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Sujet: Héritages
Nivraya

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Rechercher dans: Annúminas   Tag freyloord sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: Héritages    Tag freyloord sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySam 20 Avr 2024 - 20:25
- Je ne vais pas y arriver. Je ne vais pas y arriver…

Nivraya essaie de respirer, fort. Son souffle rauque répond aux roues de la voiture brinquebalante, qui claquent sur les pavés de la cité d’Annúminas, tandis que dans l’habitacle les deux silhouettes sont secouées de droite et de gauche malgré les efforts du cocher pour éviter les cahots de son véhicule. L’homme à l’intérieur, gigantesque, semble totalement démuni. Il pose une main immense sur l’épaule de la jeune femme, et tente de la rassurer :

- Il faut tenir. Nous y sommes presque.

- Frey’, j’ai perdu les eaux…

Il ne répond rien, et jette un regard vers l’extérieur.

Il fait nuit noire, mais il reconnaît sans mal la place de la fontaine, et l’arche voûtée, ainsi que la boutique de l’apothicaire qui se trouve à l’angle de la rue. Ils n’en ont plus que pour quelques minutes. L’aristocrate, une main sous son ventre arrondi, une autre pressée de toutes ses forces contre le plafond de la voiture, s’efforce de garder son calme malgré la douleur indescriptible qui lui cisaille les entrailles. Une onde de souffrance généralisée, que la sage-femme appelle fort à propos « contraction », lui coupe la respiration pendant plusieurs dizaines de secondes, avant de refluer petit à petit. Pour mieux revenir.

Les mâchoires serrées, les yeux perlés de larmes, la peau rougie par l’effort, Nivraya est méconnaissable.

Soudainement, l’attelage ralentit, jusqu’à s’arrêter complètement. Les chevaux renâclent, des voix étouffées se fraient maladroitement un chemin vers l’intérieur de la voiture, témoignant d’un échange assez tendu. Le géant venu du Nord, comprenant que son concours est nécessaire, s’extrait tant bien que mal de l’habitacle, et crie quelque chose au cocher, qui lui répond penaud. Il revient, quelques secondes plus tard.

- Les gardes font quelques difficultés. Nous aurions vraiment dû faire venir l’accoucheuse à la Chambre…

- Non. Le palais est plus sûr. Dis-leur que…

Elle pousse un gémissement plaintif à fendre le cœur, au bord du malaise, incapable de finir sa phrase. Ses yeux se ferment, son pouls s’accélère. Derrière ses paupières fermées, des explosions de lumière scintillante se mettent brusquement à crépiter. Cette contraction, plus forte que les dernières, la laisse haletante et fébrile. Son acolyte hoche la tête avec gravité, et se fend d’un commentaire laconique :

- Compris.

Mû par la colère et l’impératif de protéger son employeuse, Freyloord s’avance face aux gardes du Palais d’Annúminas, qui protègent la porte principale. Deux hommes assez jeunes, protocolaires… tout ce dont n’a pas besoin la primigeste. Engoncés dans leurs armures d’apparat, armés de lances et de superbes boucliers aux armes du roi Aldarion, ce sont pourtant eux qui tremblent devant le colosse qui leur avance droit dessus, en ouvrant grand ses bras immenses aux muscles noueux.

- Gardes ! Laissez-nous passer immédiatement ! Nous avons autorisation de pénétrer dans le Palais à toute heure, il s’agit d’une affaire particulièrement urgente.

Derrière lui, les gémissements se font plus sonores. Les gardes s’interrogent du regard, décontenancés. Ce n’est pas la première fois qu’ils croisent Dame de Gardelame au Palais : pour ainsi dire, sa venue est plutôt habituelle qu’autre chose. Cependant, c’est la première fois qu’elle tente d’entrer d’y pénétrer à une heure aussi tardive, et en faisant autant de difficultés vis-à-vis d’un protocole sécuritaire qu’elle a elle-même contribué à mettre en place.

- Nous… euh… Nous aurons besoin d’un laissez-passer… Ce sont les ordres.

Freyloord le dévisage avec sévérité. À dire vrai, dans leur empressement, ils ont tout bonnement oublié le fameux sésame. Dissimulant son embarras derrière un masque autoritaire, l’homme de main de Nivraya essaie une nouvelle approche :

- Vous n’entendez pas ? La Dame de Gardelame a besoin d’entrer au Palais de toute urgence… Il en va de sa santé…

Le garde n’en mène pas large. Une partie de lui accepterait bien, mais les troubles causés par l’Ordre de la Couronne de Fer et l’assassinat des princes royaux ont largement émoussé la confiance que les gardes du Palais prêtent aux visiteurs… même lorsqu’ils s’agit de figures connues dans la cité. La sécurité des principaux dignitaires du royaume demeure la priorité absolue. Les éclats de voix attirent toutefois l’attention d’une autre patrouille, au sein de laquelle se trouve un homme nettement plus expérimenté, qui intervient pour calmer la situation. Il s’approche de Freyloord, et après avoir prêté l’oreille aux bruits qui émergent du véhicule, il souffle :

- J’ai deux enfants, mon ami. Je sais de quoi il retourne. Laissez-moi simplement confirmer son identité, et je vous laisse entrer. Je connais bien la Dame de Gardelame, nous ne souhaitons pas lui rendre la vie difficile ce soir.

- Merci… infiniment.

- Il n’y a que vous quatre ?

Le géant fronce légèrement les sourcils.

- Quatre ?

Le garde pointe du doigt la voiture, et la petite silhouette qui se tient juste à côté. Pendant un instant, le cœur du Lossoth s’arrête net. Un bref moment d’inattention, une mince seconde de déconcentration, et voilà qu’un inconnu aux intentions troubles a réussi à se frayer un chemin jusqu’à sa maîtresse en toute impunité. Il ne lui suffit que d’un geste pour ouvrir la porte. Un de plus pour trancher la gorge de Nivraya de Gardelame, et porter un nouveau coup au gouvernement de l’Arnor, déjà meurtri par tant et tant de drames.

La silhouette se tourne vers lui, dans une envolée de cheveux bruns.

- C’est trop tard ! Crie-t-elle. Le bébé arrive ! Allez chercher quelqu’un !

- A… Alyss ? Répond Freyloord, stupéfait.

Elle lui jette un regard à la fois espiègle et soucieux. Toute l’ambivalence de cette guerrière au grand cœur, boule de tendresse capable de mettre à mort à peu près n’importe qui dans la capitale des Dúnedain du Nord.

- C’est une affaire de femmes ! Ne restez pas plantés là, et allez chercher quelqu’un qui s’y connaît plus que vous autres ! Dépêchez-vous !

Les émotions du géant oscillent entre la surprise la plus totale et la joie la plus profonde. Ainsi, en dépit des mots échangés, en dépit des colères et des incompréhensions, au moment où cela compte le plus, Alyss est venue. Porté par le sentiment que les choses retrouvent peu à peu leur place, le Lossoth s’élance vers le Palais accompagné du garde qui peine à suivre ses grandes enjambées.

Trouver la sage-femme.

Cette pensée, qui tourne en boucle dans son esprit, ne suffit pas à faire disparaître le demi-sourire qu’on entrevoit sur son visage d’ordinaire stoïque.

Alyss est revenue.


#Nivraya #Freyloord #Alyss
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