Ah ce que tu pouvais être fier et comblé.
Sentir la puissance de sa monture, de ses muscles déliés, accompagner son galop dans l’union du cheval et son cavalier.
Sentir le poids de cette armure, nettoyée avec soins et brillante somme si elle était d’argent, les renforts en cuir aux articulations cirés et lustrés.
Sentir battre à tes côtés ton épée, à chaque impulsion de Nivafel.
Te sentir l’âme d’un véritable homme du Rohan, d’un Rohirrim.
Ressentir ce frisson d’excitation, de l’aventure.
Le frisson du combat.
Tu avais fait ton deuil de Béomer.
Quelque chose maintenant s’agitait à nouveau en toi, tapi en ton être.
Tu n’étais pas parti sans rien,.
Tout d’abord une bourse, présent de ton père, pour pallier à tes premiers besoins, avant que de trouver quelque occupation qui viendrait subvenir à tes besoins.
Ensuite, dans une besace, une lettre de recommandation de ton père, à l’attention du vice-roi, qu’il t’avait dit avoir connu plus jeune, dans laquelle il lui proposait tes services s’il t’en jugeait digne.
De même, tu n’étais pas parti seul.
Orwyn, fils d’éleveur, et Galain, fils de Thorik, rohirrim au service de ton père, t’accompagnaient. Eux aussi allaient chercher emploi à Edoras, dans l’armée. Orwyn était plus jeune d’un printemps tandis que Galain avait ton âge. Mais tu étais le seul à déjà avoir combattu dans un véritable conflit.
Vous chevauchez en silence dans l’aube naissante.
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« Devant eux à l’Ouest, le monde s’étendait silencieux, gris et sans forme ; mais tandis qu’ils regardaient, les ombres de la nuit se défirent, les couleurs de la terre, à son réveil reparurent : le vert inonda les vastes prairies de Rohan ; les brumes blanches chatoyèrent dans les vallons aquifères ; et dans le lointain à gauche, à trente lieues ou davantage, s’élevaient les Montagnes Blanches » JRR Tolkien
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Votre compagnie chevauche un petit moment, peut-être une heure ou deux avant que de croiser âme qui vive.
Les routes sont calmes. Mais ce n’est peut être pas l’heure matinale ou la quiétude qui rend les alentours si déserts et privés de toute vie humaine apparente. Le vieil homme que vous croisez avec son chariot, tout d’abord apeuré par votre approche puis rassuré par vos saluts, vous explique que certaines rumeurs de conflits quiescents circulent. Que des groupes d’orques circuleraient de nuit également.
Il est fermier et n’a d’autre choix pour survivre que de s’aventurer sur les routes pour échanger et subvenir à ses besoins. Mais la prochaine bourgade est proche et avec elle le soulagement de cet homme qui vous dit au revoir avec amabilité, et cette solennité de l’ancien voyant monter les jeunes au front.
Une heure plus tard, de nouveau en pays isolé, vous finissez par tomber sur un groupe d’orques.
Un groupuscule en réalité. C’est toi qui les repère en premier, se déplaçant furtivement dans les vals. Il sont cinq, silhouettes sombres et viles venant enlaidir le vert pays du Rohan
A leur façon hâtive de se déplacer, ils ne ressemblent guère à une troupe en maraude, on les dirait pressés.
Tu lèves le poing pour incliner tes compagnons à stopper et leur désigne la menace. Amenant leurs montures au flanc de la tienne, tu n’as pas besoin de les regarder pour sentir monter en eux la tension.
Vous les surplombez du haut de la colline, et vous tournant le dos, ils n’ont pas encore remarqué votre présence. La situation est trop belle.
Ton cœur pulse d’une énergie nouvelle, venant rompre la monotonie de cette début de journée, alors que tu te saisis de ton bouclier et ta lance.
"Une charge rapide à la lance, pas de cris pas d’avertissement. Volte face à vingt mètres et on abat les survivants."Tu ajustes ta prise sur ton bouclier et ta lance. C’est une lance de cavalier, plus courte qu’une lance d’hast, faite pour pouvoir endurer un choc frontal sans se rompre, du moins en théorie. A son bout, ornant le fer de lance, un simple ruban rouge flotte, comme les quatre qui ornent ton bouclier à sa périphérie.
Tes compagnons se préparent de même. Y-a-t-il de l’appréhension ? Tu ne préfère pas les regarder, pour ne pas les voir flancher. Si ils te voient partir droit et sans hésitation, ils te suivront, l’honneur l’exigeant.
Une expiration plus profonde. L’air vrombit dans l’espace clos de ton heaume.
Tu talonnes Nivafel.
Derrière toi, tu entends les montures de tes camarades te suivre.
Vous dévalez rapidement la pente, avant que de gravir un petit talus, puis vous retrouver sur un terrain plat. Vos lances sont encore à la verticale, et tu sens presque les vibrations de ton petit fanion en ta main.
Vous vous rapprochez. Alors que vous n’êtes qu’à une centaine de mères, l’orc de queue s’arrête et se retourne. Sans doute crie-t-il quelque chose car ses compagnons se figent à leur tour et vous regardent avancer à vive allure.
Après l’instant de flottement, trois s’éparpillent sans demander leur reste. L’un semble hésitant, et le premier à vous avoir remarque – le plus imposant- , dégaine son épée.
Vous n’êtes plus qu’à vingt mètres. Tu distingues sa peau noirâtre, sa lame de même couleur. Tu abaisses ton arme et lance Nivafel sur celui qui vous défie, probablement le chef du groupuscule. Il lève son arme et pivote sur le côté, tentant probablement d’éviter ta charge et frapper ta monture pour te mettre à terre. Tu anticipes son mouvement et ton fer le cueille en pleine gorge, sous son casque.
Choc sourd et déchirement des chairs. Son corps n’a pas touché sol qu’il est déjà mort.
A ta gauche, Orwyn transperce sur place l’orc hésitant, et sa lance, fichée dans le cadavre lui saute des mains. Galain continue sa charge sur ta droite, à la poursuite des fuyards, et tu le suis dans ta lancée. Les fuyards ne vont guère loin, et alors que la cible de ton camarade tente d’échapper à sa mort et la lance qui le traque, il trébuche et passe sous les sabots de la monture du jeune rohirrim. Un craquement plus tard, c’en est fini. Le jeune rohirrim continue sur sa lancée, et d’un magnifique lancer de javelot, parvient à clouer un deuxième adversaire. Le dernier survivant que tu rattrapes parvient à esquiver ta lance en se jetant au sol. Frustré, tu fais faire volte face à Nivafel.
La dernière créature est au centre du triangle que vous formez maintenant. Brandissant une hache grossière, le désespoir faisant surgir à nouveau sa hargne, il crache dans ta direction.
Tu mets pied à terre, fiche ta lance su sol, et dégaine ta lame, marchant d’un pas vif vers lui. Il se lance en avant, hurlant, la hache brandie. Une attaque basique, facile à anticiper et parer. Au dernier moment, tu lèves ton bouclier, et l’oriente vers l’extérieur. Tu sens le choc lorsque le fer de sa hache vient frapper, atténué par l’inclinaison du bouclier, qui dévie l’arme et l’élan de ton adversaire sur le côté, l’envoyant tituber vers ta gauche. Ouvrant ta garde, d’un tranchant de ta lame, tu viens frapper le cou à ta portée.
Le sang gicle de la plaie béante, et il titube un court instant, comme assommé, avant de s’effondrer.
Ton cœur palpite. Des frissons te parcourt le corps.
C’est un retour à l’action que tu savoures.
« Fouillez-les corps, voyez-si quelque chose est récupérable. »
HRP/suite/HRP#Théomer