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Sujet: La rose des vents
Nathanael

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Rechercher dans: Harondor   Tag ormal sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: La rose des vents    Tag ormal sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptyMar 30 Juin 2020 - 8:39
Fiché sur sa haridelle grise, Ormal souriait, découvrant ses dents blanches au milieu des étendues jaunâtres de guèdes. Le Gondor allait mal. Les nouvelles lui étaient parvenues le matin même. Et quand le Gondor allait mal, Ormal exultait. Du haut d’une éminence rocheuse battue par le vent, il gardait un œil sur le nouvel officier d’Ella Desbo. L’homme pâle allait et venait beaucoup, surveillait, comptait, organisait, commandait. Zaoud le recruteur lui avait dit bien des choses à son sujet. Il aimait bien parler contre quelques verres offerts, et après les avoir bus, il parlait encore plus. L’homme pâle avait des hommes du Gondor à son service et des hommes du Harondor aussi. Il ne parlait pas la langue du sud et ne connaissait pas beaucoup leur culture. Mais Zaoud lui avait dit qu’il était un marchand dans l’âme et qu’il était fort pour les négociations. L’homme pâle avait réussi à apprivoiser la famille de Haravi. Ils iraient travailler dans les champs pour quelques draps propres et des perles de couleur. Ormal rit. Il avait vu les perles. Elles étaient de qualité moyenne et beaucoup finiraient par casser dans les mois à venir. Mais les draps étaient de bonne qualité, simples, mais bien tissés, à la manière du sud. L’homme pâle ne s’était pas tout à fait moqué d’eux, il était bon commerçant. Une bonne chose. Car Ormal avait des choses à vendre et d’autres, qu’il voulait acheter.

Il talonna sa mule et la poussa dans la descente en pente douce jusqu’aux premières feuilles jaunies par le soleil. Il avait enroulé un long turban autour de sa tête pour ne pas se brûler le visage et une longue tunique souple lui descendait jusqu’aux genoux, dévoilant une paire de jambes robuste couleur d’ambre. Il montait à la manière de certaines tribus marchandes du Harad, non à califourchon, mais les deux jambes du même côté, sans selle et menant son animal avec une simple corde autour du cou. Il avait le sourire franc et jovial, mais le regard acéré de celui qui cherche toujours à avoir une longueur d’avance.

Ormal se rapprocha des premiers ouvriers occupés à ramasser les feuilles de guède. Ils portaient sur leur dos des sacs tissés avec les grandes palmes des oasis. Ils levèrent les yeux quand Ormal passa et échangèrent entre eux des propos moqueurs à propos de son animal. Ormal les ignora. Il savait lui, ce qu’était une bonne mule. Trop grasse, elles devenaient fainéantes, trop sombres, elles avaient trop chaud. La sienne était parfaite. Elle avait les jarrets solides, les reins manquaient un peu de force, mais l’épaule plus développée compensait ce petit défaut de conformation. Et surtout, elle aimait le travail. Pas comme toutes ces grandes bêtes croisées avec des juments du nord, qui rechignaient à tirer les chariots quand le soleil mordait trop fort ou que quelques taons venaient leur piquer la croupe. Pour Ormal les animaux n’avaient pas besoin d’être beaux, ils devaient surtout être utiles. Et Zaoud lui avait dit que l’homme pâle cherchait des animaux utiles.

Parvenu non loin du Gondorien, un homme héla Ormal.

— Qu’est-ce que tu veux sale fennec ?
— Accueil plus chaleureux que le désert,
répondit Ormal avec son grand sourire. Je viens pour travailler. Zaoud m’a dit que vous cherchiez une mule pour tirer des chariots d’herbe du Harad. J’amène la mule.
— On n’en veut pas de ta carne.
— Vous en voudrez quand le Coup de Sabre se lèvera. Le Gondorien sera content d’apprendre que vous ne l’aviez pas prévenu que la tempête arrive.
— Parce que la tempête n’arrivera pas,
répondit l’autre.

Sans se départir de son sourire, Ormal haussa les épaules comme pour lui signifier qu’il n’en saurait jamais rien et que tout pouvait arriver. Il n’avait pas tout à fait arrêté sa mule et petits pas après petits pas, il s’était rapproché de l’homme pâle qui discutait avec un des métayers de la maîtresse Desbo.

— Gondorien !
dit Ormal comme s’il était un grand marchand du sud et qu’il s’adressait à un vulgaire étranger sur sa route. Est-ce que les frères Emri t’ont dit ce qui allait arriver ?

Quoiqu’ayant un fort accent, il parlait un westron très clair et compréhensible. Il s’exprimait lentement, comme s’il voulait laisser chaque mot pénétrer ses interlocuteurs et qu’ils se posent mille questions avant la fin de chacune de ses phrases. Ormal regarda l’homme pâle dans les yeux sans rien dire, laissant le silence s’installer entre eux un bref instant. Autour de lui les hommes du nord qui l’accompagnaient paraissaient indignés que l’on puisse s’adresser ainsi à un homme important. Mais Ormal se contrefichait des titres, des fonctions et des appellations pompeuses. Il avait connu la faim et la soif dans la profondeur des ergs méridionaux où la mort abolit l’orgueil et toute forme de hiérarchie sociale. Il avait connu la honte, l’humiliation et l’oubli dans les terres orientales.

— Au sud les caravaniers s’inquiètent. Ils ont vu des ombres au milieu des dunes et des grandes étendues de pierres. À l’ouest, les vagues ont disparu depuis de longs jours et la mer est calme comme avant une terrible tempête. Et les Fân ont vu dans le sable que les esprits du désert étaient en colère. Dans quelques jours un terrible Coup de Sable s’abattra sur tout le Harondor et votre récolte sera perdue, les hommes et les bêtes mourront.

Ormal parlait comme s’il connaissait tout cela de source sûre et qu’il avait pu lire l’avenir. Son indéfectible sourire lui éclairait toujours le visage alors même qu’il continuait d’annoncer de terribles événements. Il avait réussi à attirer l’attention du Gondorien et celle du frère de Zaoud aussi, qui intervint rapidement.

— Ne l’écoutez pas messire Praven, dit-il. Il avait saisi le traducteur par le bras pour se faire comprendre rapidement. Ormal vient du sud, c’est un Haradrim qui veut embrumer l’esprit et tordre vos idées. C’est un agitateur qui veut vous faire peur. Le Coup de Sabre s’annonce quelques jours avant par un vent très très brûlant qui brûle les yeux et assèche la gorge. On ne peut pas travailler avec ce vent très chaud. Les ouvriers le connaissent. Croyez-vous vraiment qu’ils continueraient à se courber dans les champs s’ils craignaient pour leur vie ?

Était-ce un pur de jeu de l’esprit ou faisait-il vraiment plus chaud d’un coup ? Il était impossible de le dire vraiment. Derrière Ormal, un homme qui ramassait la guède se leva pour porter son sac au bout d’une rangée de plantes et parvenu auprès du chariot, tomba soudainement, pris de vertiges. Ormal ne dit rien, sourit, et planta ses grands yeux verts dans ceux d’Evart Praven.

#Ormal #Evart #Praven
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