5 résultats trouvés pour Yse

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Sujet: Si la Mort a Mordu
Ryad Assad

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Rechercher dans: Les Havres d'Umbar   Tag yse sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: Si la Mort a Mordu    Tag yse sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptyJeu 7 Mai 2020 - 18:51
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Yse posa un regard glacé sur le cadavre de Khaan, au moment où celui-ci touchait le sol. Elle ne connaissait pas particulièrement l'homme, et n'avait aucune affection particulière pour les marchands. Le voir obtenir le sort qu'il semblait mériter n'était pas pour lui déplaire, même s'il faudrait sans le moindre doute trouver comment régler sa succession. Encore de la paperasse. Elle poussa un long soupir résigné, et fit quelques pas à l'intérieur de la pièce, pour constater les dégâts. En bas de la demeure du grand marchand, des badauds étaient déjà attirés par le cadavre, que des gardes entouraient pour éviter à quiconque d'essayer de piller les maigres biens qui restaient encore sur la dépouille encore chaude. Quelques têtes se levèrent vers la femme à la fenêtre, et Yse comprit que le peuple attendrait une réponse.

Pas une explication, oh non. Tout le monde se fichait de savoir pourquoi le Requin s'était défenestré. Les gens voulaient seulement savoir qui allait reprendre son empire.

La nature avait horreur du vide.

Le regard de la pirate glissa successivement sur les trois silhouettes qui lui faisaient face, et qui semblaient avoir traversé l'enfer ensemble. Lucinia, le regard à la fois résigné et vulnérable, paraissait attendre avec anxiété la suite des événements. Yse la connaissait personnellement, pour avoir déjà eu affaire à son père, un homme bien étrange. Elle n'avait pas d'attaches particulière à la jeune femme, mais elle avait été surprise d'entendre le sort qui avait été réservé à ses possessions – l'incendie de son manoir avait fait grand bruit –, et elle n'avait pas manqué de comprendre que son intercession serait nécessaire pour veiller à ce que les grands marchands d'Umbar ne finissent par s'entre-déchirer comme les chiens de basse fosse qu'ils étaient.

Elle était simplement arrivée trop tard, et avait laissé la mort s'abattre dans les hautes sphères. Seulement cette fois, le petit poisson avait maté le gros.

Les deux autres, Yse ne les connaissait pas. L'homme et la femme ressemblaient de toute évidence à des combattants, et ils portaient sans doute la responsabilité de la mort de Shahib davantage que la jeune marchande qui se trouvait à leurs côtés. Le sang sur les mains de cette dernière disait pourtant le contraire… Que s'était-il donc passé ici ?

- Je suppose, fit la capitaine, que vous avez une explication pour tout ce désordre.

Lucinia ne se laissa pas duper par le ton glacial d'Yse. C'était là une opportunité de s'expliquer qui ne se représenterait pas, et elle devait la saisir afin de pouvoir plaider sa cause. Les assassinats entre grands marchands étaient rares, et généralement les autorités d'Umbar veillaient à faire régner un semblant d'ordre pour éviter la déstabilisation profonde de la classe dirigeante de la cité. Ce qui venait de se produire aujourd'hui était très grave, mais il était toujours préférable de régler ce genre de choses à l'amiable plutôt que de faire un scandale de tout ceci.

- Capitaine Yse, je peux tout vous expliquer.

La jeune marchande se lança dans un récit long et détaillé de ce qui s'était passé. A la grande surprise de tous, elle n'omit aucun détail important, et ne chercha pas particulièrement à dissimuler sa responsabilité dans la mort de Shahib, pas plus qu'elle ne tut son ambition de prendre sa revanche en s'emparant de sa fortune. Le coup audacieux qu'elle avait monté aurait pu très mal finir, mais elle avait triomphé, et réclamait aujourd'hui le butin preuve à l'appui. Le morceau de papier, testament universel qui lui léguait la fortune du Requin, devait encore être paraphé par un Yse, qui ne mit pas longtemps à prendre sa décision après avoir entendu cette histoire pour le moins rocambolesque :

- Eh bien, lâcha-t-elle à la fin du récit, vous avez traversé des épreuves auxquelles bien peu auraient pu survivre, et vous avez réussi à triompher de Shahib et de son sous-fifre… Khaan, c'est bien ça ? J'estime que vous avez mérité votre vengeance, il n'était pas prudent de la part du Requin de s'attaquer impunément à l'héritage de votre père, Lucinia. Je suis heureuse que vous ayez pu vous en tirer.

C'était un mensonge. Yse s'en fichait éperdument, mais elle était fine calculatrice, et elle voyait là un moyen habile de consolider sa position. Shahib s'était toujours aligné plus ou moins nettement avec Riordan, mais depuis la mort de ce dernier, il avait eu du mal à reporter son allégeance sur un nouveau Seigneur Pirate. Sa fortune considérable demeurait un prix alléchant que se disputaient les maîtres de la ville, qui n'aimaient pas se trouver dans cette position de dépendance vis-à-vis d'un homme qui n'était, après tout, qu'un négociant. Lucinia avait redistribué les cartes, et pour asseoir sa position à la tête de cette gigantesque fortune sur laquelle elle entendait dormir, elle aurait besoin du soutien d'une figure d'autorité ici. Yse se proposait de le devenir :

- Votre plan était audacieux, pour ne pas dire ingénieux, mais il ne tient que grâce à la signature que peut apposer un Seigneur Pirate. Je suis disposée à vous aider, Lucinia, mais vous comprenez que je ne peux pas vous placer à la tête de cet empire si vous entendez défendre une politique différente de la mienne. Les intérêts des Neufs doivent prévaloir, pour qu'Umbar prospère. Comprenez-vous ?

- Je le comprends, capitaine, répondit l'intéressée avec humilité.

Yse hocha la tête :

- Bien, alors agenouillez-vous, et répétez après moi. « Moi, Lucinia Nakâda, grande marchande d'Umbar, jure solennellement fidélité à Yse, princesse des mers, capitaine du Rancunier, Seigneur Pirate de la cité d'Umbar ».

La grande marchande, qui semblait avoir ressuscité des morts, s'exécuta sans discuter. Son avenir en dépendait. Plus que son avenir, même : son destin. C'était une chose curieuse en cette ville, et les gens d'Umbar paraissaient guidés par cette force inexorable qui les menait sur les chemins du triomphe ou de l'échec. Lucinia émergeait victorieuse de cette guerre, mais à quel prix ? Nesrine et Tarik observaient la scène surréaliste qui se jouait devant leurs yeux, assistant à la naissance d'un nouvel équilibre dans les sphères du pouvoir d'Umbar. Le monde des grandes gens était décidément plein de surprises.


~ ~ ~ ~

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Une semaine avait passé, le temps pour Lucinia de mettre ses affaires en ordre, et pour Tarik et elle de récupérer de leur long périple. La jeune femme avait eu besoin d'un peu de temps pour faire admettre sa prise de pouvoir à ses anciens adversaires. Les grandes familles marchandes avaient vu d'un très mauvais œil sa prise de contrôle des affaires de Shahib, une opération qui n'était pas commune, et qui menaçait l'équilibre des forces dans la cité. Cela dit, l'appui du capitaine Yse et le ralliement rapide des partenaires commerciaux – qui tenaient davantage au maintien des liens économiques plutôt qu'à la fidélité personnelle – avaient convaincu les Miridas et les Vulnir de tempérer leurs ardeurs. Il fallait dire qu'en plus des restes de son ancienne fortune – qui se résumait pour l'heure au Mille Soleils qui effectuait son voyage de retour vers Umbar, Lucinia avait également mis la main sur la puissante clientèle du Requin, laquelle comptait un certain nombre d'hommes de mains qui se fichaient éperdument de la mort de leur patron, et qui avaient immédiatement juré allégeance à la nouvelle tête pensante… celle qui leur versait un salaire confortable pour effectuer ses basses besognes.

Tarik et Nesrine avaient joué un rôle crucial dans l'organisation de ce nouvel empire commercial, remplissant virtuellement les fonctions de chefs de la sécurité. Ils avaient distribué leurs conseils à Lucinia pour la protéger, lui garantir une assise, et surtout empêcher les Miridas et les Vulnir de mettre en place une quelconque vengeance. Ils ne l'avaient pas fait par bonté d'âme, mais parce que l'apaisement des relations était la seule manière pour eux de pouvoir quitter Umbar sans avoir à craindre de finir avec une lame plantée entre les deux épaules.

Pourtant, après sept jours de négociations, de tractations et de courriers, il avait fallu se rendre à l'évidence. Lucinia avait conforté sa position, et n'était pas prête de la perdre. La jeune femme, qui semblait avoir vieilli et mûri, n'avait plus besoin de leur aide, et eux-mêmes pouvaient retourner à leurs occupations. Tarik, son précieux papier toujours en poche, pouvait enfin rentrer auprès des siens, et reprendre le cours de sa vie. Il avait demandé à être reçu par la grande marchande, qui s'attendait à sa visite depuis quelques temps :

- Bonjour Tarik, fit-elle. Assieds-toi, je t'en prie.

Elle avait investi le bureau de Shahib, et avait commencé à le redécorer à sa manière. La fenêtre avait été remplacée, les dernières traces de sang que les serviteurs n'avaient pas pu enlever avaient été cachées par un joli tapis aux motifs floraux. Les meubles lourds et pompeux du Requin avaient quant à eux disparu, cédant la place à des étagères élégantes et plus discrètes, qui donnaient davantage de charme et de féminité à cet espace austère et jadis peu accueillant. La désormais maîtresse des lieux se leva pour accueillir le guerrier, et s'assit en même temps que lui avec courtoisie.

Elle savait qu'il avait des choses à lui dire, mais elle ne pouvait pas contenir son excitation : il y avait tant de choses qu'elle voulait partager avec lui aujourd'hui.

- Tu ne croiras jamais quelle nouvelle vient d'arriver : les Miridas acceptent de renouveler le partenariat commercial, en échange d'un allègement de leurs dettes. Rien de trop important, je te rassure. J'ai cru qu'ils n'accepteraient jamais ! Tu te rends compte ? Ça veut dire que les derniers récalcitrants vont devoir rentrer dans le rang maintenant, et que je vais pouvoir financer les réparations du Rancunier. J'ai déjà pris contact avec le chantier naval, j'ai demandé à ce qu'on envoie les meilleurs architectes au Palais des Neufs pour s'entretenir avec Yse personnellement.

Elle parlait vite, avec une nervosité frivole qui rappelait les premières heures de leur rencontre, à l'époque où elle n'était qu'une jeune fille ingénue, certes douée pour le commerce, mais sans la moindre once de malice en elle. Depuis, elle avait sciemment torturé un homme en le lacérant sans merci, avant d'orchestrer sa chute au sens propre comme au sens figuré. Son enthousiasme était un paravent bien fragile qui dissimulait à grand peine l'horreur de ses actes.

Après avoir terminé de raconter ce qui l'enchantait à ce point, elle nota que Tarik ne partageait pas vraiment son énergie. Il ne s'était jamais caché de mépriser les questions commerciales, mais elle comprit qu'il y avait autre chose. Sa voix se fit plus basse, alors qu'elle comprenait ce que les mots n'avaient guère besoin d'exprimer :

- Tu t'en vas, c'est ça ?

Elle avait toujours su que ce moment viendrait tôt ou tard. Tarik et elle n'appartenaient pas au même monde, il ne pouvait rester. Et pourtant, elle lui devait tellement. Tellement… Sans lui, elle serait probablement morte dans l'incendie de sa maison. Ou morte dans les collines du Harad. Morte sur la route, ou dans le bureau de Shahib. Morte un millier de fois, de mille façons différentes. Elle n'oubliait pas qu'il avait été envoyé pour agir contre elle, et qu'il avait été le déclencheur de tous ses malheurs, mais depuis il avait payé sa dette… Il s'était acquitté de sa tâche avec noblesse, et avait contribué à les sauver tous les deux, même quand elle avait perdu espoir.

Aucun « merci » ne pourrait traduire l'étendue de sa gratitude, mais elle avait néanmoins un présent pour le guerrier. Elle se leva et se saisit d'une lame qui trônait sur un râtelier. L'épée familiale des Nakâda, un bien précieux qui semblait avoir traversé les âges. Pendant un instant, elle lut le doute dans l'esprit du marchand. Décidément, il ne lui ferait jamais totalement confiance. Elle lui tendit l'épée par la garde, afin d'apaiser ses craintes, et lui souffla :

- Cette lame est dans ma famille depuis des générations. Arriandalazar, « la Reine sous les Flots ». Elle fut forgée dans l'ancien monde, et il est dit qu'elle ne se brisera jamais ni jamais ne perdra de son tranchant. Elle appartenait à son père, puis elle fut brandie par mon frère, et elle m'a échu quand le temps fut venu. J'ai conscience qu'il ne s'agit pas d'une arme discrète, mais je gage qu'elle sera plus utile entre tes mains expertes qu'entre les miennes.

L'arme, en effet, n'était pas de celles que l'on pouvait cacher facilement dans une manche ou une ceinture. Ce n'était pas une arme d'assassin, mais plutôt une fine lame pleine de noblesse, de celles qu'on utilisait pour affronter un adversaire en face, les yeux dans les yeux. La noblesse, le guerrier en avait fait preuve ces derniers temps, et il avait laissé derrière lui une partie de son enseignement pour embrasser un chemin nouveau. La guerre, il pouvait désormais la faire aussi bien dans l'ombre que dans la lumière. Ce cadeau symbolisait ce passage. L'épée finement ouvragée était une arme de guerre, qui avait déjà tué à l'évidence, mais elle arborait aussi de fines inscriptions qui s'enroulaient sur la lame, comme des incantations.

- C'est du vieil adûnaic, la langue des anciens Núménoréens. Il est écrit « voici la lame qui brise les chaînes, voici l'épée du serment ». Et sur l'autre face, est inscrite une phrase dont le sens s'est perdu depuis des lustres. Elle dit « quand viendra l'heure après la nuit, l'acier qui a croisé le fer brisera l'or et l'argent ». Je suppose qu'il est ironique que cette arme soit restée tout ce temps entre les mains d'une famille de marchands, n'est-ce pas ?

Elle n'avait jamais compris le sens de ces paroles. Elle avait espéré le découvrir, mais cela lui semblait hors de sa portée, et quelque part Tarik lui apparaissait comme la personne la plus indiquée pour cela. Il trouverait le courage de mener cette lame sur le chemin de la vérité, et peut-être parviendrait-il à « briser l'or et l'argent ». Lucinia lui déposa aussi un document entre les mains, un petit parchemin qu'elle avait pris soin de rouler sur lui-même et de cacheter.

- Voici ton sauf-conduit pour te rendre jusqu'à Al'Tyr. Deux de mes navires partent aujourd'hui, trois autres demain. Tu es libre de monter à bord de n'importe lequel d'entre eux, les capitaines te feront le meilleur accueil grâce à ce document.

Tout était prévu. Tarik retrouvait enfin sa liberté. Lucinia le regarda droit dans les yeux, sans savoir ce qu'elle allait trouver dans ses pupilles trop souvent fermées. L'assassin n'eut aucun mal à lire l'émotion dans le visage de la grande marchande. Elle était attristée de le voir partir, comme si une page de son existence se refermait définitivement sur son innocence et sur ces jours heureux. Sans vraiment réfléchir, elle s'approcha du guerrier, et lui déposa un baiser affectueux sur la joue.

- Sois très prudent, là-bas. Qu'il ne t'arrive rien.

Elle passa une main sur son bras, mais elle ne pouvait le retenir. Ils étaient appelés par deux destins différents, et elle ne pouvait lutter contre cette force qui était déterminée à les séparer. Alors ils restèrent là un long moment, à contempler leur passé, leur présent et leur avenir.

Et tout ce qu'ils perdaient.


~ ~ ~ ~

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Nesrine et Za'Shin discutaient de manière animée – comme souvent – en envisageant la suite de leur voyage. Ils s'interrompirent en voyant Tarik arriver. Le guerrier se remettait de ses blessures, et il aurait tout le loisir de récupérer à bord d'un des navires de la nouvelle grande marchande. Les deux voyageurs étaient au courant des dispositions prises par Lucinia, et ils ne s'étonnaient pas de voir l'assassin partir. Ils étaient même surpris qu'il fût resté à Umbar si longtemps.

- C'est l'heure de nous dire au revoir, si j'ai bien compris ?

Nesrine n'avait jamais fait dans la dentelle, mais derrière son voile on décelait tout de même une pointe de regret. Elle était une guerrière solitaire, mais elle avait apprécié la compagnie de Tarik, et ce qu'il avait apporté à leur petit groupe : de la discipline, de la rigueur. Ce qui lui manquait précisément. Cependant, elle savait aussi qu'il appartenait à la Guilde des Ombres, et qu'il n'était pas soumis à son libre-arbitre. Il n'était qu'une arme au service des plus célèbres assassins d'Al'Tyr, et il ne pouvait pas parcourir les routes à sa guise, pour mener sa vie comme il l'entendait. Il n'était pas exclus, d'ailleurs, qu'il se retrouvassent opposés à l'avenir, si d'aventure leurs chemins venaient à se croiser de nouveau. Elle ne put s'empêcher de le lui faire remarquer :

- J'espère que tu seras remis sur pied la prochaine fois qu'on se verra… cela me dérangerait de devoir botter les fesses d'un estropié.

La provocation était amicale, et tira un franc sourire à Za'Shin, qui donna une tape sur l'épaule de la guerrière, avant de tendre la main à Tarik.

- Ne l'écoutez pas, elle dit n'importe quoi, comme d'habitude. Merci, Tarik d'Al'Tyr, ou peu importe comment vous vous appelez. Vous avez accompli votre mission ici, d'après ce que j'ai cru comprendre, mais surtout vous avez accompli de nobles actes. Vous avez protégé Lucinia, vous avez restauré cette marchande dans ses droits, et vous avez permis à Nesrine et à moi d'obtenir notre vengeance.

Za'Shin ne s'était jamais ouvert sur la question, mais à plusieurs reprises il avait laissé entendre que lui aussi avait des raisons de détester le Requin. Les choses étaient peut-être trop douloureuses pour lui permettre d'en parler, mais la gratitude dans son regard était éloquente.

- Le Harad dominerait le monde depuis bien longtemps, s'il était peuplé de plus de gens comme vous. N'oubliez pas qui vous êtes, Tarik. N'oubliez pas.

Il posa une main sur le torse de l'assassin, un signe de paix de la part de certains peuples du Harad. Un encouragement aussi. Nesrine se leva à son tour, affichant un air moins moqueur que précédemment. Les paroles de Za étaient touchantes, et méritaient qu'elle se mît au diapason. Alors elle posa sa main sur l'épaule du guerrier de manière très virile, et lui souffla :

- Comme le dit l'autre idiot, n'oubliez pas qui vous êtes. Les Ombres ne détiennent qu'une partie de la vérité… c'est à vous de l'explorer complètement. Vous savez, le monde est vaste. Quoi qu'il en soit, faites bon voyage jusqu'à Al'Tyr, et prenez soin de vos blessures. Et ne mourez pas avant que nous nous retrouvions.

Elle haussa les épaules, et pour la première fois montra un visage très humain. Elle avait trouvé en Tarik un allié précieux et un rival de valeur. Elle espérait sincèrement le croiser de nouveau, quand ils auraient laissé cette sinistre histoire derrière eux, et qu'ils auraient tout deux évolué. Les adieux n'étant pas son fort, elle s'éclipsa bientôt, préférant gérer seule ses émotions contradictoires, et réfléchir à ce qu'elle ferait par la suite. Maintenant qu'elle avait obtenu sa vengeance, elle devait trouver un sens nouveau à sa vie.


~ ~ ~ ~


Elle avait fait son paquetage, qui contenait quelques vivres, une tenue de rechange, et assez d'eau pour survivre trois jours. D'ici là, elle espérait bien repérer un point d'eau potable, ou obtenir l'aide qui lui avait été promise. En apprenant la nouvelle de la mort de Khaan, la situation lui avait paru évidente. Son protecteur était mort, et elle ne pouvait plus compter que sur elle-même pour survivre. Survivre, et protéger son père qui était toujours plongé dans un état très grave.

Elle se pencha vers le chariot où reposait son corps embaumé.

- Père ? Vous m'entendez ?

Il ne répondit pas. Les drogues qu'on lui administrait pour endiguer la douleur l'assommaient régulièrement, et elle savait que dans ces moments il n'était pas utile d'insister. Par réflexe, cependant, elle lui parlait en imaginant que dans son sommeil agité il l'entendait néanmoins :

- Nous allons trouver un lieu sûr, vous verrez.

- Camila ?

La voix la fit sursauter, et elle se retourna en portant par réflexe la main à son arme. En la voyant faire, il écarta les mains pour montrer qu'il venait en paix, et elle s'en voulut presque d'avoir réagi ainsi. C'était un homme de la garde d'Umbar. Un ami de son père, qu'elle connaissait de vue, et qui ne lui ferait jamais le moindre mal.

- Tout va bien, Camila, ce n'est que moi. J'ai négocié avec les gardes, ils te laisseront passer sans poser de questions… Tu es vraiment sûre que tu veux quitter Umbar ?

Elle hocha la tête. Il n'était pas le premier à lui poser la question :

- Oui, c'est plus sûr ainsi. Nous avons de la famille en-dehors d'Umbar, j'irai les trouver et leur demander de l'aide. Je veux juste reconstruire une vie simple, et m'occuper de mon père.

Le soldat acquiesça, et n'ajouta rien. Camila baissa les yeux un instant. Elle n'aimait pas mentir. Elle savait au fond de son cœur qu'elle ne pourrait jamais se satisfaire de la situation telle qu'elle était. L'homme qui avait détruit son existence courait toujours, et avait eu l'audace de se pavaner à Umbar après avoir contribué à la chute de Shahib le Requin. Elle n'avait aucune idée de son identité, mais elle savait deux choses à son sujet : il appartenait à la Guilde des Ombres – cela, Khaan le lui avait confirmé –, et il était basé à Al'Tyr. Elle était patiente, et elle trouverait bien le moyen de le tuer un jour.

Elle s'en était fait la promesse…


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HRP : Voilà la conclusion de ce scénario, que nous avons quand même ouvert le 20 juin 2016 ! C'est toujours plaisant d'arriver au bout de ce genre d'entreprises, et ça aura beaucoup fait grandir nos deux personnages. A partir de là, je laisse Issam faire ses adieux à Umbar, et tu peux enchaîner à Al'Tyr comme tu le souhaites pour l'intégration dans la Guilde des Ombres (considère que c'est validé haha). La question de Camila reste en suspens, on verra à l'avenir comment elle reviendra te hanter haha.

Super RP en tout cas ! J'ai cru comprendre qu'il y avait un certain marchand vers Djafa qui avait besoin qu'on aille lui secouer les puces, n'hésite pas Wink
Sujet: Tales Of Umbar
Ryad Assad

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Rechercher dans: Les Havres d'Umbar   Tag yse sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: Tales Of Umbar    Tag yse sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptyJeu 16 Mar 2017 - 13:06
Tag yse sur Bienvenue à Minas Tirith ! Yse_210


- Navire en approche ! La Dame Noire ! C'est la Dame Noire !

Contrairement à d'ordinaire, il n'y eut nul cri de joie sur le pont, nul mouvement d'allégresse de la part de dizaines de bottes courant sur le pont pour saluer de larges mouvements de la main l'arrivée de renforts. Au lieu de quoi, par-dessus le ronflement léger de l'océan et le claquement des voiles sous le vent inconstant, on pouvait percevoir les gémissements des blessés et les plaintes des mourants qui n'avaient pas encore décidé d'abandonner. On vint frapper à la porte du Capitaine, qui se fendit d'un « entrez » laconique.

- Capitaine, la Dame Noire en approche. Vous pensez qu'ils sont au courant ?

Yse posa son regard sur le marin qui venait d'intervenir. Il avait gagné une large balafre sur le visage dont la moitié était recouverte d'un pansement de fortune. Son seul œil visible pour l'heure affichait une lueur sombre, abattue, comme jamais la Seigneur Pirate – qui refusait qu'on l'appelât par un titre différent – n'aurait voulu en voir sur le pont de son propre bâtiment. Elle-même n'arrivait pas à digérer la situation, et elle répondit sur un ton bien moins assuré qu'elle l'aurait souhaité :

- Faites monter Filip à bord. Que ses hommes prennent en charge les blessés qui peuvent encore l'être.

- Ce sera fait, Capitaine.

Le marin disparut, et Yse se laissa brusquement aller à la douleur qu'elle avait réussi à contenir jusqu'à présent pour faire bonne figure. Son poing se referma sur le drap qui la recouvrait, et elle serra les dents à en faire saillir les tendons du cou. Un mince filet de sueur s'était déposé sur son front, sur ses bras, et elle avait la désagréable impression de se liquéfier dans sa cabine trop petite, par cette journée trop chaude.

Peu de temps passa avant que Filip ne fit son apparition dans la pièce. Il distribua quelques ordres au dehors, avant de refermer la porte sur eux deux, et de s'avancer au chevet de la jeune femme. L'homme avait toujours été massif, relativement grand sans être un géant, mais surtout large comme un taureau. Il n'avait clairement pas le physique d'un marin, mais c'était un meneur d'hommes comme on en faisait peu, et elle avait eu raison de lui donner le commandement de la Dame Noire. Hélas, il avait tendance à se laisser facilement envahir par ses émotions négatives, et elle vit immédiatement qu'il bouillonnait d'une colère destructrice :

- Qui sont les chiens, les fils de catin, les immondes pourritures qui ont osé faire ça ? Je vais les tuer ! Je vais les tuer jusqu'au dernier !

- Filip…

Il se morigéna, s'envoyant une grande claque dans la figure pour se remettre les idées en place. Ce fils de bonne famille Harondorim n'avait jamais fait bonne impression chez les siens, et il se retrouvait beaucoup plus dans la façon d'être des pirates. Ici au moins, il pouvait agir comme il le voulait sans être jugé.

- Pardon, pardon… Mais c'est que… On a entendu dire par des navires de pêche que vous aviez été attaqués. Au début, je ne m'inquiétais pas trop, mais en voyant les dégâts… Que s'est-il passé ?

Elle haussa les épaules. Elle ne voulait pas vraiment entrer dans les détails les plus sordides.

- Nous sommes tombés sur une escadre de Pelargir, un peu au Nord d'Al'Tyr. Une demi-douzaine de navires de guerre, trop bien armés pour nous. Le combat a tourné court, et on a réussi à prendre la fuite sans trop de casse. Mais trois de leurs vaisseaux ont réussi à nous couper la retraite vers la Cité des Ombres, et c'est en essayant de leur filer entre les doigts qu'on a été pris en tenaille par les autres, qui avaient manœuvré pour nous enfermer. Ils nous ont pourchassés loin au Sud… bien après que nous soyons sortis du Delta de l'Harnen. J'ai cru qu'ils ne nous lâcheraient jamais.

Elle se souvenait très bien de ce qu'elle avait ressenti à cet instant, quand ces silhouettes sombres avaient continué à leur coller au train en les pilonnant allègrement à l'aide des balistes de proue. « Les Gondoriens ne sont pas seulement là pour nous repousser » s'était-elle dit, « ils sont là pour nous couler ». Son vaisseau s'en sortait le mieux, mais celui de son second avait essuyé de très lourds dégâts en essayant de couvrir leur retraite. Quand la poursuite avait cessé, et que les voiles blanches avaient fait demi-tour, ils avaient été contraints de remorquer le Faux Espoir pour le ramener à bon port. Filip, de toute évidence surpris, ne put s'empêcher de demander :

- Les navires de Pelargir ne s'aventurent jamais si loin au Sud d'habitude… Tu penses qu'ils savaient qu'ils avaient affaire à toi ? Quelqu'un aurait pu leur dire que tu te trouvais à bord ?

- Improbable. Ils étaient simplement déterminés à nous envoyer par le fond, c'est tout.

Elle considéra un instant cette réponse. Elle ne pouvait pas être certaine de ce qu'elle avançait, naturellement, car la perspective de pouvoir capturer ou tuer un Seigneur Pirate aurait rendu fou n'importe quel Amiral du Gondor. Mais elle n'avait hissé aucun signe distinctif, et ils n'avaient pas fait de vagues dans la région qui auraient pu rendre la flotte de Pelargir particulièrement à l'affût. Comme elle gardait le silence, Filip reprit :

- Hm… Il nous faudra tirer ça au clair, mais pour le moment le principal c'est que vous soyez rentrés. Je vais aller voir Faiz, ce gredin doit avoir des choses à raconter lui aussi.

- Faiz est mort.

Son ton grave et implacable donna encore plus de poids à cette révélation. Elle avait longtemps cherché comment elle l'annoncerait à Filip, qui était un de ses plus proches amis, et elle avait finalement opté pour la façon la plus simple et la plus directe. Il encaissa le coup. Difficilement. Elle-même ignorait combien de temps il lui faudrait pour se remettre son décès. Mais dans son équipage, on ne parlait pas des morts, et on se concentrait sur ce qu'il y avait à faire. Cette règle valait également pour elle, même si elle se rendait compte qu'il était difficile de la respecter. Filip ne dit pas un mot, se contentant de hocher la tête en arborant un air très sombre. Il se leva, prêt à quitter la pièce, et puis il sembla se souvenir de quelque chose :

- Au fait, tu ne vas pas mourir ? Je te vois serrer les fesses depuis tout à l'heure.

Elle eut un sourire triste, et répondit :

- Ce n'est qu'une égratignure.

L'expression préférée de Faiz. Ses derniers mots, aussi. Elle n'avait jamais été aussi proche de tout laisser tomber que lorsqu'ils avaient rejeté son corps à l'océan. De nombreux souvenirs étaient remontés à la surface, alors que le corps s'enfonçait dans les ténèbres insondables. Ce serait sans doute pareil pour Filip pendant un moment. Il semblait ailleurs, hanté par ses sentiments qui allaient se déchaîner brusquement dès qu'il aurait trouvé quelqu'un ou quelque chose sur quoi passer ses nerfs.

- Ils nous le paieront, Capitaine.

Elle hocha la tête, en le regardant disparaître. Oui. Tant qu'elle commanderait le Rancunier, elle ne laisserait pas un tel affront impuni.

#Yse
Sujet: [Passé] La diplomatie est la police en grand costume
Taorin

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Rechercher dans: Le Palais   Tag yse sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: [Passé] La diplomatie est la police en grand costume    Tag yse sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptyMar 23 Juin 2015 - 11:25
Les portes ouvertes, dont les figures gravées fixaient la troupe qui passait sous le linteau de pierres blanches, laissèrent passer la troupe des Seigneurs Pirates survivants, en route pour le Palais royal. Chacun était escorté par trois ou quatre de ses hommes, des vétérans de multiples batailles, soudards experts dans l’art d’ôter une vie. Bien qu’arborant des vêtements de parade, ou ce qui pouvait s’en rapprocher le plus pour des corsaires, tous étaient exceptionnellement armés, qui d’un lourd sabre d’abordage qui battait son flanc, qui d’un long coutelas à la lame bien entretenu, qui d’un arc attaché dans le dos, le carquois rempli de flèches sûrement empoisonnées. La délégation était accueillie aux portes par une forte troupe de soldats gondoriens, qui servaient à la fois à protéger les Suderons des éventuelles attaques dont ils pourraient être victimes lors de leur traversée de la cité, mais aussi pour les maîtriser en cas de trahison de leur part.

La troupe fendait la foule de badauds qui s’était regroupée, attirée par ce défilé peu commun pour cette fin de cérémonie nuptiale. Au centre, Taorin, Reznor et Yse discutaient des derniers points de détails des négociations à venir. Ils en avaient déjà discuté toute la nuit, à l’abri de leur campement : ils avaient fini par se décider de montrer leur volonté de mettre un terme au conflit en ne venant que si légèrement escorté. Il fallait montrer aux nordistes que le Sud ne se mettrait pas à genoux, mais ils ne devaient pas non plus irriter les rois des grands royaumes dont la puissance n’aurait aucun mal à balayer le nouvel Emirat, Umbar et tous leurs alliés. La tâche serait ardue, surtout que Radamanthe était une personnalité bien connue des deux souverains du Royaume Réunifié, et pouvait encore faire valoir son titre de Prince de l’Ithilien. Mais les Seigneurs Pirates ne venaient pas sans arguments en leur faveur.

La montée jusqu’au dernier rempart de la Cité Blanche se fit sans incidents notables. Bien sûr, les Suderons avaient été insultés à plusieurs reprises par des Gondoriens emportés par leurs préjugés, mais comment les en blâmer ? Ils en étaient, pour la plupart, restés aux insultes, peu intéressés par une potentielle confrontation avec les soldats lourdement armés aux armes de l’Arbre Blanc. Seul un petit groupe d’ivrognes avait lancé quelques fruits et légumes de mauvaise qualité sur la troupe, touchant majoritairement les pavés usés de la Cité mais aussi l’épaule d’un caporal ou autre sous-officier du Gondor, salissant son armure jusque-là immaculée. Les pirates restaient impassibles, conformément aux instructions : il ne fallait surtout pas créer un nouvel incident qui ne manquerait pas dégénérer rapidement.

La délégation arriva finalement devant la porte du dernier rempart de la Cité Blanche. Les gardes du corps des Seigneurs Pirates furent priés d’attendre, et furent installés dans un corps de garde. Reznor, Yse et Taorin furent alors conduits jusqu’au palais, passant devant l’Arbre Blanc planté par le roi Elessar, passant sus l’ombre de la tour d’Echtelion, foulant, pour la seconde fois, les pavés qui avaient été foulés par d’innombrables hommes de légende. Toujours impassibles, ils se dirigèrent vers la salle du trône, où Sa Majesté Aldarion d’Arnor devait les recevoir, avant de se diriger vers une salle plus calme où les véritables négociations pourraient avoir lieu. Chaque Seigneur Pirate n’avait plus qu’un homme de confiance, un bras droit, sur les talons.

Le sabre ayant appartenu à l’ancien roi gondorien Castamir, appelé l’ « Usurparteur » par les gens du Nord, battant son flanc, le Chien Borgne pénétra dans la salle du trône de l’une des plus grandes puissances des Terres du Milieu. Sans hésiter, les trois Seigneurs Pirates s’avancèrent entre les colonnes de marbre, entre les Gardes de la Citadelle en uniforme d’apparat, jusqu’au souverain nouvellement marié…

*** *** *** *** ***

La salle où auraient lieu les négociations était située au quatrième étage d’une aile du palais, et possédait de larges fenêtres donnant vers l’Est, les Champs du Pelennor, Osgiliath, et, au loin, les montagnes noires du Mordor. Une grande table ovale trônait au milieu. Sur le mur opposé aux fenêtres étaient suspendus divers boucliers et étendards antiques, ainsi qu’une tapisserie décrivant les exploits d’un ancien roi ou Intendant. De petites tables avec plumes et encriers étaient disposées dans les coins, afin de permettre aux scribes de noter les discussions et ainsi d’en tirer un traité que les différentes parties en présence pourraient signer.

Quelques personnes étaient déjà dans la pièce lorsque les Umbarites entrèrent : Radamanthe, l’ancien maître de Dur’Zork, vaincu devant ces mêmes murs, attendait, accompagné de ce qui semblait être un conseiller ainsi que de deux ou trois serviteurs munis de carafes, parchemins, plumes et encre. Taorin vit le regard noir que lui jeta le Prince d’Ithilien alors qu’il donnait son sabre à l’un des deux soldats qui montaient la garde devant la porte. Yse et Reznor faisaient de même avec le second gondorien.

Un siège luxueux avait été placé en tête de table : il s’agissait sans doute de celui réservé à Sa Majesté Aldarion d’Arnor, qui devait arbitrer les négociations. A la droite de ce qui s’apparentait presque à un trône, un fauteuil vide accueillerait sans doute le nouvel Intendant du Gondor, puis venait celui de son prédécesseur, Radamanthe. A sa gauche, un deuxième fauteuil vide était sans doute celui du général Cartogan, puis venaient les trois sièges des Seigneurs Pirates. Yse prit place au milieu, Reznor à sa droite, pendant que le Chien Borgne prenait place à sa gauche, uniquement séparé de celui dont il avait pillé les coffres et vaincu sur le champ de bataille par une maigre largeur de bois ciré.

Ils n’attendirent pas longtemps Aldarion, qui entra rapidement, Alcide d’Illicis sur les talons. Les deux hommes prirent place autour de la table, et, sans plus attendre, l’Arnorien ouvrit les négociations. Après les présentations d’usage, et les premières discussions toujours fleuries bien que tendues, Taorin prit la parole.

« Majesté, Altesse, messires, » commença-t-il, insistant particulièrement sur le titre de Radamanthe, « nous venons aujourd’hui dans l’espoir de mettre fin au conflit qui nous a opposé. La guerre qui a eu lieu, et ne manquerait de reprendre si nous ne parvenions à un accord, a assez duré. Le Harondor est meurtri par les innombrables conflits qui y ont pris place depuis des siècles, et il est temps qu’il connaisse enfin une période de paix et de prospérité, libre de toute domination extérieure.


Mais, malgré notre bonne volonté, certaines personnes semblent toujours s’opposer à une clarification des relations entre le Sud et le Nord. Vous n’êtes pas sans savoir que notre confrère et ami, le Seigneur Pirate Riordan, a été assassiné il y a quelques jours à peine, alors qu’il marchait dans les rues de Minas Tirith. Nous même avons été attaqués, et n’avons survécu que par chance. Plusieurs de nos hommes ont été tués ou grièvement blessés pendant ces attaques. Il ne s’agissait pas de vulgaires brigands. Fort heureusement, nous avons réussi à capturer l’un d’entre eux… Et, bien que cet homme n’ait pas encore avoué l’identité de son employeur, nous craignons que la divulgation de telles informations ne créent d’inutiles tensions… »


*** *** *** *** ***

Il était suspendu par les poignets à une poutre. Mis à genoux, il saignait abondamment du dos, où le fouet avait fait ses ravages, et avait la peau marquée de contusions dues aux coups assénés avec violence par les pirates. Plusieurs dents manquaient à son sourire, un de ses yeux ne s’ouvrait plus, et son nez n’était plus qu’une bouillie sanglante. Il sentait dans son dos deux hommes, torses nus, les poings tâchés du sang du prisonnier, qui attendaient leur heure en préparant quelques autres accessoires de mauvais augure. Autour de lui tournait  un troisième homme, celui qui posait les questions.

Il ne savait pas où il était : la pièce semblait grande, mais remplie de caisses de bois et de sacs de toile épaisse. Seule une lanterne éclairait l’endroit où il était retenu, zone libre délimitée d’un côté par un mur de bois légèrement incliné, et par des empilements de caisses pour les autres. Etait-il dans un entrepôt ? Dans les bas quartiers de la Cité ? Il était inconscient quand on l’avait amené ici et suspendu à cette poutre honnie. Il n’avait plus non plus aucune notion du temps : ses tortionnaires entraient et sortaient de manière apparemment aléatoire, et, de temps en temps, un homme ou une femme venaient lui poser des questions : ils voulaient savoir qui l’avaient employé, principalement. Mais, malheureusement pour eux, il était loyal à ses convictions : il ne trahirait pas son employeur.

L’interrogateur lui posa une question. Toujours la même. Qui t’as engagé ? Il cracha par terre un mélange de salive et de sang pour toute réponse. Il n’arrivait pas à bien discerner le visage de cet homme qui lui tournait autour, mais ce dernier semblait, au rythme rapide de ses pas, excédé par le manque de coopération de son invité.

« Attachez-le à une chaise, et préparez la pince » dit-il aux autres tortionnaires.

Les deux hommes lui détachèrent les mains, soulageant enfin ses épaules du poids de son corps, et l’assirent sans efforts sur une chaise. C’était sans doute le moment de tenter de s’échapper, mais il n’aurait jamais réussi à vaincre ces trois hommes en pleine possession de leurs moyens. Ils l’attachèrent à la chaise, et, soudain, l’un d’eux lui attrapa la main droite, et, avant qu’il n’ait le temps de s’en rendre compte, lui arracha l’ongle du pouce avec une pince de fer terriblement imposante. Il cria, de douleur et de surprise.

« Parle, et j’abrégerais tes souffrances. Epargne-toi ces horreurs. »

Il grogna, puis cria de nouveau lorsqu’un deuxième ongle se vit arraché. Il tremblait, ligoté sur sa chaise par une épaisse corde qui aurait pu être utilisée dans un navire. Elle lui comprimait la poitrine, marquait ses chairs. Encore, la pince s’approcha de ses doigts et de ses orteils. Il n’arrivait plus à compter, son esprit était perdu dans un océan de douleur. Il n’entendait plus que les grincements du bois, que les respirations lourdes de ses tortionnaires, leurs pas autour de lui, et les gouttes de sang qui tombaient de ses mains rougies dans la flaque de plus en plus grosse à ses pieds. Et, de temps en temps, la voix douce de son interrogateur, voix qui entrait en contradiction avec les horreurs qu’il subissait.

Puis, alors qu’il sentait la dureté de la pince contre l’un de ses derniers doigts possédant encore un ongle, il craqua. C’en était trop. Il allait leur répondre, il allait leur dire ce qu’ils voulaient entendre, il allait tout raconter : tout était bon pour faire cesser le supplice, pour mettre fin à la souffrance.

« C’est… C’est cet homme qui m’a engagé… J’connais pas son nom, mais il est v’nu à l’auberge un soir et il m’a dit… »
#Taorin #Reznor #Yse
Sujet: Un diner tout en finesse
Reznor

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Rechercher dans: Les Havres d'Umbar   Tag yse sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: Un diner tout en finesse    Tag yse sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptyVen 3 Juin 2011 - 14:18
Reznor esquissa un sourire en constatant qu'une fois de plus le hasard avait bien fait les choses. Moins d'une semaine après qu'il ait rejoint Umbar, mettant finalement un terme à une campagne d'une envergure certaine, voilà que le capitaine Taorin rentrait lui aussi à la Cité du Destin et conviait tous les Seigneurs Pirates à dîner le soir même.
Reznor était sur les docks lorsque l'information lui parvenu. Il supervisait le déchargement de sa cargaison, qui n'était toujours pas terminé. Il fallait dire que depuis que le Joyeux Requiem avait été sérieusement endommagé quelques années auparavant, au point que les réparations ait forcé Reznor a rester à terre quasi un an (car il allait sans dire qu'il répugnait à l'idée de commander tout autre vaisseau de sa flotte), le pirate ne voyageait guère plus sans quelques navires d'escortes. A vrai dire, pour la présente campagne, il aurait été plus juste de parler d'une petite flottille que d'une escorte. Reznor et les navires sous ses ordres s'étaient éloignés d'Umbar pour quelques mois de rapines et de pillages, jusqu'à ce que les cales soient pleines de richesses diverses, ce qui expliquait qu'il n'ait pas encore finit de tout débarquer.

Un dîner ce soir même. Reznor se félicita d'avoir programmé son rendez-vous pour la fin d'après-midi. Depuis à peu près le milieu de sa campagne en Extrême Harad, l'idée qu'il avait eue, et qui était précisément l'objet de l'entretien qu'il souhaitait avoir, cette idée était en centre de toutes ses pensées et de ses préoccupations, à un point tel que ce dîner rassemblant les Neufs ne lui semblait pas le plus important. Non, ce qu'il attendait avec impatience était son entretien, et les réponses qu'il allait avoir. L'horaire semblait parfait. L'idée prendrait du temps à expliquer, mais il estimait q'il aurait largement assez de deux bonnes heures. Après quoi les deux Seigneurs Pirates pourrait se rendre à la réception de leur confrère.  

Le Capitaine du Requiem continua encore quelques heures à donner ses ordres puis, calculant mentalement le temps qui s'était écoulé, il envoya un mousse vérifier au cadran solaire le plus proche. Constatant que son horloge interne ne l'avait pas trompé, il délégua le commandement à Vedraï, sa Second et s'en alla, non sans s'emparer d'une bouteille d'un de ces vins fins du Dorwinion, d'un demi-siècle d'âge. C'était là un des fleurons de son butin. Cinq caisses entières de 246, une des meilleures années.


***

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Lorsque les Seigneurs Pirates Reznor et Yse arrivèrent à la salle de réception, ils étaient encore en pleine conversation. Si l'idée du Capitaine avait mis moins de temps que prévu pour être expliquée, et que Yse avait très vite apporté une réponse très vite à sa proposition, ils avaient du ensuite rédiger un certain nombre de lettres. Tâche fastidieuse s'il en est, qui aurait pu être laissée à charger de domestiques, mais ils étaient d'avis que le moins de gens seraient au courant le mieux ce serait. Après les avoirs déposées à la volière, ils avaient décider de poursuivre leur conversation en marchant à travers le palais. Il en était préférable ainsi, car s'ils avaient décidé de rejoindre le salon de l'un ou de l'autre, la courtoisie aurait été de proposer quelque chose à boire, or ils avaient déjà vidé une bouteille à deux, et les vins du Dorwinion sont particulièrement forts. Rasséréné à l'idée que son projet semblait possible, Reznor avait idée que finalement la réunion du soir aurait son importance, et il préférait avoir l'esprit un minimum clair.

"... mais nous aurions beaucoup de chance si quiconque dans ma famille proche  soit en mesure d'apporter une réponse à ... notre problème. Mais ils pourront certainement nous conseiller sur la personne à contacter." entendit le garde, reconnaissant clairement la voix d'Yse.

"Et après, nous avons bien assez d'or pour nous montrer convaincants..." répondit Reznor alors que les deux pirates apparaissaient au bout du couloir. Notant l'air intrigué du garde, il 'en dit pas plus.
Pénétrant dans la salle, ils ne s'étonnèrent pas de la trouver vide. Leur petite ballade les avait conduit jusqu'ici, et ils avaient décidé d'entrer, bien qu'ils savaient arriver tôt.
Ce n'était pas un problème. Yse pourrait ainsi le mettre au courant de ce qui s'était passé les six mois durant lesquels le pirate avait été absent. Leur conversations avaient jusqu'alors été bien trop prenante pour qu'ils abordent ce sujet. Il s'enquit cependant de Taorin à un domestique, surpris tout de même de ne même pas voir leur hôte.

"Il me semble qu'il est toujours dans ses appartements privés, Mes Seigneurs. Jai cru comprendre qu'il s'entretenait avec un Seigneur Capitaine. Il ne devrait sûrement pas tarder, il a sans doute été mis au courant de votre arrivée."

#Reznor #Yse
Sujet: Retour à la Cité du Destin
Reznor

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Rechercher dans: Les Docks   Tag yse sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: Retour à la Cité du Destin    Tag yse sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptyLun 10 Nov 2008 - 1:09
Un navire léger fendait les flots en vue des Havres d'Umbar. Ce navire, particulièrement rapide et facile à manœuvrer, était aisément reconnaissable pour tout connaisseur, à ses hautes voiles blanches, sa coque claire et effilée, ses différentes balistes disposées sur le pont. A son pavillon aussi, au crâne et à l'étoile immaculés accompagnés d'une lune rouge sur fond noir, le tout ayant été rejoint récemment par l'emblème des membres du Conseil d'Umbar, titre dont été propriétaire l'homme accoudé au bastingage, près de la proue.

Le Capitaine du Joyeux Requiem fixait les rivages qu'il avait quitté deux mois auparavant, malgré la gloire acquise par la prise de la Cité du Destin. Le fait qu'il soit devenu un des neuf dirigeants de la ville ne semblait pas l'avoir réconcilié avec cette dernière. Même débarrassé des fanatiques Melkorites et des corsaires à leurs bottes, il n'arrivait pas à apprécier le port de son enfance, pourtant véritable capitale des forbans et autres marins peu recommandables.
Foutaises que cela ! Umbar ne pouvait être la capitale des pirates. Car la seule patrie d'un pirate se doit d'être la mer. C'est du moins ce qu'affirme toujours le Capitaine Reznor.

Les lèvres figées dans une expression grimaçante, ses cheveux pâles flottants au vent, et les cales de son navire pleines de marchandises exotiques d'une somptuosité à faire pleurer un Roi, il voyait les quais du port se rapprocher. La dernière fois qu'il les avait vu, c'était lorsqu'il partait, comme je l'ai déjà dit. La fois d'avant, il était de ceux qui lançaient un assaut acharné contre Umbar dans l'espoir, symbole absolu de liberté en Terres du Milieu soit débarrassée de ses récents maîtres, même pas des marins.
C'était le succès de cette opération qui avait précipité sa gloire.

Enfin, le Joyeux Requiem entra dans le port et, avec ses extraordinaires capacités, il était bientôt amarré à sa place. Premier de tout son équipage à descendre, Reznor posa le pied sur le pavé des docks le regard plein de nostalgie.
Déjà, des regards se posaient sur lui. Il fallait dire, le retour après deux mois du Requiem et de son Capitaine, lequel était l'un des neuf, n'était une mince affaire.
Ce dernier donna quelques instructions à ses marins qui déchargeaient une partie de la cargaison qu'ils auraient sans doute plus facile à écouler ici-même.

De tous les visages présents qui observaient la chose, il y en eu un que Reznor reconnut immédiatement. Un de ses collègues au sein du Conseil d'Umbar. Une de ses collègues, plutôt. Le Capitaine Yse était sans doute la femme pirate la plus respectée de toutes les mers, et elle se dirigeait vers lui.

"Où étiez-vous donc passé ?" fit-elle d'une voix cristalline. "Nous commencions à craindre que les neuf ne soient déjà plus que huit. Qu'avez vous été faire ?"

Reznor esquissa un sourire, ce qu'il faisait souvent, satisfait de se souvenir que s'il détestait la ville, au moins on pouvait y faire des rencontres intéressantes...

"J'étais en Extrême Orient, et faisais ce que je fais le mieux, sans doute, piller de riches navires marchands. Voyez mon butin... S'il restait dans la région le moindre seigneur susceptible d'acheter ces splendeurs, je serais riche comme un Roi."

Il désigna d'un geste du bras la file de matelots déchargeant le fruit de ses rapines. Yse fit une moue qui semblait signifier qu'elle n'était guère satisfaite.

"Remarquable... Mais pensez-vous vraiment que ce soit le meilleur moment pour courir les mers éloignées ? Le Harad est à peine débarrassé des derniers fanatiques. Votre aide nous aurais été précieuse et vous auriez eu votre compte de bataille sanglante pour satisfaire votre sabre..."

"Ne nous offusquez pas..." Reznor une bouteille de parfum ouvragée dans le coffre qu'un matelot déchargeait tout près de lui et l'offrit à la pirate, avec un pincement au coeur cependant, ces senteurs exotiques auraient été chercher dans les milles pièces auprès d'une comtesse Gondorienne...
"Je n'ai pas fait que du pillage là-bas, reprit-il. "J'ai sans doute passé autant de temps dans leurs ports étranges à m'entretenir avec des marins et des marchands, de leur noble parfois même. Il me semble important de voir comment nos voisins de l'Est voient le changement de pouvoir à Umbar.

"Et comment prennent-ils la nouvelle?" Yse avait oublié toute rancoeur dans sa voix. Il fallait dire que le sujet l'intéressait. D'ailleurs qui n'était pas intéressé par ce qui se passait par delà les mers orientales, ces contrées qu'y ne figuraient plus sur les cartes des Terres du Milieu, et qui recelaient de mystères incroyables.

"Mal. Ils ont peur pour leurs marchandises. Ils craignent que nous soyons mieux disposés envers Gondor que les propriétaires précédents, et que de fait craignent que nous nous concentrions beaucoup plus sur eux. Ajouté à cela le fait que de plus en plus de leurs Choses écument leurs mers - j'en ai combattu une sorte que je n'avais jamais rencontré - et ils craignent vraiment pour leur prospérité...
Comment on été les choses ici ?"

"Sardanapale et Lahan ne sont pas du genre à renoncer à attaquer Gondor. Ils ont du accidentellement confondre quelques-uns de leurs navires marchands avec des bateaux Melkorites... Mais il faut dire qu'il y en a de moins en moins qui prennent la mer, avec la guerre générale... Riordan ne prend plus la mer en personne, il a tellement d'équipages subalternes qu'il délèguent tout. Sined et moi sommes resté tranquilles.
Seul le Capitaine Novor manque à l'appel. Comme vous il a pris la fuite...
Combien de temps restez-vous ?

"Une semaine, sans doute..."

"Seulement ?"

"Oui, j'ai personnellement de très bon contacts avec Gondor, et le prix des objets exotiques y atteint des sommets. Je vais donc devenir un honnête marchand, pour quelques temps... »

Le Capitaine Yse soupira, mais ne dit rien. Finalement, la jeune femme salua Reznor et s'en retourna à ses activités, satisfaite d'avoir des nouvelles du neuvième Seigneur Pirate et des mers Orientales, relativement déçue de voir que le Conseil ne pouvait décidément pas se retrouver au complet bien longtemps...

Le Capitaine Reznor, lui, s'éloigna en boitant vers le centre-ville, où il négocierait ses marchandises pour moitié moins de la valeur qu'elles auraient auprès d'un Prince, et puis il irait se saouler la gueule dans les règles de l'art, la seule façon qu'il puisse supporter Umbar.

#Reznor #Yse
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