En route vers le Nord: retour dans les Hauts des Galgals

Après avoir fait ses achats dans différentes rues et différents niveaux de Minas Tirith, Halbarad repartit en direction de l'Ouest, afin de passer les Gués de l'Isen, et de remonter au Nord, vers les Galgals. Sa précipitation était grande, car il avait juré de revenir aider Sangar, l'Homme qui lui avait sauvé la vie, et qui se trouvait prisonnier dans le repaire du redoutable Croc-Noir. La hâte était assurément nécéssaire, lorsqu'on connaît la cruauté de cet Elfe, dont le seul nom provoque la terreur parmi les Gens des régions alentours.

Le Dunàdan parcourut donc au pas de course les longues lieues qui le séparaient de la rivière Isen, ne faisant hâlte que très rarement et pour de courtes durées. Il s'asseyait alors, coupant quelques rondelles de son saucisson de voyage des Nains, avec son poignard affuté. Il traversa le Pays des Chevaux en une semaine tout au plus, et passa le gué. Il voulait maintenant rejoindre Tharbad en ligne droite, l'un des seuls points de traversée du Flot-Gris. Mais la précipitation occasionne parfois de longs délais: le Capitaine aurait mieux fait de contourner le Pays de Dun par l'Ouest. Au lieu de cela, Halbarad avait pénétré sur la limite occidentale de ce dangereux territoire.

Et il est de notoriété publique que les Montagnard du Dunland ne sont pas très acceuillants ni concilliants envers les étrangers qui traversent leur contrée. C'est ce qu'Halbarad découvrit par la suite, bien que pour l'instant il marchait rapidement et d'un pas sûr, pratiquement sur la frontière entre Dun et l'Enedwaith, empruntant la vieille route du Sud, et ne sachant quel danger le menaçait...

En effet, alors qu'il s'était arrêté brièvement pour un peu de ravitaillement, Halbarad entendit de lointains cris, pas très agréables à entendre. Et les sons se rapprochaient rapidement: des voix roquailleuses, mais cependant ce n'étaient pas des Orques. En vérité, tout ce boucan était causé par des Hommes, des hommes de Dun! Le Dunàdan aperçut sept silouhettes, se trouvant à pas plus d'un furlong. Il se cacha derrière un fourré, et pouvait entendre leurs discours; ils semblaient avoir repéré sa piste:

"Regardez! disait l'un. Les empreintes de pas recommencent ici, où la terre est plus molle!"

"Allez donc! grogna un autre, ces marques doivent dater d'au moins une heure! Ne vois-tu pas qu'il n'y a personne alentours?"

"Dorbur... Vieil idiot! s'écria le premier. Les pas s'écartent du chemin! Ils vont vers ces bosquets, la canaille doit y être! Allons voir!"

Ils avaient de logues barbes ébouriffées et des visages durs et aux traits marqués; leurs habits se limitaient à des haillons marrons et gris, et quelques fourrures sales. Les sept compagnons foncèrent vers la cachette du Dunàdan, qui, entendant ces mots et cette course précipitée, eut juste le temps de sortir son arc et de décocher une flèche: le projectile se planta dans le torse d'un des montagnards, qui s'écroula, agonisant. Mais les six survivants n'en tirèrent que plus de détermination.
Halbarad sut qu'il ne pourrait pas tous les viser, non plus qu'il ne pourrait tenter un combat au corps-à-corps: il s'enfuit de son abri, et déguerpit tête baissée à l'opposé des hommes de Dun. Ceux-ci ne disposaient pas d'armes de jet, et il déclenchèrent alors la poursuite. Mais l'infatigable Rôdeur ne fut bientôt qu'un point noir dans la plaine, et ses détrousseurs firent demi-tour, dépités.

Halbarad avait échappé de peu à de gros ennuis, qui l'auraient retardé dans son but principal.

Plusieurs heures étaient passées depuis son affrontement avec les Hommes sauvages et sa fuite précipitée; Halbarad avait le gué de Tharbad en ligne de mire, et il ne tarda pas à rencontrer des sentinelles qui surveillaient le passage, des gardes d'Arnor. Le Dunàdan les salua et déclara:

"Prenez garde, mes braves gens, les hommes du Pays de Dun s'aventurent de plus en plus loin de leurs repaires. Je ne sais pas ce qu'ils manigançent, mais ils m'ont attaqué alors que je marchais, très loin des montagnes où ils tiennent leurs refuges. Prenez garde, je vous le répète!"

Et les visages des hommes devinrent graves et sombres; leur chef parla:

"J'ignore ce qu'ils peuvent faire, mais cette nouvelle n'annonce rien de bon. Nous vivons en de sombres temps... oui, assurément... de sombres temps..."

Il répéta ces derniers mots de nombreuses fois comme pour lui-même, et Halbarad, se souvenant brusquement que la hâte était nécéssaire, reprit la parole:

"Désolé, je ne puis m'attarder ici, je dois vous quitter, bien que j'aurais aimé discuter un peu plus des évènements. Mais le temps me manque, j'ai une affaire urgente à régler dans le Nord, et la nuit ne va pas tarder à tomber. Au revoir, et courage! Les hommes de Dunland ne viendront peut-être jamais à Tharbad!"

La douzaine de soldats d'Arnor lui dit adieu en retour, se demandant tout de même qu'est-ce qui pouvait faire qu'un des leurs soit aussi pressé, pour qu'il ne fit même pas connaître son nom. Ils ignoraient cependant l'existance du Maître aux Lames jumelles dans les Hauts. De son côté, Halbarad ne rencontra pas de difficulté pendant la dernière partie de son voyage. Il voyait Tyrn Gorthad, les Collines aux Galgals, se rapprocher chaque jour un peu plus.