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Sujet: Poursuis le soleil, tu fuiras les cauchemars [PV Sigvald]
Ryad Assad

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Rechercher dans: Rhûn   Tag aya sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: Poursuis le soleil, tu fuiras les cauchemars [PV Sigvald]    Tag aya sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptyJeu 3 Jan 2013 - 23:30
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Un froid surnaturel s'était abattu sur la région entourant Albyor, et il semblait que l'Hiver s'annonçât particulièrement rude, cette année. Vieille-Tombe avait connu des chutes de neige, et on avait dû interrompre une partie des manœuvres militaires pour déblayer les rues de la ville qui étaient devenues impraticables. Albyor n'en était pas encore à ce point-là, et pourtant cela ne lui aurait pas fait de mal. La neige devenue eau aurait peut-être chassé la crasse qui s'incrustait dans les moindres recoins, entre chaque pavé, sous chaque porte, et en chaque personne. Aya n'avait jamais aimé la ville Noire, et elle n'aimait pas s'y promener, surtout la nuit. Les lamentations des milliers d'esclaves qui transitaient par ici avaient de quoi rendre fou, et nul doute que le froid allait en emporter une grande partie. Les misérables, ennemis capturés, dissidents, opposants au Trône, étaient des criminels voués à la mort. Là-dessus, rien à redire. Mais ils auraient pu mourir en silence. La jeune fille déambulait dans les rues en quête d'une boulangerie décente pour acheter des provisions. Elle avait été chargée de faire quelques courses pour ne pas éveiller les soupçons de la garde. De son propre avis, il n'y avait rien de plus anormal qu'une jeune fille de son âge, marchant dans les rues mal famées de cette cité glauque. Fort heureusement, elle n'était pas seule. Et pourtant, que Melkor en soit témoin, elle l'aurait préféré. On lui avait assigné la présence d'un elfe, ces créatures mesquines et roublardes, hautaines et condescendantes. Elle n'aimait pas ce Sigvald qui les accompagnait, et si elle avait eu une lame entre les mains, nul doute qu'elle la lui aurait enfoncée entre les côtes, pour voir si son immortalité était bien réelle.

Elle n'avait jamais apprécié les elfes. Ici, en Rhûn, on s'en était toujours méfié, et on les avait toujours regardé avec une sorte de crainte. C'étaient des êtres étranges, magiciens diaboliques parfois, assassins furtifs souvent, créatures imbues d'elles-mêmes, toujours. Depuis l'assassinat du Roi Alâhan, les choses n'avaient fait qu'empirer. Les elfes vivant sur le territoire, les rares osant braver la froideur des habitants, avaient été chassés de leur foyer, quand ils n'avaient pas été tués, tout simplement. On avait maudit les ambassades elfiques, maudit les oreilles pointues, et on avait juré de massacrer tout elfe qui oserait à nouveau franchir les frontières. Nul doute que quelques uns de ces malfaiteurs vivaient encore dans le pays, mais il était évident que la Reine faisait de son mieux pour les traquer. Aya, à sa grande honte, marchait en compagnie de l'un d'entre eux, qui aurait tout aussi bien pu avoir empoisonné son Roi.

Plus grand qu'elle, il avait le visage fermé et dur, assez différent de ce qu'elle imaginait. Il se dégageait une certaine grâce de ses mouvements, mais rien d'aussi surnaturel qu'elle l'avait cru. Il semblait au final très réel. Peut-être étaient-ce aussi les conséquences de son empoisonnement. Il était arrivé très affaibli, et avait été sauvé alors qu'il se tenait aux portes de la Mort. Secrètement, Aya avait espéré qu'il ne s'en sortît pas. Un elfe ne méritait pas qu'on lui sauvât la vie. Mais les choses étaient ainsi, et elle était désormais contrainte d'obéir au capitaine renégat, et de faire les courses à sa place. Cela n'avait rien de très formidable, et elle se demandait ce qui la retenait de s'approcher des gardes qui déambulaient dans les rues. Elle aurait pu tout leur raconter, et les choses auraient été terminées très rapidement. L'elfe arrêté, le déserteur capturé, et la situation réglée. Mais elle avait peur, quelque part. Si le déserteur venait à échapper aux gardes, elle risquait de le payer plus tard. Elle, ou sa famille. Pour rien au monde elle n'aurait mis la vie de ses parents et de son petit frère en danger. Elle préférait s'humilier plutôt que de les impliquer dans cette sombre histoire.

Elle tourna légèrement la tête vers l'elfe, qui avait le regard lointain. A quoi pouvait bien penser une créature pluri-centenaire comme lui ? Il avait dû se battre à de nombreuses reprises, et voir de nombreux malheurs. Ressassait-il le passé inlassablement comme un vieillard sénile, ou bien essayait-il d'oublier tout cela, comme un lâche ? Probablement qu'il essayait d'oublier. Ca collait trop bien avec son air triste, et sa mélancolie. Il devait se morfondre, et ne pas aller de l'avant comme seuls les Hommes de l'Est savaient le faire. Aya, sûre d'avoir percé à jour l'immortel, avait arrêté son idée, et il aurait fallu des siècles pour la convaincre du contraire.

Elle avisa bientôt une petite échoppe où l'on vendait du pain, mais aussi des fruits, des légumes et des babioles. Elle s'en approcha, bien décidée à terminer ses emplettes, et à rentrer le plus vite possible. L'ambiance du coin avait de quoi effrayer, et elle n'était ni très haute ni très épaisse. Son protecteur était un elfe, et s'il venait à être découvert comme tel, elle risquait encore pire que s'il l'abandonnait à la garde. Elle s'approcha du commerçant, un homme d'âge mûr, dont les traits fatigués trahissaient la rudesse de sa vie. Le manque de lumière avait rendu sa peau pâle, et il semblait presque mort. Seul le mouvement de ses yeux indiquait qu'il restait une once de vie dans ce corps étrange. Pourtant, en voyant les deux visiteurs, il s'anima comme un pantin désarticulé, et c'est d'une voix étonnamment agréable qu'il les invita à approcher. Aya frissonna, en se disant qu'une telle voix était presque envoûtante, et qu'il s'agissait peut-être d'un charme destiné à l'attirer dans les griffes d'un être maléfique. Il y en avait plein, qui traînaient par chez elle. A Vieille-Tombe, les légendes étaient nombreuses. D'après certains, les catacombes de la ville recèleraient de nombreux secrets et de nombreux dangers. Mais les habitants étaient si superstitieux qu'ils ne s'aventuraient jamais là-bas. Certains s'amusaient, pour effrayer leurs amis, à dire sur le ton le plus sérieux du monde qu'ils avaient vu des spectres, sans couleur et sans visage, rentrer ou sortir des tombeaux. Tout le monde savait que ce n'étaient que des fables pour faire l'intéressant, mais personne n'était allé vérifier.

Le temps de penser à ça, Aya était déjà face au commerçant, qui lui demanda ce qu'elle voulait. Elle s'efforça d'imaginer qu'il était un bon père de famille, et qu'il ne mangeait pas de petites filles pour le dîner. Ses yeux s'arrêtèrent sur ses dents : n'étaient-elles pas un peu pointues ? Non ! Elle était encore en train de délirer, et elle refusait de paniquer pour si peu. Elle allait faire ses achats, rentrer rapidement, et arrêter de penser à tout cela.

- Nous avons besoin de pain de voyage, et d'un peu de viande. Conservable, si possible.

L'homme se fendit d'une petite révérence presque inquiétante, et alla regarder ce qu'il avait en boutique. Il revint quelques minutes après, avec ce que la jeune fille avait commandé. Il avait même pris soin d'emballer le tout dans un tissu à peu près propre, ce qui n'était pas du luxe à Albyor. La propreté, bien entendu, et pas le tissu. Mais au moment où Aya allait partir, l'elfe arriva les bras chargés de provisions, qu'il déposa en vrac sur le comptoir. Le regard du marchand s'illumina de contentement, alors que celui que la jeune fille s'illuminait de fureur. Elle lança d'une voix courroucée :

- Je n'ai pas assez pour payer tout ça !

Le marchand leva la tête, craignant de perdre une vente providentielle, mais l'elfe tira de sa ceinture une bourse bien remplie, qui donna entièrement au commerçant. Il y avait probablement plus que le compte, mais c'était peut-être pour acheter le silence de l'homme dont les yeux pétillaient désormais. L'elfe récupéra les provisions, et les plaça dans son sac. Aya aurait voulu lui demander où il allait, mais il ne lui en laissa pas l'occasion. Il tourna les talons, et s'éloigna en suivant la trajectoire du soleil. Elle resta un instant à regarder sa silhouette austère qui semblait se dessiner de moins en moins précisément dans le paysage. On aurait dit qu'il s'évanouissait purement et simplement, comme une ombre. Elle comprit qu'il ne reviendrait jamais, et un sourire se dessina sur son visage. Avec un peu de chances, il serait arrêté à la frontière et tué. Avec un peu de chance.

Elle acheva de faire ses courses, et quitta prestement le marchand ravi. Mais comment allait-elle expliquer cela aux autres ? Elle se mit à réfléchir, consciente qu'elle ne manquerait pas d'être assaillie de questions.

#Aya #Sigvald
Sujet: La neige est un plat qui se mange froid
Ryad Assad

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Rechercher dans: Rhûn   Tag aya sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: La neige est un plat qui se mange froid    Tag aya sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptyDim 4 Nov 2012 - 19:13
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A chaque pas, la douleur revenait, lancinante. Et à chaque seconde, un nouveau pas. Le rythme régulier avait quelque chose d'agaçant et de profondément stressant. Juchée sur le dos de sa monture, bandant tous ses muscles pour ne pas en tomber, Aya était au bord de l'évanouissement, maintenue éveillée par le flux et le reflux incessant de la souffrance qui naviguait dans son corps à toute vitesse, détruisant tout sur son passage. Elle aurait voulu pleurer, mais même cela elle n'en avait plus la force. Le froid qui régnait dehors y était peut-être pour quelque chose, d'ailleurs. Les températures, incroyablement basses pour la saison, n'avaient rien arrangé au cas de la jeune fille qui était plus livide que jamais. Toutefois, cela semblait avoir du bon, car sa blessure au flanc saignait moins qu'avant.

Ses pensées s'élevèrent comme un nuage, et elle se perdit dans ses souvenirs. Cela faisait désormais trois jours, et tout était encore flou dans sa tête. Elle se souvenait vaguement qu'ils s'étaient arrêtés...quelque part...et qu'un individu mystérieux avait surgi de nulle part. Elle l'avait vu en premier, et avait voulu prévenir Firaz du danger. Mais son corps avait agi plus vite que sa langue, et avant de comprendre, elle s'était retrouvée étendue au sol, baignant dans son propre sang, une plaie béante au flanc. Puis plus rien. Plus rien jusqu'au moment où elle s'était réveillée, vautrée en selle, sommairement bandée, son cheval suivant celui du traître. Elle avait mis du temps à comprendre comment elle était passée de la bataille à la fuite, et Firaz avait refusé de lui expliquer. En même temps, elle avait tendance à ne pas vraiment comprendre ou écouter ce qu'on lui disait. Ses pensées divaguaient régulièrement, et il lui était impossible de fixer son attention plus de quelques instants sur une même information.

A côté de la jeune Rhûnienne, une voix s'éleva. Elle cligna des yeux, et identifia Firaz. Depuis quand était-il à sa hauteur ? Et puis quelle importance, de toutes façons. Il lui annonça qu'ils se rendaient vers le Nord et la mer. Le reste de son explication, elle ne le comprit pas. Pourquoi voulait-il aller vers le Nord ? Pour l'éloigner de chez elle, et pour aller chercher son général, afin de fomenter une rébellion ? L'imbécile, il n'y avait aucune chance que sa seule volonté parvienne à jeter à bas le Trône de Rhûn ! Aya toussa bruyamment, ce qui lui déchira le flanc. Elle gémit de douleur, et mit son poing dans sa bouche pour ne pas hurler. Lorsqu'elle le retira, il était rougi de sang. Mauvais signe, de toute évidence. La respiration sifflante, elle parvint tout de même à lever les yeux vers le renégat :

- T...Traître...

Ce fut tout ce qu'elle parvint à souffler, d'une voix quasiment éteinte. Elle fut de nouveau prise par une quinte de toux, et des larmes lui montèrent aux yeux, tant elle se sentait mal. Elle pensait que Firaz l'avait entendue, et elle se demandait pourquoi il ne lui répondait pas. Elle leva de nouveau la tête vers lui, et porta le regard dans la même direction que le déserteur. Deux cavaliers apparurent dans son champ de vision, trop loin pour qu'elle puisse clairement les identifier. Sa vue brouillée n'arrangeant rien à l'affaire. Elle espéra qu'il ne s'agissait pas d'ennemis supplémentaires venus les achever. Firaz capta son inquiétude, et il lut en elle qu'elle désirait récupérer son arme. Cependant, lui évitant d'avoir à ouvrir la bouche et à formuler péniblement sa requête, il la stoppa net dans ses délires. Elle était loin d'être assez remise pour lui être d'un quelconque secours, c'était évident, mais il voulait surtout se prémunir contre une attaque dans le dos. A mains nues, dans son état, elle n'avait aucune chance de l'effrayer un tant soit peu. Avec une lame, même ainsi, elle pouvait l'expédier chez ses ancêtres, qui se feraient un plaisir de venger l'affront de sa trahison. Dépitée, elle jeta un dernier regard à son sabre, accroché à la selle du renégat. Plus tard, pensa-t-elle.

Firaz talonna sa monture, et il força l'allure pour se porter à la rencontre des deux inconnus qui se présentaient face à eux. Aya, dont le cheval était relié à celui de son geôlier par une corde, emprunta le même rythme, soumettant la jeune fille à un surplus de souffrance dont elle se serait bien passée. Sa blessure lui coupait la respiration, et elle crut qu'elle allait périr étouffée, incapable de respirer. Sa gorge lui brûlait, et quand enfin l'homme s'arrêta, elle mit quelques secondes à inspirer profondément, pour soulager ses poumons malmenés. Les stridors qui s'ensuivirent furent d'une rare intensité. A chaque fois qu'elle expirait, un léger nuage de vapeur se formait. Elle toussa à nouveau, et celui-ci se teinta de pourpre.

Le renégat apostropha les voyageurs, une main posée sur le manche de son épée. Il semblait tendu comme la corde d'un arc, ignorant encore tout des deux inconnus, et préférant éviter toute mauvaise surprise. Aya inspira profondément, éclaircissant ses idées pour essayer de tirer son épingle du jeu. Qui pouvaient bien être ces deux hommes qui voyageaient ? Des soldats réguliers, ou bien des habitants du Royaume, très certainement. Ainsi, c'étaient forcément des alliés potentiels pour la jeune fille, et certainement des ennemis du renégat. Rassemblant ses forces, elle ajouta à l'appel de son compagnon de voyage :

- A l'aide ! C'est homme est un...

Une violente quinte de toux la saisit, et elle fut incapable de terminer sa phrase. Elle aurait voulu leur dire que c'était un traître, un renégat, un briseur de serment, un assassin et un comploteur contre le Trône. Elle aurait voulu leur appui, qu'ils se débarrassent de lui, qu'ils le capturent et qu'ils le livrent aux autorités. Et quant à elle, elle espérait qu'ils pourraient l'aider, lui trouver un véritable docteur qui saurait la soigner. Elle espérait qu'ils pourraient la ramener à sa famille. Mais elle n'en eut pas le temps, et sa toux ne voulait pas s'arrêter. A chaque nouvelle quinte, elle sentait ses forces s'envoler, la douleur revenir toujours plus forte. Dans sa tête, elle avait l'impression qu'un orchestre de cuivres jouait une symphonie disharmonieuse. Elle ferma les yeux, priant pour que cela cesse.

Sans s'en rendre compte, elle sombra dans l'inconscience, comme si en s'abritant derrière ses paupières, elle avait laissé les ténèbres de son esprit l'envahir temporairement. Elle eut l'impression qu'un baume apaisant enveloppa son corps et son âme, comme un cocon protecteur. Et pourtant, cela ne l'empêcha pas de glisser de cheval. Son corps, privé de toute énergie, se retrouva au sol brutalement. Etendue sur le dos, un filet de sang coulant le long dans son menton, sa blessure s'était rouverte. Dans son sommeil, au loin, elle entendait toujours la symphonie...

#Aya #Sigvald
Sujet: Un lieu de rencontres
Ryad Assad

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Rechercher dans: Vieille-Tombe   Tag aya sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: Un lieu de rencontres    Tag aya sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptyMar 23 Aoû 2011 - 1:26
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Aya marchait dans les rues cruellement malmenées par le vent mordant qui soufflait en tempête. Les larmes qui naissaient au coin de ses yeux étaient chassées instantanément, et quiconque l’aurait croisée aurait pensé qu’elle aurait mieux fait de prendre un épais manteau à capuche, pour préserver son visage rougi, et ses cheveux qui fouettaient l’air derrière elle. Personne n’aurait deviné qu’elle pleurait - s’il y avait eu quelqu’un dehors par ce temps. Et elle avait de bonnes raisons de pleurer. Elle s’était encore disputée avec son père. Toujours à propos du même problème. Cela faisait la sixième fois ce mois-ci. Sauf que cette fois, c’était particulier. Encore une fois, son père s’était opposé de toutes ses forces à son choix de vie, au moment où il n’était plus possible de prendre le temps de réfléchir. Tandis qu’elle marchait sans but, à la recherche d’un abri où ruminer sa colère, ses compagnons aspirants-soldats partaient pour leur premier entraînement en dehors des murs de la cité. Au cours de la semaine qu’ils allaient passer sous les ordres des instructeurs les plus sévères et les plus sadiques, ils sauraient vraiment s’ils étaient faits pour le métier des armes, ou si leur rôle se cantonnerait à celui d’écuyers. Mais Aya n’avait même pas cette chance. Elle avait pourtant tout prévu. Elle avait préparé son équipement, ramassé ses armes de prédilection avec lesquelles elle pourrait faire la démonstration de ses compétences, sellé son cheval, préparé des provisions, et fait ses adieux à sa mère. Mais son père s’était érigé comme un rempart infranchissable entre elle et son destin. Ils s’étaient violemment disputés, à grands renforts de cris et de larmes. Et Aya avait perdu. De rage, elle avait jeté sa convocation aux pieds de son père, avait grimpé sur son cheval, et avait galopé aussi loin qu’elle l’avait pu.

En vérité, elle n’avait pas cent mètres qu’elle fut obligée de mettre pied à terre. Le vent qui s’engouffrait dans les rues était si violent qu’il menaçait de la désarçonner. C’est alors qu’elle se rendit compte qu’elle avait oublié son manteau. Tant pis ! Elle ne retournerait pas le chercher. Pas tout de suite, du moins. Tenant son cheval par la bride, baissant la tête pour protéger son cou dénudé, elle s’était lancée à l’assaut des pavés, en quête d’une auberge ouverte, pour y trouver un peu de chaleur et de réconfort. Mais visiblement, la colère lui avait fait perdre la notion de l’espace, car elle s’était dirigée sottement vers la caserne. Bien entendu, lorsqu’elle y allait pour s’entraîner, personne ne lui disait rien. Mais pour ce qui y était d’y trouver un repas chaud et un abri contre le froid, il lui faudrait repasser. On acceptait là que ceux qui portaient l’uniforme, et qui avaient officiellement intégré le service actif. Les aspirants vivaient chez leurs parents, et ils ne se préoccupaient pas de savoir où ils allaient manger. Honteuse et furieuse envers elle-même, elle fit demi-tour, et mit le cap vers une auberge qu’elle savait proche. Enfin...ses souvenirs la voyaient plus proche.

En poussant la porte, elle fut accueillie non pas par la douce chaleur d’un bon feu de bois qu’elle attendait, mais par une ambiance glaciale. Enfin, elle la jugea glaciale par rapport à ses propres critères. Ses parents habitaient dans une maison, et avaient une situation correcte qui leur permettait de manger de la viande plusieurs fois par semaine, et de se chauffer dignement. Mais la petite auberge n’avait qu’une seule cheminée, qui satisfaisait uniquement ceux qui se trouvaient sur les tables avoisinantes. Tables qui, soit dit en passant, étaient toutes occupées par des marchands. Marchands qui, bien entendu, avaient pensé à prendre d’épais manteaux de fourrure, pour se protéger du froid. Froid qui, comme hasard, régnait dans les seuls coins libres de la pièce. La jeune fille grelottante alla prendre place sur une chaise, relativement à l’écart des marchands qui n’aimaient pas trop qu’on vienne les coller sans raisons. Ses cheveux étaient complètement décoiffés, et elle décida d’y mettre de l’ordre, ne serait-ce que pour s’occuper les doigts...et les réchauffer un peu. Elle passa commande d’une bière et d’une portion de coq au vin. On lui servit une soupe de légumes et un lait chaud. L’influence de son père s’étendait même jusque là. Elle grommela un remerciement au serveur, et commença à manger avec appétit.

Ce faisant, elle ne vit pas la porte s’ouvrir, pour laisser passer un homme venant apparemment de loin, qui semblait avoir arpenté les rues sous ce vent mordant pendant encore plus longtemps qu’elle. Elle leva les yeux alors qu’il commandait une chambre, mais ne vit de lui que son dos massif recouvert par un vêtement épais. Encore un qui avait pensé à prendre ses précautions avant d’affronter ce rude climat. Au comble de l’ennui, l’attention d’Aya fut attirée par le fait qu’il n’avait pas enlevé sa capuche, même après être rentré dans l’établissement. C’était souvent le cas lorsque les gens cherchaient à cacher leur identité, se souvint-elle. Elle avait lu plusieurs histoires parlant de voyageurs mystérieux. A chaque fois, cela impliquait des aventures épiques, parsemées de dangers mais aussi de fabuleuses découvertes. En se rappelant qu’elle avait été privée par son père du droit de participer à cet exercice en dehors de Vieille-Tombe, la jeune fille sentit sa colère revenir. Cependant, ses tremblements, n’étaient pas le fait de la colère, mais bien du froid qui ne l’avait pas encore quitté. Elle s’empressa de porter son lait chaud à ses lèvres tout en suivant l’homme étrange du regard, avec un air qu’elle se voulait mystérieux mais discret.

Elle plissa les yeux pour mieux voir, tandis qu’il se délestait de ses épaisses fourrures histoire d’être plus à l’aise pour manger. C’est alors qu’elle le vit. Un autre aurait pu s’y tromper, croire qu’il avait mal vu, mais pas elle. Pas Aya Assad, fille de Hamid. Sa famille était dans l’armée de Rhûn depuis des années, et elle-même était particulièrement déterminée à servir la Couronne par l’épée. L’homme assis seul à cette table portait un uniforme de l’armée régulière. C’était un soldat ! Mais que pouvait-il bien faire là ? En dehors de la caserne, il aurait dû être accompagné par au moins un de ses compagnons. Et puis il aurait dû porter son uniforme complet bien en évidence. Même par ce temps. Tout cela sentait l’intrigue à plein nez...pour le plus grand plaisir de la jeune fille. Elle l’observa un instant, tandis qu’il attendait son repas, en se posant une seule question : “dois-je aller le voir ?”. Il ne lui fallut pas longtemps pour peser le pour et le contre, et pour prendre sa décision.

Elle se leva brusquement, attirant sur elle une bonne partie des regards de la salle, et mit le cap sur la table du soldat. Ses cheveux étaient de nouveau bien coiffés, son allure était assurée, et malgré ses joues rosies par le vent, elle se sentait parfaitement présentable.

- Bonsoir monsieur, puis-je m’asseoir ?

Sans attendre de réponse, elle prit place en face de lui, avant d’ajouter :

- J’ai vu votre uniforme, vous êtes un soldat ? Vous avez l’air de venir de loin, et pourtant vous êtes seul. Vous savez...vous pouvez aller à la caserne...vous n’aurez à payer pour la nuit, et...oh ! Je suis désolée. J’ai oublié de me présenter : je m’appelle Aya. Aya Assad. Et j’essaie de rentrer dans l’armée. Et vous-même ?

Avec un franc sourire sur le visage, elle termina sa tirade, but une gorgée de son lait chaud qu’elle avait emmené avec elle, avant de reposer la tasse sur la table, dans l’attente d’une réponse de son interlocuteur.

#Aya #Firaz
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