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 [DECLASSIFIE]Cendres et poussières

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Nathanael
Espion de l'Arbre Blanc
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Nathanael

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[DECLASSIFIE]Cendres et poussières EmptyMar 6 Déc 2016 - 9:25

La chambre … Le tenancier de l’auberge avait l’audace de dire qu’il s’agissait d’une chambre. Un matelas rempli de paille moisie et une couverture en laine qui sentait encore le mouton qu’on avait tondu pour la tisser. Le capitaine Berton connaissait le moindre recoin de cette bicoque où s’accrochaient des odeurs de ragoût brûlé et de graisse froide. On ne venait pas pour y manger ou pour y boire, chacun le savait. L’aubergiste avait un coffre rempli d’or. “Ses pourboirs”. Mais personne n’était dupe. Sa daube était tellement dégueulasse et sa bière mauvaise, que personne ne lui aurait donné la pièce pour récompenser ses talents de cuisinier. Non, son or, il le gagnait autrement. Rien n’achète mieux le silence que quelques pièces frappées du visage du roi. Le capitaine préférait le silence absolu de la mort et c’est bien pourquoi il était là aujourd’hui. La missive qu’il avait fait porter à la jeune femme devait l’emmener tout droit dans la chambre six de cette auberge crasseuse. Il n’avait plus qu’à attendre. Il chercha un endroit où s’asseoir. Le lit peut-être. Mais quand il souleva les couvertures, une armée de petites bêtes noires s’échappèrent en sautant et en courant. Puces, tiques ou morpions, il ne voulait pas le savoir. Il chercha un siège, en trouva un, dissimulé sous une épaisse pile de coussins rapiécés qui exhalaient encore l’odeur de l’arrière train de la dernière personne qui s’était assise dessus. Décidément ! Il ouvrit la porte de la chambre qui donnait sur un couloir mal éclairé.

- Aubergiste !

Le capitaine Berton tapa trois grands coups sur les planches du mur. Le tenancier monta en trottinant, ses bourrelets se trémoussant au-dessus de sa ceinture. Il était rouge et soufflait comme un bœuf quand il arriva à la dernière marche.

- Deux chaises… propres, précisa le capitaine.

Le gros bonhomme descendit après avoir hoché la tête. Mais ce n’est pas lui qui revint toquer à la porte. Le sagouin avait osé envoyer sa femme. Elle était aussi grasse que lui, mais ses courbes lui seyaient mieux. Elle avait des seins énormes qui semblaient vouloir sauter du balcon à chaque fois qu’elle faisait un pas.

- Laissez, je vais me débrouiller.

Sans un merci, il récupéra les deux chaises et les posa face à face tout en attendant son invitée. Elle ne devrait plus tarder. “Je l’espère”. Il n’aimait pas attendre. Personne n’aimait attendre. Qui pouvait apprécier le bonheur de se tourner les pouces dans une chambre pouilleuse ? Mais le général le lui avait ordonné. Et quand le général ordonnait, on obéissait. Les Valar savaient ce qu’il faisait à ceux qui n’obéissaient pas. Lui-même ne voulait pas le savoir. Il y avait bien des rumeurs à propos du général. Le capitaine Berton savaient qu’elles reposaient sur du vent, mais c’était dire à quel point Cartogan enflammait les imaginations. Les soldats de la cité se pissaient dessus quand il menait ses tournées d’inspection. Elles étaient de plus en plus rares. Mais il fallait voir l’ardeur des combattants quand ils astiquaient leur armure. Le capitaine était sûr qu’ils ne prenaient pas autant de soin à s’astiquer le manche. Ils frottaient tant le métal avec leur bout de chiffon huilé qu’ils en venaient presque à le polir une seconde fois. La plupart d’entre eux n’avaient porté les armes que comme tenue d’apparat au mariage de Tar Aldarion. Depuis la campagne d’Assabia beaucoup de jeunes gens avaient gonflé les troupes royales. Il fallait bien remplacer les morts. Les braves, les courageux, qui avaient donné leur vie pour retrouver l’enfant chéri du roi. L’orgueil des uns faisait le triste sort des autres. Il était bien heureux de ne pas avoir participé à cette mascarade guerrière. Ceux qui en étaient revenus disaient que le sable avait bu le sang si goulûment que c’était comme si tout le désert du sud voulait leur peau. Et ils n’avaient peut-être pas tord.

Le capitaine Berton ne venait pourtant pas parler de sang. Pas encore. Pas tout de suite. Le général Cartogan lui avait donné une tâche de servante. Mais c’était celle qu’il préférait. Il était là pour s’assurer que la jeune recrue qui se disait si fidèle à l’homme de fer en ferait autant. Une première tâche bien difficile, mais qui les assurerait de son dévouement et de ses capacités. Si elle venait à échouer le capitaine Berton savait ce qui lui resterait à faire. Et tandis qu’il réfléchissait en son fort intérieur, quelqu’un frappa à la porte.
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Lithildren Valbeön
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[DECLASSIFIE]Cendres et poussières EmptyMar 6 Déc 2016 - 14:50
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Elle était allée prendre son courrier dans l'ancienne maison de son père décédé – Paix à son âme – quand, parmi le courrier basique, elle vit une missive marquée du sceau du Général Cartogan. Ce n'était certainement pas lui qui avait fait cela, il ne s'en donnait jamais la peine. Elle regarda tout autour d'elle, pour vérifier si personne ne la regardait et rentra dans la maison. Là, elle se retira dans la chambre de son père, ferma les rideaux et les volets de bois, alluma une faible bougie, ferma la porte et s'installa sur le bureau. Elyena descella la missive, la flamme parcourut les lignes pour en dévoiler le message. Elle était employée pour enquêter sur l'origine des rumeurs sur Cartogan et mettre à jour la trahison de cette personne, quelle qu'elle soit, alliée ou ennemie. Elyena posa la bougie, la missive et appuya son dos sur le dossier de la chaise. Ce genre de missive était plutôt faite d'ordres que d'une demande. Si l'on appelait la Rose Noire, alors elle répondait à l'appel. Elyena était loin d'être la meilleure mais elle avait participé à des missions ayant leur importance et mit en prison sans toujours le vouloir les coupables. Une noble lors d'une fête, deux fois Sir De Varden et ses complices, une femme ayant tué son mari et fait accusé son fils... Elyena pensa soudain qu'aujourd'hui, elle devait rencontrer Yvân afin de prendre de ses nouvelles. Cela lui permettrait de revoir cet enfant seul avant la mission. Elle devait se rendre avant le soir à l'Auberge des Murmures. Bien.

Elyena ouvrit l'armoire de la chambre et regarda la seule tenue qui y résidait. Son mari ne devait la voir sous aucun prétexte, pour éviter les questions. Elyena rouvrit les volets et rideaux de la chambre située à l'étage de la maison, puis se dévêtit. La Rose Noire se regarda dans le miroir couvert d'une très fine couche de poussière. Ses courbes élégantes s'étaient amincies depuis "l'incident de l'artefact" mais elle gardait son charme ; sa poitrine était proportionné pour sa taille fine bien que légèrement plus ronde et gonflée à cause de sa grossesse et de l’allaitement assez long de son fils Aren ; ses jambes étaient solides et fines, plus musclées que le reste de son corps. Elyena pouvait marcher, s'accroupir, se relever et courir presque une journée entière sans faiblir. Elle enfila un pantalon, un débardeur et des bottes de cuir noir – ces dernières étant faites pour imiter un modèle elfique, plus léger et et plus fin – et ajusta sa ceinture à laquelle pendait une petite bourse avec une broche de rechange – pour éviter que son mari ne la reconnaisse si jamais elle le croisait - une dague. Elle ne savait pas s'en servir comme un assassin mais c'était une précaution de défense et de menace voire une aide précieuse si besoin était. Elle prit ensuite son manteau de tissu bleu nuit aux deux pans fixés par une broche en métal volontairement oxydé afin qu'elle ne brille à aucune lueur de torche ; la capuche en était si ample que quelle que soit la lumière du jour, nul ne verrait son visage. Cela permettait de cacher son identité à quiconque voulait l'incriminer. Elle était assez fière de réussir ses mission – en général – car si l'un des prisonniers venait à sortir, il voudrait la tuer. C'est pas comme si ils connaissaient son nom ou son adresse, mais tout va très vite dans cette ville.

Elyena sortit par la porte derrière la maison et s'engagea dans les ruelles sombres slalomant entre les maisons. Elle ne sortit des ruelles que plus tard, afin de se rendre près des arcades creusées dans la roche en haut de laquelle se trouvait cette pointe superbe surplombant la ville. Yvân était déjà là, dans l'ombre, fébrile et patientant. Elle se présenta devant lui et l'embrassade qu'ils échangèrent dura une trentaine de secondes.

- Quel plaisir de te revoir, Yvân.
- C'est partagé, vous le savez.

Ils parlèrent de tout et de rien pendant presque deux heures avant de se quitter. Le soleil déclinait vers le crépuscule bien qu'on en était encore loin. Elyena manquait de temps et en perdait en restant plantée là. Elle se rendit chez son mari, changeant la broche de son manteau en chemin pour une en fer bien polie et brillante sans gravure exceptionnelle. La Rose Noire monta quatre à quatre les marches menant à l'étage, marchant d'un pas vif à sa chambre. Aren dormait dans un lit munit de barrière autour pour lui éviter de tomber ou de marcher pendant la nuit ; son sommeil paisible apaisait sa mère. Elyena le prit dans ses bras et le serra doucement contre elle, pour imprimer la chaleur et la douceur de ce petit corps fragile. Elle l'embrassa ensuite sur le front et le reposa dans son lit. Edahn entoura alors sa femme de ses bras, la faisant sursauter. Elle sourit au baiser dans le cou.

- Il te ressemble.
- Si tu penses me flatter, c'est réussi.
- On ne flatte pas l'égo d'un soldat, on ne peut que le brosser.

Il la lâcha et fit mine de bouder.

- Je dois m'absenter quelques temps pour des affaires.
- Encore ?
- Je suis désolée, Edahn.
- Tu es si peu présente pour ton fils...
- Il est encore jeune, il ne s'en souviendra pas.
- Tu vas me manquer. Reviens vite, d'accord ? Et sois prudente.
- Tu as ma parole.


Ils échangèrent ce genre de longs et tendres baisers qui faisait frémir la jeune femme. Mais le temps se rétrécissait à vu de nez et venait à manquer. Elle ne devait pas faire attendre son contact à l'Auberge. Elle se défit avec douceur de l'étreinte de son cher et tendre, puis quitta la maison avec une larme aux yeux. Elle changea la broche de nouveau et mit sa capuche. Des perles salées roulaient sur ses joues mais elle ne sanglotait pas. Ce déchirement qu'elle ressentait ne la quittait jamais lorsqu'elle partait en mission loin de sa famille.

L'Auberge des Murmures. Elle n'y avait jamais été, avant elle recevait des missives par corbeau ou des lettres cachetées résumant une situation, donnant rendez-vous à un endroit précis dans la Cité pour voir un contact qui donnait les instructions. Mais ici, elle allait enfin voir l'intermédiaire au lieu d'un domestique, d'un page ou de quelqu'un qui ne risquait pas de révéler grand chose. Elle entra dans l'auberge, visage masqué. Sa silhouette révélait bien son statut de femme, mais nul ne tourna la tête. D'ailleurs, les bières se trouvaient sur les tables mais l'on en buvait pas, tout comme la nourriture que l'on ne mangeait pas. L'endroit était aussi sale que l'argent qui circulait. Elle traversa la salle à grands pas, ne souhaitant nullement s'attarder ici et monta les escaliers. Elle chercha des yeux la chambre où son contact se trouvait, prit une grande inspiration et toqua. Une voix masculine lui parvint de l'intérieur, lui disant d'entrer. Elle obéit et fronça les narines à l'odeur de la chambre. Tout était miteux, pourri et par miracle son contact avait pu obtenir deux chaises propres. Il était plus âgé qu'elle sans pour autant être un ancien. Il invita la jeune femme à s'asseoir, lui montrant sa mine bougonne. Oui, elle était en retard... La jeune s'assit et dévoila son visage : un visage fin au teint clair rehaussé par deux yeux bleus et encadré de longs cheveux noirs lisses. Sa beauté était cruciale pour ses missions, pour séduire et corrompre – bien que montrer ses atouts à d'autres hommes que son mari la dégoûtait et qu'elle n'était jamais allée jusqu'à tromper son mari pour obtenir des informations. L'homme jaugea la jeune femme et ouvrit la bouche pour parler.

Enfin les choses sérieuses commençaient.

#Elyena
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Nathanael
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[DECLASSIFIE]Cendres et poussières EmptyJeu 26 Jan 2017 - 10:06

Elle était en retard. Mais il ne dit mot, tandis qu’elle passait la porte. Il savait qu’un jour la mort viendrait et la prendrait, aussi sûrement qu’elle prenait tous les hommes sur cette terre depuis l’aube des temps. Il était impossible d’être en retard avec la mort. À cette pensée, il sourit. Inutile de lui faire payer quelques minutes d’attente. La vie était bien assez difficile. Et la mission qui suivait aussi. Quelques minutes de retard, c’était quelques minutes d’insouciance en plus, quelques minutes de répit, quelques minutes gagnées sur la grande faucheuse noire. La putain d’Eru.

Il dardait ses yeux de fouine sur la jeune femme qui lui faisait face. En parlant de putain… par les Valars, depuis combien de temps n’avait-il pas senti la douceur d’un sein gonflé de désir dans la paume de sa main ? Pensée fugace. Fichtre, la mission passait avant tout. Et puis la beauté… combien de temps gardait-on son joli minois au service de l’Arbre Blanc ? Est-ce qu’il n’avait pas été plus beau lui-même quelques années auparavant ? Ses traits tirés, son teint cireux et sa maigreur affichée étaient autant de sacrifices faits pour le royaume. Quand on était aussi belle, c’est qu’on ne servait pas depuis très longtemps sous les ordres du général.

– Vous ne savez pas pourquoi vous êtes ici, vous ne savez pas qui je suis. Vous ne le saurez pas davantage après notre discussion.

Il n’aimait pas les préliminaires. Les politesses étaient des sucreries pour les gourmands raffinés. Le capitaine préférait la soupe de moelle.  

– Les hauts dignitaires sont inquiets. L’Arbre Blanc se meurt. Nous faisons appel à vous pour couper les branches qui menacent de faire pourrir le tronc.

Un silence. Il ne la quittait pas des yeux. À chaque mot il lisait son visage. Il en mémorisait chaque détail. Pas pour s’en souvenir une fois le soleil couché, allongé seul sur sa paillasse. Non. En cas de traîtrise plutôt. Afin de ne pas tirer sur la mauvaise personne, le moment venu. Mettre un coup de couteau à un innocent, quelle perte de temps ! C’était déjà arrivé à un ou deux agents. Dommages collatéraux disait-on. Si le capitaine avait été à la tête de l’Arbre Blanc, il aurait fait tuer les imbéciles qui s’étaient trompés de cible. L’incompétence était intolérable à ses yeux.

– Des séditieux menacent le général et les agents au service du royaume. Des canailles qui regrettent le temps où un vieux renard dirigeait l’Arbre avec un peu plus de complaisance. Ils craignent la discipline et l’ordre imposés par le général Cartogan et veulent le faire tomber. Et ça ne m’étonnerait pas qu’un vieillard en robe bleue trempe dans ce complot.

Jusqu’aux chevilles, ou jusqu’au cou, il ne le savait pas. Le capitaine n’avait pas pu déterminer à quel moment le conseiller d’Arnor avait réussi à faire tourner la tête de ces agents. C’est qu’il parlait bien le coquin. Il maniait les mots comme on tend des bonbons à des enfants. Il les avait détournés de leur objectif, la défense du royaume, pour les faire adhérer à ses propres opinions. Agissait-il de son propre chef ou sur quelques recommandations de la part de la reine ou du roi du Nord ? Voilà qui serait plus grave. Crise diplomatique. Complications politiques. Sur fond de chasse au trésor et de quête du pouvoir, ce n’était pas impossible. Le Tar n’avait-il pas pris la liberté d’envoyer ici et là ses pions sans en avertir le Gondor ? Chercher à fragiliser le royaume de Méphisto en sapant ses fondations n’était qu’un coup de plus sur l’échiquier. Le capitaine en était presque certain. Mais les doutes ne suffisaient pas, les faits seuls comptaient.

– Nous avons un ou deux noms. Des hommes à suivre et à surveiller. Rien de plus pour le moment. Vous me ferez des rapports concis à la fin de chacune de vos journées. Rapports que vous me donnerez une fois par semaine dans cette même Auberge. Trouvez n’importe quel prétexte utile à cette mission. Prenez un amant s’il le faut, peu m’importe. Le royaume, seul, doit rester debout. Le reste n’a aucune importance. Votre vie n’a aucune importance. Étant donné les informations que je vous ai transmises et le danger qu’elles représentent si elles tombaient entre de mauvaises mains, vous conviendrez que le moindre écart de votre part ne donnera lieu à aucun pardon.

Servir ou mourir, telle était sa devise.
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[DECLASSIFIE]Cendres et poussières EmptyMer 8 Fév 2017 - 11:53
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Le regard de cet homme était insistant sur la personne de l'espionne. Qu'il la déshabille du regard ou qu'il mémorise ses traits, cela importait peu.

- Vous ne savez pas pourquoi vous êtes ici, vous ne savez pas qui je suis. Vous ne le saurez pas davantage après notre discussion.

Cela commençait fort bien. Elyena n'était pas habituée à un tête-à-tête avec son rencard. Les corbeaux ou messages étaient plus pratiques à tous les égards. Mais si on la convoquait, alors la situation nécessitait la plus grande discrétion du monde, et devait être bien plus préoccupante que la jeune femme l'avait espéré.

- Les hauts dignitaires sont inquiets. L’Arbre Blanc se meurt. Nous faisons appel à vous pour couper les branches qui menacent de faire pourrir le tronc.

Elle ne répondit pas, attendant qu'il poursuive. Il laissa le silence peser tel une armure sur les épaules d'un enfant. Le malaise était présent et il fixait intensément le visage d'Elyena. La Rose Noire gardait un visage impassible et sérieux. Qu'il parle !

- Des séditieux menacent le général et les agents au service du royaume. Des canailles qui regrettent le temps où un vieux renard dirigeait l’Arbre avec un peu plus de complaisance. Ils craignent la discipline et l’ordre imposés par le général Cartogan et veulent le faire tomber. Et ça ne m’étonnerait pas qu’un vieillard en robe bleue trempe dans ce complot.

Elle fronça les sourcils. La situation était bien plus grave qu'elle n'osait l'imaginer. Elle restait loin de Cartogan pour que son mari n'ait nul soupçon, mais là... Cela dépassait de loin tous ce qu'elle aurait pu penser. Un complot contre Cartogan ? Il était bienfaiteur d'Elyena – enfin à ses yeux à elle – alors elle ne laisserait personne tenter de le tirer vers le bas. Mais calmons-nous, nulle colère ou ressenti ne doit troubler le travail d'une espionne. Cartogan était un exemple, un homme à suivre et à défendre. Elle ferait tout pour que l'ordre règne et que les troubles-fêtes ne soient que poussière au vent. Si le Conseiller d'Arnor trempait là-dedans... Cela rendait la mission de la jeune femme bien plus dangereuse que prévu. Un petit idiot qui fait circuler des rumeurs sur un général puissant ? Pas bien difficile. Mais si des puissants cherchaient eux-mêmes à faire plonger des puissants ? Alors la finesse d'esprit était de rigueur, et pas qu'un peu. Un seul faux pas dans la danse politique, et tout un système s'effondre, de même qu'elle serait balancée au bout d'une corde.

- Nous avons un ou deux noms. Des hommes à suivre et à surveiller. Rien de plus pour le moment. Vous me ferez des rapports concis à la fin de chacune de vos journées. Rapports que vous me donnerez une fois par semaine dans cette même Auberge. Trouvez n’importe quel prétexte utile à cette mission. Prenez un amant s’il le faut, peu m’importe. Le royaume, seul, doit rester debout. Le reste n’a aucune importance. Votre vie n’a aucune importance. Étant donné les informations que je vous ai transmises et le danger qu’elles représentent si elles tombaient entre de mauvaises mains, vous conviendrez que le moindre écart de votre part ne donnera lieu à aucun pardon.

Elyena hocha doucement. Cela la répugnait, mais si elle devait avoir un amant et tromper son mari pour le Royaume.. elle le ferait. Peu volontiers, mais si c'était sa seule issue, alors elle l'emprunterait. Domestique, gouvernante, coureuse de remparts, tout était bon pour sauver le royaume. Tous le monde peut voir un faux pas, et la cour sait se montrer cruelle envers ceux qui n'exécutent pas bien les ordres.

- Ce sera fait, mon seigneur, répondit-elle simplement d'une voix douce et claire.

Des ordres clairs et convaincants. Elle se mit à espérer ne pas croiser son mari. Elyena craignait de croiser sa route, surtout si son enquête la menait dans les hauts-quartiers de la ville. Elyena croisa ses jambes, en attente des noms que cet homme lui fournirait.

#Elyena
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