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Une aventure est une succession de problèmes | |
| Ryad Assad Espion de Rhûn - Vicieux à ses heures perdues
Nombre de messages : 2511 Age : 32 Localisation : Pelargir Rôle : Humaniste
~ GRIMOIRE ~ -: Humain -: 36 ans -:
| Mar 16 Avr 2013 - 2:30 | | Le froid était mordant, et le vent soufflait en tempête à travers les arbres nus. Il soulevait de fines couches de poudreuse, et on aurait dit qu'une brume blanchâtre s'était élevée dans les airs, tel un brouillard opaque, glacial et piquant. Piquant car ces cristaux de neige acérés étaient propulsés à une vitesse phénoménale, et venaient s'écraser brutalement sur les parties exposées au froid. Ce n'était pas un temps à rester dehors, naturellement, et il fallait de bonnes raisons pour sortir par ce temps. De très bonnes raisons. La faim en était une. Une ombre courait à travers la forêt, s'arrêtant à intervalle régulier derrière un arbre, pour observer. Elle soufflait fort, mais le vent hurlait tant et si bien que même un cri strident aurait été difficile à percevoir. La créature, penchée, observait de ses yeux attentifs, cherchant quelque chose dans la neige. Des traces. Elles étaient fraîches, et menaçaient de disparaître à cause du temps peu clément. Ramassant sa hache de guerre, Kristivna s'élança à la poursuite de son gibier, courant aussi vite que le lui permettait la couche neigeuse dans laquelle elle s'enfonçait jusqu'au genoux à chaque pas. La guerrière avait l'estomac vide. Ses maigres réserves étaient épuisées depuis plusieurs jours, et malgré tout son talent, elle avait été bien incapable de débusquer le moindre animal. Le temps était de plus en plus froid, et elle était convaincue que le gibier avait poussé vers le Sud, pour trouver un peu de chaleur et de nourriture. Elle l'avait donc suivi. Elle n'avait pas le choix, si elle voulait survivre, aussi avait-elle pris en chasse un ours esseulé, qu'elle avait cru pouvoir rattraper. Mais il lui avait échappé peu après, et elle avait tourné en rond un moment, à rechercher sa trace. Elle avait alors localisé d'autres empreintes : des empreintes humaines. Elle n'appréciait guère les étrangers, et avait pour habitude de les chasser de son territoire, mais cette fois, elle allait les attaquer pour leur voler de quoi subsister. Cependant, cette idée s'était révélée plus difficile à mettre en application, et elle avait eu beaucoup de mal à les suivre. Elle s'était éloignée de ses repères, et depuis longtemps, elle ne reconnaissait plus les montagnes qui se dressaient à l'horizon. Mais il lui fallait continuer jusqu'au bout, sans quoi tous ses efforts n'auraient servi à rien. Elle poursuivait sa filature, cassant peu à peu la distance, lorsqu'elle repéra enfin les hommes qu'elle avait pris en chasse. Ils étaient une demi-douzaine : de grands gaillards costauds, probablement des aventuriers, à en juger par les armes qu'ils portaient au côté. Il y avait pas mal de types dans leur genre qui arpentaient les grandes étendues glacées du Nord, dans l'espoir d'y trouver quelque trésor. La plupart n'étaient que des pillards qui s'emparaient par la force des biens les plus précieux des tribus qui vivaient là, pour les revendre à prix d'or à des marchands avides d'objets rares. Cela faisait désormais plusieurs années que Kristivna les combattait, mais il semblait qu'au delà des terres enneigées, ils étaient des centaines à vouloir tenter leur chance. Un peu moins, depuis que le temps avait fraîchi, mais ceux qui osaient encore venir étaient encore plus déterminés, et encore plus combatifs. Ceux qu'elle suivait s'étaient arrêtés, tous les sens aux aguets. Craignant d'avoir été repérée, la chasseresse se dissimula derrière un arbre, et les observa à la dérobée. Elle constata très vite, cependant, qu'ils regardaient droit devant eux, et qu'ils ne semblaient pas avoir noté sa présence. Sans un bruit, ils se déployèrent en deux groupes de trois, qui prirent des chemins différents, mais visiblement avec le même objectif. Pas besoin d'être devin pour comprendre qu'ils encerclaient une proie. C'était peut-être de la viande gagnée facilement, si elle arrivait à faire d'une pierre deux coups. Kristivna, même si l'idée de s'en prendre à six hommes lui paraissait folle, décida de s'approcher. La faim la tenaillait, et elle était désormais prête à tout. Elle se glissa hors de sa cachette, et approcha aussi discrètement qu'il lui était possible de le faire. Malgré tout, elle craignait un piège. Elle arriva là où s'étaient tenus les six hommes, et vit ce qui les avait intrigué. Un feu de bois, quelques dizaines de mètres en avant, que l'on pouvait apercevoir malgré les arbres et la neige qui tombait. Ces hommes croyaient peut-être avoir trouvé une proie facile. Kristivna n'appréciait particulièrement l'idée de s'attaquer gratuitement à des voyageurs, mais la survie passait avant tout. Et si c'étaient des étrangers, alors c'était encore mieux. Elle raffermit sa prise sur sa hache, et s'approcha par la gauche. Devant elle, trois hommes se déplaçaient, accroupis, les yeux rivés sur la silhouette solitaire qui se réchauffait devant le feu. Un seul voyageur ? La jeune femme était quelque peu surprise, mais cela ne ferait que renforcer la confiance de ces hommes, aussi ne pouvait elle pas se permettre de trop attendre. La course à la nourriture était engagée, et elle ne pouvait pas perdre. Alors, tout se passa assez rapidement. Les six hommes se concertèrent d'un signe, et sortirent à découvert pour s'attaquer au pauvre voyageur isolé. Celui-ci n'eut pas le temps de réagir que déjà Kristivna fondait sur les trois hommes desquels elle était la plus proche. Elle abattit le premier d'un revers de hache rageur. L'homme, le dos vomissant un flot de sang, s'écroula en poussant un grand cri de douleur qui mourut brutalement. La guerrière, insensible à son sort, donna un grand coup de poing dans le nez du second, qui s'était retourné, avant de brandir sa hache à deux mains, et de l'abattre sur le troisième. Celui-ci tenta vainement de parer avec son épée, mais l'impact fut trop fort, et le métal mordit profondément sa chair au niveau de l'épaule. Eclaboussée du sang de ses ennemis, Kristivna se tourna vers les trois autres combattants, qui s'étaient tournés vers elle. Visiblement, ils l'avaient identifiée comme une menace bien plus sérieuse que le voyageur qui paraissait davantage apeuré que combatif. Trois contre un...ce serait un gros défi, mais elle n'en pouvait plus d'attendre. Avec un cri de guerre, elle se précipita à leur rencontre. Son attaque hasardeuse passa largement à côté de sa cible, et elle sentit en retour l'acier plonger en elle, au niveau de l'épaule, juste au-dessus du cœur. Elle avait froid avant, mais le contact de la lame lui glaça le sang, et elle eut l'impression qu'une partie de sa vie venait d'être arrachée. Un cri involontaire franchit ses lèvres, et elle lâcha son arme. Sauvage, elle parvint tout de même à esquiver, en plongeant à terre, les coups des deux autres hommes. Elle se releva rapidement, malgré la douleur qui lui vrillait le bras gauche, et courut en direction de l'arbre le plus proche, pour s'en servir comme d'une défense. Les guerriers derrière elle tentèrent de monter à l'assaut de sa position, mais elle avait eu le temps de s'emparer d'un de ses couteaux de lancer. Fort heureusement, elle était droitière, et elle avec une précision rare, elle envoya son arme se ficher dans l'estomac d'un des trois combattants. Les autres, voyant leur compagnon tomber, battirent précipitamment en retraite. De six, ils étaient passés à deux, et ils ne souhaitaient sans doute pas continuer la lutte après cela. Aussi brutalement qu'il était parti, le calme revint sur le petit campement. Le feu brûlait toujours, et les cadavres saisis par le froid étaient déjà en train de changer de couleur. Drôle de spectacle, alors que la neige autour d'eux se teintait de rouge tandis qu'ils se vidaient de leur sang. Kristivna, une main plaquée sur sa blessure pour limiter la perte de sang, sortit de sa cachette, pleine de méfiance. Elle récupéra son couteau, et s'approcha des autres corps. Cependant, elle ne cherchait plus de nourriture, et ses yeux se posaient sur le sol, de plus en plus inquiets, tandis qu'elle se mettait à la recherche de son arme. Elle était persuadée de l'avoir laissé tomber, et elle ne comprenait pas où elle avait bien pu passer...à moins que les deux survivants ne l'aient prise avec eux. Comme trophée. De rage, la jeune femme frappa du pied un des corps étendus sur le sol, avant de se précipiter vers le seul d'entre eux qui ne saignait pas. Enfin...Pas trop. Le coup qu'elle lui avait donné lui avait éclaté la lèvre et le nez - elle n'y était pas allée pour plaisanter -, et le pauvre était inconscient. Elle trouva rapidement le moyen de le réveiller, et dès qu'il commença à ouvrir les yeux, elle se mit à lui hurler dessus en le secouant : - Où sont-ils allés !? Tes compagnons ! Dis-moi où ils sont partis !Le blessé cligna des paupières comme s'il ne savait plus où il était, mais le fait d'être malmené ainsi ne l'aidait pas à se recentrer. Il implora qu'on le laissât tranquille, mais la jeune femme n'était pas disposée à accéder à sa requête, aussi finit-il par confesser : - A Dale ! On devait prendre la grande route de l'Est, et vendre tout notre butin là-bas. Je jure que c'est vrai !Kristivna lut dans son regard qu'il disait la vérité. Elle ne connaissait pas la ville, mais cela lui semblait plausible. Pourquoi aurait-il eu intérêt à lui mentir, alors que ses compagnons avaient fui en l'abandonnant. Fermement convaincue qu'il était sincère, elle sortit son poignard accroché à sa cuisse, et lui trancha la gorge. Il mourut avec une expression de surprise accusatrice sur le visage. Elle n'en tint pas compte, mais préféra le retourner face contre terre, pour échapper à ce regard. Elle se mit à le fouiller sommairement, et trouva rapidement ce qu'elle cherchait : une sacoche contenant des provisions, notamment de la viande séchée. Elle mordit dedans à pleine dents, et... Avec une vivacité surprenante, elle se retourna. Elle avait complètement oublié la présence du voyageur, qui se tenait encore là, comme pétrifié de peur. Il avait peut-être cru qu'en demeurant immobile et silencieux, elle allait l'épargner. A dire vrai, il n'était pas passé loin de réussir, car elle avait totalement écarté de son esprit son existence. Elle se leva, et s'approcha de lui, poignard en main. Dans des conditions normales, elle aurait peut-être tranché sa gorge avec aussi peu de pitié que pour l'aventurier qui avait eu le malheur de goûter à l'acier de son arme. Mais alors qu'elle marchait, elle fut prise d'un vertige violent, et elle dut lutter contre une nausée soudaine. Elle tomba à genoux, inspirant profondément pour se calmer, pour garder les idées claires. Le coup qu'elle avait reçu n'était pas mortel, fort heureusement, mais par ce temps, la moindre égratignure pouvait devenir problématique. Kristivna sentit une fièvre s'emparer d'elle, et elle s'assit dos à un arbre, en grimaçant. Elle tourna les yeux vers le jeune voyageur, et le détailla un instant. Il avait l'air terriblement mal à l'aise, et s'il avait pu disparaître derrière ses cheveux blonds - une couleur qui étonnait toujours la jeune femme - il l'aurait sans doute fait. Elle prit la parole, d'une voix teintée d'un accent étrange : - Toi, là ! Approche !Elle n'avait pas lâché son poignard, ce qui ne la rendait pas beaucoup plus rassurante, mais au regard de ses compétences au couteau de lancer, il était imprudent de tenter de fuir. Elle ne savait cependant pas quelle allait être sa réaction, aussi ajouta-t-elle : - Viens m'aider, j'ai besoin de tes mains pour soigner ma blessure.Elle rabattit sa tunique de peau, dévoilant son épaule entaillée, couverte de sang. Ce n'était pas beau à voir, mais la lame était bien aiguisée, et la plaie était nette. C'était déjà ça. Levant les yeux vers le garçon, qui semblait très jeune, elle mentit : - Ces hommes, là. Ils venaient pour toi. Je t'ai sauvé la vie, alors tu me dois bien ça, pour commencer...Mentir ne risquait pas de l'empêcher de dormir, assurément, mais elle se rendait de plus en plus compte, tandis qu'elle réfléchissait, qu'elle avait besoin de ce garçon pour continuer. Pour retrouver la hache rituelle de ses ancêtres, elle avait besoin de retrouver ces hommes qui la lui avaient volé. Or, elle ignorait où chercher. D'une voix détachée, elle demanda alors : - Au fait, dis-moi..."Dale", tu connais ? Tu sais comment y aller ?Membre des Orange Brothers aka The Bad Cop"Il n'y a pas pire tyrannie que celle qui se cache sous l'étendard de la Justice"- Spoiler:
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| | | Ciaran Citoyen
Nombre de messages : 7 Localisation : Mar Vanwa Tyalieva
~ GRIMOIRE ~ -: Homme -: 25 ans -:
| Jeu 18 Avr 2013 - 7:39 | | Une longue et déchirante plainte secoua la forêt, brisant le silence qui régnait sur les bois. Les flocons blancs se mirent à tourbillonner avec fureur, un épais blizzard se forma, augmentant encore l'épaisse couche de blanche qui recouvrait la terre gelée. Elle avait déjà atteint déjà trois pieds d'épaisseur. Une étrange petite silhouette, emmitouflée dans une peau d'animal de couleur brune s'y frayait péniblement un passage. Elle s'arrêta un instant pour réajuster le haut de sa fourrure qui lui servait de capuchon, puis en resserra les pans, comme si elle espérait pouvoir mieux s'abriter du terrible froid environnant. En vain, les cristaux de glace parvenaient malgré cette protection à se frayer un chemin et lui brûlaient la peau. Le vent était si glacial qu'il lui semblait recevoir des coups de poignard dans la face.
La petite silhouette continuait vaillamment d'avancer. Dans une tempête comme celle-ci, s'arrêter ne serait-ce que quelques minutes pouvait signifier la mort. L'étranger s'enfonçait dans la poudreuse jusqu'au genoux. Depuis quand la neige tombait-elle ? Des heures, des jours, des mois… Il ne savait plus trop. La plainte lugubre retentissait toujours. C'est le vent. Sa voix hurle à travers les arbres comme une complainte funèbre. Un avertissement pour les âmes égarés.
Enfin, le vent s’apaisa quelque peu. L'étranger, épuisé, après être parvenu à une petite clairière, se laissa tomber au sol. Il ne pouvait aller plus loin. Exténué, il rampa jusqu'à un colossal frêne. Ses branches, bien que nues, et ne pouvant arrêter la neige, constitueraient un obstacle pour le vent, ce qui lui permettrait d'allumer un feu. Il s'accrocha au tronc pour se redresser, et péniblement fit craquer quelques unes des branches basses de l'arbre. Le bois était mouillé. Il creusa un peu la neige, puis disposa, de façon à former une sorte de pyramide, le bois récupéré, les plus grosses parties des branches vers l'intérieur du tas et les brindilles vers l'extérieur. L'étranger regarda la pile de bois trempé ainsi formée d'un air dubitatif, doutant visiblement qu'il serait possible d'y mettre feu, mais haussa finalement les épaules, et sorti de sa besace un briquet.
L'effort avait fait glisser le haut de sa fourrure, qui était en fait une peau d'ours, dévoilant un visage aux traits fins plutôt enfantins et des yeux marrons-verts se dissimulant derrière des mèches d'un blond pâle. Les mains tremblantes il tentait vainement de faire fonctionner son briquet. Au bout de bien dix minutes, le feu ne prenait toujours pas, et le froid commençait à engourdir son corps. Il poussa un juron. Il ne sentait plus ses orteils, ce qui était mauvais signe. Quel fou es-tu ! Pourquoi entreprendre pareil voyage par ce temps ! Il aurait mieux fait de rester à la Butte aux Lièvres, où Moremond lui avait proposé d'attendre la fin de la tempête. Enfin, une brindille s'enflamma, communiquant le feu à toute la pile.
Le jeune homme poussa un soupir de soulagement. Il resta là, à contempler le petit brasier, et à sentir la chaleur revenir en lui. Il ferma les yeux, ému par la simple musique du bois craquant et consumé par les flammes. Il rouvrit ses paupières. Le feu ne durerait pas très longtemps, ensuite il devrait se remettre en route. Le vent hurlait toujours, mais avec moins de force. Il se tança, pour la centième fois au moins depuis qu'il était parti, de ne pas avoir suivi les sages conseils de son hôte, et de s'être mis en route malgré la tempête menaçante. Gwirech, ai-je donc encore tant à apprendre ? Il sembla voir le vieux visage ridé de son défunt maître dans les flammes. Patience Ciaran, tu es encore jeune. La sagesse viendra en son temps. Le jeune homme secoua la tête avec dépit, pour chasser des souvenirs envahissants. Il n'était pas fait pour être Shaman, il le savait bien. Son père aurait aimé le voir boulanger, comme lui. Après son décès, et vu l'absence de la moindre aptitude chez Ciaran dans ce domaine, sa mère l'avait confié à Gwirech. Une façon comme une autre de lui trouver une utilité.
Pourquoi avait-il donc eu besoin de quitter si tôt cette maudite Butte aux Lièvres ? Il s'y était rendu pour célébrer les funérailles du vieux chef de clan des Norejan. Un enterrement devait se faire en respectant certains rituels si l'on ne voulait pas offenser les esprits et risquer d'empêcher l'âme du mort de profiter du repos éternel. Ces rituels étaient connus uniquement des shamans, qui étaient les seuls habilités à les célébrer. Gardien du savoir et des traditions ancestrales, la bonne blague. Ciaran accomplissait en vérité bien peu de ces rituels millénaires. Il est vrai que dans l'imaginaire courant, un Shaman était un vieil homme avec une longue barbe, pas un petit jeunot maladroit. Ciaran n'inspirait pas vraiment confiance. Et il se jugeait trop peu expérimenté pour soigner les gens. La santé et les maladies n'étaient pas des choses à prendre à la légère. Il rendait ainsi peu de services à la population. C'était toujours de la faute de Gwirech, qui était mort trop tôt. Ciaran soupira. Il serait bientôt temps de se remettre en route. Il n'en avait vraiment pas envie. Le feu était chaud, et pour la première fois depuis qu'il avait quitté la Butte aux Lièvres, il se sentait en sécurité. Un bruit se fit entendre derrière lui, un bruit très léger de métal sifflant dans les airs. Ciaran se retourna vivement et failli hurler. Un immense homme, vêtu de mailles et de fourrure sortit en hurlant d'un fourré, le jeune homme ne l'avait pas vu s'approcher. Six autres surgirent à sa suite. Il était trop tard pour esquiver, mais de toute façon, Ciaran était bien trop abasourdi pour réagir. Comme dans un rêve, il vit une lourde flamberge fendre l'air…et le rater de peu. Le brigand qui la tenait s'écroula en hurlant aux pieds de Ciaran. D'une plaie béante dans son dos s'écoulait un liquide épais et carmin qui teinta la neige de rouge.
Le nouvel arrivant, qui venait de l'abattre, ne se préoccupa pas de son sort, virevolta et abattit son poing sur le nez du second qui s'effondra inconscient. Enfin, avant que quiconque ait le temps de réagir, il enfonça sa monstrueuse hache dans l'épaule du troisième, lui sectionnant presque le bras. Le Shaman ne pouvait détourner son regard terrifié de la tâche couleur vermeil qui s'élargissait devant lui. Son instinct lui soufflait de se mettre à couvert, mais il était tout simplement incapable de réagir.
Entre-temps, les trois autres maraudeurs restants s'étaient détournés de lui, voyant qu'il n'était pas agressif, et attaquèrent l’intrus. Celui-ci se mit à couvert derrière un arbre et expédia avec une effrayante précision son coutelas dans l'estomac du plus proche de ses assaillants. Les deux derniers jugèrent plus prudent de se retirer. Il ramassèrent quelque chose de volumineux dans la neige, et s'enfuirent en courant. Le calme revint sur la clairière.
Ciaran, au prix d'un immense effort, parvint à détourner son regard de l'homme étendu à ses pieds. Il releva la tête. L’intrus était toujours là. Il avait beau l'avoir sauvé, le Shaman n'était pas rassuré pour autant, il avait rarement vu autant de sauvagerie. Ciaran se demanda si le meurtrier de ses assaillants n'allait pas lui faire subir le même sort. De nouveau, il promena ses yeux sur les corps sans vie. Et moi qui me sentait en sécurité.
En attendant, l'autre ne paraissait pas se soucier de lui. Il était occuper à retourner tous les corps étendus, comme s'il cherchait quelque chose. Une idée naïve lui vint à l'esprit. Peut-être que s'il se faisait tout petit et ne faisait aucun bruit, l’intrus ne se rendrait pas compte de sa présence… Il retint sa respiration. L'autre passa près du feu qui brûlait toujours et un tison lui éclaira le visage l'espace d'un instant. Ciaran faillit hoqueter de surprise. C'était une femme.
Elle s'approcha d'un des hommes allongé dans la neige, celui auquel elle avait cassé le nez et commença à le secouer brutalement. Il finit par reprendre connaissance. Elle commença alors à lui hurler dessus :
- Où sont-ils allés !? Tes compagnons ! Dis-moi où ils sont partis !
L'autre, ainsi malmené, ne semblait plus du tout savoir où il en était et avait l'air terrorisé. Ciaran commença à avoir pitié, mais pas au point d'intervenir et de se faire remarquer. Le blessé finit par crier :
- A Dale ! On devait prendre la grande route de l'Est, et vendre tout notre butin là-bas. Je jure que c'est vrai !
La guerrière dut le croire, car elle cessa de le malmener. Elle sortit un poignard. Non ! aurait voulu crier Ciaran, mais les mots s'étranglèrent dans sa gorge. La jeune femme lui trancha le gosier. Sans la moindre once de pitié à son égard, elle le retourna et commença à fouiller dans la sacoche du mort. Une sueur froide perla le long des tempes du Shaman. Comment un être humain, une femme qui plus est, peut se conduire ainsi ? La guerrière eut soudain l'air satisfaite et sorti quelque chose du sac, puis mordit dedans à pleine dents. Ciaran commençait à envisager de fuir sans qu'elle ne s'en rende compte, quand soudain, elle se retourna et bondit sur ses pieds. Son poignard toujours dégoulinant de sang elle marcha d'un pas résolu vers Ciaran. Celui-ci cru voir sa dernière heure arrivée. Il se demanda s'il avait été assez bon dans sa vie pour éviter le châtiment éternel. Il n'avait rien fait de particulier de bien, mais rien de mal non plus. Alors qu'il se posait ces questions, la jeune femme vacilla et tomba à genoux, et, après avoir inspiré profondément, comme pour se calmer, rampa jusqu'à un arbre. Elle devait être blessée. Ciaran aurait du mettre cela à profit pour s'enfuir, mais la peur paralysait chacun de ses membres. Elle ouvrit la bouche et dit :
- Toi, là ! Approche !
Son accent était mélodieux et résonnait assez étrangement aux oreilles de Ciaran, prouvant que la jeune fille venait de loin. Le Shaman lui aurait bien obéi, mais il ne pouvait tout simplement pas bouger. L'autre ajouta :
- Viens m'aider, j'ai besoin de tes mains pour soigner ma blessure.
Elle dénuda son épaule, dévoilant une belle entaille. La coupure paraissait nette, mais il fallait recoudre la plaie. Elle ne paraissait plus aussi agressive qu'avant, Ciaran commença à respirer plus librement. Elle lui dit encore :
- Ces hommes, là. Ils venaient pour toi. Je t'ai sauvé la vie, alors tu me dois bien ça, pour commencer...
Ces mots perturbèrent Ciaran. La jeune fille avait-elle juste voulu le sauver ? Mais alors, pourquoi toute cette violence ? Et pourquoi en auraient-ils après lui ? Il ne les connaissait même pas. Non, c'était absurde, l'étrangère l'aurait tué lui aussi si elle n'était pas blessée. Mais il était vrai qu'elle venait de lui sauver la vie, en abattant ses assaillants alors que lui même était paralysé par la peur.
- Au fait, dis-moi..."Dale", tu connais ? Tu sais comment y aller ?
Le jeune homme se secoua un peu. L'étrangère avait beau rester dangereuse, elle venait de le sauver, et elle avait été blessée. Il se demanda pourquoi tenait-elle à ce point à poursuivre les bandits. En avoir tué quatre ne lui suffisait-il pas ? Et de quelle lointaine et sauvage contrée venait-elle pour ne pas connaître la cité de Dale !
- Bien sûr que je sais comment me rendre à Dale, qui ne le sait pas ?
L'étrangère parut vouloir ajouter quelque chose, mais sa bouche se tordit en un rictus de douleur. Ciaran s'approcha prudemment d'elle, sans quitter le poignard des yeux. Il acheva de bien lui dénuder l'épaule, afin d'observer la plaie de plus près. Bien que méfiante, la jeune fille le laissa faire. La blessure était propre heureusement, mais l'étrangère ne serait pas en mesure de se servir de son bras gauche avant une ou deux semaines. Le plus rapide était évidemment de désinfecter puis de recoudre, mais c'était douloureux. En revanche, son épaule guérirait plus vite. Pas ici, résolut le jeune homme.
- C'est une mauvaise plaie, je peux la recoudre mais ça risque d'être douloureux. Il faut trouver un abri, pour que je puisse te soigner ça.
L'étrangère lui jeta un regard interrogateur.
- Je me nomme Ciaran, je suis un Shaman du peuple des béornides. Je te remercie de m'avoir sauvé. |
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| Ven 19 Avr 2013 - 15:26 | | Kristvina souffrait bien plus qu'elle ne voulait le montrer. La lame était passée juste au-dessus de son cœur, et si elle arrivait encore à bouger le bras gauche - très lentement et en se montrant très précautionneuse -, cela lui arrachait une grimace de douleur qu'elle dissimulait à grand peine. Il n'était pas dans ses habitudes de remettre son sort dans les mains d'un autre, et bien qu'elle se refusât à l'admettre, se retrouver dans une situation aussi étrange la mettait terriblement mal à l'aise. Elle était une guerrière, une chasseresse dans l'âme, qui soignait ses plaies dans l'intimité de son abri, et qui ne se laissait pas attendrir par les premières boucles de cheveux blonds qu'elle croisait. Alors pourquoi avait-elle épargné celui-là, tout tremblant et tout misérable ? Elle n'arrêtait pas de se le demander. Peut-être parce qu'il était justement tout tremblant et tout misérable. Même en faisant un grand effort d'imagination - ce qui n'était pas le point fort de la jeune femme -, elle ne parvenait pas à le trouver menaçant ne fût-ce qu'un instant. Avec ses grands yeux candides, et son air terrorisé, il semblait davantage prêt de mourir de peur que de l'attaquer par surprise. Pourtant, malgré tout, elle gardait son poignard en main...au cas où. Elle avait déjà vu des gens au visage d'ange se révéler être des adversaires redoutables, et s'il y avait bien une chose qui lui avait permis de se maintenir en vie toutes ces années, c'était bien sa méfiance à l'égard de quiconque. Ainsi que Blodvatn, la hache rituelle de son clan. Hache qu'elle avait perdu. A cette pensée, son visage s'assombrit immédiatement. Les sourcils froncés et une moue contrariée sur le visage, elle semblait prête à se lancer à la poursuite des deux hommes sur-le-champ. Quand bien même son état ne le lui permettait pas véritablement. Se faisant violence pour demeurer patiente, se convainquant qu'elle connaissait probablement mieux la neige que ses deux cibles du moment, elle passa essuya ses mains couvertes de sang sur la poudreuse immaculée, et croqua avidement dans un morceau de viande séchée qu'elle avait pris au type qu'elle avait tué. Ce n'était pas grand-chose, mais elle était affamée, et il lui restait encore trois corps à fouiller. Le goût salé de la venaison n'était pas déplaisant, et sans cette maudite blessure qui la lançait affreusement, elle aurait pu en profiter encore davantage. Alors, le gamin parla pour la première fois. Kristvina avait cru qu'il était muet, pendant un temps. La peur, parmi les siens, avait parfois des effets étranges sur l'âme. Des esprits entouraient l'être effrayé, et lui retiraient la voix, pour qu'aucun cri ne vînt le trahir. Ils la lui rendaient quand bon leur semblait. La jeune femme avait toujours considéré que c'étaient des histoires pour lui faire peur, mais à chaque fois qu'elle avait une frayeur, elle ne pouvait pas s'empêcher d'émettre quelque son pour s'assurer que sa voix était toujours là. Cette pensée disparut aussi vite qu'elle était apparue, et elle se concentra sur le garçon qui l'interrogeait d'un air étrange. Visiblement, il savait comment gagner Dale, mais de toute évidence, il considérait qu'il s'agissait d'une évidence. Elle se dit qu'il se montrait bien insolent pour quelqu'un dans sa position, et à dire vrai, si elle n'avait pas eu besoin de son aide, peut-être qu'il aurait définitivement cessé d'exister. Elle voulut lui répondre quelque chose, mais la douleur revint plus intense que jamais, et elle grimaça, en proie à une souffrance perceptible. - C'est pas vrai... Lâcha-t-elle entre ses dents serrées.Elle sut gré au jeune garçon de ne pas poursuivre sur le sujet de Dale, et de se concentrer sur sa mission du moment : la guérir et lui permettre de retrouver ces hommes qu'elle allait de toute évidence mettre à mort dès qu'elle mettrait la main dessus. Il avait les mains froides, et elle frissonna lorsqu'il écarta encore un peu plus son vêtement pour mettre à nu la plaie qui saignait peut-être un peu moins abondamment qu'avant. Elle serra les dents, mais cela lui faisait si mal qu'elle détourna la tête, pour cacher le masque de peine qui s'était peint sur son visage. Ce n'était pour l'heure que l'étape du diagnostic, et il faudrait encore attendre qu'il la recousît, ce qui s'avérerait très probablement beaucoup plus douloureux. Cependant, elle était brave, et ne se laisserait pas arrêter par une si petite blessure. Le blondinet acheva son inspection, et considéra justifié de demander à Kristvina de s'éloigner, de trouver un abri pour pouvoir procéder à ses soins. Son visage changea du tout au tout, passant subitement à une colère froide, terrible comme l'hiver qui s'abattait sur eux en ce moment sous la forme de tourbillons de neige : - Non ! Tonna-t-elle. Pas question d'aller où que ce soit. Recouds la plaie, tout de suite ! Ensuite, tu me guideras jusqu'à Dale, c'est compris !?Elle haletait. Sa colère avait réveillé la douleur dans son épaule, qui commençait seulement à refluer alors qu'elle venait de se calmer. Elle avait l'impression d'avoir couru pendant une heure d'affilée, et elle se laissa aller à reposer sa tête contre l'arbre au pied duquel elle était adossée, sa poitrine se soulevant à un rythme soutenu, tandis qu'elle aspirait l'air à grandes goulées. Elle avait les mâchoires serrées, et sa prise s'était raffermie sur son poignard, à lui en faire blanchir les jointures. Ce genre de réactions était assez habituel chez elle, aussi n'en fut-elle pas surprise outre mesure, mais il était simplement rare qu'elle le montrât devant d'autres personnes. Elle se mettait souvent en colère contre elle-même, contre les gens qu'elle traquait, ou bien contre les ours contre qui elle se battait. Mais la plupart ne lui répondaient pas. Le gamin ne répondit pas immédiatement non plus, et un silence gêné s'installa entre eux. Il fut le premier à le rompre, sur un ton relativement amical, mais non dénué de crainte. Il se présenta assez simplement, et la remercia de lui avoir sauvé la vie. Elle haussa un sourcil, presque surprise de le voir réagir ainsi. En vérité, elle n'avait plus vraiment l'habitude des relations humaines cordiales, et il lui semblait que cela faisait une éternité qu'elle n'avait pas parlé à quelqu'un ainsi, simplement. Elle demeura silencieuse un instant, comme si elle cherchait quelle était la réponse la plus appropriée à donner dans cette circonstance. Elle finit par se rabattre sur la chose la plus facile : - Kristvina. C'est mon nom.Elle avait prononcé ça sur un ton assez neutre, qui ne reflétait pas bien ses émotions du moment. Outre la douleur dans son épaule, elle était perturbée par tout ce qui s'était passé. La perte de Blodvatn, le fait d'avoir épargné ce gosse, d'être soignée par lui... Tout cela lui paraissait bien étrange pour une chasse qui s'annonçait pourtant banale. Son excès de confiance lui avait coûté bien plus cher qu'elle n'aurait pu le croire. Elle sortit de ses pensées, et se rendit compte que sa réponse était quelque peu sèche, et qu'il était peut-être préférable de se montrer un minimum courtois avec la personne en charge de réparer son épaule blessée. Quelque peu hésitante sur la marche à suivre, elle se lança avec un peu d'appréhension : - Euh...Tu appartiens au clan des Béornides, c'est ça ? Je n'en avais jamais rencontrés avant, mais vous devez être de grands chasseurs d'ours, tout comme nous.Ce disant, elle avait désigné du menton la veste en peau d'ours que le garçon portait. Il était vrai que dans son propre clan, l'ours était l'animal sauvage par excellence : celui qui emportait le plus de chasseurs valeureux, mais qui assurait à tous et à toutes un repas copieux pendant plusieurs semaines. A la fois un prédateur et une proie, à la fois un ennemi mortel et une créature révérée. Kristvina, elle, avait rapidement appris à les considérer davantage comme des ennemis que comme des divinités. Elle en avait affronté un, peu après avoir commencé à vivre en solitaire, et il lui avait laissé une grosse cicatrice sur la jambe, en souvenir. Elle avait compris qu'ils ne seraient jamais amis. Sans s'en rendre compte, elle s'était mise à masser son mollet, comme si elle sentait encore les dents de l'ours plantées dans sa chair. A chaque fois qu'elle y pensait, elle sentait revenir l'angoisse de la mort qui l'avait saisie à cet instant, et l'impuissance qu'elle avait éprouvé, secouée comme une vulgaire brindille. Elle se demandait encore comment elle avait fait pour s'en sortir. Elle secoua la tête pour écarter ces sombres pensées, et revint au garçon. - Ton clan doit être bien différent du mien, Ciaran des Béornides, pour avoir un homme sans poils au menton pour Shaman.Sans se départir de son sourire, et attendant une réponse à sa dernière phrase, elle glissa entre ses lèvres un nouveau morceau de viande, qu'elle mâcha avec soin. Ses paroles pouvaient apparaître mesquines, mais elles étaient largement atténuées par le petit sourire qui était apparu sur son visage. Un sourire carnassier. Un sourire de guerrière. Le sourire d'une prédatrice...D'une tueuse d'ours. #KristivnaMembre des Orange Brothers aka The Bad Cop"Il n'y a pas pire tyrannie que celle qui se cache sous l'étendard de la Justice"- Spoiler:
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