[OUTRO IRL 18 ANS] Pour se noyer, choisir l'alcool avant la mer

Le gondorien lâcha sa plume et s’étira contre le dossier de sa chaise. Il se redressa, l’air grimaçant. Sa prochaine solde irait dans l’achat d’un nouveau siège. C’était désormais acté. Sined passa une main sur son crâne avant de caresser mécaniquement sa moustache. Chez les Meynard, les bacchantes étaient sacrées. Aucun homme de la famille ne pouvait prétendre à quitter le foyer sans ces célèbres poils dominant les lèvres. Sined repensa à feu son paternel. Qu’aurait-il pensé de son fils lors de ces événements ? Aurait-il été désemparé ? Fier ? Inquiet ? Indifférent ?

Si le nom de leur famille n’avait pas été sali -du moins directement-, l’honneur des siens avait peut-être été égratigné. Après tout, celles et ceux qu’il avait conduit sous ses ordres étaient mêlés jusqu’au cou. Et si la plupart n’était aujourd’hui plus là pour en témoigner, les archives de l’Histoire, elles, n’oublieraient pas.

Quel instructeur était-il. Pour avoir laissé ces bleus prendre tant de mauvaises décisions ?

Sined repoussa son carnet, débordé par l’émotion et la colère. La peau autour de ses ongles était rongée et le blanc de ses yeux nervuré de sang. Il s’agenouilla devant un petit meuble ancien à l’autre bout de sa chambre. Il en sortit un verre et une bouteille aussi vieille que lui et retourna à sa table de travail. Le bruit du liège s’échappant du goulot résonna dans la pièce. Le liquide mordoré s’engouffra dans le passage pour finir sa course dans le réceptacle transparent que Sined tenait entre ses doigts tremblants. Son regard se porta ensuite sur l’étiquette.



- À votre santé, soldats.

La voix de Meynard était enrouée par la fatigue et la peine. Celles et ceux à qui il dédiait ce verre, il se rappelait leurs visages. Et s’il voulait tous les honorer, la bouteille en prendrait un sacré coup.

La première gorgée lui brûla la gorge en même temps qu’elle lui délivra une dose de plaisir non négligeable. Son esprit sentit la chaleur de ce corps étranger lui insuffler une nouvelle force et le porter jusqu’à son journal et sa plume. Meynard garda son verre dans une main et la pointe noire gouttant au-dessus du papier. L’heure d’écrire un nouveau chapitre avait sonné.