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Sujet: [OUTRO IRL 18 ANS] Les racines de la révolte
Learamn

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Rechercher dans: Le Port de Harlond   Tag cereis sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: [OUTRO IRL 18 ANS] Les racines de la révolte    Tag cereis sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptyMer 15 Mar 2023 - 17:23


“Armés? Ils sont armés? Mais comment diable est-ce possible!?”


Cereis fulminait, avançant d’un pas rapide à travers les rues agitées de la Cité Blanche. Derrière lui, une quinzaine de gardes en armure et lourdement armés le suivaient au pas de course. Les émeutes qui avaient débutés de manière plus contrôlée des semaines plus tôt était désormais entrées dans une nouvelle dimension et c’étaient à des véritables scènes de guerre qu’assistaient désormais les habitants de la glorieuse capitale du Gondor. Des soldats en ordre de guerre déambulant à travers les niveaux de la ville, non pas pour repousser un envahisseur venant de l’Est lointain mais bien pour maîtriser, voire écraser, leur propre population.

Jusque-là, la Garde était parvenue à maintenir un certain ordre. Une tâche grandement rendue possible par l’interdiction du port d’armes décidée par le Général Cartogan depuis de longs mois. Mais voilà, que ce matin, la donne venait de complètement changer. Un groupe d’insurgés avaient quitté la ville pour réceptionner un convoi d’armes bloqué au Port d’Harlond. Averti par les agents de l’Arbre Blanc, la Garde avait envoyé deux compagnies pour les arrêter à temps. Les lieutenants Comas et James ainsi que leurs hommes n’étaient pas revenus. Les insurgés avaient trouvé un moyen de pénétrer dans la cité, malgré la surveillance étroite au niveau des murs. Quel camouflet! Comment cela avait-il été possible? Erelas, Capitaine de la Porte de Minas Tirith, et qui manifestait de plus en plus son désaccord avec le pouvoir, avait-il été capable de les laisser sciemment entrer dans la cité avec leur butin pour y semer la mort et le chaos? Si tel était le cas, il serait jugé pour ses crimes; et pendu en place publique au côté de ses nouveaux protégés. C’était du moins ce que Cereis espérait fortement.
Le lieutenant gondorien tourna après un angle et tomba nez-à-nez avec l’un de ses pairs.

“Ah vous voilà Lieutenant Fein! Un point sur la situation?”

Son camarade semblait mal en en point. A bout de souffle, une entaille sanguinolente à la joue; il avait souffert des premiers affrontements.

“Les insurgés ont déjà pris le contrôle du Premier Cercle où ils ont reçu un appui massif de la population locale. Ils ont ensuite forcé l’entrée jusqu’au deuxième niveau avant que l’on ne puisse le boucler. Les combats se sont engagés près du quartier des Relieurs et du marché couvert afin de les repousser.
-Bien allons leur prêter main forte.
-Ils sont si nombreux Cereis, si nomb…aaaargh.”


Fein ne put jamais finir sa phrase, ses derniers mots se perdant dans un gargouillis pathétique. Une flèche tirée depuis l’étages d’un bâtiment adjacent s’était fiché dans sa carotide; le garde s’écroula au sol, mort. Réagissant au quart de tour, Cereis éleva son bouclier et ordonna à ses hommes d’en faire de même.


Tag cereis sur Bienvenue à Minas Tirith ! Revolt12


L’ennemi était partout. Se regroupant dans les rues et les squares, se cachant derrière chaque recoin, tirant depuis les toits. Le chaos était total. Cherchant à se mettre à l’abri, Cereis analysa les alentours et repéra des arcades en pierre à quelques mètres de là-bas. Au moins pourrait-il se protéger. Il aboya à ses soldats de le suivre et avança, recroquevillé sous son bouclier.

Malheureusement pour lui, une foule en furie surgit alors à l’autre bout de la rue. Les émeutiers étaient munis de fourches, de barres de métal et d’autres objets du quotidien d’ordinaire si anodins mais qui pourraient causer bien des dégâts. Cereis poussa un juron.

“Retraite! Retraite!”

Il dégaina son épée et repoussa les premiers assaillants qui s’étaient rués en sa direction. Il était bien meilleur combattant que ces pauvres roturiers mais leur nombre faisait leur force. Le lieutenant embrocha l’imprudent qui se trouvait le plus proche avant de tourner les talons et de s’éloigner au plus vite de cette rue sous le contrôle des manifestants. Il devait se rendre à l’évidence, leur position n’était plus tenable. Ses hommes étaient pris dans la mêlée et leur sort était scellé. A coups d’épées, Cereis parvint à se frayer un chemin vers une allée plus calme. Il reprit son souffle et tenta de raisonner au plus vite. La ville était sous le coup d’une insurrection; une guerre civile avait éclaté.

Les cloches.

Il fallait faire sonner les cloches. Prévenir le Général, l’Intendant ou encore le Roi que la situation avait dégénérée. Il repéra le modeste clocher qui trônait au-dessus du siège de la guilde des Orfèvres. Le son que produirait ces cloches ne serait pas très puissant, mais avec un peu de chance il serait entendu par les gardes postés sur les niveaux supérieurs qui pourraient alors sonner l’alarme générale.

Il monta les marches quatre à quatre. Derrière lui, un groupe d’insurgés avait déjà repéré son armure rutilante et s’était mis à le courser. Un javelot fut lancé, qui l’atteignit au mollet, le faisant chuter au sol. Avec un cri de douleur, Cereis se redressa et tituba en direction de la corde qu’il saisit à deux mains.

Avec les forces qui lui restaient, il tira. La cloche trembla puis s’actionna et le tintement grave se fit entendre. Un autre javelot fut lancé, qui rebondit sur le dos de sa cuirasse. A nouveau il fit sonner la cloche avant de jeter un regard derrière lui.

Les révolutionnaires étaient sur lui. Il chercha à lever son épée mais des bras puissants l’en empêchèrent et lui firent perdre son équilibre fragile. Désarmé et diminué, Cereis recula; esquivant une première attaque; mais il était trop affaibli pour voir la seconde venir, ni la suivant d’ailleurs. Un formidable coup de poing le sonna complètement. Une lame vint ensuite se ficher dans les interstices de son armure, au niveau de son épaule. Perclus de douleur, Cereis chuta sur le côté depuis le haut du clocher; basculant dans le vide. Mort avant même d’avoir percuté le sol.

Une clameur formidable s’éleva alors du Bas de la Cité. Le Deuxième Niveau de Minas Tirith était désormais “aux mains du peuple”.

Sujet: La Purge: Sauver les apparences
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Rechercher dans: Le Marché Noir   Tag cereis sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: La Purge: Sauver les apparences    Tag cereis sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptyMar 27 Avr 2021 - 17:40




“Lieutenant! Mon Lieutenant! Réveillez-vous!”

Cereis ouvrit lentement les yeux avant de se redresser subitement, brusquement agité par une toux violente qui lui brûlait le thorax. Le Gondorien, pris de convulsions, se pencha en avant et cracha les épaisses glaires qui gênait sa respiration. Exténué et en sueur, il s’adossa finalement contre une poutre en bois et tenta de reprendre lentement une respiration normale. Autour de lui plusieurs hommes de la garde étaient affairés à vérifier l’état de santé de leur supérieur. On lui porta un verre d’eau et épongea la suie et la sueur qui cachait son visage au teint clair. Ses cheveux blonds avaient pris une couleur sombre dans l’incendie et plusieurs poils de son bouc avaient été complètement calcinés. Laissé inconscient dans le brasier qui avait consumé la Cave, la vie de Cereis n’avait tenu qu’à un fil. Si les renforts étaient arrivés quelques minutes plus tard, il n’aurait peut-être plus jamais ouvert les yeux. D’un grognement, il appela l’un de ses hommes de confiance.

“Waldemar! fit-il d’une voix rauque. Où sont-ils? Le salaud n’était pas seul, il n’était pas seul…
-Nous l’ignorons mon Lieutenant. Il avait déjà disparu lorsque nous somme arrivés sur les lieux de l’incendie.
-Et les documents?
-Tout a brûlé mon lieutenant…
-Quelle enflure!”


De frustration, Cereis rassembla ses dernières forces et frappa du poing sur le sol meuble. Il le tenait. Il avait pris le dessus sur ce malfrat que la Garde traquait depuis de si longs mois et il était parvenu à lui filer entre les doigts par l’arrivée impromptue d’autres bandits qui l’avaient pris par surprise. Ah! Si seulement il avait assigné plus d’hommes à cette mission!

Waldemar s’agenouilla en face de son officier et commença à panser les blessures de ce dernier. Tout en déroulant un bandage, le soldat chercha à rassurer Cereis.

“Ce n’était qu’un pion. Nous tenons Anakel, la tête du Réseau. La mission est un succès.”

Il disait vrai, la vieille dame avait opposé une résistance farouche mais voilà qu’elle était condamnée à croupir dans une cellule insalubre pour le reste de ses jours déjà comptés. Cependant quelque chose tracassait grandement le Gondorien. Sauer avait pris le risque de revenir à la Cave pour l’affronter alors qu’il était poursuivi, tout cela pour l’empêcher de pouvoir fouiller correctement les lieux. De toute évidence il avait cherché à cacher quelque chose.

Cereis souffla entre ses dents.

“Il y a autre chose… Non, il y autre chose qui nous manque. Mais maintenant, je connais son visage.”

Ce regard cruel, cette voix suave, ces traits squelettiques. L’image de Sauer était désormais gravée à jamais dans son esprit retors.




FIN DE LA MINI MISSION: La Purge: Sauver les Apparences




Bilan: Semi-échec pour le Réseau d’Anakel:



-Arrestation de la Vieille Dame
-Destruction de la Cave
-Plusieurs membres démasqués
-Partenariats commerciaux mis à mal au sein du Marché Noir
-Visage de Sauer désormais connu

-Plusieurs membres importants échappés
-Secrets du Réseau préservés
Sujet: La Purge: Sauver les apparences
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Rechercher dans: Le Marché Noir   Tag cereis sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: La Purge: Sauver les apparences    Tag cereis sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptyMar 2 Mar 2021 - 10:55


Tout s’était déroulé si rapidement. Cereis, plongé dans sa recherche au sein des nombreux tiroirs du bureau, sursauta quand il sentit les flammes lécher ses mollets. Par réflexe il eut un pas de recul et constata avec horreur les dégâts. Déjà, les précieux parchemins se consumaient et toutes les preuves compromettantes pour le Réseau d’Anakel se transformaient en cendres. Fou de rage, l’officier identifia rapidement la source de l’incendie. L’homme était là, sournoisement tapi dans l’ombre, un sourire satisfait sur son visage cruel. Le lieutenant se précipita alors sur le malfaiteur et les deux hommes roulèrent lourdement au sol. Un nouveau coup porté à la mâchoire lui ouvrit sa lèvre déjà meurtrie et bientôt le goût du sang gagna le palais du Gondorien. Mais cette sensation là il la connaissait, c’était exactement la même qu’il avait ressenti sur les champs de bataille. Il décupla donc de rage et soumit Sauer à une pluie de coups puissants visant son visage. D’un point de vue purement physique, le hors-la-loi ne faisait pas le poids. Cereis était plus grand, plus lourd, plus endurant, mieux entraîné et après chaque choc, la garde sommaire de Sauer faiblissait. Il serait alors à la merci de la Garde. Mais le nettoyeur était un homme rusé et n’hésitait pas à exploiter habilement chaque faiblesse qu’il pouvait identifier dans les défenses du soldat. Un coup dans les parties intimes, des doigts dans les yeux, des morsures aux doigts; tout était permis pour les suiveurs d’Anakel. Et puis, il y avait au fond de ce regard une lueur de folie peu commune parmi les malfrats des bas-fonds. Ce Sauer n’était pas un simple brigand se confondant en excuses et justifications dès que les Gardes de la Cité Blanche arrivaient dans le quartier. Non, cet homme était déterminé à aller jusqu’au bout des choses.

Mais qu’est-ce que cela pouvait vraiment signifier?

Bientôt Cereis sentit la fumée pénétrer dans ses poumons et fut pris d’une toux puissante. L’air frais se raréfiait et il sentait l’incendie gagner du terrain dans leur dos. Pourtant il ne lâcha pas prise, il tenait enfin ce fameux Sauer dont ils entendaient le nom depuis de longs mois sans pour autant parvenir à l’identifier, moins encore à mettre la main dessus. S’il parvenait à s’échapper, le Réseau d’Anakel survivrait assurément et il faudrait tout reprendre. Mais tout ceci n’était qu’une question de temps. La Ligue des Ombres, les Griffes d’Ammoth, le Réseau… tous ces bandits n’avaient plus leur place dans la glorieuse capitale du royaume du Gondor et le général Cartogan avait été très clair sur ses instructions et le sort qu’il fallait leur réserver. Avec la destruction des preuves matérielles, il était indispensable de mettre cet homme aux arrêts, sous la torture, il avouerait. Cereis en avait la conviction.

L’officier du Gondor avait toujours le dessus sur son adversaire mais faiblissait à vue d’œil. Ses attaques étaient moins tranchantes, moins rythmées. Les vapeurs toxiques de l’incendie semblaient le perturber plus que Sauer qui avait désormais une fenêtre d’action. Malheureusement pour ce dernier, il entendit à l’extérieur les cris et appels sur le feu qui embrasait rapidement la Cave. Les renforts ne tarderaient pas à venir et les choses se compliqueraient grandement pour Sauer.

A présent que les documents secrets étaient partis en fumée: le choix du nettoyeur était simple. Il pouvait profiter de la faiblesse qui gagnait Cereis pour tenter de se débarrasser de cet officier qui connaissait désormais son visage, au risque de voir les gardes arriver pour l’arrêter d’une seconde à l’autre. Ou alors il pouvait profiter de la confusion pour prendre la fuite, mais alors son identité serait désormais révélée aux autorités.

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Rechercher dans: Le Marché Noir   Tag cereis sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: La Purge: Sauver les apparences    Tag cereis sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptyMer 10 Fév 2021 - 11:14


“Mais c’est qui ce type?!”

Le lieutenant Cereis n’était pas particulièrement réputé pour sa patience ou son sang-froid et voir cet inconnu qui jouait aux équilibristes le narguer de la sorte ne lui plaisait pas du tout. Le bougre avait eu la présence d’esprit de se placer hors de portée, dans le cas contraire il aurait été certain que l’officier de la Garde ne cherche à l’étrangler à mains nues. L’inconnu était dans l’ombre et tout ce que les soldats pouvaient distinguer était une silhouette svelte et élancée. Le malfrat avait de toute évidence le sens de la théâtralité et son intervention eut un petit effet sur certains des hommes présents. Ses premiers mots, prononcés d’une voix aussi basse qu’inquiétante, avaient complètement refroidi l’atmosphère. Les Gardes, surpris, échangèrent des regards incrédules; Cereis crut même voir une lueur d’inquiétude dans les yeux de l’un de ses subordonnés. Et cela n’était pas pour lui plaire. Vraiment? Les fiers guerriers du Gondor étaient-ils tombés si bas qu’ils tremblaient de genoux devant le premier fantaisiste venu se moquer d’eux. Cereis lui n’était pas du genre à se montrer impressionner par si peu.

Ses menaces pourtant firent leur petit effet. L’homme connaissait leurs noms… Peut-être avait-il simplement écouté leur conversation lors des minutes précédentes mais être interpellé de la sorte par son nom faisait toujours son petit effet. Quant à la vengeance promise sur sa famille et celle de ses hommes, Cereis devait admettre que cela n’avait jamais été agréable d’entendre de telles choses mais il s’était endurci avec le temps et avait appris que les rats, une fois acculés, tenaient souvent ce discours de la dernière chance pour pouvoir s’échapper du piège tendu par les prédateurs. Ce jour-là Cereis était le chasseur.

“Sauer…”
souffla l’officier.

Il n’avait pas vu le visage de l’inconnu et ne savait finalement que peu de chose sur ce criminel au nom bien connu dans les bas-quartiers de la ville mais la manière dont il avait insinué son identité ne laissait que peu de place au doute. Leur cible prioritaire était juste devant eux et son arrestation pouvait définitivement mettre un coup d’arrêt aux sombres agissements du Réseau d’Anakel. Comme s’il avait anticipé la réaction du soldat, le truand disparut à travers la fenêtre. Il ne pouvait leur filer entre les doigts.

“Rattrapez-le!”
hurla Cereis en prenant ses armes.

Les trois soldats du Gondor s’élancèrent prestement à l’extérieur de la Cave. Sauer avait déjà pris de l’avance et les hommes, en armures lourdes, allaient devoir faire le tour de la bâtisse pour rejoindre la ruelle où il avait sauté, au milieu d’un quartier qu’ils ne connaissaient que trop peu.

Mais alors qu’il s’apprêtait à suivre ses hommes dans cette folle course poursuite, Cereis s’arrêta net. L’attitude de Sauer était pour le moins étrange. Pourquoi révéler sa couverture alors qu’il avait échappé à la Purge? Pourquoi prendre le risque de faire connaître son visage? Non, le bougre avait assurément quelque chose d’autre derrière la tête. Narguer les hommes du Gondor pour prendre la fuite lâchement ne signifiait qu’une chose: Sauer cherchait à faire diversion. Il avait attiré leur attention avant de les inviter à le chasser à travers le dédale du Premier Cercle. Le criminel cherchait à les éloigner de quelque chose de précieux qui se trouvait dans cette pièce. Et ils avaient mordu à l’hameçon.

Cereis fit volte-face et son regard se posa lentement sur le magnifique bureau en bois de houx qui trônait au fond de la pièce.

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De leur côté, Waldemar, Drauler et Bernor s’étaient élancés sur les traces de Sauer sans la moindre hésitation. Et comme ce dernier l’avait probablement prévu, perdirent rapidement sa trace. Ingénieusement dissimulé à leurs yeux, il pouvait constater avec satisfaction que les trois guerriers n’avaient plus la moindre idée d’où le malfrat pouvait bien se terrer mais aussi d’où ils se trouvaient. Les guerriers en armures devaient aussi subir les regards courroucés des habitants de ce quartier malfamé qui voyaient d’un très mauvais œil la présence de Gardes dans ce coin-là de la ville.

Cependant le membre du réseau pouvait constater que Cereis manquait à l’appel. L’officier avait-il bifurqué pour suivre une autre piste ou était-il resté fouiller la Cave. Sauer l’ignorait mais les enjeux étaient trop grands pour que toute possibilité soit laissée de côté.

Plusieurs choix s’offraient désormais à lui. Il pouvait sortir de sa cachette pour affronter les gardes au risque de se faire arrêter. Il pouvait tout simplement courir à toute allure vers la Cave, mais là encore il se ferait remarquer et attirerait l’attention des Gardes. La discrétion était aussi possible, mais rebrousser chemin sans se faire remarquer lui prendrait plus de temps, un temps qui lui était compté jusqu’à ce que Cereis ne mette la main sur le précieux document. Ou alors, il pouvait rester caché et attendre pour préserver sa couverture; après tout le fameux parchemin était caché aux yeux de tous de façon très ingénieuse et fouiller le bureau n’était définitivement pas suffisant pour mettre la main dessus. Un certain degré d’intelligence et de perspicacité était requis pour actionner le mécanisme révélant le double-fond du tiroir concerné, et Cereis ne semblait pas être un grand savant.
Sujet: La Purge: Sauver les apparences
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Rechercher dans: Le Marché Noir   Tag cereis sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: La Purge: Sauver les apparences    Tag cereis sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptyDim 31 Jan 2021 - 20:03

La Cave avait été complètement saccagée. Ce qui avait été, encore quelques heures plus tôt, une petite boutique de bric-à-brac anodine était devenue un véritable champ de bataille. Les articles en tous genres jonchaient le sol rougis par le sang de ce qui avaient osé s’opposer à la volonté du Général Cartogan. Le Lieutenant Cereis exultait et ne faisait visiblement aucun effort pour dissimuler son large sourire. Enfin, avaient-ils mis la main sur la tête du Réseau d’Anakel… Des mois qu’ils essayaient de démanteler ce réseau criminel, qu’ils arrêtaient de petits exécutants, qu’ils tentaient d’arrêter l’esclavage clandestin et les enlèvements à répétitions. Pourtant, la Garde de Minas Tirith n’avait jamais réussi à remonter jusqu’à la source et identifier les têtes pensantes du réseau. Mais cela, s’était avant que Cartogan et le Directeur Rhydon n’initie la Grande Purge. Dans les bas-fonds de la capitale, les organisations criminelles du genre avaient fait leur loi pendant trop longtemps. L’Arbre Blanc, pourtant affilié aux affaires extérieures, s’était saisi du dossier et il n’avait fallu que quelques semaines pour que leurs espions n’obtiennent de précieuses informations. Tout cela n’avait pas été chose aisée, mais les plus talentueux des agents étaient parvenus à s’infiltrer dans le réseau. Dès lors, il avait fallu se montrer patient, car même une fois à l’intérieur du réseau, le fonctionnement hiérarchique restait obscur et chaque membre de l’organisation n’interagissait directement qu’avec des seconds couteaux sans intérêts. Mais la persévérance avait finir par payer et un de plus brillants infiltrés avaient obtenu une information capitale.

Une réunion prévue dans l’arrière-boutique de la Cave entre un certain Alrik Danten, marchand du Premier Cercle et Anakel en personne.

L’occasion était trop belle. Cereis avait choisi ses meilleurs hommes, ceux qui étaient prêts à tout pour la défense de leur royaume. Le combat avait été bref mais particulièrement violent. Pris par surprise, les criminels avait pourtant opposé une résistance aussi farouche qu’artisanale aux soldats du Gondor. Une poignée d’entre eux avait dégainé de vraies armes, le reste des bandits n’avaient pas hésité à charger les guerriers avec des outils variés. Là une fourche rouillée, ici un gourdin clouté. Sable dans les yeux, coups en dessous de la ceinture ; toutes les règles de dignité militaire n’avaient pas vraiment cours ici et les Gardes s’étaient montré réellement déstabilisés. Même la vieille femme, identifiée comme Anakel, leur avait donné du fil à retordre. Armée d’une lance, et férocement protégée par deux colosses aux mines patibulaires, elle avait fait mordre la poussière à deux gondoriens. Même le Lieutenant Cereis avait subi un violent coup, asséné avec le manche en bois, et sa lèvre inférieure saignait désormais abondamment.

Toutefois, submergés par le nombre et l’équipement bien supérieur de leurs ennemis, les criminels finirent par faiblir. Les plus couards tentèrent de s’enfuir, les autres se sacrifièrent pour leur patronne. Cette dernière se tenait toujours aussi droite, dévisageant l’officier d’un regard sévère. Elle tenait toujours fermement le manche de sa lance désormais brisée.

“C’est fini chèvre galeuse ! Rends-toi à présent ! “

La dame n’esquissa pas le moindre geste. Les insultes et injonctions de ce grossier officier ne semblaient pas l’affecter le moins du monde. Au contraire, elle se montrait étonnamment paisible. Comme si elle avait attendu ce moment depuis bien longtemps.

“Va au diable ! Saisissez-la, on verra si elle fait toujours autant la maligne au fin fond d’un cachot!”

Malgré leur réputation de passoire ces dernières années, les geôles de Minas Tirith restaient un endroit peu enviable, qui plus est pour une personne d’un âge si avancé. Sans ménagement, les hommes du général prirent “Anakel” par les épaules. Il y avait encore beaucoup de monde à arrêter au sein du réseau, mais maintenant que la tête avait été coupée, tout serait plus simple.

Cereis balaya la pièce du regard :

“Waldemar, Drauler, Bernor! Fouillez cet endroit de fond en comble! Ramenez-moi toute information que vous jugez nécessaire et ne laisser rien au hasard. Et surtout tâchez de trouver où se terre le reste des membres, surtout ce diable de Sauer… Si on le trouve, c’en est fini de leur petit groupe de voyous.”


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Sauer était pourtant bien là. Il avait été alerté par les bruits de combats alors qu’il se rendait au rassemblement avec un peu de retard. Tapi dans l’ombre, il avait assisté aux combats sans juger qu’il était nécessaire pour lui d’y prendre part. Après tout, chacun avait son rôle dans le réseau.

Les trois gardes entamèrent leur recherche avec un certain zèle et au rythme où ils allaient, ils auraient tôt fait de mettre la main sur quelques renseignements compromettants. Ils s’approchaient d’ailleurs dangereusement du bureau d’Alrik, qui avait détalé dès le début des combats. Au fond d’un des tiroirs et derrière un ingénieux double-fond, se cachait une liste de documents que le Gondor ne devait pas trouver. L’arrestation de la Vieille Dame les avait tous pris par surprise et Cartogan avait parfaitement réussi son coup. Cependant, le réseau avait tout intérêt à ce que le général continue à croire qu’il s’était définitivement débarrassé d’eux.

Sauer devait à présent faire un choix, attendre dans l’ombre en espérant que les trois gardes ne trouve pas un document savamment dissimulé aux yeux de tous. Ces hommes-là étaient probablement assez stupides pour passer à côté sans se poser aucune question. Ou alors devait-il risquer de trahir sa présence et s’assurer que les gardes n’approche pas du bureau en houx.
Sujet: Une page ne se tourne pas, elle se déchire
Ryad Assad

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Rechercher dans: Université de Minas Tirith   Tag cereis sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: Une page ne se tourne pas, elle se déchire    Tag cereis sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptyVen 19 Juil 2019 - 10:32
Attendre.

Il n'y avait rien de pire pour l'âme aiguisée d'une guerrière, davantage habituée à l'euphorie des combats et à l'angoisse permanente de l'instant présent. Le futur, immatériel et insondable pour quiconque à l'exception des Eldar les plus sages de la Terre du Milieu, demeurait trop lointain pour lui apporter le moindre réconfort. Qu'étaient quelques heures pourtant, à l'échelle de toute une vie immortelle ? Qu'étaient quelques secondes quand le plus simple millénaire n'était qu'une vulgaire page tournée sur un chapitre clos ?

Aujourd'hui pourtant, ces secondes et ces heures étaient d'une importance capitale pour Lithildren.

Capitales car elles pouvaient décider de la réussite ou de l'échec de sa mission.

Reinil toussa subitement pour se dégager les poumons, tout en essayant de ne pas faire trop de bruit. Quittant les lieux macabres en s'appuyant sur le bras de l'Elfe, il n'en menait pas large, et affichait une mine déconfite. Il avait suivi de loin l'échange entre sa compagne et l'infortuné préposé au transport des cadavres, le dénommé Sanson. Il avait compris les tenants et les aboutissants de leur conversation, et son esprit discipliné avait traité et classé les informations de manière automatique. Le choix était de toute façon aussi simple que rationnel : patienter, ou tenter de forcer le passage, de quitter la Cité Blanche pour peut-être ne plus pouvoir y revenir. Dans les deux cas, ils prenaient des risques énormes, sans grandes garanties de succès.

En s'extirpant de ce réduit où s'entassaient des corps raidis par la mort, le jeune garçon avait semblé retrouver ses esprits, comme si le fait de quitter l'air confiné et puant de cette réserve lui avait permis de chasser les démons qui parasitaient ses pensées. Il répondit timidement à Lithildren, en essayant de rassembler le peu de courage qu'il avait à disposition :

- Ça ira… Fit-il dans un souffle. J'espère que nous n'en croiserons pas d'autres comme eux…

C'était un vœu honnête, celui d'un enfant confronté à des choses qu'il ne comprenait pas, qu'il ne maîtrisait pas. Il aurait aimé pouvoir fermer les yeux sur la réalité du monde, mais maintenant qu'il venait de découvrir de quoi l'extérieur de l'Université était fait, il n'était plus possible de faire machine arrière. Il y avait des visions qu'aucune bonne volonté ne pouvait effacer. Les cadavres frappés par la maladie mystérieuse qui ravageait Minas Tirith lui donnaient la chair de poule, mais il s'efforça de ne pas y penser pour le moment. Il suivit le conseil de l'Elfe, et se focalisa sur un souvenir heureux. Une chose fort rare dans sa vie.

Ses parents lui vinrent instantanément en mémoire, comme une réminiscence d'une ère lointaine et révolue. Il entendit un rire charmant qui appelait son nom d'une jolie voix féminine. Une voix douce et affectueuse. Maternelle. Un visage fin aux yeux vifs sembla apparaître devant lui, et il se souvint. Une main délicate dans ses cheveux, qui lui chatouillait l'oreille pour le taquiner. Le jeune garçon eut un sourire amer, et il laissa l'émanation de son passé se dissoudre devant lui. Il était certes apaisé, mais une vieille blessure enfouie venait de se réveiller au fond de son cœur. Il s'efforça de cacher à Lithildren sa réaction, et changea de sujet immédiatement.

Le plus important était de se concentrer sur ce qu'il leur restait à faire, et il s'efforça de contribuer à leur quête en donnant un avis aussi sincère qu'éclairé :

- Nous avons déjà réussi à atteindre le premier cercle, je ne pense pas que nous devrions perdre notre avantage en nous jetant tête baissée vers les portes. Il y a trop de gardes pour que quiconque puisse passer, même quelqu'un comme vous.

Pour éduqué qu'il fût, Reinil ignorait encore beaucoup de choses au sujet des Elfes, et comme tout un chacun il leur prêtait des capacités et des pouvoirs bien supérieurs à ceux d'un simple mortel. Il ignorait que malgré leur longévité et leur constitution différente de celle des Edain, les Eldar n'étaient pas des dieux, et que seuls leurs plus grands héros étaient en mesure de forcer le destin à se plier à leur volonté. Il poursuivit, prudemment :

- Cependant, je pourrais essayer de joindre le capitaine Erelas… De le mener jusqu'à vous. Personne ne me connaît ici, et je ne suis pas recherché comme vous pouvez l'être. Si vous me dites qu'il peut vous appuyer, alors cela vaut peut-être le coup. Un seul mot de votre part, et je m'en vais le retrouver et lui demander assistance. C'est le moyen le plus sûr, car j'ai bien peur que Sanson ne nous dénonce par crainte d'être sanctionné.

Le risque était grand, en effet, de voir le dénommé Sanson retourner sa veste et les mettre en danger contre une poignée de pièces… ou plus simplement contre l'assurance qu'il ne serait pas traîné dans les geôles de Minas Tirith pour complicité. Le laisser partir était la décision la plus sage, mais il ne fallait pas faire confiance à des hommes qui avaient encore tout à perdre, et qui ne comprenaient pas les enjeux de leurs décisions. Leur âme n'était pas aussi faible que les Eldar le croyaient parfois, mais les nécessités impérieuses d'une vie courte et fragile dictaient parfois des choix curieux aux yeux des immortels.

Cherchant à conclure son propos par une interrogation qui le taraudait, le garçon dont les mains semblaient le démanger ajouta pour faire bonne mesure :

- Maintenant que nous sommes ici, je m'interroge… Qu'arrivera-t-il à monsieur Nallus si nous quittons la Cité Blanche ? Pensez-vous que nous pourrons encore l'aider depuis l'extérieur ?

Il n'avait pas osé en parler à Lithildren auparavant, de crainte de susciter sa colère. Il savait qu'elle voulait sauver le commandant Mevan à tout prix, mais précisément ce prix semblait être leur mission. Celle de la Société des Chercheurs, celle qui pouvait peut-être décider du sort de la Terre du Milieu. Pour important que fût le commandant, était-il bien raisonnable de mettre en danger tous leurs efforts pour une seule vie, quand ils pouvaient en sauver bien davantage en restant ici ? Il était vrai que leur marge de manœuvre était réduite, et qu'ils ne pouvaient circuler librement dans Minas Tirith… mais au moins ils étaient sur place, et pouvaient agir. S'extirper péniblement de la cité signifiait se couper de tout. De l'Université, de Neige, et des rares alliés dont ils disposaient à l'intérieur de ces murs. Reinil n'osait trop le demander, mais son interrogation était un dilemme.

Valait-il mieux sauver Chance, ou sauver Nallus ?


~ ~ ~ ~


- Écoutez, j'ai des ordres qui viennent de tout en haut, alors je veux que cette porte soit ouverte sur-le-champ, j'exige de pouvoir passer.

Le garde se fit tout penaud. Il avait bien vu le sceau royal sur le document, et il avait bien vu la mine renfrognée de son interlocuteur qui ne semblait pas particulièrement patient. Pour autant, les consignes étaient claires, et il n'avait pas le droit de prendre la décision de son propre chef. Seul le capitaine de la grande porte pouvait choisir de laisser entrer ou sortir un individu, en endossant personnellement la responsabilité pour ses actions. Il y avait bien des femmes qui circulaient quotidiennement pour alimenter les troupes qui gardaient le Rammas Echor, mais c'était bien tout, et elles étaient soigneusement contrôlées à chaque allée et venue. La sentinelle répondit :

- Je suis désolé, sire Cereis, mais je n'ai pas le pouvoir d'accéder à votre demande. Vous devrez attendre le retour du capitaine Erelas.

- Mais je dispose de documents qui me garantissent le droit de passage, soldat !

Cereis était furieux, désormais. Sa colère ne jouait pas en sa faveur, car il attirait inutilement l'attention sur lui alors qu'il aurait sans doute mieux valu faire profil bas. En face, le militaire s'efforçait de garder sa mesure, et de répondre posément :

- Je comprends bien monsieur, et je suis certain qu'il n'y aura aucun problème avec le capitaine. Cependant, cette décision ne m'appartient pas. Ce sont les ordres du général Cartogan, et je risque d'être condamné pour insubordination si j'y contreviens.

- Maudit Cartogan ! S'entendit-il dire.

La réponse officielle était claire et implacable, ce qui eut le don de déplaire à l'assassin en mission. Il fit volte-face et s'éloigna d'un pas vif à la recherche du capitaine Erelas, faisant claquer sa cape derrière lui. Son agacement était palpable, car il savait que si des officiers étaient au courant de son opération, il y avait plus de chances pour que quelqu'un fît le rapprochement par la suite. On lui avait demandé de « s'occuper » du commandant Mevan, et bien qu'il ignorât encore comment, il savait que toute entreprise de cette nature avait un risque de mal finir. Très mal, même. Alors il était prudent d'éviter que les représentants de l'armée comprissent que même leurs hauts gradés pouvaient être soumis à la justice expéditive des émissaires du Haut-Roy. La noblesse inclinait la tête devant son monarque, mais elle n'aimait pas voir l'arbitraire royal s'abattre sur l'un des leurs.

Ce contretemps inattendu ne durerait pas éternellement, mais il donnait à Lithildren un bref répit, alors que le soleil descendait prudemment de son piédestal pour s'abattre derrière la silhouette du mont Mindolluin.

La nuit était déjà proche de s'abattre sur le premier cercle…

#Cereis
Sujet: Une page ne se tourne pas, elle se déchire
Ryad Assad

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Rechercher dans: Université de Minas Tirith   Tag cereis sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: Une page ne se tourne pas, elle se déchire    Tag cereis sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptyVen 14 Juin 2019 - 15:37
Deux jours.

C'était le temps exceptionnellement court que Neige avait donné à Lithildren pour accomplir sa mission, à savoir localiser Cereis et identifier ses maîtres. Si la première partie du plan avait été relativement aisée à accomplir, et que la filature à distance n'avait pas semblé poser de problème particulier, il avait été fort difficile pour l'Elfe d'obtenir la moindre information. Les raisons étaient simples. Premièrement, elle connaissait trop peu la Cité Blanche pour s'y retrouver aisément, et les endroits où sa cible se rendait ne lui étaient pas familiers, si bien qu'elle ne pouvait pas en tirer la moindre conclusion. Elle aurait pu bénéficier des conseils de Reinil, voire même de Chance Mevan si elle avait pu le faire entrer à Minas Tirith, mais aujourd'hui elle était seule et elle devait se débrouiller ainsi, même si cela limitait considérablement ses possibilités. La seconde raison suivait la première : puisqu'elle ignorait où se rendait Cereis lorsqu'il pénétrait dans un bâtiment, elle ne pouvait décemment pas le suivre, au risque de tomber nez à nez avec une cohorte de soldats armés jusqu'aux dents prêts à l'accueillir.

Alors, réduite à glaner des informations sans grand intérêt pour le moment, elle ne pouvait que guetter l'opportunité. Même si ce temps passé à arpenter les rues de la Cité Blanche pouvait paraître bien court à l'échelle d'une vie elfique, il n'en demeurait pas moins pesant et désagréable. Le sentiment d'être perpétuellement en danger émoussait même les sens les plus affûtés, et la nécessité de se déplacer en permanence par des voies sombres, mal entretenues, odorantes et remplies de rats n'arrangeait rien. Reinil et Horas n'avaient pas été en mesure de lui donner un plan des égouts qui servaient à évacuer les eaux usées depuis le sommet de la cité vers sa base, et le risque de s'y perdre était grand. Pour autant, ces passages peu praticables fournissaient des cachettes fort utiles pour quiconque était assez mince pour s'y glisser, assez fou pour endurer la crasse et l'odeur nauséabonde, et assez fort pour se hisser vers la surface le moment venu, et non déraper en chute libre jusqu'au pied de la montagne. Un humain normal n'aurait jamais pu réunir toutes ces conditions, ce qui expliquait probablement pourquoi les gardes ne songeaient pas à explorer ces passages qui de toute façon ne les intéressaient guère.

Ceux qui cherchaient Lithildren n'imaginaient pas un seul instant qu'elle avait pu quitter sa tanière, et qu'elle se promenait librement au milieu d'eux.

Cereis était un homme méthodique à défaut d'être patient, et qui disposait de toute évidence de ressources considérables. Du peu qu'elle avait pu en voir, il distribuait ses ordres à tous les hommes en uniforme qu'il croisait, leur commandant de veiller soigneusement à ne pas laisser s'échapper une Elfe à l'air farouche. Ils avaient ordre de la prendre vivante – une information pas anodine – mais ils étaient tenus de protéger leur vie, et si Lithildren essayait de s'en prendre à eux, ils risquaient d'essayer de la tuer en état de légitime défense. Confortés dans leur certitude qu'elle se trouvait à l'intérieur des murs épais de l'institution pluriséculaire, les gardes concentraient leurs recherches autour de l'Université, laissant tout le loisir à Cereis de faire quelques voyages vers les niveaux les plus hauts de la Cité Blanche, ceux auxquels Lithildren n'avait pas accès, probablement pour demander à ses supérieurs l'autorisation d'enfoncer les portes qui lui barraient la route. De toute évidence on ne lui en avait pas donné la permission, et il s'était résolu à patienter, parlementant vivement avec un des professeurs à travers l'huis clos qui se dressait entre lui et sa proie comme un mur infranchissable.

Il ignorait naturellement que Lithildren s'était échappée, et que c'était désormais lui la proie.

Il l'ignorait, mais il ne manquait pas de prudence néanmoins, preuve d'un entraînement poussé dans le domaine de la dissimulation. A plusieurs reprises, l'Elfe avait failli être repérée, et elle n'avait dû son salut qu'à la chance. Cereis était vigilant, pour ne pas dire paranoïaque, et il avait l'avantage de connaître le terrain : autant d'atouts dans sa manche, alors que la guerrière n'en avait aucun. Et pour couronner le tout, elle était pressée par le temps…

Deux jours, c'était bien trop court, mais Neige semblait pressée d'agir.

Le premier jour et la première nuit se déroulèrent ainsi, un jeu de dupes dans lequel les deux lutteurs se cherchaient et s'évitaient mutuellement. Cereis, intouchable car souvent entouré de soldats, patrouillait autour de l'Université comme un limier ayant acculé une proie, et attendant l'ordre de la mettre à mort. Lithildren s'efforçait de le suivre, de le guetter, en faisant attention de ne pas elle-même être prise au piège.

A l'affût, elle n'avait pas d'autre choix que d'attendre patiemment, en espérant que Cereis commettrait une erreur avant la fin du temps qui lui était imparti.


~ ~ ~ ~


En entrant dans la pièce, Neige sentit immédiatement qu'elle n'y était pas la bienvenue. Elle avait l'habitude d'agacer son supérieur, mais elle ne se souvenait pas avoir jamais vu une lueur aussi cruelle dans son regard. Il était de toute évidence courroucé, et ce fut à grand peine qu'il contint son envie de lui hurler dessus. Peut-être parce qu'il savait que ce n'était pas la peine. Peut-être parce qu'il avait conscience que malgré sa froideur devenue légendaire au sein du Service, elle pouvait à tout moment se transformer en une tempête mortelle pour quiconque se dressait sur sa route.

- Bonjour Directeur, merci d'avoir accepté de me recevoir.

La politesse feinte, le calme avant le début des hostilités.

- Capitaine, cracha-t-il sans cacher son mépris. Je suppose que vous êtes venue m'expliquer pour quelle raison vous souhaitez interférer avec des ordres directs de votre supérieur hiérarchique.

Neige se redressa légèrement. Elle savait dans quelle direction allait partir cette conversation, et elle s'y préparait déjà. Ses arguments étaient comme ses armes : tranchants et prêts à servir si besoin. Comme toujours, elle frapperait la première, et elle frapperait la dernière. Elle aurait le premier sang et le dernier mot, n'en déplaise à ce « directeur » de pacotille qu'elle n'appréciait ni ne respectait.

- Je crois qu'il y a méprise, monsieur. La femme que vous recherchez n'est pas une menace pour la sécurité du Gondor, et j'ai estimé que…

- Vous avez estimé, capitaine !? Estimé !? Qui êtes-vous pour estimer quoi que ce soit ? Tout ce que vous avez à estimer, c'est combien de pouces d'acier enfoncer dans le cœur de votre cible, que ce soit bien clair. Les libertés que votre ancien maître vous laissait sont inacceptables, et vous mériteriez d'être traduite en cour martiale pour la peine.

Neige ne vacilla pas sous la menace. Elle savait que c'étaient des paroles en l'air. Elle n'était pas assujettie au même régime que les troupes régulières, et elle avait conduit assez d'opérations de ce type pour savoir que lorsque le Service souhaitait se débarrasser d'un agent, le problème était réglé en interne, silencieusement, et de manière définitive. Mais le directeur était un homme de guerre qui respectait la loi et l'ordre au pied de la lettre. Il croyait naïvement que ces paroles auraient un quelconque effet sur la jeune femme, et il se trompait lourdement. Glaciale, elle reprit :

- Directeur, cet ordre de mission a poussé Cereis à enfreindre les limites de l'Université, à bafouer ses privilèges, et à entacher une nouvelle fois l'image de l'armée. C'était une opération illégale, immorale, et de surcroît inutile. Cette femme n'est pas un danger.

Son interlocuteur semblait bouillir de rage devant tant d'insolence. L'insubordination de Neige n'était pas de celles qu'il pouvait tolérer, mais il avait conscience qu'elle n'était pas n'importe qui dans le Service, et qu'il ne pouvait pas simplement la dégrader ainsi. Il digéra sa colère, et rétorqua :

- Capitaine, vous outrepassez vos prérogatives : il ne vous appartient pas de juger de la légalité des ordres qui vous sont donnés, de même qu'il ne vous appartient pas de juger de leur moralité ou de leur opportunité.

- Vous n'avez pas tous les droits, directeur, et vous n'avez pas le pouvoir d'interférer avec les libertés de l'Université.

L'intéressé eut un rictus si malveillant et si plein d'assurance que Neige se sentit soudainement décontenancée :

- Vous apprendrez, capitaine, que ces ordres proviennent directement du général Cartogan, et à travers lui de Sa Majesté le Haut-Roy Mephisto. Un ordre qui a d'ailleurs reçu l'approbation de votre oncle…

Cette information acheva de briser la confiance de la guerrière, qui ne trouva pas quoi répondre. Son oncle ? Impossible ! Jamais il n'aurait signé un tel ordre, qui allait à l'encontre de tout ce en quoi il croyait en tant que diplomate et aristocrate du Gondor. Non, il ne pouvait pas avoir fait une telle chose. Cependant, elle ne pouvait pas le prouver : l'ordre de mission de Cereis ne portait évidemment aucune signature, et elle devait croire sur parole le directeur…

Sauf si elle pouvait obtenir la vérité de la bouche de son oncle…

Changeant subitement de stratégie afin d'écourter au maximum cet entretien, elle ravala sa fierté et inclina légèrement la tête :

- Si ces ordres viennent du Haut-Roy, alors je vous prie d'accepter toutes mes excuses, directeur. Je ne vous dérange pas plus longtemps.

- Vous pouvez disposer, j'ai à faire effectivement. Mais nous n'en resterons pas là, capitaine.

Ces mots glissèrent sur sa nuque au moment où elle franchissait le seuil de la porte, en lui hérissant le poil sur la peau. Elle avait l'impression d'avoir soudainement réveillé un adversaire qu'elle avait eu le malheur de sous-estimer, et qui dardait son regard vorace dans sa direction désormais.

Les heures étaient comptées, elle devait trouver son oncle.

#Rhydon

~ ~ ~ ~


Le second jour de filature s'était étiré en une succession de moments d'ennui profond, et d'intenses périodes de panique chaque fois qu'elle avait cru être découverte par une patrouille inattendue. Cereis lui-même paraissait sur ses gardes, jetant des regards furtifs derrière lui de temps à autre, comme s'il pressentait que quelqu'un le suivait. Pourtant, ce genre de surveillance était domaine que Lithildren maîtrisait de mieux en mieux. Deux jours étaient bien peu pour acquérir les réflexes des espions les plus aguerris qui avaient passé des années à apprendre et perfectionner leurs méthodes, mais les habitudes de bon sens venaient vite, et elle ne faisait plus les mêmes erreurs qu'au départ. Elle avait également une meilleure connaissance des environs de l'université, des cachettes potentielles, des temps de parcours entre elles, ainsi que des espaces les plus propices pour se replier éventuellement. Tout cela lui avait permis de se rapprocher légèrement de Cereis, qui avait la fâcheuse habitude de se poster toujours à peu près au même endroit, certainement pour adopter un point de vue familier quand il observait l'Université, afin de pouvoir repérer plus rapidement une quelconque anomalie. Lithildren était désormais assez proche pour se trouver à portée de voix par endroits, et pour glaner des bribes de conversation avec les soldats.

Ainsi apprit-elle qu'il avait réussi à mobiliser un contingent d'une quinzaine d'hommes, qui montaient la garde à toutes les entrées de l'Université, et qui étaient relayés fréquemment par de nouvelles sentinelles descendues de la caserne. Ce déploiement de force était significatif, particulièrement dans ce contexte de crise, et attestait de l'importance que prenait cette affaire pour les autorités militaires. Par sa faculté à distribuer les ordres, Cereis apparaissait comme le chef officiel de l'opération, et il s'était attiré les critiques de beaucoup de nobles qui étaient venus jusqu'à lui pour manifester leur mécontentement. Il y avait eu quelques menaces pour la forme, des individus outrés par le sort réservé à l'Université qui promettaient d'en appeler « aux plus hautes instances » pour que justice soit faite. Cereis ne paraissait pas ému le moins du monde, comme s'il se savait couvert. Cependant, son agacement était palpable, même s'il s'efforçait de le contenir pour éviter de créer un nouveau scandale qui n'aurait fait que lui faire perdre davantage de temps.

Lithildren captait tout ceci et bien d'autres choses qui la renseignaient sur les équilibres politiques fragiles au sein de la Cité Blanche. Elle nota que les relations entre les nobles et l'armée n'étaient pas au beau fixe, peut-être parce que le général Cartogan avait interdit le port d'armes dans la cité. Cette mesure destinée à accroître la sécurité avait fortement irrité la noblesse d'épée, dont l'esprit chevaleresque n'aurait su se priver volontairement du port d'une arme au côté. Les soldats étaient désormais les seuls à pouvoir se défendre en ville, et pour ces puissants seigneurs, il n'était de toute évidence pas facile d'accepter que de simples roturiers fussent en mesure de brandir une arme alors qu'eux-mêmes n'y étaient pas autorisés. Toutes ces subtilités de la vie gondorienne pouvaient paraître négligeables, mais elles aidaient Lithildren à se faire une image mentale de la vie au sein de la capitale du grand royaume des Hommes, ce qui pourrait l'aider à mieux discerner ses amis de ses ennemis à l'avenir.

Ses ennemis ne tardèrent d'ailleurs pas à apparaître, sous la forme d'un homme solitaire tout de noir vêtu.

En le voyant arriver au départ, elle aurait pu croire qu'il s'agissait d'un noble comme les autres. Il avait le port altier, la démarche énergique et vive, et surtout il semblait savoir exactement ce pourquoi il se trouvait là, marchant droit vers Cereis comme tous ceux qui souhaitaient se plaindre auprès de lui. Pourtant, il n'y eut pas d'éclats de voix, ni de dispute, et encore moins de manifestations d'irrespect. Bien au contraire. L'homme posa une main respectueuse sur l'épaule de Cereis, lui soumettant une question inaudible qui portait de toute évidence sur la situation au sein de l'Université. De là où elle se trouvait, Lithildren distinguait parfaitement le nouvel arrivant : il avait les cheveux courts contrairement aux hommes de la troupe qui affectionnaient de les porter longs, et sa barbe était soigneusement taillée comme s'il mettait un soin tout particulier à apparaître rigide et sec. Il devait avoir entre quarante et cinquante ans, mais l'expérience se lisait davantage dans son regard que dans sa gestuelle encore très assurée.

C'était de toute évidence un guerrier, et pour ne rien arranger il était sorti en arborant une belle épée au côté. Pourtant, il ne portait pas l'uniforme de la garde royale. Son statut était peu clair, mais il semblait connaître personnellement Cereis, et lui parler comme à un proche. Voire un élève. Les deux hommes se mirent à échanger à voix basse, s'éloignant des soldats pour ne pas être entendus d'eux. Ce faisant, il se rapprochaient paradoxalement de Lithildren, dont les oreilles toutes elfiques purent capter une grande partie de la conversation :

- Lord Rhydon, fit Cereis, vous avez obtenu l'autorisation ?

- Pas encore, répondit l'homme. Nous avons eu quelques complications, il semblerait que l'Université ait de puissants amis, et ils utilisent tous les stratagèmes pour nous retarder.

Cereis hocha la tête, visiblement déçu.

- Et Neige ?

- Tout est sous contrôle. Restez concentré sur l'Elfe, ne pensez qu'à votre mission, et tout ira bien. Le reste, j'en fais mon affaire.

Nouveau hochement de tête. De toute évidence les ordres n'étaient pas faits pour être discuter. Obéir était une des qualités premières des bons soldats, mais c'était également cela qui les poussait parfois à accomplir des actes d'une cruauté sans nom. Quand les officiers laissaient leurs hommes déchaîner leurs passions, de terribles drames pouvaient se produire, or qu'y avait-il dans les yeux de Cereis sinon les flammes de la colère et de la vengeance ? Il voulait laver l'affront fait par Neige, et nul doute que s'il retrouvait Lithildren, il lui ferait payer de ne pas pouvoir passer ses nerfs sur la femme aux cheveux blancs. Il y avait quelque chose de répugnant et de dangereux chez cet homme qu'il ne fallait pas sous-estimer.

- J'y pense, reprit Rhydon. J'ai entendu des rumeurs selon lesquelles cette Elfe serait proche du commandant Mevan.

- De Pelargir ? Celui qui garde le Rammas Echor ?

- Lui-même. C'est peut-être un moyen de pression à utiliser.

Cereis parut légèrement déstabilisé. Même s'il était de toute évidence un tueur prêt à passer à l'acte sans la moindre pitié, l'idée de s'en prendre délibérément à un officier supérieur de l'armée du Gondor n'était pas de celles qu'il pouvait accepter aisément. Rhydon capta bien son hésitation, et ajouta :

- Nous travaillons pour le Haut-Roy, nous tenons nos ordres de tout en haut, et nous avons pour mission de veiller à ce que nul ne vienne semer la zizanie au sein de cette cité. Surtout pas maintenant. Vous comprenez, Cereis ? Nous n'avons pas le choix.

- C'est un commandant, monseigneur. Un homme respecté par ses hommes. Je ne sais pas si…

Rhydon fit claquer sa langue :

- Cereis, bon sang, que vous a-t-on appris ? Faites preuve d'imagination, et utilisez votre cervelle pour une fois. Occupez-vous du commandant Mevan, et je me charge du reste. J'ai encore une personne à aller voir aujourd'hui pour m'assurer que nous aurons tout le soutien dont nous avons besoin. Je compte sur vous pour ne pas tout faire échouer.

L'intéressé acquiesça avec raideur, conscient qu'il s'agissait d'un avertissement à prendre au sérieux. De toute évidence ce Rhydon ne plaisantait pas, et il n'était pas de ceux qui toléraient bien les échecs. Il abandonna Cereis, qui demeura un instant immobile, avant de prendre à pas lents la direction du bas de la Cité.

Ce faisant, il mettait Lithildren face à un dilemme épineux. Suivre Cereis était risqué, car il s'aventurerait probablement dans les niveaux inférieurs, où on lui avait déconseillé de se rendre. Mais pouvait-elle véritablement abandonner Mevan au sort qui lui était promis, quel qu'il fût ? Elle pouvait également essayer de suivre Rhydon, pour en apprendre davantage sur ce personnage bien mystérieux dont l'autorité était bien réelle, même si ses limites étaient floues. Ce rendez-vous qu'il avait évoqué était peut-être l'occasion de découvrir pour qui il travaillait, mais l'Elfe aurait-elle l'occasion d'y assister ? Ou même de s'approcher assez près pour voir qui était cette personne que Rhydon devait voir ? Rien n'était moins sûr. Elle pouvait enfin essayer de se faufiler discrètement jusqu'aux ruelles du Premier Cercle, et se débrouiller pour trouver cette fameuse Bâtisse Close où Neige était censée l'attendre dans quelques heures à peine. Lui faire un rapport de ce qu'elle avait découvert était peut-être le plus prudent, voire le plus avisé, mais était-ce bien prudent de vouloir retrouver la femme aux cheveux pâles alors que Rhydon semblait connaître ses moindres faits et gestes ?

Privée des conseils militaires qu'aurait pu lui donner Mevan, ou des informations précieuses qu'aurait pu lui communiquer Reinil, elle devait prendre une décision seule, en son âme et conscience.

Une décision qui déterminerait peut-être le sort de ceux qui comptaient sur elle.

#Cereis
Sujet: Une page ne se tourne pas, elle se déchire
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Rechercher dans: Université de Minas Tirith   Tag cereis sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: Une page ne se tourne pas, elle se déchire    Tag cereis sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptyMer 17 Avr 2019 - 11:17
Cereis devait bien l'admettre, l'attitude de l'Elfe le laissait perplexe. Il devinait son caractère impétueux, indomptable, et pour autant elle ne semblait pas encline à s'opposer à lui. Pour protéger le gamin et le vieil homme ? Il savait que les Eldar se pensaient comme les défenseurs d'un idéal de paix et d'harmonie, mais il avait toujours cru que ce peuple mystérieux préférait se soucier de ses propres problèmes que de ceux des simples mortels. Les créatures telles que lui n'étaient que poussière à leurs yeux.

Il ne comprenait tout simplement pas.

Pourtant, un élément décisif le poussa à se méfier davantage que de raison. Elle avait évoqué le nom de Nallus. Elle avait eu beau feindre de ne pas le connaître, elle avait spontanément abordé le sujet, et c'était déjà bien assez pour éveiller la suspicion à son endroit. Ses ordres, comme il l'avait indiqué à l'Elfe, étaient particulièrement stricts. On ne lui avait donné que très peu d'informations, mais il se souvenait encore très bien des mots de son supérieur : « elle est peut-être liée dans le complot de Nallus ». Ces paroles étaient gravées dans sa mémoire, et il n'avait pas le sentiment qu'il s'agissait d'une simple coïncidence. Il avait vu trop d'espions ennemis au cours de sa carrière pour encore croire à ce genre de choses. L'Elfe, quelles que fussent ses intentions, n'était pas aussi innocente qu'elle voulait bien le faire croire.

En la voyant essayer de négocier pour défendre les deux érudits, il comprit qu'il avait là une opportunité à exploiter, une faille dans sa garde qu'elle laissait délibérément ouverte, en espérant qu'il allait faire preuve de clémence envers les innocents. Cereis n'était pas un homme fondamentalement mauvais, et il ne prenait aucun plaisir à ce genre de choses, même s'il accomplissait son devoir avec un zèle louable. Lorsque l'occasion lui fut présentée de mettre un terme à cette affaire sans trop de vagues, il s'en empara sans la moindre hésitation.

- Très bien, madame, nous ferons ainsi. Relâchez-le.

Horas retrouva sa liberté, mais il était encore sous le choc, et il mit un moment à reprendre ses esprits. La scène qui se jouait ici était par trop inhabituelle entre ces murs pour que quiconque y fût préparé. A part Lithildren, naturellement. Cereis la dévisagea, lui faisant comprendre que son geste de bonne volonté exigeait une contrepartie de la part de l'Elfe, et qu'elle devait se soumettre au protocole.

- Si vous nous aviez suivi sagement dans un premier temps, nous n'aurions pas eu besoin de telles entraves. Cependant je serais plus rassuré en vous sachant attachée. Rassurez-vous, à cette heure Minas Tirith dort encore, et vous éviterez l'humiliation publique.

Maigre consolation, mais il s'agissait néanmoins d'un privilège rare. Elle aurait pu être arrêtée avec fracas par les autorités de la cité, conduite sans merci au milieu d'une foule ébahie qui l'aurait prise pour cible avec cruauté. Dans le contexte tendu de ces derniers temps, les espions et les traîtres suscitaient une rage populaire à nulle autre pareille. Le peuple de Minas Tirith cherchait les potentiels rebelles, et se méfiait comme de la peste des nouveaux venus en ville, dont l'allégeance n'était pas claire. La confiance était devenue rare, et les individus comme Mevan ou Erelas – qui accordaient du crédit aux propos d'une inconnue – avaient été marginalisés par la politique du général Cartogan. Cet homme exigeait une loyauté sans faille de la part de ses troupes, afin de maintenir l'ordre.

Toujours l'ordre.

Il n'y avait pas de place pour la sympathie, pour les sentiments ou pour les initiatives personnelles. L'obéissance était la clé de voûte de son armée, et il avait instauré une politique sécuritaire nouvelle et brutale à Minas Tirith qui, il fallait bien l'avouer, avait produit des résultats inespérés. La paix était revenue au sein des sept cercles, on ne parlait plus de sombres complots contre la personne du roi, et même les bandes criminelles qui avaient fait des premiers cercles leurs terrains de jeu avaient été repoussées et se dissolvaient comme des ombres à midi.

Lithildren fut donc attachée, mais de sorte à ce qu'elle ne sentît pas trop durement la morsure de la corde sur ses poignets. Une attention discrète que Cereis avait envers elle afin de lui montrer qu'il n'était pas là pour la faire souffrir inutilement. Il souhaitait simplement lui poser des questions. Ils s'éloignèrent donc rapidement de l'université, et prirent la direction de la caserne, qui se trouvait plus haut dans la cité, les obligeant à remonter progressivement le long du chemin unique qui serpentait à travers la capitale comme un serpent gigantesque enroulé autour de la montagne. Les rues étaient effectivement désertes à cette heure, et ils ne croisèrent ni commerçants, ni artisans, ni même les nobles les plus matinaux qui dormaient encore. Si quelque chose devait se dérouler, il n'y aurait aucun témoin.

Le malaise des soldats était perceptible, et Lithildren pouvait sentir leur tension qui s'exprimait par des contractions nerveuses qui se répercutaient jusque dans leurs doigts, et à travers le tissu sur les bras de la guerrière. Ils étaient concentrés, mais quelque chose les agitait, sans qu'il fût possible de dire quoi avec certitude. Tout à coup, Cereis bifurqua de la rue principale, et s'engouffra dans une artère moins exposée. Cela ne ressemblait pas au chemin de la caserne, à n'en pas douter, mais personne ne jugea utile de faire le moindre commentaire.

Cependant, alors qu'ils continuaient à progresser tranquillement vers des ruelles de plus en plus étroites, ils s'arrêtèrent. Leur route était barrée par une silhouette encapuchonnée qui se tenait trop loin pour pouvoir être identifiée avec certitude.

- Qui va là ? Fit Cereis en portant instinctivement la main à son arme, un réflexe qu'il avait conservé de ses nombreuses missions à l'étranger.

La silhouette s'avança légèrement, et rabattit le capuchon qui dissimulait son visage. Une pluie de cheveux blancs cascada autour d'un visage glacial. Des yeux pénétrants plongèrent dans celui du chef de troupe, et une voix résonna, pure comme le cristal et tranchante comme l'acier :

- C'est moi, Cereis. J'ai l'impression que tu t'es trompé de chemin.


- Neige, feula-t-il. Que veux-tu ?

La femme s'approcha de nouveau, de toute évidence insensible à la présence des deux hommes derrière Cereis. Ce dernier semblait agité… de la peur ? Oui, il avait l'air de craindre cette femme, et ce qu'elle pouvait lui faire. Leur faire. Il fallait s'en méfier, assurément.

- Ton ordre de mission, Cereis. Que dit-il, précisément ?

- Cela ne te concer…

Le regard de Neige s'agrandit légèrement, et ce simple geste suffit à faire regretter au guerrier ses velléités de résistance. Il tira de sa poche un document soigneusement plié et cacheté, qu'il tendit à la femme aux cheveux blancs. Celle-ci s'en empara sans un mot, et le lut attentivement, indifférente à la nervosité presque palpable de tous les autres. Elle agrémenta sa lecture de nombreux « hm » pensifs, avant de reprendre :

- Je vais prendre en charge cette dame à partir de maintenant. Tu peux disposer, Cereis.

- M-Mais…

Un nouveau regard le figea sur place. Neige n'était pas d'humeur à plaisanter, ou à tolérer le moindre signe d'insubordination. Car oui, Cereis était bien son subalterne, et même s'il tenait ses ordres de tout en haut, il n'en demeurait pas moins sous sa direction. Il fit signe aux deux hommes, et ils firent demi-tour sans mot dire, s'éloignant d'un pas pressé pour cacher leur humiliation. Neige les observa s'éloigner au loin, avant de revenir à l'Elfe. Elle tira un poignard, et d'un geste sec fit tomber les liens qui l'entravaient.

- Je suis désolée pour tout ça. Vous arrivez à Minas Tirith dans une situation très particulière, je le crains. Vous êtes Lithildren, c'est bien ça ?

La question pouvait paraître anodine, mais elle en soulevait bien d'autres. Ce n'était pourtant pas le lieu pour en discuter. Neige était énergique, et elle savait rentabiliser son temps. Elle entraîna l'Elfe dans la direction inverse de celle où elle allait, pressant le pas pour éviter de croiser une patrouille par inadvertance. Son pas rapide ne favorisait pas la conversation, mais elle trouva néanmoins le temps de donner de brèves explications.

- Nous retournons à l'université. Je crains que vos amis ne fassent une bêtise si nous les laissons sans nouvelles trop longtemps.

Elle marqua une pause, avant d'ajouter :

- Il est curieux qu'ils aient pris fait et cause pour vous si rapidement, mais s'ils vous ont fait confiance, c'est que vous méritez sans doute que l'on vous écoute.

En arrivant dans les lieux qui avaient accueilli Lithildren, Neige et elle furent accueillies par le rire communicatif de Horas qui semblait immensément heureux de retrouver leur visiteuse. Son sourire s'étendait d'une oreille à l'autre, et il serra chaleureusement la main qui lui était tendue, manquant de danser sur place tant il trépignait d'impatience à l'idée de connaître le fin mot de cette affaire. Mais ce fut la réaction de Reinil qui fut la plus touchante. En voyant l'Elfe revenir, il s'était précipité vers elle et l'avait pris dans ses bras comme un fils retrouvant sa mère. Il la serra fort, avant de lâcher :

- Nous vous croyions perdue ! C'est un miracle !

Neige, qui se tenait tout à côté, afficha un sourire gêné. Elle ne savait jamais comment réagir quand les choses allaient bien… Peut-être parce qu'elle savait que tout allait basculer rapidement. D'une voix qu'elle voulait apaisante, elle demanda à Horas :

- Où pouvons-nous discuter tranquillement, monsieur ? Je souhaiterais m'entretenir avec cette femme.

#Reinil #Cereis #Horas
Sujet: Une page ne se tourne pas, elle se déchire
Ryad Assad

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Rechercher dans: Université de Minas Tirith   Tag cereis sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: Une page ne se tourne pas, elle se déchire    Tag cereis sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptyMar 16 Avr 2019 - 16:52
Il y eut un silence fort long et fort gênant sitôt que Lithildren eut terminé de prendre la parole. Horas, notamment, semblait estomaqué, comme s'il n'en revenait pas de voir la guerrière tenir tête ainsi à trois hommes armés. Il ignorait bien entendu les capacités de l'Elfe, mais même une fière représentante des Premiers Nés aurait eu fort à faire face à trois hommes d'armes de toute évidence expérimentés et déterminés. Sa bravoure tranchait avec la posture d'ordinaire complaisante et résignée des érudits de Minas Tirith, qui s'étaient toujours pliés aux directives des autorités sans jamais opposer rien de plus qu'une résistance morale. Ils ne se seraient jamais opposés de cette manière à des hommes du Haut-Roy, et à l'évidence les intéressés ne s'attendaient pas une telle réaction.

Cereis, en particulier, fronça les sourcils brusquement, contrarié de voir la tournure que prenaient les événements. Mais un sourire cynique ne tarda pas à revenir hanter son visage jusqu'alors fermé. Un « simple soldat » ? Cette Elfe était décidément très amusante.

- En pleine nuit, fit-il sur un ton acide ? Ne voyez-vous pas que déjà le soleil se lève derrière le Mordor ? Nous avons eu la politesse de vous accorder une nuit de sommeil avant de vous questionner, mais la courtoisie a assez duré. Emparez-vous d'elle, nous l'interrogerons à la caserne !

Les deux hommes firent un pas en avant pour se saisir de Lithildren, mais Horas et Reinil essayèrent de s'interposer, plaidant en la faveur de leur invitée qui n'avait, après tout, rien fait de mal sinon venir faire quelques recherches au sein de l'université.

- Attendez, cria notamment le jeune garçon en levant les mains. Vous ne pouvez pas arrêter quelqu'un de cette manière, sans motif valable.

Le chef du trio fit claquer sa langue, décidément très contrarié par l'attitude de Reinil et par son outrecuidance. Il répondit sèchement :

- Nous n'arrêtons pas madame, nous la conduisons simplement ailleurs pour procéder à son interrogatoire. Mais si elle résiste, alors nous serons contraints de procéder à son arrestation, ainsi qu'à celle de tous ses complices, en vertu des pouvoirs qui nous sont conférés par le Haut-Roy.

En disant cela, il avait tapé du plat de la main sur l'armure du garde à sa droite, sur laquelle apparaissait un arbre stylisé. Le symbole du Gondor et de la lignée des rois qui gouvernaient cette cité depuis des âges. S'opposer à ceux qui arboraient cette tunique, cela revenait à s'opposer au royaume tout entier, mais plus largement aux Peuples Libres et, dans l'esprit de Cereis, à la notion même de « Bien ». Il croyait fermement dans la rectitude morale de son peuple, et il ne pouvait tolérer qu'on résistât aux directives qui venaient d'en haut. Cela contrevenait à sa conception très manichéenne des choses.

- Quant à toi gamin, c'est la dernière fois que tu te dresses entre moi et ma mission. Si tu veux continuer à vivre tranquillement ici, écarte-toi. A moins que tu ne préfères que je t'arrête sur-le-champ pour avoir cherché à défier mon autorité.

Reinil devint livide. Confronté à la perspective d'être emprisonné et jugé pour un acte séditieux, il se sentit soudainement faiblir. Dame Lithildren avait peut-être l'habitude de ce genre de situations, mais pas lui, et tout à coup la réalité venait le heurter de plein fouet. Cependant, avant d'avoir pu répondre, ce fut Horas qui prit la parole, aussi rusé que d'habitude :

- Monsieur Cereis, fit-il en feignant la politesse. Je crois que tout le monde ici veut que les choses se terminent bien. Si vous vouliez bien nous dire ce qui vous amène ici, nous pourrions essayer de régler cela pacifiquement.

- Cette femme, répondit l'intéressé en la pointant du doigt, est entrée à Minas Tirith pour des motifs qui apparaissent peu clairs à mes supérieurs, et sa présence ici soulève de nombreuses questions dans le contexte actuel.

Horas jeta un regard en coin à Lithildren, les yeux pétillants de malice :

- Je crois qu'elle vous a répondu, monsieur. Elle est ici pour faire de la recherche, rien de plus. Avez-vous une raison particulière de ne pas la croire ?

Pour la première fois, Cereis parut perdre de sa superbe. La façon dont la question était tournée donnait l'impression que quelque chose se tramait, et que les soldats en étaient responsables. D'ailleurs, les deux gardes se tournèrent vers leur chef, curieux d'entendre sa réponse. Ils n'étaient pas là pour parler, mais ils savaient écouter et leur jugement n'en serait pas moins décisif si des choses immorales étaient à l'œuvre. Même s'ils obéissaient fidèlement aux ordres, ils savaient encore distinguer le bien du mal. Cereis s'éclaircit la gorge, cherchant à écarter les accusations :

- Eh bien… je trouve seulement cela suspect. Je souhaite savoir quelles informations vous recherchez, et dans quel but. Vous n'êtes pas ici simplement pour lire quelques livres et bavasser avec les professeurs, n'est-ce pas ?

Il marqua une pause lourde de sens. Même si l'université de Minas Tirith était renommée dans toute la Terre du Milieu, les Elfes avaient dans leurs propres bibliothèques des textes infiniment plus précieux que ceux que l'on pouvait trouver ici, et leurs sages en connaissaient certainement bien davantage que les plus éminents enseignants. Pour Cereis, il y avait anguille sous roche, et il était déterminé à mettre la main dessus, quitte à déplaire à ceux qui se mettraient en travers de sa route. Ce fut Horas qui, le premier, fit les frais de ce caractère inflexible.

- Mais monsieur, s'exclama-t-il presque outré, pensez-vous que nous soyons des chercheurs de pacotille, et que nous ne pouvons pas converser avec une Elfe ? Croyez-vous qu'en nous injuriant après avoir manqué du respect le plus élémentaire envers notre communauté vous gagnera nos faveurs ? Je vous prierais de bien vouloir quitter les lieux, et de faire intervenir votre supérieur en personne ! Cela suffit, à présent !

La colère indignée de Horas était montée brusquement, mais la réaction de Cereis fut aussi vive que cinglante.

- Taisez-vous, vieil homme !

Horas, peu habitué à être ainsi repris, se tut brusquement, choqué.

- Je ne réponds que devant le Général Cartogan, tempêta le militaire, et ce n'est pas vous qui allez me dicter ma conduite. Vos prétendus droits ne sont rien face aux impératifs de la défense de cette cité, mais vous… vous entravez mon enquête. Gardes, arrêtez cet homme, et conduisez-le immédiatement en détention.

Un des deux soldats s'approcha de Horas qui, encore  abasourdi, n'opposa pas la moindre résistance. Une main ferme se posa sur son épaule et l'éloigna de la scène, sans lui laisser l'opportunité d'intervenir par ailleurs. Cereis se détourna de lui, et focalisa son attention sur Lithildren. Cependant, Reinil s'interposa de nouveau entre elle et lui, ce qui fit monter la colère dans le guerrier. Il ne comprenait pas que dans les circonstances, de simples civils trouvassent le cran de s'opposer aussi ouvertement à l'autorité royale. Ne comprenaient-ils pas que l'ennemi était aux portes, et qu'ils ne pouvaient pas simplement accueillir une étrangère au sein de leurs murs ? Des espions et des traîtres circulaient de toutes parts, et tous ne se présentaient pas sous les formes les plus désagréables.

- Écoutez, madame… Suivez-nous sans protester, et je m'arrangerai pour laisser votre jeune compagnon tranquille. Mais si vous faites du zèle, je serai obligé de tous vous appréhender, et les Valar seuls savent ce qu'il adviendra de vous par la suite. Tendez-moi vos mains.

En disant cela, il avait sorti une corde, qu'il tenait ostensiblement dans sa main ouverte. Un signe qu'il voulait bienveillant. L'autre n'était pas très loin de son épée pourtant, et il n'hésiterait pas à répondre à la force par la force si Lithildren tentait quoi que ce fût d'inconsidéré.

#Cereis #Horas #Reinil
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Ryad Assad

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Rechercher dans: Université de Minas Tirith   Tag cereis sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySujet: Une page ne se tourne pas, elle se déchire    Tag cereis sur Bienvenue à Minas Tirith ! EmptySam 13 Avr 2019 - 20:17
L'éclair de peur qui passa dans les yeux de Reinil fit peut-être regretter à Lithildren de s'être montrée trop franche. Après tout, elle manifestait une certaine froideur face à la mort physique et aux perspectives de la prison, mais le jeune garçon qui lui faisait face semblait avoir été catapulté dans un univers qui n'était pas le sien. La violence, l'illégalité, le danger… autant de concepts qui le dépassaient et qu'il n'arrivait pas à bien se représenter. Il s'était toujours vu comme un fervent défenseur de la vérité et de la connaissance, mais avec l'arrestation de Nallus, la quarantaine dans la Cité Blanche, et toutes ces choses qui se passaient, il avait l'impression que ses certitudes s'effondraient.

La vérité ne protégeait pas contre l'arbitraire, la force et la cruauté.

Il était bel et bien en danger.

- J'ai très peur, Dame Lithildren.

Cette confession lui avait échappé, et il baissa la tête plein de honte. Il aurait voulu être plus courageux, avoir le cœur brave de ces chevaliers qui partaient à l'aventure sans craindre ni l'adversité ni les épreuves. Mais il n'était qu'un jeune érudit perdu dans ses livres. Il n'avait pas ces qualités.

- Je vous aiderai de mon mieux, cependant. Pour monsieur Nallus.

Cette pensée réconfortante lui tira un sourire difficile. Il songeait souvent au vieil homme, qui devait se morfondre entre quatre murs glacés, dans une pénombre épuisante. C'était du moins ainsi que le garçon se représentait une cellule, et il espérait bien pouvoir en tirer son mentor. Malgré ses doutes et ses hésitations, il éprouvait au fond de lui-même une forme d'excitation incontrôlable à l'idée de mener enfin un combat qui en valait la peine. Il était là pour aider Lithildren, et il lui semblait tout à coup que tous ses efforts passés avaient désormais un sens. Il n'apprenait plus simplement pour impressionner ses professeurs ou éprouver la satisfaction discrète du travail accompli, mais pour une cause noble et juste qui méritait d'être défendue. C'était sans doute ce qui lui permettait de rester là, fermement ancré sur ses pieds, plutôt que de fuir en courant pour oublier toute cette histoire.

Il en était là de ses réflexions quand le cri de Lithildren le ramena brutalement à la réalité. Il sursauta comme si on l'avait piqué avec un aiguillon, et mit un moment à comprendre ce qu'elle voulait lui dire. Trouvé ? Trouvé quoi ? Son impatience était à la hauteur de sa découverte, cependant, car quand elle lui montra la clé de lecture du texte mystérieux qu'il avait retrouvé dans les documents de Nallus, ses yeux s'agrandirent de surprise.

- Un code… Astucieux !

Son enthousiasme de jeune garçon adepte de petits jeux d'esprit s'éveilla, et il adressa de sincères félicitations à l'Elfe. Elle venait de les faire avancer d'un grand bond dans cette histoire et, peut-être, de les mettre sur une piste intéressante qui leur permettrait de libérer Nallus.

- Nous avons là une indice très précieux, mais cela ne nous donne pas encore l'identité des coupables. Il serait plus prudent de garder cette lettre en sûreté.

Il invita Lithildren à le suivre un peu plus loin dans la pièce, et lui indiqua l'emplacement d'un petit coffre secret, habilement dissimulé derrière un pan de mur amovible sur simple pression. Le tout était invisible de l'extérieur, mais recelait assez d'espace pour enfermer en sûreté leurs documents et éviter une fouille. Le jeune étudiant s'en expliqua :

- La Société des Chercheurs est une institution ouverte et neutre, mais nous savons quels risques peuvent peser sur nous en raison de nos activités. L'université recèle de nombreux secrets, et nous avons pris l'habitude de mettre en sécurité le fruit des recherches les plus sensibles.

Il referma la cache soigneusement, et se tourna vers Lithildren, qui semblait au moins aussi épuisée qu'il pouvait l'être. D'une voix douce il lui indiqua :

- On ne voit guère le temps passer ici, car les fenêtres sont hautes, mais le soir tombe déjà. Que diriez-vous de prendre un repos bien mérité, et de nous restaurer ?

Reinil avait raison. Ils avaient travaillé d'arrache-pied toute la journée, sans même voir les heures défiler, et ce n'était que maintenant qu'ils se rendaient compte qu'ils n'avaient rien avalé depuis le matin. L'heure était venue de prendre un repas chaud, et de se relaxer afin d'être en mesure de percer les autres secrets de la Fraternité dès le lendemain. Ils pouvaient déjà se satisfaire de leurs progrès, car ils semblaient désormais être sur une piste brûlante qui mériterait d'être creusée plus avant. Le jeune garçon conduisit Lithildren hors de la salle de recherche, vers un grand hall désespérément vide, où se rassemblait à peine une demi-douzaine d'érudits. Ils mangeaient en bavardant de choses et d'autres, mais interrompirent leurs conversations en voyant approcher Lithildren.

Leurs sourires sincères et francs offrirent un accueil aussi chaleureux que possible à ces hommes de science et de savoir qui se réjouissaient de dîner en illustre compagnie. Ils lui firent signe d'approcher, et l'un d'entre eux s'appliqua à lui servir une large portion de légumes variés, accompagnée d'une pièce de jambon de toute évidence savoureuse. C'était un repas de qualité si on le comparait à ce que mangeaient les gens du peuple en-dehors des murs de l'imposante Minas Tirith, mais à l'échelle de la cité ce repas semblait modeste et frugal. Les professeurs cultivaient une forme de modestie qui les honorait, même s'ils vivaient dans le confort de la plus prestigieuse forteresse de la Terre du Milieu, et que leurs frais étaient couverts par le trésor royal et par les généreuses donations des aristocrates soucieux de se comporter en mécènes avisés.

Les convives se montrèrent curieux au sujet de la présence de Lithildren entre ces murs, ce qui les incita à lui poser quelques questions polies, mais ils étaient suffisamment sages pour savoir qu'il n'était pas utile de tout connaître, et que les motifs de la jeune femme n'appartenaient qu'à elle. En ce monde, la connaissance était autant une arme qu'un danger, et ils ne souhaitaient pas faire planer une quelconque menace sur eux-mêmes, surtout que l'arrestation de Nallus était encore fraîche dans leurs esprits. Ils se mirent donc rapidement à parler d'autre chose, laissant la conversation dériver au gré du hasard. Pour Reinil, ce moment de détente était tout simplement magique, et il avait toujours adoré entendre les professeurs échanger et débattre entre eux, leurs esprits vifs s'engageant dans des duels de logique et de vivacité au moins aussi impressionnants que les passes d'armes des bretteurs les plus talentueux.

Ils mangèrent, ils burent, ils rirent même aux plaisanteries acérées que les vénérables se lançaient parfois. Pour la première fois depuis fort longtemps, il sembla qu'un cocon de paix et d'harmonie venait de se constituer, loin des tourments de la guerre, de la maladie et de la Fraternité de Yavannamirë…

#Reinil

~ ~ ~ ~


Le soir entrait par la fenêtre du petit bureau, qui donnait directement sur l'ensemble de la cité. Depuis le septième niveau, les torches que portaient les gardes ressemblaient à de petites perles lumineuses, comme si sous leurs pieds s'était étendu un ciel étoilé dans lequel le vertigineux promontoire l'incitait à plonger. Quelqu'un frappa soudainement à la porte :

- Entrez, fit-il en se détachant de sa contemplation.

Un homme d'âge mûr fit son apparition dans l'entrebâillement, lissant les plis de sa tunique en essayant de cacher une pointe de nervosité. Ou d'agacement ?


- Lord Rhydon, vous vouliez me voir ?

L'intéressé hocha la tête, et prit place dans son épais fauteuil.

- Tout à fait, capitaine Erelas. Je voulais entendre de votre bouche quelles étaient les nouvelles.

Erelas s'éclaircit la gorge, se redressant imperceptiblement comme s'il s'apprêtait à faire un rapport. Il commença d'ailleurs son récit de manière méthodique, en énonçant clairement les principaux points à retenir, à savoir que la situation des civils et de l'armée était toujours sous contrôle malgré les rumeurs qui se faisaient de plus en plus insistantes, et que la garnison en place à Rammas Echor n'avait toujours repéré aucun signe menaçant de la part des Orientaux de Cair Andros. Ils attendaient, stationnés aux points stratégiques, sans savoir quand ils seraient relevés de leurs fonctions et enfin autorisés à stationner à l'intérieur de la Cité Blanche. Rhydon l'écoutait très attentivement, fixant sur lui des yeux sombres.

- Est-ce tout ? Fit-il bientôt quand Erelas eut achevé son récit.

- Euh… Oui, sire, je crois que je n'oublie rien.

- Et moi je crois au contraire que vous oubliez quelque chose de très important. On m'a rapporté que vous aviez admis quelqu'un au sein de Minas Tirith, ce matin. Une femme elfe.

Le capitaine s'efforça de rester impassible, mais il ne put s'empêcher de tiquer intérieurement. Rhydon ne l'avait pas fait venir pour un simple rapport. Il avait essayé de gagner du temps en lui parlant de choses et d'autres, mais Lithildren semblait être la principale raison pour laquelle il avait été convoqué ici. Car après tout, il n'était pas dans les habitudes de cet homme sec et pédant de prendre ses informations directement auprès des hommes de la troupe qui se trouvaient sur le terrain. De son point de vue, Erelas n'était qu'un des très nombreux maillons de la cotte de mailles humaine qui défendait Minas Tirith. Un maillon paré du titre de capitaine, mais un maillon parfaitement remplaçable néanmoins. Son ascendance noble lui conférait peut-être un certain prestige au sein de l'armée régulière, mais pas ici. Pas dans ce bureau.

- C'est exact, sire. J'ignorais cependant que vous étiez intéressé par cette affaire.

- Il n'est pas d'affaire qui n'intéresse pas le Service, capitaine. Dites-moi, pourquoi avez-vous fait entrer cette femme dans Minas Tirith ?

L'officier prit une seconde de réflexion. S'il mentait, il se pouvait fort que la situation se retournât contre lui dans le futur, et Rhydon n'était pas du genre à plaisanter avec l'insubordination. Même s'ils n'appartenaient pas officiellement à la même branche, il se débrouillerait pour briser sa carrière, voire le faire passer pour un traître au royaume. A l'heure actuelle, cette accusation pouvait suffire à l'envoyer à la potence… Il répondit sur un ton qu'il espérait convaincant :

- Elle cherchait à rencontrer les érudits de l'université de Minas Tirith, et c'est là que je l'ai conduite. J'ai aussi pensé qu'elle pourrait nous apporter son aide, car on dit que la médecine elfique est capable de faire des miracles.

La réponse était suffisamment évasive pour lui permettre de mettre Rhydon sur une fausse piste, mais l'homme était malin, et il demanda :

- Vous a-t-elle dit qui elle cherchait à rencontrer en particulier ?

- Je ne crois pas, mentit Erelas. Voulez-vous que je me charge de lui poser la question ?

Rhydon leva la main pour l'interrompre :

- Ce ne sera pas nécessaire, capitaine. Mes hommes s'en occuperont. Je ne vous retiens pas davantage, vous pouvez disposer.

Erelas inclina légèrement la tête, mais alors qu'il allait partir, Rhydon l'interpella d'une voix où ne transparaissait nulle compassion :

- Une dernière chose, capitaine… Rappelez-vous que vos ordres consistent à assurer la défense du Premier Cercle, pas de décider qui peut entrer ou sortir de Minas Tirith. Souvenez-vous en, car le général Cartogan aime peu ce genre d'initiatives. Compte-tenu du contexte, je suis sûr que vous comprenez.

- Oui sire, toutes mes excuses.

La porte se referma doucement derrière Erelas, et Rhydon lâcha un soupir. Son regard se perdit de nouveau vers l'horizon, alors qu'il se grattait le menton sans y penser. Il pressentait que quelque chose se tramait, mais il lui faudrait attendre d'obtenir un rapport à la fois fiable et précis pour se faire une idée de la situation. Le capitaine ne lui avait pas tout dit, et il y avait comme un vent de sédition dans les bas-fonds de Minas Tirith. Il se leva pour regarder de nouveau par la fenêtre, conscient que les ennemis du Gondor ne se trouvaient pas tous à l'extérieur de ces murs…


~ ~ ~ ~


Au petit matin, les jardins de l'université avaient ce petit quelque chose de féerique. Baignés d'une douce lumière, les lieux s'illuminaient de manière somptueuse, alors que plantes et murs se confondaient l'un avec l'autre, mariage curieux de la pierre et des végétaux le long d'ensembles architecturaux construits par des artistes de grand talent. Leur nom était peut-être oublié aujourd'hui, mais la beauté de leur création continuait de transparaître. On reconnaissait les traits númenoréens, à la fois lourds et imposants, mais s'y ajoutait la finesse et le goût du détail des Eldar. Le résultat était magnifique, et il fait bon se promener à l'ombre des grands arbres aux feuilles légèrement agitées par la brise en profitant de cette vue à nulle autre pareille dans la Cité Blanche. Cependant, quelque chose vint troubler le cadre idyllique et apaisant du jardin. Le bruit distinct de bruits de pas nombreux, accompagné des échos d'une vive discussion.

- Mais vous n'avez pas le droit ! Nous avons déjà déposé une plainte à Sa Majesté, et nous ne manquerons pas de dénoncer vos abus de pouvoir !

L'homme qui essayait vainement de défendre sa cause était un des professeurs que Lithildren avait rencontrés la veille. Il s'appelait Horas, et elle n'avait pas pu ne pas remarquer son regard malicieux. Il était un véritable bout en train d'ordinaire, mais en la circonstance il paraissait plutôt courroucé par la présence incongrue de deux soldats de l'armée royale en uniforme, qui escortaient un troisième homme, de toute évidence le chef de la troupe. Celui-ci, enveloppé dans une cape légère, pressait le pas pour ne pas avoir à écouter les plaintes du professeur. Les deux soldats qui le suivaient essayaient quant à eux de calmer leur interlocuteur qui n'en démordait pas et exigeait d'eux qu'ils attendissent aux portes de l'université.

Reinil était réveillé depuis quelques temps, et il avait déjà eu le loisir de se toiletter et de s'apprêter. Il se préparait en réalité à aller prendre le premier repas de la journée dans le hall commun, quand il entendit des éclats de voix. Il ne mit pas longtemps à comprendre que des hommes du Haut-Roy se trouvaient sur les terres de l'université, et que cette nouvelle violation de leurs droits ne pouvait avoir pour cause que la présence de Lithildren, arrivée la veille. Abandonnant ses affaires sur place, il se précipita jusqu'à la chambre de la guerrière, qui se reposait encore. Toquant précipitamment, il souffa :

- Dame Lithildren, c'est Reinil. Je… Faites vite, je crois que des hommes viennent pour vous !

Il entendit de l'agitation à l'intérieur, comme quelqu'un qui s'habillait prestement, et en retour il décida de monter la garde à l'entrée, prêt à accueillir le trio qui tournait déjà au bout du couloir et marchait vers lui d'un pas décidé.

- Garçon ! Cria le chef de la compagnie. Où se trouve l'Elfe ? Réponds rapidement, nous sommes pressés.

- Elle est à l'intérieur, mais elle n'est pas encore disposée à vous recevoir.

L'homme semblait ne pas se soucier de cet état de fait, mais Reinil s'interposa entre lui et la porte, la bloquant de sa frêle personne. Cette micro-résistance parut surprendre le militaire, qui rapprocha instinctivement la main de son épée. De toute évidence, ils étaient à cran, et ils n'avaient pas envie de perdre du temps. Pour autant, un meurtre de sang froid au beau milieu de l'un des lieux les plus révérés de la Cité Blanche serait considéré comme impardonnable. Il lui fallait trouver une autre solution.

- Nous avons des questions à lui poser, c'est tout.

- Une dame ne saurait voir quiconque avant d'être habillée, monsieur.

L'intéressé fit claquer sa langue, agacé. Il n'était pas payé pour qu'un gamin lui tînt tête. Au moment où il se trouvait sur le point de s'emparer de Reinil pour l'écarter sans ménagement de sa route, il vit toutefois la porte s'ouvrir. Lithildren fit son apparition, une expression indéchiffrable sur le visage. Mentalement, l'homme la compara au portrait sommaire qu'on lui en avait dressé, et jugea qu'il s'agissait probablement de celle qu'il recherchait. Elle avait des oreilles pointues, ce qui était assez rare dans la capitale du Gondor à l'heure actuelle. Pas de doute, c'était bien elle.

- Bonjour madame, je m'appelle Cereis. Au nom de Sa Majesté Mephisto, j'aimerais éclaircir les raisons de votre présence ici. Voudriez-vous nous expliquer ce qui vous amène à Minas Tirith ? Plus précisément à l'université ?

Un silence s'installa entre tous ceux qui étaient présents, y compris Horas qui venait d'arriver, le souffle court. Chacun regardait Lithildren dans l'attente de sa réponse. Cereis, qui paraissait très sûr de lui, se permit d'ajouter :

- J'ai des ordres très stricts, et je préférerais vous voir collaborer avec nous.

La menace était à peine voilée. Reinil, qui s'était légèrement écarté, ne put s'empêcher de noter que le pourpoint du dénommé Cereis ne portait pas les armes traditionnelles du Gondor. Il ressemblait peut-être à un militaire, mais il n'en avait certainement pas l'uniforme, contrairement aux deux gardes qui l'accompagnaient. Qu'est-ce que cela pouvait bien signifier ?

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