montures transperçant l'air, naseaux vers l'avant, oreilles plaquées contre leurs crinières. Lièvre menait l'allure, tandis qu'Ardanos le Chasseur et Dwilidan le guide suivaient derrière. Ils arrivèrent alors sur une petite route sinueuse, le soleil disparaissait derrière l'horizon... Des maisons apparurent au loin près d'un bois. Le village de Bree...

A l'approche de l'entrée, Lièvre tourna la tête vers ses deux compagnons de voyage.

"Nous sommes des voyageurs fatigués et cherchant un abri pour la nuit, messieurs."

Une fois à la hauteur de la grande porte de bois, une ouverture laissa apparaître un visage creux. L'homme parla d'une voix monocorde :

"Quel est le but de votre venue à Bree étrangers ?"
"Chercher un toit et de quoi nous reposer" répondit Ardanos calmement.

Le visage disparut puis un loquet fut levé. La porte s'ouvrit alors laissant entrer Dwilidan et les deux autres hommes dans l'enceinte du village. Les allées et venues étaient encore assez importantes, les rues pavées voyaient circuler bon nombre de personnes et de chevaux. Lièvre mena leur groupe vers un lieu bien particulier, une pancarte en bois au-dessus de l'entrée représentait un cheval de petite taille avec écrit en-dessous "Poney Fringant". Ils laissèrent leurs montures à l'étable non loin puis entrèrent dans la bâtisse. Il y faisait chaud et la salle était bondée, une odeur de viande se mélangeait aux remontées d'alcool donnant irrésistiblement envie de manger et de boire à quiconque foulerait le seuil de la porte.

"Bien, je vais nous chercher de la nourriture et quelque chose à boire, prenez la clef de ma chambre. C'est la dernière porte à gauche au fond du couloir à l'étage. Installez-vous le temps que je revienne." lança Lièvre d'un ton amical.

Ardanos se saisit des clefs et entraîna Dwilidan avec lui dans les escaliers. Rapidement les deux compères arrivèrent devant la fameuse porte, le Chasseur rentra la clef dans la serrure et ouvrit bientôt la porte, dévoilant la soi-disant "chambre" de Lièvre. Mais surprise, il ne s'agissait pas là d'une simple pièce pour dormir. Une table ronde était installée dans un coin de la pièce, autour quatre chaises étaient disposées. Quelques meubles étaient également contre les murs afin d'habiller un peu la pièce, un chandelier allumé ainsi qu'un ratelier d'armes et derrière un rideau quatre lits très modestes.

"Et bien, Lièvre a des goûts de luxe!" ironisa Ardanos.
"On peut se vanter d'avoir la plus grande chambre de l'auberge, dit Lièvre qui était apparu derrière eux à l'instant, un grand plateau entre les mains, rempli de viande séchée, de fruits et de trois choppes de bière. Mangeons d'abord, nous parlerons ensuite."

S'en suivit alors plusieurs longues minutes de silence durant lesquelles chacun savoura son repas sans dire un mot. Puis une fois repus, Lièvre reprit la parole :

"Très bien. Maintenant, passons aux choses sérieuses...

L'ami d'Ardanos se leva alors et invita ses deux compagnons à en faire de même.

... Moi, Lièvre, présiderai cette réunion de la Loge des Passeurs d'Etoiles. Que ceux qui ne sont pas près à tout sacrifier pour le bien des Peuples Libres quittent sur le champ cette séance. Aux autres... Salut !"

Cette phrase symbolique prononcée, Lièvre jeta dans les yeux le jeune guide. Ardanos quant à lui se tenait sur le côté, observant la scène, d'un air sérieux.

"Toi que nous avons invité parmi nous, tu devras tout d'abord répéter après moi les vers d'un serment avant que nous ne t'initions aux choses d'un monde de secrets que tu ne soupçonnes même pas. Ecoute-bien et comprends les !"

Mon Bras et mon coeur, mon sang et ma vie,
Au sort des Peuples Libres à jamais je dédie,
Sans crainte et sans repos je combattrai pour la paix,
Jusqu'à ce je sois trop faible pour tenir une épée,
Je suis le Gardien, la flamme qui brûle dans la nuit,
Je suis le rayon de l'aube lorsque tout semble perdu,
Je combats en silence, je rejette la gloire,
Je porte la lumière, je garde la mémoire,
Des jours de liberté, en ces jours noirs...

Lièvre se tut alors, n'attendant qu'une chose de la part de son vis-à-vis.

"Une fois ce serment prononcé, nous répondrons à toutes tes questions."

Le soleil avait presque terminé sa course à travers les cieux lorsque les trois aventuriers arrivèrent à leur destination finale. La ville de Bree, dernière construction humaine avant la Comté hobbite, tendait presque sa main vers notre guide qui allait à la rencontre du destin. 

Après avoir passés la porte, Lièvre conduit Dwilidan et Ardanos vers l'auberge du Poney Fringuant. Ce n'était pas la première fois que le guide mettait les pieds dans la ville de Bree, en fait c'était la troisième et les deux fois précédentes il avait dormi dehors ou dans les écuries, faute d'avoir les moyens suffisants pour se payer une bonne chambre pour la nuit.

C'est presque avec regret qu'il laissa son nouveau cheval à l'étable. Le contraste entre sa robe et ses crins le fascinait plus que tout et rendait la monture reconnaissable, peut être trop en fait. Il lui avait trouvé un nom qui lui rappèlerait son Rohan natal: "Nahald" souffla t'il doucement.
Ce mot signifiant "secret" en rohirrique ancien, langue dont les bases lui furent données par son oncle durant sa jeunesse en Rohan.

Puis le guide revint au niveau de Lièvre et Ardanos qui franchissaient la porte de l'auberge. Laissant celui qui semblait détenir le pouvoir leur acheter de quoi se nourrir, le Chasseur et Dwilidan se dirigèrent vers la chambre qui leur avait été indiquée. Presque aussi grande que la maison de notre guide elle  n'était pas seulement composée d'un lit et d'une armoire; une table ainsi qu'un râtelier contenant quelques armes trônaient fièrement dans un coin de la pièce, parfaitement implantés dans ce décor pourtant inhabituel.

Liévre, les bras chargés de victuailles, invita Dwilidan à se servir. Ce dernier ne se fit pas prier, engloutissant avec gourmandise la viande séchée ou bien le pain rapportée par son sauveur. La bière lui rafraîchit l'organisme, mis à mal par cette journée rocambolesque dont notre guide se souviendrait sûrement toute sa vie. Croquant avec plaisir dans une pomme fraiche il échangea un sourire complice avec Ardanos.

Après quelques minutes passées à manger, Lièvre prit finalement la parole, jaugeant le guide du regard qui le soutint avec sa volonté qui le caractérisait. Lorsqu'il annonça que Dwilidan devrait répéter le serment, les dernières miettes de suspicion qui subsistaient chez le guide disparurent aussi rapidement que si on les avaient balayées; tout ceci était bien sérieux et réel. Il se leva cérémonieusement après quelques secondes de réflexion sur les paroles qu'il avait à prononcer.

Il devrait protéger la Terre du Milieu cela au moins était clair, il devrait aussi le faire sans attendre de gloire en retour, sans que personne ne sache ce qu'il faisait. Cela était un bon point car la gloire suscite l'envie, l'envie la jalousie qui mène ensuite à la haine. Non se battre sans rien attendre en retour était la meilleure des solutions. Prenant conscience que ses paroles changeraient sans doute sa vie il parla d'une voix forte et assurée:

"Mon Bras et mon coeur, mon sang et ma vie, 
Au sort des Peuples Libres à jamais je dédie,
Sans crainte et sans repos je combattrai pour la paix,
Jusqu'à ce je sois trop faible pour tenir une épée,
Je suis le Gardien, la flamme qui brûle dans la nuit, 
Je suis le rayon de l'aube lorsque tout semble perdu, 
Je combats en silence, je rejette la gloire, 
Je porte la lumière, je garde la mémoire, 
Des jours de liberté, en ces jours noirs..."

Se rasseyant sur sa chaise il pût observer comme du soulagement chez ses interlocuteurs ou alors il l'avait simplement imaginé. Incapable de se retenir de parler tant les question qui l'assaillait était nombreuse il parla à nouveau, posant les question comme le lui avait indiqué Lièvre:

"Voilà, je me suis joint à vous mais j'ai bien quelques questions. Tout d'abord nous dirige? Je me doute bien que vous n'êtes pas les seuls membres de cette.....hm...Loge avez vous dit? Et ensuite qui combattons nous? Je pensais que les derniers ennemis avaient étés abattus lors de la grande Bataille dans le Nord d'il y a cinq ans. Ah et une dernière question, pourquoi avez vous un nom d'animal monsieur Lièvre et pas Ardanos? Il ne fait pas partie de la Loge?

Il en avait fini avec ses questions et ses derniers doutes disparaissaient peu à peu; il pensait avoir fait la meilleure chose pour son bien comme pour le bien de la Terre du Milieu.

Une fois son serment prononcée, Dwilidan s'empressa de poser plusieurs questions comme Lièvre le lui avait proposé. Ce jeune guide était avide d'apprendre tant mieux. Il allait être servi.

"Tout d'abord notre hiérarchie. La Loge des Passeurs d'Etoiles est divisée en plusieurs sous-Loges à travers la Terre du Milieu afin de pouvoir lutter plus efficacement. Tu fais partie de la Loge de Bree, tout comme moi et Ardanos. Notre supérieur direct est Puma, actuellement en mission et ne peut donc pas t'initier lui-même. Sache que toi comme nous ne connaitrons jamais les Grands Maîtres de la Loge, seul Puma et quelques autres connaissent leurs noms. Plus tard, peut-être implanteras-tu une nouvelle Loge, mais dans ce cas, toi seul connaitra notre identité, tes recrues n'auront affaire qu'à toi. Ainsi en est-il de notre organisation, le secret est nécessaire si nous voulons nous protéger de nos ennemis..."

"Nous avions un oeil sur toi depuis quelques mois, ton aventure dans les Galgals a été une sorte de test final." ajouta Ardanos.

Lièvre hocha de la tête confirmant les dires de son compagnon.

"Notre ennemi à présent. L'Ordre de la Couronne de Fer, une organisation secrète et indépendante regroupant des Hommes et des Elfes, peut-être même des Nains qui sait. Leur influence ne cesse de croître et leurs apparitions sont toujours synonymes de mort et de désolation. Tu as sans doute entendu parler des enlèvements successifs de l'héritier d'Arnor et de celui de Gondor ainsi que le siège d'Aldburg qui s'est soldée par la disparition aussi mystérieuse que l'apparition des attaquants. Très bien organisés, leur but à long terme est d'empoisonner toutes les nations de la Terre du Milieu, de s'y infiltrer et de prendre le contrôle de tous nos territoires, par la ruse ou par la force. C'est pour s'opposer à l'OCF que la Loge des Passeurs d'Etoiles a été réveillé."

Un silence pesant envahit la chambre. L'heure était grave, les trois hommes le savaient.

"Très peu de gens sont au courant de la situation, tu fais partie des personnes qui peuvent empêcher la Terre du Milieu de sombrer sous leur joug."

Puis Ardanos s'avança d'un pas en direction de Dwilidan.

"Enfin, la raison pour laquelle je n'ai pas de nom animal est simple. Lors de notre rencontre, je ne pouvais pas me permettre de dévoiler mon nom de code à un homme dont je devais jauger le niveau, c'est pourquoi je me suis présenté à toi sous un faux nom. Si tu t'étais révélé inapte, la Loge n'aurait pas pu être compromise. Mais maintenant que tu es des nôtres, je peux te donner mon identité : je suis Fennec."

Lièvre reprit alors la parole, s'adressant à nouveau à Dwilidan.

"Maintenant que tu fais partie des nôtres, ton identité doit demeurer secrète aux yeux de tous ceux ne faisant pas partie de cette Loge. Ainsi, tu vas devoir abandonner ton nom...

A tous, présents et à venir, Salut! Notre nouvelle recrue, au nom de la Loge de Bree, et tenu compte du fait qu'il a prononcé le serment qu'on ne peut défaire, est maintenant reconnu comme un Passeur d'Etoiles sous le titre de Cerf. Qu'il en soit digne et fier à jamais !"

C'était fait. Dwilidan était devenu Cerf, un Passeur d'Etoiles, voué à une cause des plus nobles.

Cerf...le roi silencieux de la forêt, celui que l'on ne voit pas. Un nom qui convenait à Dwilidan, lui qui aimait tant voir sans être vu. Il était maintenant fier de porter le nom d'un animal si majestueux, restait tout de même à prouver sa valeur. Mais il était prêt, il le savait...il le sentait.

Leur ennemi, cet Ordre, semblait tout de même bien dangereux s'ils parvenaient si aisément à manipuler les plus grandes puissances de la Terre du Milieu, il devrait être prudent; ne se fier à personne et être encore plus discret, plus encore qu'il n'avait pu l'être auparavant.

Et leur dirigeant, ce fameux Puma, devait sûrement être un homme des plus importants et des plus forts pour avoir été désigné comme le chef de leur Loge, la Loge de Bree. Il tardait à Dwilidan de rencontrer cet homme, celui qui avait probablement choisi de le recruter.

D'autres questions taraudaient encore notre jeune guide mais la nuit bien avancée le convainc de ne pas poser le bon millier de questions qui lui traversait l'esprit, il devrait sûrement prendre des forces avant les aventures qui risquaient de l'attendre. Il se tourna une fois de plus vers Lièvre et Ardanos, alias Fennec, il lui restait tout de même une dernière petite question et il pourrait ensuite partir au pays des songes tranquillement:

"Quel est notre but dorénavant? Devons nous exécuter une mission, récolter des informations ou quelque chose dans ce genre? Au fait, puis je me choisir une arme? Ma courte épée n'est pas vraiment faite pour le véritable combat, pour quelque accrochages tout au plus. Avons nous quand même le temps de nous reposer ou le destin de la Terre du Milieu n'attend il pas"

Un sourire apparut sur le visage du guide, le destin qui l'attendait était probablement au delà de tout ce qu'il aurait pu imaginer dans son enfance et ses rêves les plus fous; et cela le réjouissait plus que tout, il n'avait pas envie de se cantonner à un rôle de figurant dans les pages d'Histoire qui étaient en train de s'écrire.

"Je t'en prie, choisis donc l'arme qui te conviendra. Tu es encore libre d'avoir celle que tu souhaites mais sache que le plus important, ce n'est pas l'épée mais le bras qui la manie." conclut Lièvre de manière solennelle.

Le silence retomba dans la chambre. La lune illuminait une partie du plancher donnant à la scène un aspect fantomatique, les visages creusés des trois hommes ajoutaient d'ailleurs à cette idée. Le sommeil les guettait et chacun comprit qu'il leur fallait reprendre des forces pour les semaines à venir. Fennec prit l'initiative de se diriger vers l'un des trois lits disposés dans la seconde pièce de la chambre. Il y déposa ses quelques affaires et salua ses deux compagnons ; Lièvre en fit bientôt de même. Le jeune guide les suivit très certainement sur la route menant aux bras de Morphée. Leur nuit fut paisible mais l'on pouvait supposer que l'esprit de Dwilidan soit envahi de questions, d'images, de visages et de sentiments contraires...

Quoiqu'il en soit, l'aube se leva comme toujours depuis l'Aube des Temps, éclairant peu à peu la chambre. Lorsque Dwilidan ouvrit les yeux, ses deux compères étaient déjà levés, attablés qu'ils étaient, se nourrissant des restes de la veille. Ils l'accueillirent à leur table naturellement, un sourire aux lèvres. C'est alors qu'on frappa à la porte. Aussitôt Fennec se leva sans un bruit, il se saisit d'une dague et se glissa derrière la porte, Lièvre, lui, s'apprêtait à l'ouvrir... Qui cela pouvait-il être ? L'Ordre ? Ou simplement l'aubergiste ?

"Il fait encore nuit." dit Lièvre.

"Le crépuscule est loin." fit une voix légèrement aïgue, signe d'une voix en plein changement.

Lièvre s'approcha davantage de la porte et l'ouvrit sans peur, Fennec était resté aux aguets. Une silhouette apparut devant l'entrée, le garçon avait l'air d'avoir une quinzaine d'années, son regard bleuté et son sourire charmeur parlait pour lui.


"Je suis Rossignol et je serai votre guide. Nous devons partir au plus vite pour l'Est.

La nuit de Dwilidan avait été entrecoupée de nombreux songes, songes durant lesquels il se voyait luttant face à des hordes d'ennemis accompagné lui même par des hordes d'animaux.
Il se réveilla reposé, confiant devant un avenir dégagé même si dangereux. Fennec et Lièvre étaient déjà en train de reprendre des forces, finissant les restes de la veille. L'épée qu'il s'était choisi avant d'aller se coucher, une longue lame effilée de bonne facture, pendait à ses côtés.

Aucun des deux hommes ne parlaient mais ils accueillirent le guide le sourire aux lèvres, sûrement contents de maintenant le compter parmi eux. Il tira une chaise vers la table et se saisit d'une miche de pain qu'il mordit à pleine dents, la faim commençait à le tenailler après cette bonne nuit de sommeil. Au dehors le soleil restait timide mais sa présence se faisait de plus en plus importante

Dwilidan allaient encore poser milles et unes questions lorsque des coups sourds retentirent à la porte. Le sang de notre guide se figea soudainement, il ne pouvait pas déjà faire face à ses ennemis, pas ici, pas maintenant. Sa main se portait à sa nouvelle arme tandis que ses compagnons se déplaçaient déjà, Fennec couvrant Lièvre qui demandait une sorte de code à celui qui se trouvait derrière la porte.
La réponse juvénile qui parvint aux trois Passeurs sembla convenir aux deux plus expérimentés qui ouvrirent la porte à un jeune garçon qui ne devait pas avoir passé plus de seize hivers.

Il indiqua avec une rapide phrase la suite des opérations, ils devaient aller à l'Est. Ces contrées étaient inconnus à notre guide, il savait qu'il y avait les Monts Brumeux mais pas plus ; cela serait une bonne première utilisation de ses cartes nouvellement acquises dans les Galgals et dessinées par Elessar, il se devait de se rendre utile aux Passeurs.

Pour le moment il préférait pas prendre d'initiatives malencontreuses, il se contentait d'observer sans intervenir ; il n'avait aucune autorité.

Sa chevelure blonde et ses traits rappelaient à Lièvre la description d'un jeune garçon que Puma lui avait faite il y a quelques temps. Il l'avait donc initié ? Il semblait si innocent, pourtant le garçon avait été bien entouré. Quoiqu'il en soit Lièvre hocha de la tête suite aux paroles de Rossignol. Cerf initié, il était temps de partir à présent. Il serait toujours possible d'en apprendre davantage à leur nouvelle recrue durant leur périple. Alors que Fennec et Lièvre rangeaient leurs quelques affaires, Rossignol s'approcha de Dwilidan et le regarda droit dans les yeux, un mince sourire sur ses lèvres. Le jeune guide ne le savait pas mais son vis-à-vis avait déjà gravé son visage dans sa tête.

"Alors c'est vous, la dernière recrue de Puma ? Vous ne m'avez pas l'air très dégourdi avec une lame pourtant..."

Le regard amusé de Rossignol venait renforcer cette impression d'arrogance et d'assurance qui se dégageait de lui. Il ne semblait porter aucune arme sur lui, une cape brune recouvrait ses épaules, au-dessus d'une tunique de bonne facture.

Après les derniers préparatifs, le quatuor quitta donc le Poney Fringant et se dirigea vers les étables toutes proches. Rossignol siffla brièvement, appelant son jeune hongre. Une fois grimpé dessus tel un fauve bondissant sur sa proie, le nouveau compagnon des trois autres Passeurs les fixa tour à tour dans les yeux.

"Notre destination est Dol Guldur. La Grande Loge m'a envoyé ici pour que nous y allions ensemble. La plupart des Passeurs seront là-bas, notamment Puma. On m'a dit de confier la direction de notre petit groupe à Lièvre... voilà, maintenant, je vous suis."

Lièvre acquiesça, il grimpa sur le dos de son étalon et se mit en tête de groupe. Fennec tenait l'arrière garde.

"Bien, merci Rossignol. Nous aurons l'occasion de reparler durant le trajet. Je propose que l'on passe par le Rohan, nous aurons un long voyage à faire. Espérons que rien ne nous ralentisse en chemin."



[je précise que ces évènements se déroulent bien avant que Renard n'apprenne aux trois Pères leur mission à Dol Guldur, mais étant donné le retard, le sujet a été repoussé...]

Le jeune garçon paraissait plus mûr que pouvait ne laisser paraitre son air juvénile, et c'est avec un certain dédain qu'il se moqua de notre guide. Malheureusement il y avait du vrai dans ce qu'avait pu dire Niels, Dwilidan était loin d'être un vrai guerrier, il pouvait survivre face à de vulgaires brigands mais pas contre les terribles guerriers qu'il ne tarderait pas à rencontrer et cela il le savait. Mais avec ses nouveaux alliés il pouvait, non il devait se hisser au niveau de ses compagnons. Et pour cela il devrait ravaler sa fierté et demander de l'aide à Fennec ou Lièvre qui avaient déjà démontrés toutes leurs capacités.

Après avoir rapidement bouclés leurs maigres possessions, les quatre Passeurs sortirent de l'auberge, prêts pour ce long voyage qui devrait finalement les mener à Dol Guldur, un lieu dont notre guide avait seulement entendu parler dans les histoires les plus sombres. Appelant sa propre monture, le guide se hissa avec facilité sur la selle ; au moins une chose pour laquelle il était doué et où il n'aurait besoin de conseils.

Donnant le commandement du groupe à Lièvre, Rossignol se mot ensuite en route, précédé par leur chef. Fennec, quand à lui, fermait la marche.

Cerf mit Nahald au niveau de Fennec, sa fierté en prendrait en coup mais il devait lui demander :

"Fennec, j'aurais besoin de...comment dire...de leçons de combats, j'ai jamais vraiment appris à me battre. Je sais un peu mais c'est plus  à l'instinct qu'autre chose comme t'as pu le voir, c'est pas vraiment de la technique. Donc si toi ou Lièvre pouviez m'aider je vous en serais reconnaissant."

Tout en attendant la réponse il commença à sortir ses cartes nouvellement acquises, peut être pourrait il trouver quelques raccourcis qui leur permettraient de gagner du temps.


#Dwilidan

Les quatre Passeurs laissaient derrière eux le village de Bree et se dirigeaient à présent vers le sud-est à bonne allure. Ils ne devaient pas perdre de temps, le vent glacial venant du Nord fouettait les visages des cavaliers tandis que leurs capes claquaient dans l'air. Lièvre était en tête, suivi de près par Rossignol, Cerf et Fennec. Ce dernier vit d'ailleurs s'approchait à sa hauteur leur nouvelle recrue. Dwilidan se confia alors à lui à propos du maniement des armes. Un sourire plein d'ivresse illumina le visage de Fennec, ce petit en voulait. Tant mieux !

"Avec plaisir, camarade. Comment refuser cela à un frère Passeur ? Et c'est vrai que je t'ai vu à l'oeuvre face aux Déjantés."

Indiquant du regard le jeune Rossignol devant eux, il siffla :

"Ne fais pas attention à ses remarques arrogantes, ses mots blessent tel un fouet, hein ? Tu t'y feras... et tu comprendras bientôt qui lui a transmis son don pour la rhétorique."

Soudain des flocons firent leur apparition, l'hiver semblait bien en avance cette année-ci...

"Je t'enseignerai des passe-d'armes à chacun de nos campements. Si tu écoutes et observes bien, tu pourrais les maîtriser plus ou moins comme il faut à notre arrivée, histoire que tu nous claques pas dans les bras dès les premiers combats, hein l'ami ?!"

Fennec éclata de rire, ce qui fit pivoter la tête de Rossignol et de Lièvre dans leur direction. Le rire est bien le propre de l'homme mais en ces jours sombres, tuer et mourir semblaient plus propres à l'homme que tout le reste...