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 Le vent nous portera...[Forêt, PV Mardil]

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Sighild Baldrick
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Sighild Baldrick

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Le vent nous portera...[Forêt, PV Mardil] EmptyDim 4 Oct 2015 - 9:22
Elle grimpait les marches de sa demeure en tenant délicatement contre elle le nouveau-né. On lui avait demandé de prendre sa sœur le temps que leur mère puisse se reposer et se laver. Cela ne la dérangeait en rien car elle aimait s’en occuper. Aucun nom ne lui fut donné pour le moment, ses parents cherchaient à lui en donner un digne de leur famille.

Arrivant dans sa chambre, la jeune mage se contempla dans son miroir. Une pensée lui traversa l’esprit un court instant : un jour viendrait où elle tiendra son propre enfant. L’idée l’amusa et l’inquiéta également : elle imagina un instant à quoi pourrait ressembler sa descendance mais sera-t-elle une bonne mère ? Son enfant ne craindrait-il pas un danger certain du fait de leur alignement ? Elle savait qu’elle était désormais une mage, un potentiel ennemi pour qui le voudrait car une chose était sure, le mal ne se reposera jamais.

Mais pour avoir un jour la joie d’être mère, il fallait trouver avant tout le père…Ce qui ne serait pas chose aisée car la semi-elfe avait une carapace que personne, mis à part ses parents, ne connaissait. L’être qui pourra un jour toucher son âme ne lui vint pour le moment pas à l’esprit, du moins, elle se confortait dans cette idée par peur d’être blessée ou de se tromper.

La belle s’installa avec douceur sur son fauteuil et s’arrêta un instant sur sa chambre. Assise dans le coin gauche, elle regarda chaque objet, chaque habit qui étaient à la fois élégants et simples car tel était sa volonté. A l’autre bout de la pièce se trouvait son bâton et son épée, l’on pouvait désormais arpenter la ville avec ses armes, une bonne chose qui la rassura.

On entendit soudain une douce mélodie venir du rez de chaussée, Laurelin profitait de ce temps calme pour jouer de la harpe. C’est sous cette mélodie apaisante que la sœur aînée s’assoupit.


***


Un murmure l’appela, un murmure étrange et lointain qu’elle ne connaissait pas. Qu’était-ce ? Lui demandait-on de l’aide ou lui indiquait-on un chemin ?

Tout n’était que brume, une brume épaisse où elle ne pouvait rien distinguer. Elle ressentait pourtant de l’importance dans ce murmure, comme s’il était indispensable pour elle de le comprendre.


***

Ses yeux se rouvrirent lorsque l’enfant bougea et que l’on entrait dans sa chambre. Son père voulait reprendre le nourrisson. La belle acquiesça et le lui rendit.

Trop soucieuse de ce qu’elle venait de rêver, la jeune mage informa son père qu’elle ne déjeunera pas avec eux et qu’elle partirait prendre l’air, cherchant quelques champignons pour le repas du soir.
L’homme respecta le choix de sa fille. Il la connaissait assez pour comprendre que quelque chose l’inquiétait mais savait également qu’elle ne lui en parlerait que lorsqu’elle le décidera.

Avant de partir, Sighild déposa un baiser sur la joue droite de son père.

Se saisissant de ses armes et de sa cape noire, elle descendit, salua sa mère respectueusement, prit un sac de tissu et sortit par la cour.

Elle était assez grande pour recevoir une dizaine de personnes et d’y accueillir une écurie. Sighild s’y dirigea et alla chercher sa nouvelle monture : Lumbo. Depuis la bataille d'Imladris, l'étalon noir ne la quittait plus. C’est sans attente qu’elle sortit par la porte du jardin.

Lumbo partit au galop lorsqu’ils furent dos aux portes de la Cité Blanche.

Cette balade quotidienne lui faisait du bien car Sighild arrivait enfin à trouver un peu de paix. Elle arrivait à se reposer et à méditer. Elle se retrouver seule avec la Nature et communiait avec elle. La jeune mage avait oublié l’apaisement que cela lui procurait.

Il fallait bien avouer que Sighild était inquiète pour l’avenir de ce monde, les récents événements étaient une preuve que la menace était encore présente.

Il y avait aussi l’état de santé de son père qui se dégradait de jour en jour. Ils partiraient prochainement pour Imladris car son père voulait y finir ses jours. A cette annonce, la belle, d’ordinaire calme, s’était levée en tapant du poing, refusant cette éventualité. Cette simple pensée avait mis Sighild hors d’elle. « Tu n’as pas le droit de dire cela » avait-elle réagit, les yeux remplis de larmes. Laurelin s’était rapprochée de sa fille et l’avait prise dans ses bras pour la réconforter. « Le temps est notre unique ennemi Elwing » lui répondit-elle avec douceur, « nous savions que cela arriverait ». Albérick vint à son tour envelopper de ses bras son épouse et sa fille aînée. Il essuya les larmes de sa fille, qui ne cessait de pleurer. « Je pourrais chercher un sort, un objet ou une solution qui te rendrait ta jeunesse. Je pourrais créer, je suis sûre que je le pourrais » avait-elle fini par dire tant sa tristesse était grande. Albérick avait regardé sa fille droit dans les yeux et lui avait répondu : « Ton don ne doit pas servir ta cause personnelle. La vie est ainsi faite, je suis un homme qui a assez bien vécu et qui a eu la chance d’avoir deux magnifiques enfants. Je n’aurais sans doute pas l’occasion de voir grandir ta sœur comme je t’ai vu grandir toi. Mais tu seras là pour veiller sur elle et sur ta mère. On m'a un jour dit que je n'avais pas eu la joie d’avoir un fils, mais à mes yeux, Elwing, tu vaux tous les fils du monde. »

Ils se rapprochèrent de la forêt et Sighild essuya une larme qui coulait sur son visage. Sa famille était tout pour elle et la simple idée de perdre à nouveau l’un des siens la fragilisée. Mais il ne fallait point montrer cette faiblesse, alors, elle redevint froide et mystérieuse comme avant.

Descendant de son fidèle compagnon, Sighild emprunta un petit sentier qui la mènerait droit vers sa prochaine cueillette. Suivie par son cheval, la belle sortit son couteau de sa botte et se dirigea vers des cèpes.

Pendant que Lumbo broutait de l’herbe et que sa maîtresse continuait ramasser champignons et noix, des pas se firent entendre.

Sighild se redressa et sortit de son fourreau son épée. Son bâton était sur sa selle, à proximité, mais il n’y avait peut-être pas nécessité d'employer la magie.

Les pas se rapprochaient d’eux, les pas d’un homme, des pas étranges…




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Mardil
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Le vent nous portera...[Forêt, PV Mardil] EmptyVen 9 Oct 2015 - 22:03
Le vent nous portera...[Forêt, PV Mardil] Eirik11


Le moindre mouvement lui coûtait un effort surhumain. A cause de la douleur tout d’abord. Il avait souhaité quitter Pelargir alors qu’il n’était pas totalement remis et il en payait les conséquences. Le voyage avait été un véritable calvaire. Assi à l’arrière d’une roulote, le moindre cahot sur la route l’avait fait grimacer. Il n’avait jamais été si heureux qu’en voyant les hauts murs blancs de Minas Tirith. Tout du moins, pendant une fraction de seconde.

Malgré son désir de retrouver Sighild, il s’était rendu aux maisons de guérison… et n’en avait pas bougé depuis trois jours. Les soins qu’il avait reçus avaient rendu ses douleurs tolérables à défaut de les faire disparaître complètement. Il était suffisamment bien portant pour quitter ce refuge s’il le voulait. Mais le voulait-il vraiment ?

Plus il y réfléchissait et plus il nourrissait des doutes sur sa première intention qui avait été de se précipiter vers sa sauveuse. Il continuait à la considérer comme tel. Elle lui avait permis de commencer une nouvelle existence et de surmonter ses peurs et sa peine alors qu’elle même avait ses propres démons à terrasser. Et lui qu’avait-il fait pour l’aider ? Que lui avait-il apporté si ce n’est des responsabilités et du souci supplémentaires ?

Et voilà que, de nouveau, il avait placé tous ses espoirs en elle. Sans même songer un seul instant qu’elle avait mieux à faire que de le materner. Non pas qu’il pensât qu’elle pourrait refuser de l’aider. Elle avait trop bon cœur pour lui dire une chose aussi mesquine. Seulement il refusait de lui infliger ça une fois de plus. D’autant que cette fois-ci, la douleur était trop profonde pour qu’elle puisse y faire quoi que ce soit.

Il ne voulait pas qu’elle le voie aussi diminué. Pas à cause de sa blessure non. Celle-ci lui causait bien du souci, il ne pouvait le nier. Il avait un mal fou à réaliser même les actions les plus simples. Et il y avait tant de choses qu’il ne pourrait plus jamais faire ou qu’il n’aurait jamais l’occasion de faire. Depuis son plus jeune âge, il avait voulu porter l’épée. Il ne rêvait pas d’être un soldat, il rêvait d’être un héros. Le genre d’homme qui pourrait venir en aide aux plus faibles et aux plus démunis, comme il l’avait été la majeure partie de sa vie.

Il s’en était allé bouffi d’orgueil et de fierté mal placée, portant ses rêves et ses espoirs bien haut devant lui. Il ne lui restait plus rien. Il n’était plus rien. Pourquoi s’était-on tant acharné à le sauver ? Il n’était plus qu’un poids pour les autres désormais. Il avait pensé au suicide. Il n’avait pensé qu’à ça depuis trois jours. Mais il avait si peur de mourir. Etait-il destiné à vivre une vie misérable après tout ? Il avait voulu changer de vie, quitter son monde cruel et froid et voilà qu’il était de nouveau plongé dans les affres du désespoir, sans aucune chance de pouvoir remonter à la surface. Les Valar devaient être dotés d’un sens de l’humour bien cruel pour lui infliger tant de peine.

Il ne pouvait plus se regarder en face dans le miroir. C’était plus que son bras qui avait été amputé, c’était une partie de sa personnalité, un pan de son esprit. Une partie de lui était aussi pourrie que son bras sous l’action du poison avant que Felian ne l’ampute. Que ne pouvait-il se débarrasser aussi aisément de ces sentiments. Cependant, il n’existait pas d’arme ou d’instrument chirurgicaux pour une telle opération. Tout du moins pas au sens littéral du terme.

C’est pour cette raison qu’il ne pouvait pas se montrer devant la magicienne. Elle saurait tout de suite ce qu’il était devenu : désespéré, en proie aux regrets, au ressentiment et à un cynisme qui ne lui ressemblait pas. Il n’avait jamais été friand d’introspection. Enfant, il avait préféré se réfugier dans le maniement de l’épée plutôt que d’affronter ses démons. Et lorsqu’il avait été forcé d’agir, les conséquences avaient été bien plus terribles qu’il ne l’aurait imaginé.

Mais maintenant… Que pouvait-il faire d’autre que penser ? Il ne serait plus jamais un homme d’action. Si encore il savait résonner… Mais il ne savait ni lire ni écrire. Personne ne lui avait jamais appris à utiliser son esprit, uniquement ses muscles. Ses pensées étaient donc stériles, tournant en boucle dans sa tête sans lui apporter le moindre réconfort.

Sighild. Si belle. Si forte et si fragile à la fois. Elle avait su l’aider à traverser la pire épreuve de son existence. Le voyage de Fondcombe à la cité blanche avait été avant toute chose un voyage à la recherche de lui-même, de ses aspirations et de ses craintes. Elle lui avait fait comprendre tant de choses. Et lui, il s’était empressé de les oublier dès que l’opportunité de se venger était apparue.

Elle avait tenté de le dissuader. Il n’avait pas voulu écouter. Et voilà où il en était désormais. Il se promît de faire mieux cette fois-ci. En son fort intérieur, il savait qu’il devait la rejoindre. Elle était la seule lumière dans cette nuit oppressante, le phare qui pouvait le guider vers les rives de son avenir. Sa décision était déjà prise depuis longtemps bien qu’il souffrât de devoir se montrer à elle sous ce jour des moins flatteur.

Il quitta les maisons de guérison dès le lendemain. Le soleil était déjà haut dans le ciel et chauffait de ses rayons la cité blanche.  En cet après-midi ensoleillé, Minas Tirith n’était qu’effervescence joyeuse et enjouée, contrastant davantage encore avec l’air sombre d’Eirik. Arrivé devant la demeure de la magicienne il hésita un bon moment à franchir le seuil mais se décida tout de même à frapper à la porte après une longue délibération en lui-même.

Lorsqu’il s’enquit de la jeune elfe, on lui répondît qu’elle n’était pas chez elle. Sur le coup, il ne sût que dire pu faire. Il connaissait les proches de Sighild puisqu’il avait vécu avec cette dernière durant les mois précédents. Pour autant, il n’avait pas voulu interférer avec leur vie et avait opté pour une chambre éloignée d’eux. Il prenait ses repas seul ou avec la mage lorsqu’elle était disponible. En fait, il avait passé la majeure partie de son temps loin de leur demeure, ne se sentant guère à l’aise entre ces murs.

Ce n’était en aucun cas la faute de Sighild ou de sa famille mais il avait le sentiment de ne pas être à sa place en ces lieux. C’est pourquoi il hésitait à repartir sur le champ alors qu’on lui assurait qu’il était le bienvenu et que rien n’avait été touché dans sa chambre. Le problème était qu’il ne considérait toujours pas la pièce en question comme « sa » chambre. Si la générosité de Sighild et de sa famille le touchait, elle contribuait aussi à détériorer l’image peu flatteuse qu’il avait de lui-même, dépendant de la charité de ces braves gens afin de survivre. Maintenant encore plus qu’auparavant.

C’est pourquoi il déclina l’invitation et déclara qu’il repasserait plus tard dans la soirée. Il se mit à descendre les étages de la cité, ayant l’intention de partir vers le proche Ithilien, puisqu’on lui avait dit que la magicienne était partie vers la forêt. Il n’attînt pas les portes de la cité cependant. En chemin, il s’arrêta dans une taverne afin de se rafraîchir un peu avant de partir. Il lui restait encore quelques pièces sur lui. Cependant, après la première bière bienfaitrice, son courage sembla se dégonfler. La deuxième bière ne lui fît pas autant de bien. La suivante non plus. Il ne vît pas Sighild ce soir-là mais passa la nuit ivre mort dans une ruelle malodorante au premier niveau de la cité.
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Sighild Baldrick
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Le vent nous portera...[Forêt, PV Mardil] EmptyMar 13 Oct 2015 - 20:14
***


Elle n’arrivait pas à distinguer cette silhouette, à la fois si proche et si lointaine. La belle resta cependant sur ses gardes, épée en main. Cette situation ne la rassurait pas.

Un vieillard amaigri sortit du bosquet, il peinait à marcher avec l’aide d’un bâton trouvé dans la forêt. Malgré son apparence froide, Sighild était attristée de voir ce pauvre homme inoffensif, affaiblit par son âge et par la faim. L’inconnu faisait pitié à voir,   il pouvait correspondre à l’avenir proche d’Albérick.

Le regard clair du vagabond se posa sur la créature qui se tenait devant lui. Son visage, travaillait par le temps, fut émerveillée par la beauté qui se tenait devant lui :
« Ne me battez pas ma Dame. Je ne suis qu’un pauvre vieillard qui cherche à se nourrir. »



« N’ayez crainte mon bon Sieur, il ne vous arrivera rien en ma présence. Avez-vous trouvez des victuailles pour votre soupé ? » Avait-elle fini par répondre, en rangeant son épée.


« Les temps sont durs pour mes pauvres jambes mon enfant, je n’ai plus les mêmes facultés qu’avant et ces derniers temps le moindre effort me fatigue. »


Sighild avait attrapé son bras libre pour qu’il puisse y trouver repos. L’homme lui expliqua qu’il était un ermite de la forêt, que son modeste logement se trouvait à quelques lieux d’ici et qu’il profitait de l’automne pour récolter de quoi se nourrir. Dans sa grande générosité, la jeune mage lui laissa sa récolte, il en aurait pour plusieurs jours rien qu’à lui seul et elle lui proposa de le reconduire chez lui : chose que le vieil homme accepta.

Elle l’avait aidé à montrer sur son cheval et elle suivit les instructions de l’homme pour retrouver sa demeure. Pendant leur promenade, l’homme lui raconta son histoire : jeune, il fut rodeur, puis avec l’âge, chasseur dans cette forêt qui lui procurait tout ce dont il avait besoin. Il avait eu une femme, point d’enfants. Ils allèrent auparavant à la cité blanche pour revendre  ou ce qu’ils pouvaient.

L’homme avait arrêté ces promenades lorsque sa moitié partit, il n’attendait qu’une chose : que sa vie le quitte pendant son sommeil. Il était pourtant entouré d’âmes charitables, qui lui apportaient une fois tous les deux jours à manger. Mais l’homme avait toutefois son orgueil et voulait continuer à faire des choses qu’il estimait pouvoir faire. Il se présenta à son aidante : il se faisait nommer Papé le Solitaire.

Au moment où elle allait se présenter à son tour, l’homme lui pointa du doigt sa modeste demeure, faite de pierres et de bois. Elle l’aida à descendre de sa monture avec douceur et le guida vers l’entrée de son domicile. Pour la remercier, le Papé lui demanda d’entrer et de s’asseoir : il voulait lui offrir une collation. Sortant un morceau de pain ainsi qu’un pot de marmelade, l’homme installa tout sur sa table de bois pendant que Sighild était partie chercher de l’eau à la source.

S’installant en face à face, l’homme observa davantage celle qui lui tenait compagnie.

« Je ne vous ai même pas demandé votre nom, ma Dame. » dit-il en mordant doucement son pain.
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"Je me nomme Sighild Baldrick. »répondit-elle avec calme.


« Baldrick…l’aigle entourait de feu. Vous êtes donc de cette famille de guerriers appréciée au sein de la Cité Blanche. Mes aïeuls me racontaient jadis les exploits de votre famille, guerrier de père en fils. Bien sûr, les mères et les filles étaient tout aussi valeureuses que leurs hommes. »


Etonnée par les propos de l’homme, la belle but ses paroles et lui en demanda plus. Ils continuèrent leur échange, puis, ils parlèrent des voyages de l’ancien rodeur, Sighild lui raconta aussi quelques une de ses péripéties. Elle se garda bien de lui expliquer la bataille d’Imladris, cela était encore trop récent pour elle.

Sighild écouta tellement les récits du Papé, qu’elle en oublia le temps. Voyant que la nuit était déjà tombée, elle gratifia l’ancien rodeur de son accueil. Avant de franchir la porte, l’homme lui rendit quelques un de ces champignons pour son souper. Il lui demanda de revenir le voir, quand l’occasion se présentera.

La belle accepta volontiers de revoir l’homme et repartir sans plus attendre vers la Cité Blanche.
Le Papé Solitaire était comblé par cette rencontre. Avant de fermer la porte de sa cabane, il fit rentrer son chat et lui raconta sa journée. Ce n’était pas tous les jours que l’on recevait chez soi une jolie Dame avec autant de dons. Qui aurait pu croire qu’un jour, il parlerait avec une mage, très belle à regarder.

En s’asseyant sur les genoux de son maître, le chat tigré buvait lui aussi les paroles de son maître, comme attentif par cette nouvelle amie…
***


La nuit était déjà tombée depuis une heure. D’étranges et dangereuses créatures commençaient à s’éveiller lorsque le soleil quittait le ciel, mais cela ne l’effraya pas. Ils galopèrent, insouciants, pour arriver plus tard devant la Cité Blanche.

Les gardes, qui connaissaient désormais bien la cavalière, la laissèrent entrer sans encombre. Les rues étaient quasi désertes, les gens du jour avaient laissé leur place aux gens de la nuit. Il y avait assez de place pour rester à cheval : elle rentra chez elle.

Une fois que son vaillant destrier était dans son box, avec sa portion de nourriture et d’eau, Sighild se dirigea vers sa demeure.

La pluie commença à tomber.

Dans la cuisine, sa mère était en train de préparer un potage dont elle avait le secret. Elle n’avait pas attendu sa fille et ses champignons, se doutant et étant habituée à ce qu’elle rentre tard. En la voyant arriver, Laurelin allait lui donner une information importante mais elle fut devancée par son enfant :

« Je te prie de m’excuser pour le retard, j’ai fais une rencontre improbable et je n’ai pas vu le temps passer. » dit-elle, en posant son sac en tissu qui contenait plusieurs sortes de champignons et des noix.

Alors que son enfant retirait sa cape et sortit ses trouvailles, Laurelin la stoppa dans son action avec douceur. Inquiète sur ce qu’il pouvait se passer, Sighild fixa immédiatement sa mère :
« Ton père va bien n’ai crainte. Nous avons eu une visite tout à l’heure, pour toi, mais il n’a pas souhaité t’attendre. »

Qui était-ce ? Calion ? Voronwë ? Mithrandir ? Laurelin reprit aussitôt :

« Il est revenu de Pélargir. »

A ses mots, la semie-elfe se recula et remit aussitôt sa cape :


« Sais-tu où il se trouve ? »


« Hélas, il ne nous a rien dit. Elwing, mange au moins quelque chose avant de partir. Tu n’as rien avalé depuis hier matin. »


La jeune mage se contenta de regarder sa mère pour l’apaiser. Sans dire un mot, elle sortit par l’entrée principale de sa demeure, bien décidée à le retrouver.

Elle commença par les bas quartiers de la Cité Blanche, qui lui rappelèrent cette drôle de rencontre. Elle n’avait guère peur des dangers de ces rues, du fait de ses dons et de son équipement.  

Sighild passa des heures à le chercher, rien à y faire. Elle retourna dans le milieu de  Minas Tirith et se rendit aux maisons de soins. On lui informa que son protégé était bien venu se faire soigné il y a quelques jours.  La belle pesta de l’intérieur et ressortit sous cette pluie battante.

Elle continua ses recherches dans les différents bars de la ville, essuyant des remarques de maladroits et d’idiots qui ne voyait qu’en elle un bon moyen de s’assouvir ses pulsions primaires.
La pluie s’estompa petit à petit et l’astre de la nuit allait bientôt disparaître lorsqu’elle vit trois ivrognes autour de quelque chose, un corps. Deux d’entre eux soulevèrent le corps d’un homme, pendant que le troisième guettait les gardes.

Ils s’enfoncèrent dans cette ruelle malodorante, sans avoir vu l’inconnue à la cape noire *.
« Il est mort ? » dit le premier



« Non, non, juste endormi. » reprit l’autre


« Pourtant, il n’avait pas tant bu que ça…tu ne lui en aurais pas mis de trop sans son verre ? » renchérit le dernier

« On s’en fiche, ce qui compte c’est ce qu’il a dans ses poches et dans sa bourse. » conclut le premier.

Alors que les trois voleurs s’occupaient de leur victime, Sighild s’avança sans faire un bruit. Le troisième, sans doute le plus idiot des trois, fut tirer en arrière par la belle qui lui affubla un coup de pieds dans l’entre jambe et l’assomma contre le mur.

Un de moins.

Le second vint aussitôt lui donner un coup de poids au visage, pendant que le premier sortit une dague. Elle les repoussa tous les deux et désarma le premier.

Retirant sa cape, les deux hommes furent à la fois étonnés et amusés, étonnés de voir une donzelle devant eux et amusés à l’idée de ce qu’ils pourraient lui faire. Leurs idées partirent rapidement à la vue de l’épée qu’elle venait de sortir.

Le regard de Sighild n’était pas amical, loin de là, il ressortait d’autant plus par le bleu qui commençait à se former sur sa joue droite. Constatant la menace qui se tenait devant eux, les deux voleurs partirent, laissant sur place leur acolyte.

Rangeant son épée dans son fourreau et ramassant sa cape,  la belle se dirigea vers son protégé qui commençait à reprendre connaissance. Sans dire un mot, la belle l’entoura de sa cape et constata avec peine son état.

Il était en train d’ouvrir les yeux, elle le fixa, comme à son habitude. Son regard était toujours le même, froid.

Sighild était heureuse de le revoir vivant mais il s’était mis en danger inutilement. Son visage demeura impartial.

Elle ne lui adressa pas la parole et se contenta de le soulever et de l’aider à marcher. Il avait besoin de repos, de vêtements chauds et de manger.

Le soleil commençait à apparaître et la pluie s’abattit progressivement…
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Mardil
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Le vent nous portera...[Forêt, PV Mardil] EmptyMar 2 Fév 2016 - 13:48
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Les sons étaient indistincts autour de lui. Il avait vaguement conscience du froid du pavé et de l’odeur omniprésente d’urine. Eirik ne reprît conscience que lorsqu’on le souleva de terre. Il s’était étendu sur son moignon et, maintenant que le poids de son corps n’endormait plus ce qu’il restait de son bras, la douleur fît de nouveau son apparition, bien plus forte qu’elle ne l’était quelques heures plus tôt.

Cependant, il ne parvenait pas à ordonner à son corps d’obéir. Il voulait se défendre contre les hommes qui le manipulaient sans précaution et qui semblaient en vouloir à sa bourse. Seulement, il ne parvenait même pas à formuler le moindre son, encore moins à faire bouger ses membres. Dans les brumes d’alcool qui commençaient à se dissiper, il comprît soudainement qu’il était absolument sans défense. Il allait mourir dans cette ruelle, une fin pathétique qui témoignerait de ce qu’il restait de lui.

Cependant, son destin fût tout autre et se manifesta, une fois de plus, par l’apparition de celle à qui il devait déjà tout. Eirik ne comprît pas grand chose au court déferlement de violence qui s’empara de la ruelle. Ce n’est que lorsque Sighild l’aida à se relever qu’il réalisa qu’elle venait de lui sauver la vie une fois de plus. Il n’avait rien vu à cause de son esprit embrumé par l’alcool et de la faible luminosité autour d’eux.

Son parfum, en revanche, il ne pouvait l’oublier. Un mélange subtil de senteurs forestières, de fleurs étranges et exquises et de fruits frais. Un parfum qui n’avait rien d’artificiel. Un parfum aussi doux et magnifique que celle qui l’émettait. Il se laissa aller contre elle, l’enlaçant doucement et savourant sa chaleur réconfortante, pas vraiment conscient qu’une telle familiarité était toute à fait inconvenante même si personne ne pouvait les voir. Il avait conscience de salir la tenue de la magicienne, d’être totalement indigne de s’appuyer sur elle de cette manière, au sens propre comme au sens figuré.

Elle mît fin à son étreinte, avec douceur mais fermeté, et ils se mirent en chemin. Elle n’avait pas prononcé un mot et lui non plus. Eirik savait que rien de ce qu’il pourrait dire serait une justification suffisante. Et, à vrai dire, il n’avait pas les pensées suffisamment cohérentes pour se lancer dans une telle explication. Il avait évité d’aller la trouver pour ne pas qu’elle le voie ainsi diminué et n’avait réussi qu’à lui présenter un visage encore plus pitoyable. Il n’avait pris aucune décision correcte depuis leur départ de Fondcombe et semblait condamné à toujours choisir la mauvaise voie.

Eirik ne garda qu’un souvenir confus de leur arrivée chez la belle mage et ne tarda pas à sombrer dans le sommeil. C’était encore le meilleur remède afin d’oublier la douleur lancinante dans son bras.

*******

Il se réveilla après quelques courtes mais bienfaisantes heures de sommeil. Le soleil n’était pas encore très haut dans le ciel et il ne pouvait pas être plus de midi. Il se prépara du mieux qu’il le pouvait, activité qui lui prenait beaucoup plus de temps désormais. Il eût toutes les peines du monde à fermer les boutons de sa tunique et dû se contenter d’enfiler ses bottes sans parvenir à les lacer. Une infirmière des maisons de guérison s’en était chargé pour lui la dernière fois.

Le temps de se préparer et il se sentait de nouveau inutile. Même les choses les plus simples lui apparaissaient désormais comme des obstacles insurmontables. Il ne savait pas comment s’adapter à sa nouvelle condition. Et qu’était-il au juste ? Un vétéran ? Il n’avait jamais combattu pour le Gondor à proprement parler et ne pouvait même pas prétendre à une indemnisation. Il n’était qu’un estropié parmi d’autres, sans compétence particulière, sans intérêt pour un autre que lui-même. Le seul avenir proche qu’il voyait se dessiner devant lui était la mendicité. Une perspective bien peu réjouissante.

Un instant, il pensa à filer sans demander son reste, à disparaître purement et simplement de la vie de Sighild. Il ne pouvait lui apporter que des difficultés supplémentaires dont elle n’avait pas le moins du monde besoin. Cependant, il était impensable de faire une chose pareille. Elle avait sûrement dû fouiller une bonne partie de la cité pour le retrouver et l’avait sauvé une fois de plus. Il ne pouvait lui manquer de respect ainsi. Il se devait au moins de la remercier avant de partir à la rencontre de son futur, aussi sombre qu’il paraisse.

Il descendit précautionneusement les marches, là où auparavant, il aurait dévalé l’escalier quatre à quatre. Il trouva Sighild dans la bibliothèque familiale, penchée sur quelques ouvrages dont le sens resterait à jamais mystérieux pour lui. Il eût honte de la déranger ainsi, dans ses bottes défaites, et s’apprêtait à tourner les talons lorsqu’elle prononça son nom à voix basse. Il avait oublié que les elfes avaient une ouïe hors du commun et qu’il était peine perdue d’essayer de passer inaperçu.

Il prît une profonde inspiration et se tourna vers elle. Ses traits magnifiques étaient dénués de toute émotion et il ne pût soutenir l’intensité de ses yeux verts. Il ne savait pas si elle ressentait vraiment la désapprobation et la déception qu’il avait lues sur son visage ou s’il ne faisait que projeter les sentiments qu’il éprouvait pour lui-même. Que pouvait-il lui dire ? A quel point il avait honte de son comportement ? Et par où commencer ? Elle l’avait sauvé par le passé et essayé de lui transmettre un peu de sa sagesse. Il n’avait pas écouté. Et désormais, il venait la voir en espérant qu’elle serait capable de le sauver à nouveau. Sauf que cette fois-ci, l’ennemi était bien plus redoutable que ceux qu’il avait affrontés par le passé. C’est de lui-même qu’il avait besoin d’être sauvé.

- Je suis désolé…

Il avait prononcé cette phrase sur un ton tellement pitoyable qu’il ne trouva rien à dire pour continuer la conversation. Cette façon de se comporter n’était pas digne de lui. Il ne restait pas grand chose du jeune homme qui avait quitté la cité blanche plusieurs semaines auparavant. Certes, lorsque Sighild l’avait recueilli, il était anéanti par la perte de sa famille et de tous les repères de son existence. Mais sa nature avait repris le dessus. Il était volontaire et voulait faire de son mieux. Il avait bu les paroles de Sighild comme si sa vie en dépendait (ce qui était peut-être vrai d’ailleurs). Et rapidement, il avait nourri de nouvelles envies, de nouveaux projets malgré la douleur et la peine.

Or, rien de tout cela ne se passait cette fois-ci. Il ne parvenait pas à trouver en son cœur, l’envie de continuer son existence. Il voulait dire tout ça à Sighild, elle qu’il considérait, non seulement comme sa sauveuse, mais comme sa confidente. Elle qui était devenue sa nouvelle famille et sa seule amie. Et pourtant, il ne pouvait avouer son impuissance, qui transparaissait pourtant dans chacun de ses gestes et chacune de ses expressions. Au minimum, il voulait lui faire comprendre ce qu’elle représentait à ses yeux et à quel point il avait honte de l’avoir déçue. Il voulait au moins la remercier pour tout ce qu’elle avait fait pour lui, même si de simples mots seraient bien réducteurs par rapport à ce qu’il aurait aimé lui faire savoir.

Il trouva enfin le courage de parcourir les quelques pas qui le séparaient d’elle et de la regarder en face. Alors il comprît. Comment avait-il pu imaginer que la magicienne ne ressentirait que de la déception ou même du dégoût pour ce qu’il était devenu ? Tout ce qu’il pouvait lire dans ses yeux était de l’inquiétude et une bonté inépuisable. Il se laissa tomber à genoux à côté de la chaise qu’elle occupait et enfoui sa tête au creux de son épaule. Elle ne le repoussa pas et, seulement alors, les larmes qu’il avait refoulé depuis Pelargir coulèrent enfin.
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Sighild Baldrick
Adepte des Arts Secrets
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Le vent nous portera...[Forêt, PV Mardil] EmptyMer 6 Avr 2016 - 9:25
Sighild avait ouvert brusquement la porte de la demeure familiale. Refermant la porte derrière sa fille, Laurelin l’aida à monter le jeune homme à l’étage. La mage installa Eirik dans sa chambre, elle lui retira ses vêtements les plus mouillés et l’installa dans les draps de son lit.

Avant de redescendre, elle sortit de son armoire une tenue car elle était elle-même trempée. Vêtements en main, la belle se dirigea vers la salle d’eau là où sa mère avait pris soin de laisser du linge pour se sécher.

Laurelin prépara un bol de soupe, coupa une tranche de pain pour son aînée et soigna sa fille :


«Je sais que tu es inquiète pour ton père, mais nous savons depuis longtemps que ce jour devait arriver. Je partage ton sentiment, il est difficile pour moi de savoir que je vais…le perdre et qu’il ne verra pas ta sœur grandir…mais nous le savions depuis toujours. Il sera cependant éternel dans nos cœurs. »



Face aux paroles de sa mère, la mage ne répondit rien. Que pouvait-elle répondre ? Laurelin était un être juste et elle avait hérité de ce trait de caractère.

Les soins terminés, Laurelin s’assit en face de sa fille et la regarda manger son potage. Lui souriant avec bienveillance elle reprit :


« Et ce jeune homme, que comptes-tu en faire ? »

La jeune mage but son potage, hésitante, puis se stoppa. Elle rompit son pain, le mit dans le chaud breuvage pour dire enfin :
« Je vais lui proposer de rester avec moi. Quel avenir aurait-il tel qu’il est aujourd’hui ? »


Tout en mélangeant son pain dans sa soupe, Sighild remarqua que sa mère en attendait plus :

« Il a tout perdu et je suis aussi responsable de son état actuel. Je l’ai envoyé dans ce bain de sang. C’est une chance qu’il en soit sorti vivant. »



« Et s’il venait à refuser ton offre ? »



« Elle sera toujours valable, quoiqu’il décide. »


D’un sourire bienveillant et fier, Laurelin se leva, embrassa sa fille sur la tête et partit se coucher.
Sighild termina sa soupe et débarassa la table. Elle manqua une nouvelle fois de sommeil, alors, elle décida de prendre un livre qu’elle avait emprunté à la bibliothèque royale.

Au fur et à mesure de sa lecture, les yeux de Sighild se fermèrent.

***


Elle ne voyait rien mais sentait une brise froide lui caressait le visage. Au loin, le son d’une harpe et une cloche qui sonnait de temps en temps.

Puis le paysage devint plus net. Elle était entourée d’un épais brouillard. Etait-ce un marécage ? Ou une forêt ? Elle ne sentait ni ne voyait grand-chose de descriptible.

*Il est temps…*



Elle se retourna dans la direction de cette voix.

*Il est temps…*


Cela faisait si longtemps qu’elle ne l’avait pas entendu.

* Il ne faut plus attendre.*



Elle parla mais aucun son ne s’échappa :


*Ils savent.*


La brise se transforma alors en vent violant, c’était comme s’il emportait cette voix et cette mélodie loin d’elle.

Sighild tomba au sol, elle sentait la crainte monter en elle, elle ressentait le danger s’entourait d’elle ainsi que quelque chose qui restait bloqué en elle.


« Sigh..ild… »


***

A l’entente de son nom, la belle se précipita immédiatement vers la chambre de ses parents, qui se trouvait juste derrière elle.



« Sigh…ild… »

Son père devait sans doute l’appeler depuis quelques minutes. Sans plus attendre, elle se dirigea vers le mourant homme et lui apporta de l’eau.
« Pardonne moi père, je ne t’avais pas entendu. »


L’homme, encore lucide, regarda le visage de sa fille inquiet. Il y déposa son visage pour toucher cette blessure légère. Se voulant rassurante, Sighild sourit à son père et posa sa main sur la sienne :



« Un grand homme m’a un jour dit que la vie était faite de blessures, qu’elles soient visibles ou non. »

Albérick sourit un instant car ledit homme n’était autre que lui. Buvant son verre d’eau, il remercia sa fille. Elle le borda et le laissa se reposer.

C’est en tournant le dos à son père et en sortant de sa chambre que son sourire disparut, pour laisser place à ce visage sans émotion.

Sa mère était sans doute partie avec le nouveau-né en ville, c’était sans doute elle qui avait enveloppé Sighild d’une couverture.

Impuissante, elle alimenta la cheminée de la demeure et retourna à sa lecture. Que pensait de ce rêve étrange ? Elle ignorait qui « ils » étaient…mais cela n’annonçait rien de bon.

Un bruit à l’étage la sortit de ses pensées. Il était réveillé.

Sighild continua sa lecture tout en restant attentive aux bruits de pas de son jeune ami. De l’hésitation ? Pourquoi en aurait-il ? Etait-il gêné d’être là ? La mage attendit, encore quelques instants, pour souffler enfin son prénom. Elle voulait qu’il descende et c’est ce qu’il fit.

Posant son livre et regardant le jeune homme, qui semblait avoir du mal à se vêtir seul, Sighild allait parler lorsqu’Eirik la devança.

Il était désolé ? Sighild ne comprit pas mais n’eut une nouvelle fois pas le temps de réagir : il enfouit sa tête contre son épaule.

D’un geste délicat, la mage entoura Eirik de ses bras et posa sa tête contre la sienne sans dire un mot. Elle le laissa pleurer et caressa son dos. Elle comprenait cette réaction pour l’avoir vécu lors de la bataille de Fondcombe mais elle avait refusé d’être soutenue par qui que ce soit.

Après quelques minutes à écouter les pleures de son jeune compagnon, Sighild le repoussa délicatement. Un léger sourire apparut sur son visage, d’un geste délicat, elle retira les larmes qui coulaient encore et lui dit :

« Mon jeune ami, tu as vécu des choses, difficiles et atroces. Tu n’as pas à t’excuser…c’est plutôt à moi de l’être…j’aurais dû t’empêcher de partir... »


Elle se leva au même instant et fit asseoir Eirik sur sa chaise :
« …malheureusement, ce qui est fait est fait. »


Tout naturellement, Sighild se mit à genou et laça les bottes d’Eirik :
« Je ne te forcerais pas à m’expliquer ce qu’il t’est arrivé là-bas mais tu es en vie et c’est une bonne chose. »


Changeant de botte, elle reprit :
« Il va falloir que tu apprennes à être autonome Eirik. »



Puis elle se redressa et regarda le jeune homme d’un regard bienveillant :




« Mais nous aurons tout le temps pour apprendre et pour réapprendre ces choses. »

Tournant le dos à son invité, Sighild se rendit dans la cuisine, prépara deux bols, deux cuillères et trancha deux morceaux de pain. Laurelin avait été cherché du lait frais, Sighild en mit un peu sur le feu, son ami avait besoin de prendre des forces. Puis, elle sortit une marmelade de fraises, dont sa mère avait le secret.

Son jeune ami avança timidement et prit place en face de Sighild lorsqu’elle termina de servir leur repas. Sighild prépara la tartine d’Eirik et la lui posa délicatement :
« Aussi longtemps que tu le souhaites, notre demeure t’est ouverte. Après avoir mangé, tu pourras aller te rafraichir dans la salle d’eau. Pour ce qui est de tes vêtements…loin de moi l’idée de te gêner mais il faudra t’en chercher de nouveaux, tout au moins deux tenues. Je vais regarder ce que nous avons ici, la famille de mon père a toujours conservé beaucoup de choses, je pense que nous devrions trouver ton bonheur. »


Elle but avec grâce son lait et attendit une réponse de son interlocuteur silencieux. Elle ne voulait pas lui faire peur avec ses souhaits, elle voulait déjà pouvoir déceler ce qu’il souhaitait avant tout pour ne pas le brusquer…






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