Les trois elfes s’engagèrent à la suite du petit dans la forêt de Druadan. L’homme, malgré son physique trapu, paraissait particulièrement à l’aise et agile dans le sous-bois.
Il s’engagea dans de multiples chemins, changeant souvent de direction et accélérant progressivement l’allure. En quelques minutes, le petit homme s’était mis à courir, faisant perdre tout sens de l’orientation aux trois elfes.
La course folle dura encore un moment avant que l’homme ne disparaisse de leur vue, les laissant complètement perdus au milieu d’un bois profond et sombre. Même la lune peinait à darder ses rayons à travers l’épais feuillage. Malgré leurs sens aiguisés, les trois compagnons auraient eu bien du mal à retrouver leur campement.
Alors que durant leur course de nombreux cris avaient retenti, formant un joyeux tintamarre, le silence s’était désormais installé dans la forêt, contribuant à l’étrange atmosphère. Sighild, Calion et Voronwe explorèrent un peu les environs à la recherche de leur guide. Ils débouchèrent en haut d’un petit vallon à la végétation clairsemée.
Un sifflement retentit du fond de l’encaissement. Leur guide se trouvait une centaine de mètre devant eux, presque impossible à distinguer dans le noir. Il leur fit de grands signes, les encourageant à le suivre et à se hâter.
Les elfes se mirent alors à dévaler la pente, tâchant de ne pas se prendre les pieds dans leur course. Soudain, plus ou moins à mi-pente, le sol se déroba sous leur pied. Ils s’enfoncèrent lourdement dans le vide, tombant au fond trou profond. La chute fut rude et ils mirent quelques minutes à se relever. Calion se tâta machinalement le visage pour s’assurer qu’il n’avait rien de cassé.
Le trou était étonnamment profond et lisse. Il devait s’agir d’un piège élaboré de longue date et qui avait déjà dû servir à de nombreuses reprise. Même en se tenant les uns les autres, il était impossible de remonter à la surface. La lune elle-même éclairait à peine le fond du trou.
Une tête apparut en haut du piège, bientôt suivie d’une autre et puis d’une dizaine d’autres. Les petits hommes discutaient entre eux dans une langue difficilement compréhensible. Un mot néanmoins revenait souvent : “Oban”. Au bout d’un moment, les petits hommes se dispersèrent. On entendit le bruits de chevaux mécontents et d’un barda métallique. Pour sûr, les hommes avaient vidé le campement des elfes.
Le temps passa lentement. A un moment, un immense ours passa sa tête par-dessus le trou, vite chassé par un claquement de langue sec. Même si plus personne ne se laissait voir, visiblement on montait la garde.
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L’aube finit par arriver sans que les elfes n’en sachent plus sur les intentions des habitants de la forêt. Finalement, peu de temps après le lever du soleil, une grande agitation se fit entendre à la surface. Les petits hommes des bois reprenaient en cœur le même mot “Oban”.
Quelques minutes plus tard, une tête apparut en haut du trou. Malgré ses traits grossiers, il semblait qu’elle appartienne à une femme.
Celle-ci adressa quelques mots à un homme qui se tenait à ses côtés. Puis, elle fixa les trois elfes au fond du piège et leur adressa la parole.
“Je suis Oban et l’homme à côté de moi est Bow-Moar, le chef de notre tribu.”, elle parlait un westron très correct bien que marqué par un fort accent.
“L’objet que vous aviez en votre possession est un bien très précieux. Il s’agit d’une partie d’une de nos pierres de garde. Ask-Aig, son créateur, a mis une part importante de son âme en elle. La décapitation de la pierre mettait sa survie en péril.”La jeune fille détachait chaque syllabe, faisant un effort pour parler de la manière la plus claire possible.
“Parmi mon peuple, ceux qui parlent votre langue ne sont pas nombreux. C’est pour ça que je suis là. Alors, maintenant, dites-moi : où avez-vous pris cette tête et que comptiez-vous en faire ?”Il était clair que Calion, Sighild et Voronwe allaient devoir se montrer convaincants pour se sortir de ce guêpier.