Un diamant Céleste dans une mer de zircons

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Ryad Assad
Espion de Rhûn - Vicieux à ses heures perdues
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Ryad Assad

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Un diamant Céleste dans une mer de zircons EmptyMar 15 Déc 2015 - 18:32
Un diamant Céleste dans une mer de zircons Dalia_10

Des armées en campagne, qui se rassemblaient et partaient à l'assaut des places-fortes gobelines. Ces mêmes Gobelins qui, repoussés par la furie des Nains et de leurs alliés, battaient en retraite et s'égayaient dans la campagne en bandes désorganisées. Le Nord de la Terre du Milieu s'embrasait peu à peu, consumé dans une guerre terrible et souterraine dont les Hommes n'entendaient guère parler, mais qui pouvait changer le destin du monde. Dalia elle-même avait appris toutes ces nouvelles à mesure que son chemin l'avait rapprochée des contreforts des Monts Brumeux. Par tous les Valar, elle n'aurait jamais dû se tenir si près d'eux. Tout cela tenait à ce que les Elfes de Fondcombe, la Dernière Maison Simple, lieu d'accueil et de savoir pour toutes les âmes bonnes et pures, lui avaient refusé l'entrée dans leur sanctuaire. Elle avait attendu des jours durant que des messagers vinssent la trouver, pour la guider jusqu'à l'entrée secrète de leur précieuse cité, laquelle disait-on avait subi d'odieux dommages lors de la guerre contre l'Ordre. Elle avait attendu en vain. Nul Elfe ne s'était présenté à elle, nulle patrouille de beaux et somptueux cavaliers pour venir la mener jusqu'au Seigneur Sombre-Chêne de noble réputation.

Elle avait regagné les villages alentours, peuplés d'hommes cruellement meurtris par la guerre. Ils lui avaient raconté la sombre histoire d'Imladris, l'éviction de son gardien, et l'arrivée d'un nouvel intendant du nom de Calion Palantir. Elle se souvenait avoir entendu son nom, murmuré pendant le mariage royal. Elle ignorait qu'il avait tout simplement remplacé Sombre-Chêne, qui avait toujours ouvert les portes de la cité à qui réclamait audience. Les temps avaient changé. Pas sa mission.

L'assemblée s'était réunie, et avait décidé de joindre les éminents dirigeants de la Terre du Milieu, pour les avertir de la menace qui planait sur eux. Elle s'était engagée à contacter les Elfes, d'une manière ou d'une autre. Si Imladris lui refusait une audience, alors elle n'avait d'autre choix que de pousser plus loin son exploration, et rejoindre Vertbois. Les habitants des lieux n'étaient guère aisés à cerner, mais elle était convaincue de pouvoir compter sur la bienveillance du Seigneur des lieux, Angrod, dont elle avait entendu beaucoup de bien.

Au cours de son voyage à travers les montagnes, qu'elle n'avait pu entreprendre que parce qu'une caravane de marchands lourdement gardée avait acceptée de l'intégrer en échange de ses talents de guérisseuse, elle avait appris ce qu'il se tramait dans les montagnes, dans les cavernes et dans les forêts du Nord d'Arda. La guerre. La mort. Les Nains avaient un nouveau Roi, d'après ce que l'on racontait, et il avait entrepris une ambitieuse politique de reconquête sitôt son emprise sur le pouvoir raffermie. Il avait uni les haches des Naugrim contre un même ennemi, et avait décidé de mener personnellement la campagne contre les féroces Gobelins. Les conséquences des nombreuses batailles, qui avaient vu les Gobelins abandonner nombre de leurs positions et subir de lourdes pertes, étaient dramatiques pour les gens qui vivaient en bordure des régions. Des maraudeurs qui avaient réchappé aux combats venaient piller les champs, tuer et voler à la nuit tombée. Le Nord n'était pas sûr.

Elle avait passé tout cela, cependant, et avait traversé le Gué de Carrock défendu par les Béornides, des hommes rudes et durs en affaire, qui avaient négocié au prix fort le droit de passage de la petite compagnie. Dalia ne s'en était pas souciée. Elle, grande guérisseuse de Minas Tirith, était réduite à voyager comme une simple roturière alors qu'elle appartenait à une des principales familles d'Osgiliath. Devoir payer une taxe n'était qu'une humiliation de plus qu'elle acceptait humblement, consciente que sa mission primait sur toute autre considération. Son blason aurait le temps d'être redoré, et elle n'avait pas fait insulte à son nom en évitant soigneusement de le révéler à ses compagnons de route. Pour eux, elle n'était qu'une bourgeoise précieuse, Dalia du Gondor, qui cherchait à rejoindre les terres Elfiques. Ils n'avaient rien demandé de plus.

Elle avait abandonné la compagnie, qui avait en grande majorité l'intention de descendre vers le Sud, en suivant l'Anduin, pour rallier le Rohan et le Gondor. Elle s'était retrouvée seule, hélas, dans une région hostile, avec pour seule indication de « continuer tout droit » jusqu'à voir apparaître la forêt de Vertbois. Elle était, disait-on, si grande qu'elle occupait tout l'horizon et qu'il était impossible de ne pas la rencontrer. Elle y avait cru, et avait chevauché bravement vers l'Est, en suivant le seul chemin qui s'ouvrait sous ses pas. A chaque instant, elle se demandait si des bandes de Gobelins hardis ne lui tomberaient pas dessus avant qu'elle n'eût le temps de rejoindre l'abri que représentait le royaume sylvestre.

La chance avait été de son côté. Elle avait découvert l'océan de verdure qui s'étendait à perte de vue, bien plus loin que le regard pouvait porter, et avait forcé l'allure pour gagner le couvert des arbres avant que l'obscurité ne s'emparât d'Arda. Elle avait passé une nuit sans chaleur et sans lumière, car elle n'était pas stupide au point d'oublier que les Elfes de Vertbois n'étaient guère amis avec ceux qui s'en prenaient à leurs arbres. Elle préférait ne pas se présenter au Seigneur des lieux comme une intruse sans manières, même si sa tenue abîmée par le voyage ne seyait pas à une Dame de son rang. Elle avait consenti à d'immenses sacrifices pour le bien de cette mission, et cela ne faisait que commencer.

Vertbois n'était pas un endroit où il faisait bon se promener seul, sans escorte et sans guide. Dalia Ronce avait entendu des histoires à ce sujet, mais elle qui croyait dans l'existence des artefacts de pouvoir qui menaçaient la Terre du Milieu ne pouvait pas accepter l'idée qu'une forêt était « maudite ». Elle connaissait les plantes et leurs effets, savait lesquelles étaient dangereuses et lesquelles étaient bénéfiques. Elle n'avait pas à craindre les « maléfices » de la Forêt Noire. Elle se trompait. Quand elle se perdit pour la première fois, elle mit cela sur le compte de la fatigue due à un long voyage. La seconde, elle attribua cela à sa propre médiocrité en ce qui concernait l'orientation. Mais bientôt, elle se trouva complètement perdue au milieu des arbres, incapable de trouver le Nord. La pénombre permanente qui régnait dans la sylve la rendait folle, et elle avait de plus en plus de mal à rester lucide. L'eau des rivières qui serpentaient ici ou là lui avait immédiatement semblé impropre, ce qui n'arrangeait pas sa déshydratation qu'elle essayait de combler en recueillant l'ondée au matin. Mais le pire était la faim qui la tenaillait en permanence. Elle avait pensé pouvoir trouver des fruits dans la forêt, mais Vertbois semblait lui refuser son aide. Tout ce qu'elle trouvait était pourri et gâté, et quand les fruits étaient bien mûrs, ils étaient dangereux pour la santé, voire mortels. Un piège tout désigné pour ceux qui n'y prêtaient pas attention.

Elle avait erré ainsi, sans savoir exactement combien de temps, jusqu'à finalement céder à la frustration qui l'avait gagnée :

- Pourquoi les Elfes de Vertbois ne veulent-ils pas se montrer ? Que craignent-ils d'une femme seule ? Je viens en paix ! Je viens rencontrer votre souverain, le Seigneur Angrod, pour lui parler d'une affaire de la plus haute importance ! Les Elfes ne savent-ils plus différencier leurs amis de leurs ennemis ?

Elle avait crié cette dernière phrase en tournant sur elle-même, pour montrer aux arbres immobiles qui la regardaient paisiblement une bague qu'elle portait à l'index. Une bague qu'on lui avait offerte, il y avait très longtemps : un cadeau précieux que les Eldar ne faisaient pas à la légère. Un don qui faisait de son porteur un « Ami des Elfes ». Elle s'attendait presque à voir surgir des silhouettes gracieuses de l'obscurité, à entendre des rires et des saluts lancés à pleins poumons. Il n'y eut rien de tout cela. Le silence.

Elle s'assit, à bout de forces, et sombra bientôt dans l'inconscience, éreintée.


~ ~ ~ ~


Les Elfes de Vertbois n'abandonnèrent pas Dalia Ronce. Ils l'avaient suivie et observée tout au long de son errance, et quand elle s'était présentée comme une amie, ils avaient convenus d'accéder à sa requête, et de l'emmener auprès de leur Seigneur Angrod, pour qu'il décidât de son sort. Celui-ci avait ordonné qu'elle fût soignée par les meilleurs guérisseurs, et traitée comme une hôte de marque. Les gens du royaume sylvestre n'étaient guère amicaux avec les étrangers, mais ils savaient recevoir ceux qui avaient su gagner la confiance des Eldar. Quand elle se réveilla, Dalia fut remise d'aplomb par la médecine et la bienveillance des hommes et des femmes qui veillaient sur elle. On l'habilla de vêtements simples mais superbes, et elle fut conduite auprès du Seigneur de Vertbois, qui la reçut avec une grande familiarité :

Un diamant Céleste dans une mer de zircons Angrod10

- Dame de Ronce, veuillez pardonner nos Sentinelles de ne pas avoir répondu plus rapidement à votre appel. Les temps sont troublés, pour les Elfes, et nous devons faire preuve d'une grande prudence.

Elle inclina la tête respectueusement. Elle n'aurait jamais imaginé pouvoir converser de la sorte avec le Roi de Vertbois, après avoir vécu de telles aventures. Elle lui en fit la réflexion, et il sourit :

- Je ne suis pas « Roi de Vertbois-le-Grand ». Ce titre appartient à Thranduil et à sa lignée. Je ne suis que le Seigneur qui veille à protéger son domaine.

- Je comprends, Sire. Permettez-moi de vous informer immédiatement de la raison de ma présence ici. Je suis porteuse d'informations capitales, que vous devez à tout prix entendre.

- Je vous écoute attentivement, chère Dame. Vous avez fait une longue route, et avez bravé seule les dangers d'Eryn Lasgalen. Je ne peux que vous accorder tout le temps que vous demanderez.

Elle remercia ce souverain fort courtois et fort bien disposé à son égard. Elle avait entendu bien des choses positives au sujet d'Angrod, mais elle ne s'attendait pas à découvrir un personnage aussi charmant et aussi ouvert. Elle n'était après tout qu'une émissaire inconnue d'une assemblée dont il pouvait aussi bien rejeter la légitimité. Au lieu de la chasser ou de mettre en doute sa bonne foi, il acceptait de lui consacrer son temps. Elle ne comprit pas immédiatement que, si long que pût être l'exposé qu'elle lui proposerait, cela ne serait qu'un clin d'œil pour un Elda. Dalia commença par le début :

- Je vous ai fait parvenir une lettre, je pense que vous devriez la lire avant toute chose.

Il s'exécuta de bonne grâce, et s'absorba un instant dans la lecture, avant de revenir à son interlocutrice. Ses sourcils se froncèrent légèrement, comme s'il attendait davantage d'informations :

- Vous savez tout ou presque, Sire. Nous craignons que la Terre du Milieu coure à nouveau un grand danger, et nous pensons que l'unité sera notre meilleure arme contre les dangers qui nous guettent. Trop longtemps, nos ennemis ont profité de notre division, exploité nos intérêts individuels. Nous aurions pu conserver cette information pour nous, ou ne la divulguer qu'à quelques rares privilégiés. Au lieu de quoi, nous pensons que chaque royaume, chaque peuple doit être informé de ce qu'il se trame. Nous pensons qu'en nous unissant dans la quête de ces artefact de grand pouvoir, nous pourrons prévenir tout déséquilibre. La Terre du Milieu n'a pas besoin d'un nouveau conflit.

Angrod se leva, et invita Dalia à marcher avec lui. Ils arpentèrent les allées superbes du Palais, qui était un mélange spectaculaire entre un savoir-faire inspiré des Nains, et une poésie toute elfique que l'on retrouvait partout, dans les sculptures, dans les décorations exquises et dans les peintures aux couleurs vives :

- Nous sentons depuis longtemps que des forces sont à l'œuvre. Les Elfes ont payé un lourd tribut dans la guerre contre l'Ordre de la Couronne de Fer, et nous n'ignorons pas quels malheurs surviennent lorsque l'intérêt d'un seul l'emporte sur l'intérêt de tous. Les Hommes ont donné un exemple malheureux de cette vérité jadis, et l'Anneau Unique de Sauron ne fut pas détruit quand l'occasion se présenta. Le sang des Elfes Sylvains inonda le sol à Dagorlad, à Barad-Dûr, mais Isildur le Roi des Hommes entendit garder l'Anneau pour lui. La situation ne semble pas avoir changé depuis ces tragiques épisodes qui ont enténébré le Troisième Âge.

Les âges passent, mais le cœur des Hommes s'anoblit-il ? Vous êtes une exception bienvenue, un diamant céleste dans une mer de zircons. Qu'en est-il du reste de votre race ? Ce Warin, dont le nom est murmuré avec horreur, n'était-il pas un homme de pouvoir qui a dominé l'Ordre dont la noirceur s'est répandue jusqu'au cœur de notre monde ? Imladris, Fondcombe comme vous l'appelez, a été ravagée par la folie et l'ambition. Je ne peux permettre qu'Eryn Lasgalen subisse un sort analogue. En aucun cas.


Dalia savait qu'Angrod avait raison. Il était bien plus sage et plus expérimenté qu'elle le serait jamais, et sa réflexion était profondément logique. Pourtant, il était de son devoir d'essayer. Elle n'en ferait peut-être pas le principal allié du Gondor, mais elle pouvait glaner quelques concessions, et obtenir la promesse qu'il ne les abandonnerait pas s'ils avaient besoin de lui :

- Sire, je ne suis pas différente des miens. Je crains autant que j'espère. Je suis condamnée à faire des choix bons et mauvais, à être dans l'errance pour mieux trouver mon chemin. Les Hommes n'ont pas votre sagesse, il est vrai. Nous n'avons pas votre longévité, ni votre connaissance. Cependant, nous partageons le même amour de la vie, le même amour de la paix, j'en suis convaincue. Nous nous battrons de toutes nos forces pour préserver ce en quoi nous croyons, car nous ne pouvons rester inactifs face au Mal qui grandit.

- Là est peut-être l'erreur, Dame de Ronce.

- Je ne le crois pas, Sire. Si nous pouvons changer les choses, si nous pouvons améliorer l'avenir, ou au moins empêcher qu'il ne s'assombrisse, je pense que nous devons tout tenter. Je travaille à guérir mon prochain, et en cela j'influence le cours des choses. Je ne laisse pas la maladie gagner, ni la gangrène se répandre. Et, s'il m'en est donné la possibilité, je cherche à prévenir l'apparition de tout mal. Je suis certain que les Elfes de Vertbois sont capables de nous aider à guérir ce monde. Ensemble, Sire, nous pouvons faire en sorte de protéger ce futur que nous voulons. Ensemble.

Elle plongea son regard déterminé dans les yeux d'Angrod. Elle n'aurait même pas soupçonné avoir une telle force de caractère et une telle éloquence en elle. Elle se surprenait, et assurément ce voyage avait changé bien des choses dans sa façon de concevoir le monde. Elle avait vu la guerre, elle avait vu les menaces qui se déplaçaient dans l'obscurité. Seule une vive et éclatante lumière pouvait les révéler et les détruire. Le Seigneur de Vertbois détourna un instant le regard :

- J'ai besoin de réfléchir à tout cela, Dalia de Ronce. Profitez de notre hospitalité, je vous en prie. Je vous ferai mander lorsque j'aurai pris une décision.

- Je vous remercie, Sire.

#Dalia #Ronce #Angrod


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Un diamant Céleste dans une mer de zircons EmptySam 21 Mai 2016 - 23:49
Un diamant Céleste dans une mer de zircons 949347HyarilAngrod

- Avez-vous fait tout le chemin depuis le Bois Doré, sieur Hyaril, vous qui ne voyagez que si rarement par-delà vos frontières, à la seule fin de me forcer la main ?

La tension était palpable, une tension froide, mesurée. Une tension toute elfique pour ainsi dire, qui ne provoquerait aucune réaction enflammée et irréfléchie comme c'est souvent le cas chez les Humains, mais qui n'en était pas moins grande. Leurs yeux perçants, qu'ils avaient tous les deux du même gris bleuté, étaient plantés réciproquement dans ceux du vis-à-vis comme s'ils cherchaient à entrevoir la psyché qui se cachait derrière. Que tentaient-ils d'y dénicher ? Le seigneur de Vertbois devait chercher à deviner comment ce chef autoproclamé d'une petite troupe à la conscience soit-disant irréprochable, en était venu à savoir ces choses-là. L'elfe de Lórien, lui, y cherchait simplement un peu d'espoir. On aurait presque dit le reflet d'un miroir tant leurs deux physionomies étaient proches ; seule la couleur opposée de leur chevelure offrait un contraste flagrant, comme la plume d'un corbeau sur un tapis de neige, ou la perle d'opale brillant au clair de lune dans la nuit.

- Chaque individu est libre de décider de ses choix, et chaque dirigeant, de la politique que mènera son royaume. Non, seigneur Angrod, je ne suis pas venu vous forcer la main, et vous savez fort bien que je n'en ai pas le pouvoir, tout noble que je puisse être. Earwen fût-elle venue ici en personne qu'elle ne pourrait guère vous obliger à faire ce que vous ne voulez pas faire. Mais de toute façon, je ne suis pas ici en tant que vassal de la Dame de Lórien, mais en tant que membre et chef d'un groupe de bien, d'un groupe qui n'est pas un royaume et qui par conséquent n'entend pas contester votre autorité légitime sur vos sujets, ni vous obliger à accomplir quoi que ce soit.

Le visage d'Angrod se radoucit imperceptiblement. Il avait déjà rencontré Hyaril longtemps auparavant, lorsque le sud de son domaine était connu sous le nom de Lórien Orientale et que les grands parmi les Galadhrim venaient y séjourner un temps, puis repartaient quand ils se languissaient de l'écorce grise de leurs mellyrn que nul arbre ne pouvait surpasser à leurs yeux, pas même les arbres à écorce millénaire de Vertbois. Mais le noble n'avait pas alors les mêmes prérogatives qu'à présent. Le maître d'Eryn Lasgalen n'avait eu vent que très récemment de l’existence de cette guilde, de ces Tirissindo comme ils se plaisaient à se faire appeler, et c'était aujourd'hui même qu'il avait appris l'identité de leur meneur.

- Et avez-vous été contacté par la Dame de Ronce ? questionna encore Angrod à brûle-pourpoint.

Il imaginait difficilement que son visiteur eut pu accéder aux appartements mis à la disposition de la Grande Guérisseuse de Gondor, qui était par ailleurs toujours son hôte. Comment aurait-il pu le faire au nez et à la barbe des habitants du palais, lui qui n'était arrivé que ce matin-même ? Et pourtant la coïncidence n'était certainement pas fortuite : un instant plus tôt, il venait lui rebattre les oreilles avec ses idées de pitié et de bonté, d'empathie et de compassion envers les Humains et... leurs problèmes. Non, le hasard était bien trop improbable.

- Oui, et non, fut la réponse sibylline qu'il obtint.

Hyaril préférait rester vague. Devait-il lui révéler que Dalia de Ronce, toujours soucieuse du bien-être du peuple gondorien, et toujours désireuse de le protéger non seulement des maladies, mais aussi des souffrances inhérentes aux penchants de la race humaine, s'était confiée à l'un des seuls Vigiles présents dans la Cité Blanche, un certain Demetion Farthas, et qu'entre autres considérations sur la violence qui gangrenait les ruelles de la ville, elle lui avait aussi accordé sa confiance et fait part de ses angoisses concernant le grand danger qui planait sur le monde. Puisque les autorités de Gondor ne semblaient pas prendre la menace au sérieux, elle avait décidé de sauter le pas elle-même. Avant de prendre congé de Demetion, elle lui avait indiqué son désir d'informer les Elfes de la situation, eux qui n'avaient point reçu la Missive, et en premier lieu le royaume elfique le plus étendu, Vertbois-le-Grand. De Demetion et par le truchement du fidèle Indralorn, la chose avait atteint les oreilles de Hyaril qui, ne connaissant que trop bien le tempérament de l'héritier de Thranduil, avait décidé de venir en personne au Palais des Elfes pour essayer de le sortir de l'indifférence.

- Je ne l'ai pas rencontré directement, finit-il par lâcher. C'est par mes propres subalternes que j'ai su qu'elle avait l'intention de demander votre aide.

- De demander mon aide pour faire quoi ? questionna Angrod en fronçant les sourcils. Elle a certes mentionné une menace, diffuse, latente, a parlé d’objets magiques qui pourraient être utilisés pour de mauvais desseins s'ils tombaient entre de mauvaises mains... Et si vous voulez mon avis, les mauvaises mains sont souvent celles des Hommes, car c'est bien par leur faute que la beauté de la Terre du Milieu se dégrade et que son éclat faiblit inéluctablement. On ne peut pas empêcher un pyromane de jouer avec le feu, c'est dans sa nature... on ne peut qu'attendre qu'il se brûle avec, hélas !

Hyaril aurait plus que jamais voulu pouvoir sonder l'esprit de son prestigieux interlocuteur : la Dame de Ronce lui avait-il apporté aussi peu d'informations concrètes qu'il le prétendait ? Elle n'avait pas donné beaucoup de détails à Demetion, en tout cas... L'espoir qu'il avait eu d'en apprendre davantage de la bouche d'Angrod s'amenuisait.

- Les Hommes... déclara-t-il comme dans une tirade de la dernière chance. Ils sont loin d'être parfaits, je ne le nie pas. Mais beaucoup sont bons, quoique souvent maladroits. Je me dis qu'il est de notre devoir, nous qui en savons davantage sur le monde et sur sa destinée, de remettre les Hommes dans le droit chemin, autant que nous le puissions. Nous sommes tous des Eruhini, des Enfants d'Eru, et si nous sommes les Premiers-nés, alors agissons à la manière d'un aîné qui prend soin de son cadet. Je vous en conjure, rappelez-vous ces phrases si, dans un avenir proche, vous étiez amené à faire un choix.
#Hyaril #Angrod


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