Le jour a des yeux, la nuit a des oreilles [PV Bekin]

Taegan revint assez rapidement, l'interrogatoire semblait avoir durée peu de temps néanmoins le vétéran avait sûrement obtenu les informations nécessaires. Avec le prisonnier et la carte ils semblaient avoir le nécessaire pour rentrer au camp, son hypothèse fut confirmée par Taegan qui décida qu'il fallait rentrer au camp par un chemin plus éloigné de la côte afin d'éviter tout bandits.
Ils devaient être approximativement à deux jours de marche du campement, le prisonnier n'avait pas dit un mot depuis leurs départs Taegan non plus d'ailleurs il voulait sûrement éviter de révéler un quelconque renseignement au prisonnier. Bekin admiré la beauté du paysage pendant ce temps, en silence, ils arrivèrent à un domaine agricole contenant plusieurs chevaux dans une clôture. Afin d'éviter tout problèmes le vétéran analysa la situation tout en restant discret et décida qu'il vaudrait mieux voler des chevaux afin d'arriver plus vite au camp où il devait livrer la carte et le prisonnier. Le jeune ranger devait se charger de prendre des chevaux tandis que Taegan se chargerait de sécuriser la sortie. La tâche allait être rude pour le jeune ranger, voler des chevaux sans se faire repérer; Taegan s'éloigna tandis que le jeune homme réfléchissait à un plan.
Le plan serait simple, prendre les chevaux puis s'en aller, l'idéal serait d'en prendre deux, un pour Bekin et un pour le prisonnier et le vétéran.
le jeune ranger commença alors à sauter par dessus la clôture qui retenait les chevaux et se dirigeait vers les chevaux à pas de loup, chaque pas était calculé pour faire le moins de bruit possible. Le jeune homme pouvait apercevoir le vétéran se dirigeait lui aussi discrètement vers la sortie. Il ne fallait surtout pas que les chevaux se cabrent et donne un coup de sabot ce qui serait très mauvais pour lui.
Il suffirait au jeune homme d’attacher les chevaux avec une corde ainsi il pourra partir avec les deux à la fois. A son approche les chevaux ne firent pas un geste, il en profita pour sortir un bout de corde et attacher 2 chevaux l’un à l’autre. Le stresse monta, il ne fallait pas que les chevaux se cabrait sinon il foirait toutes la mission, une fois les chevaux attachés le seconde partie serait plus compliqué il se ferait de toutes façon repéré il devait donc miser sur la rapidité, il décida de compter jusqu'à 3 puis de sauter sur le cheval et s'en aller direction la sortie. La 3ème secondes fut décisive, il sauta sur le cheval et ordonna au cheval de galoper en direction de la sortie. Il ne put voir si quelqu’un dans le domaine agricole avait réagit il devait se concentrer vers la sortie. Taegan et le prisonnier l’attendait là bas, la sortie n’était plus qu’à quelques mètres lorsqu’il entendit des cris de surprise, ça y est ils étaient repérés. Une fois arrivés aux côtés du vétéran Bekin lui dit :

- J’ai prit un cheval pour toi et le prisonnier, montez vite ! 

Il détacha rapidement la corde et la rangea, le ranger monta puis le prisonnier s’asseya derrière lui, ils partirent au galop en direction du campement sous les cris des hommes qui tentait en vain de les poursuivre.

Les heures avaient défilées à toutes vitesses, en silence, le seul bruit était celui des sabots contre le sol. Ils allaient sûrement atteindre le camp avant la nuit, le soleil commençait déjà sa lente descente ils ne devaient plus être très loin du camp, ils n’y avaient aucun contretemps ou bandit en vue tout ce passé pour le mieux.
Quelques minutes plus tard ils apercevaient enfin les tentes du camp, bientôt ils remettraient la carte et les informations au sergent.
A leurs arrivées au camp personnes ne fit attention à eux hormis le sergent qui les attendaient non loin de pied ferme, ils arrêtèrent les chevaux, Bekin prit la carte et se dirigea vers le sergent il la lui tendit :

- Nous avons ce que vous souhaitez, la carte contient les différents points où les pirates ont prévus d’attaquer, nous également des informations que Taegan à réussi à à soutirait du prisonnier. 

Il attendit que Taegan déballe tout ce qu’il savait.

Une fois la carte minutieusement examinée le sergent leur expliqua que tout cela était bien plus qu’un plan d’attaque, tout cela n’était en réalité que des endroits susceptibles d’être utilisés par les pirates pour des razzias en Harondor, il les questionna également au sujet du prisonnier qui les attendait à l’extérieur de la tente.
Le prisonnier était toujours aussi silencieux en train d’examiner le camp en le parcourant du regard, Pyral ordonna qu’on le fasse entrer dans la tente, il n’attendit pas qu’on lui donne l’ordre une deuxième fois et il entra dans la tente, les rangers purent alors profiter d’un temps de repos Taeagan le conduisit près d’un achoppement rocheux, ils s’y installèrent, la chaleur était toujours présente mais diminuait au fur et à mesure de la journée, le vieux ranger posa alors une question à Bekin qui répondit après un certain temps de réflexion :

- Eh bien à vrai dire cette première mission fut… plutôt agitée et assez éprouvante, surtout sous cette chaleur insoutenable, c’est bien la première fois que j’ai connus une telle chaleur.

Ils passèrent assis là à contempler le ciel tandis que le soleil effectuait sa lente descente afin de laisser place à la lune et à la fraîcheur du soir, les premières étoiles commencèrent à apparaître dans la ciel et Taegan l’interpella pour lui dire que certaines forces de l’ombre étaient à l’œuvre et qu’il s’inquiétait, quant à lui le jeune ranger finit par ce demandait comment avait-il lu dans le ciel, il devrait sûrement essayer de lui demander un jour afin de pouvoir y lire quelques signes lui aussi un jour.
Le jeune ranger se remémora tout le déroulement de sa mission les hauts et les bas, l’homme innocent qu’il à tué, Taegan qui c’était évanouie, le prisonnier récupéré il se dit alors que beaucoup de choses c’étaient passés depuis leurs départ du camp en très peu de temps. Il avait sûrement gagner en expérience grâce à cette mission, grâce à Taegan.
Le camp commençait petit à petit à s’endormir paisiblement malgré quelques personnes qui veillait, Bekin s’endormit lui aussi à son tour.

Lorsque le matin arriva, le jeune ranger se réveilla et vit que Taegan était lui aussi debout, le sergent Pyral leur annonça qu’il allait devoir aujourd’hui démonter les tentes et qu’il se mettrait en route vers Djafa le soir afin d’y amener Erkin, Bekin commença alors à se poser des questions concernant le prisonnier qu’il avait ramené de leurs mission, il semblait avoir une plus grande importance qu’il n’y paraît, le jeune homme fut pris d’une curiosité dévorante et se posa un millier de question pourquoi un simple prisonnier devait-il aller à Djafa ? Détenait t-il une information qui valait leurs vies ? Toutes ces questions ce bousculèrent dans la tête du ranger.
Chacun mit sa main à la pâte lorsqu’il fallait remballer tout le campement, Bekin et Taegan s’occupèrent d’une tente, tandis qu’il commençait à la démonter le ranger en profita pour poser quelques questions :

- « Dis voir lorsque tu as interrogés le prisonnier tu.. enfin il possède quoi comme information ? Et aussi tu sais quel est la situation en Harondor ça ma l’air… tendus ?

Le ranger en profité pour tenter de détenir des informations sur le mystérieux prisonnier tout en se renseignant sur la situation en Harondor.

Taegan regarda attentivement son jeune compagnon, et mit un long moment avant de répondre:

-Je te demanderai de ne pas répéter ce que je vais te dire maintenant, car ce n'est pas ma place de divulguer des informations stratégiques, ni de répandre des rumeurs dans le campement, sans savoir si elles sont vraies ou pas...Mais d'un autre côté, si les circonstances avaient été différentes, tu aurais pu être celui qui interrogeait le prisonnier.

Il ouvrit une gourde en cuir et but une longue gorgée d'un vin local, puis la tendit à son compagnon. Ils n'avaient pas d'autres ordres que de lever le campement et se reposer pour aujourd'hui, l'alcool était donc toléré.

-Le prisonnier m'a dit qu'il était l'héritier d'une des principales familles nobles de Djafa. Il était apparemment parti à la chasse sur les côtes avec quelques compagnons et serviteurs pendant quelques jours, lorsque les pirates lui sont tombés dessus. Ils ont tué les autres, mais l'ont gardé comme otage ou pour l'interroger. Quelques éléments collaient avec son histoire. Ses vêtements, même s'ils étaient sales et à moitié déchirés, étaient faits d'un tissu coûteux, et ressemblaient à une tenue de chasse. Mais je pensais à moitié qu'il me racontait cette histoire pour qu'on ne le largue pas en route...En voyant la réaction du sergent, je me dis qu'il ne mentait peut-être pas...Pyral a passé quelques mois à Djafa, il connaît mieux ce monde étrange que moi. Et je ne pense pas qu'il abandonnerait nos positions sur un simple coup de tête. Sauf si t'as une autre idée de qu'il pourrait être..?

Il se gratta la barbe avant de reprendre.

-Quant à la situation en Harondor...ouais, tendu c'est un bon mot. Depuis la défaite à Dur'Zork, l'Emir Radamanthe a été forcé de faire de Djafa la nouvelle capitale d'Harondor. Les pirates et rebelles du Sud n'ont pas réussi à faire trop d'avances depuis, mais la guerre est loin d'être terminée. Alors que les troupes de Radamanthe maintiennent leurs positions à l'Est et ici au Sud, la plus grande crainte est que les pirates d'Umbar vont réussir à prendre contrôle des points stratégiques sur la côte Ouest et nous prendre en tenailles. Et il faut dire ce qui est, c'est pas tout le monde en Harondor qui est ravi de nous voir ici ni d'avoir un Emir qui vient du Gondor. Les familles nobles regardent attentivement de quel côté vient le vent, et certaines d'entre eux n'hésiteront pas à se tourner contre Radamanthe s'il commence à perdre la guerre. C'est peut-être pour ça que le sergent veut ramener cet Erkin à Djafa. Il veut donner aucun prétexte aux nobles locaux de se tourner contre nous.

Il grimaça, et rajouta:

-Mais bon, c'est pas notre problème tout ça, Bekin. Nos défis à nous sont à échelle humaine, à la portée d'une flèche. On nous dit de lever le camp et nous trainer à travers le sable jusqu'à Djafa, on le fait. Ou bien t'envisages une future carrière dans la politique ?

Ils discutèrent encore pendant un moment, avant que Taegan n'annonce à son jeune compagnon son intention de dormir quelques heures avant la levée du camp.

Ainsi commença leur voyage vers Djafa. L'Erith du sergent Pyral avançait rapidement ; une vingtaine de rangers expérimentés était une force très mobile, même s'ils ne connaissaient pas ces terres aussi bien que leur belle Ithilien.

Ce fut lors d'une escale qu'Erkin, l'homme qu'il avait libéré, s'approcha de lui avec un sourire.

-Mon sauveur ! La fortune m'a sourit lorsqu'elle t'a mis sur ma route, Bekin. Ton officier m'a dit ton nom. Je lui ai raconté tes exploits et lui ai dit que tu méritais d'être nommé sergent de ce pas, mais il n'a pas voulu m'écouter...c'est décevant. J'aurais bien besoin d'hommes comme toi lorsqu'on arrivera à Djafa, Bekin. Des hommes d'action, et de confiance. Tu serais apprécié à ta juste valeur là-bas, et rémunéré généreusement. Penses-y. Mais peu importe ta décision, une récompense t'attendra une fois que nous attendrons notre destination.

Erkin lui fit une tape amicale dans le dos avant de s'éloigner.

Ils arrivèrent au fort de Sinedon le lendemain matin. C'était une forteresse de petite taille, mais bâtie sur un plateau surmontant la route qui reliait Al'Tyr, à présent aux mains des rebelles, à Djafa. Un seul chemin escarpé menait au fort, et le conquérir serait une tâche difficile même pour les artilleurs experts du Gondor.

Lorsqu'ils pénétrèrent dans la cour du fort, ils purent voir avec surprise une agitation digne d'une ruche d'abeilles. Les soldats couraient dans tous les sens, chargeaient des provisions et des armes sur des chariots, criaient des ordres. Le sergent Pyral interpella un des gardes à la porte et lui demanda ce qui se passait. Ce dernier lui répondit :

-Les corsaires, sergent. La côte Ouest brûle. L'Emir est au front Est avec le gros de l'armée. Le gouverneur de Djafa a envoyé un appel urgent aux garnisons de la région d'envoyer des renforts aux places fortes sur les côtes avant qu'il ne soit trop tard.

Après avoir répondus à ses quelques questions le temps passa, il en appris plus sur Erkin et le comment du pourquoi, ils discutèrent encore quelques temps avant que Taegan décide d'aller se reposer en l'attente de la levée du camp, le jeune ranger, lui, vagabonda encore quelques temps puis il finit par s'installer à un endroit fort confortable, puis petit à petit ses paupières se fermèrent, et le sommeil l’emporta.

Il fut réveillé par l'agitation qui régnait dans le campement, tout le monde se préparaient à partir il faisait parti des rares traînards, qui, comme lui et le vieux vétéran avait décidé de s'accorder un temps de repos avant le départ. La lune était déjà haute dans le ciel, et la fraîcheur de la nuit obligea Bekin à se couvrir plus chaudement, bien qu'il se trouvait dans un endroit ou la fraîcheur était chose rare elle était belle et bien existante la nuit quand la chaleur du jour était passée. La petite troupe passa chacune de ses nuits à marcher dans une longue et ennuyante routine, le jour repos, la nuit ils se mettaient en route, chaque jour la même routine, les paysages défilèrent à pertes de vue finissant par lasser toutes la troupes.
Néanmoins le plan de voyage imposé avait un avantage ils ne souffraient pas le moins du monde de cette chaleur insupportable qu'apportait le soleil, amenant son lot de coups de chaleur eux aussi fort peu agréable, ainsi ils pouvaient se reposer et s'abriter à l’abri des ombres qu'apportaient les quelques arbres.
C’est lors d’une de ses escales qu’ Erkin, l’ancien prisonnier, en profita pour féliciter et remercier le jeune ranger pour l’avoir libérer, il lui proposa même une offre à Djafa, travailler et servir une famille noble à Djafa était une offre plus que généreuse, malheureusement intérieurement Bekin savait où était sa place, dans le Nord, dans les forêt de l’Ithilien.
Après un très long voyage ils arrivèrent enfin en vu du fort de Sinedon, petite forteresse située sur un plateau surplombant la route malgré sa taille la forteresse n'en semblait pas moins solide et était malgré tout imposante.
Le long convois franchissa les portes et déboucha sur une grande cour, ne s'attendant à rien de spécial Bekin fut surpris de voir autant de monde et par dessus tout une telle agitation, les cris fusaient de partout et toutes les personnes visibles couraient en tous sens, sans exception. Un garde prit tout de même le temps d'expliquer au sergent Pyral la raison de cette agitation, le sergent revint très vite vers le convois afin d'expliquer la situation, d'une voix puissante afin de couvrir les autres bruits, il annonça que la situation commençait à tourner très mal pour l'Emir, la côte Ouest était apparemment attaqué par les corsaires des pirates d'Umbar, l'ensemble des armées était appelé à rejoindre le combat et à venir en aide aux gros de l'armée parti défendre la côte.
Pyral resta quelque temps le regard dans le vide avant de reprendre la parole pour annoncer quelques ordres :

- Allez récupérer autant de provisions que possible, reposez vous au maximum nous repartons au plus vite !

Chaque homme du mettre la main à la patte, ils firent les provisions remplirent leurs gourdes d'eau au maximum, très vite les hommes avaient pris assez de provisions pour la dernière étape du voyage vers Djafa. Très vite, le fort fut déserté, il n'y avait plus un bruit très rapidement, ce qui permis ainsi aux hommes de se reposer au maximum.
Bekin lui aussi profita de cet instant de repos, pour se reposer et pour penser, la situation était-elle si grave ? Quel serait l’issue de cette guerre ? Malheureusement il n'aurait sûrement aucune réponse, il pourrait seulement se faire des idées, il ne verrait jamais la véritable situation de ses propres yeux.
Le temps passa et les hommes purent se reposer toutes la journée dans un endroit où ils ne manquaient de rien, la journée passa si vite que Bekin eut envie de rester une journée de plus malheureusement la nuit arriva et le convois se remit en route une fois de plus.

Le convoi marcha encore quelque jours, et enfin les premiers groupe de maison apparurent, elles se ressemblait toutes mais cela convenait parfaitement au jeune ranger qui voyait tout les jours les mêmes choses, un peu de changement ne faisait aucun mal à personne.
Malheureusement très vite chaque hommes du convois remarqua qu'à mesure qu'ils s'approchaient de Djafa et que les maisons se faisait plus présentes, quelque chose semblait planer dans l'air, quelque chose de tendu prêt à craquer à tout moment, personne ne semblait sortir de ses maisons, et les rares personnes rencontrait ne jeté aucun coup d'œil au convois, ou, lorsque cela ce produisait c'était des regards meurtriers qu'ils leurs lancés, le côte Ouest était sûrement la raison de cette tension constante.
Après quelques jours supplémentaires dans la fraîcheur glacial de la nuit ils arrivèrent enfin en vue de Djafa, la capitale d'Harondor.
Les convois marchands affluaient de toutes part, transportant toutes sortes de marchandises, bien plus peuplé que Bekin ne l'aurait imaginé, la ville était bien plus grande qu’il ne l’aurait imaginé couvrant toute l’horizon, la ville méritait son titre de capitale du Harondor.
Très vite le convoi se retrouva plongés au cœur même de la capitale.

Djafa, la Perle du Sud...deux oasis donnaient vie à cette grande ville marchande, mais l'or coulait dans ses veines. La cité était un carrefour ancestral où se croisaient les routes commerciales vers le Gondor, le Khand, et le Harad. Même pendant la guerre, le flux des caravanes marchandes ne s'arrêtait pas. Des fières murailles encerclaient la cité, mais les maisons, habitations provisoires et campements s'étendaient bien au-delà des remparts. Des milliers d'habitants du Harondor et du Harad étaient venus ici à la recherche d'une sécurité relative depuis la prise de Dur'Zork par les forces de la coalition pirate.

Lorsqu'ils passèrent les grandes portes de la cité, le sergent Pyral s'approcha de Taegan et de Bekin et leur dit:

-Je dois raccompagner Erkin jusqu'à sa destination, mais ca ne sert à rien qu'on perde tous notre temps là-bas. Vous avez bien entendu les informations au fort Sinedon; il est quasi-certain qu'on va bientôt recevoir l'ordre de partir au front. En espérant que le front ne se déplace pas jusqu'ici...Je garde quatre rangers avec moi, pendant ce temps là allez droit à la caserne gondorienne, elle se trouve à côté du palais de l'Emir et de l'ambassade du Gondor. Feomir y a déjà été, il vous guidera. Renseignez-vous sur la situation actuelle, renouvelez les provisions et prenez soin de l'équipement. Nous devons être prêts.

Alors que le sergent Pyral, Erkin et quatre rangers continuèrent leur chemin vers les quartiers résidentiels de Djafa, la quinzaine restante suivit Feomir jusqu'à la caserne gondorienne.

***

Il s'agissait d'un bâtiment assez élégant, témoignant des moyens conséquents que le Gondor investissait dans sa province la plus avancée au Sud. Les seules fenêtres qui donnaient sur l'extérieur étaient au deuxième étage, étroites et protégées par des volets. Ils furent arrêtés à la porte par des hommes de rang gondoriens, qui les laissèrent néanmoins vite passer après avoir échangé quelques mots avec Feomir et Taegan. Les rangers se retrouvèrent dans une grande cour intérieure qui contenait un terrain d'entraînement, mais aussi une fontaine et plusieurs beaux palmiers qui offraient un peu d'ombre à ceux qui venaient s'asseoir sur le carré d'herbe soigneusement maintenu.

Les hommes furent guidés vers leurs quartiers, mais Taegan posa une main sur l'épaule de Bekin et lui dit:

-Viens, on va s'informer un peu. On ira se poser après.

Ensemble, ils se dirigèrent vers le bureau où siégeait un lieutenant. Ils découvrirent avec plaisir qu'il s'agissait d'un ranger du même Otharrimon qu'eux. Les rangers étaient une formation très respectée, mais leurs relations avec l'armée régulière n'étaient pas toujours les plus faciles. Travailler avec un de leurs propres officiers serait sans doute plus constructif et agréable. Le lieutenant leva les yeux et regarda Bekin, puis lui dit:

-Au rapport, soldat. Vous êtes de quel Erith?

Une fois que Bekin donna son rapport, le lieutenant se gratta le menton pendant un court instant et leur dit:

-Regardez cette carte



-Les forces de l'Emir Radamanthe sont à l'Ouest, représentées par le symbole de l'étoile. D'après les derniers rapports, l'Emir a remporté plusieurs escarmouches et a même réussi à établir une garnison du côté Est de la rivière. Mais il ne peut pas se permettre de battre en retraite maintenant, à moins que la situation devienne désespérée. Les forces ennemies en provenance de Dur'Zork continuent à rechercher une quelconque marque de faiblesse pour l'exploiter et l'attaquer. Les généraux ont donné l'ordre d'envoyer une armée au Sud, pas loin de là où vous étiez postés, vous voyez ce triangle ici. Les forces du fort de Sinedon et des villages environnants ainsi que quelques contingents de la capitale ont été envoyés là-bas. On s'attend à une tentative d'attaque de la part d'Al'Tyr, on ne peut pas les laisser pénétrer dans le coeur du Harondor.

Il soupira.

-Et maintenant la partie vraiment inquiétante. D'après les rapports, les pirates ont commencé les incursions sur la côte Ouest. Ils recherchent probablement à établir une base pour ensuite faire atterrir des troupes en provenance d'Umbar et ouvrir un troisième front. Je ne vais pas vous mentir soldats, nous sommes déjà beaucoup trop éparpillés, comme du beurre étalé sur une trop grande tartine. Nous ne pouvons pas permettre à l'ennemi d'ouvrir ce troisième front, sinon Djafa sera étranglée. Le capitaine Garrick est parti il y a quelques jours sur la côte Ouest avec son Thangion, dans la bourgade portuaire d'El'Odanna, là où vous voyez le cercle sur la carte. C'était le lieu le plus probable d'atterrissage des corsaires...je n'ai pas eu de nouvelles de lui depuis. C'est...inquiétant. Ce sera tout pour l'instant. Allez vous reposer soldats, en attendant vos ordres.

C'est-ce qu'ils firent. Taegan n'était pas très bavard, perdu dans ses pensées après avoir entendu les nouvelles de la part du lieutenant. Les quartiers étaient sobres, mais paraissaient luxueux après des semaines passées à dormir sous la tente où à la belle étoile. Ils logeaient dans deux chambres de dix personnes, avec des lits superposés. Une fenêtre donnait sur la cour intérieure, et ils pouvaient entendre le doux murmure de la fontaine.

***

Le sergent Pyral arriva quelques heures plus tard, mais il ne les rejoignit pas tout de suite. Il passa du temps avec le lieutenant et d'autres officiers et sous-officiers. Lorsqu'il rentra dans les quartiers de ses hommes il claqua des doigts et dit:

-Garde à vous soldats, rassemblement dans la cour dans cinq minutes.

Lorsqu'ils s'y réunirent, le sergent leur adressa la parole de manière laconique:

-Soldats, nous avons terminé une mission mais une autre commence. Nous avons reçu l'ordre de voyager vers le port d'El'Odanna sur la côté Ouest pour venir en renforts au capitaine Garrick. Des chevaux rapides nous seront fournis. J'ai reçu vingt hommes supplémentaires sous mon commandement. Soldat Taegan, approchez. En vue de nos effectifs augmentés, j'aurai besoin d'être secondé. Vous êtes nommés caporal, à effet immédiat. Félicitations. Vous pouvez disposer; nous partons dans trois heures.

Ce n'était pas une cérémonie élégante ni des circonstances joyeuses, mais il s'agissait néanmoins d'une marque de confiance de la part du sergent et d'une prise de statut pour le nouveau caporal.

Alors que les rangers commencèrent les préparatifs, Bekin fut interpellé par un ranger d'une autre unité:

-Eh, tu es de l'Erith du sergent Pyral n'est-ce-pas? Suis-moi.

Il le mena jusqu'à une pièce qui servait d'entrepôt, et lui donna un morceau de tissu d'une couleur difficile à déterminer. C'est seulement lorsqu'il le déplia, que Bekin put voir qu'il s'agissait d'une cape semblable à la sienne, mais faite d'un tissu plus léger et n'ayant pas la couleur verta caractéristique des accoutrements des rangers d'Ithilien.

-J'ai vu trois hommes de mon unité se faire descendre parce qu'on nous voit arriver de loin avec nos capes vertes! A moins de combattre dans une oasis, c'est pas franchement discret. Nous sommes une unité furtive, pas d'assaut. Avec l'accord des officiers, j'ai fait un prototype d'une cape de ranger avec des tissus locaux, dans des couleurs qui permettront de mieux se camoufler parmi les sables ou les collines de la côte. Nous en avons commandé une cinquantaine aux artisans de Djafa. Ton Erith part au front, vous serez donc les premiers à les essayer. Pas mal, non? Fais signe à tes compagnons de venir chercher leurs capes ici.

Leur pas les menèrent jusqu'à la caserne gondorienne de Djafa ou ils pouvaient une fois de plus se reposer dans un endroit calme, agréable. La caserne était un endroit bien plus agréable que ce qu'ils avaient connus depuis de nombreux jours, au lieu de tente, des matelas confortables, au lieu de la chaleur, une fontaine et des palmiers gardant ainsi un semblant de fraîcheur au milieu de cette région si chaude. Les soldats s'y trouvaient en nombre sans pour autant que cela soit trop étouffant, de l'extérieur le bâtiment n'avait rien d’accueillant mais une fois en son intérieur on découvraient un véritable palace.

La plupart des rangers décidèrent d'allez directement se reposer dans leurs nouveaux quartiers, mais, Taegan interpella le jeune ranger, il souhaitait simplement s'informer avant le repos, qui était mérité, ils se dirigèrent vers le bureau du lieutenant, source d'information des plus sûr, ils traversèrent de nombreux couloirs en rencontrant quelques soldats gondoriens et rangers qui les saluèrent en les voyant.
Il arrivèrent au bureau du lieutenant et après un rapide briefing du lieutenant, Bekin en apprit plus sur la situation tendus du Harondor, tout semblait près à craquer en un rien de temps, le lieutenant leur ordonna de se reposer, ce qu’ils firent au plus vite, après avoir trouver une couchette, le jeune ranger eu toute le temps pour réfléchir, perdus dans ses pensées à écouter la fontaine s’écouler dans la cour intérieur, malheureusement la fatigue eu vite le dessus sur lui et il s’endormit.

Il se fit réveiller en sursaut par le sergent Pyral qui leur annonça un rassemblement, il se leva rapidement et rejoignit avec les autres hommes le sergent dans la cour.
Une nouvelle mission les attendaient, au port d’El’Odanna, à l’Ouest, afin de venir en aide au capitaine Garrick,ils posséderaient plus d’hommes des chevaux rapides et Taegan fut promus au rang de caporal.
Bekin assimila toutes les informations et ce demanda ce qu’ils allaient trouvé là-bas, d’après les dires du lieutenant rencontré la veille ils n’avaient pas eu de nouvelles venant de Garrick depuis un bon bout de temps, la question aurait une réponse une fois au port.
Très vite la caserne devint une véritable fourmilière les derniers préparatifs ce mettaient en place les chevaux furent scellés et parés au départ, bientôt ils seraient prêt à partir.
Mais alors qu’il participait au préparatif un homme l’interpella et lui demanda de le suivre, curieux, Bekin le suivit, celui-ci le mena à une pièce, il lui tendit une pièce de tissus d’une couleur étrange, avant même que l’homme le lui explique le jeune ranger devina l’utilité de cette couleur, elle se fondait parfaitement dans le sable ou les collines.
Ils seraient donc les premiers à tester cet méthode de camouflage, n’attendant pas plus longtemps Bekin alla chercher ses compagnons, pratiquement tous le suivirent lorsque celui-ci expliqua l’utilité de la cape, d’autre par simple curiosité.
Très vite ils furent tous équipés de cette nouvelle cape qui leur permettraient d’être bien plus discret dans ce milieu hostile qu’était le Harondor.
Bientôt chaque hommes fut prêt au départ, on assigna un cheval à chaque hommes celui du jeune ranger était entièrement noir hormis quelques parties qui était tacheté de blanc, au niveaux des pattes et du museau.
Ainsi, les hommes se mirent en route, une longue file d’hommes sortant de la caserne puis petit à petit ils quittèrent Djafa en se dirigeant vers l’Ouest, au port d’El’Odonna.

La distance qu'ils devaient parcourir entre Djafa et El'Odanna était comparable à celle de leur voyage précédent, de leur campement jusqu'à la Perle du Sud. Mais cette fois-ci ils disposaient de chevaux rapides et la route était bonne. Au fur et à mesure qu'ils s'approchaient de la côte le vent se manifestait de plus en plus souvent en ramenant quelques nuages qui rendaient la chaleur plus supportable et leur permettaient de voyager plus longtemps en journée.

Il leur fallut trois jours pour arriver jusqu'à leur destination; malheureusement ils ne croisèrent aucun messager apportant des nouvelles du capitaine Garrick. Cela faisait à présent sept ou huit jours depuis que le capitaine était parti vers la côte, et le manque de contact ne présageait rien de bon.

Les quarante cavaliers guidés par un local au service de Radamanthe finirent par arriver sur un plateau surmontant la côte. Avant d'en descendre pour atteindre la bourgade d'El'Odanna, le sergent Pyral décida qu'il valait mieux envoyer des éclaireurs. Taegan fut désigné, et comme à son habitude il demanda à Bekin de l'accompagner, s'étant lié d'amitié avec son jeune subordonné.

Lorsqu'ils s'approchèrent du bord du plateau, ils purent apercevoir le panorama du port et de ses alentours.


Les prédictions et craintes des officiers gondoriens s'étaient avérées correctes. La première chose qui attira leur regard était une flotte de cinq bateaux aux voiles noirs et aux proues caractéristiques des navires d'Umbar. Des silhouettes minuscules grouillaient sur la plage à côté du port, et plusieurs bâtiments de la bourgade étaient brûlés alors que d'autres fumaient encore. Mais le port était surmonté par un phare bâti sur un grand rocher, et relié à la bourgade par une passerelle. Le phare devait faire une vingtaine de mètres de haut, et était bâti en pierre lisse et brillante dont les lignes symétriques rappelèrent aux deux rangers leur Gondor natal. Le bâtiment devait avoir des centaines d'années ou peut-être même des milliers, bâti par les maçons numénoréens avant que les secrets de leur artisanat ne soient perdus.

Hormis son aspect esthétique, ce qui attira surtout le regard de Bekin dans ce phare était un drapeau solitaire qui le survolait: celui du Gondor. Le jeune ranger s'en aperçut avant Taegan, dont les yeux n'étaient plus aussi bons. Lorsqu'il en informa son caporal, ce dernier fronça les sourcils:

-Si le drapeau du Gondor survole encore le phare c'est que le capitaine Garrick a du s'y réfugier et il tient encore bon. C'est une bonne nouvelle, mais ca veut aussi dire que son Thangion n'a pas réussi à empêcher les corsaires d'atterrir et de prendre contrôle du port. Cinq bateaux de cette taille, ils doivent être plusieurs centaines...Et nous ne sommes que quarante. Revenons voir le sergent...


Avant qu'ils ne quittent leur poste d'observation, Bekin put apercevoir quelques éléments supplémentaires. Plusieurs corps jonchaient la passerelle qui reliait le phare au port. Même s'il ne pouvait pas distinguer s'il s'agissait des corps de rangers ou de corsaires, des combats y avaient sans doute eu lieu. Le bas des murs du phare était d'ailleurs noirci par des flammes ou de la fumée. Le plus grand rassemblement d'hommes, probablement des guerriers ennemis, était sur la plage au niveau du port, et peut-être ailleurs dans les bâtiments. Un plus petit groupe se tenait non loin de la passerelle mais du côté de la ville, à l'abri des projectiles pouvant être tirés du phare.

Lorsque les deux rangers rejoignirent le sergent Pyral, Taegan invita Bekin à faire le rapport en mentionnant sa vue supérieure.
Quelle allait être la recommandation du jeune ranger? Une approche furtive? Ou bien utiliser leurs montures pour un assaut de choc? Leur décision pourrait décider de leur vie ou de leur mort, ainsi que celle des défenseurs du phare. Et si le débarquement des corsaires n'était pas arrêté ici, le chemin vers Djafa serait grand ouvert pour les envahisseurs...

Le voyage vers El'Odanna prit bien moins de temps que tout leur précédent voyage, les chevaux permettaient au cavaliers d'atteindre leur destination en seulement trois jours, à mesure qu'ils approchaient du port l'atmosphère se fit plus lourde, un sorte de voile d'anxiété couvrait le visage de chaque cavalier.
Lorsqu'ils campaient, personne n'échangeait de mot, chacun gardaient pour soi ses peurs, ses pensées, chacun gardaient pour soi une terrible réalité, soi ils trouveraient Garrick à El'Odanna, soi ils se dirigeaient droit dans la gueule du loup. Les paysages défilaient les uns après les autres, et la vitesse des cavaliers leur apportées du vent rendant ainsi la chaleur bien plus supportable.
Et c'est alors que l'après-midi du troisième jour ils eurent en vues, la côte et au loin le port d'El'Odanna, la longue file de cavaliers fut stoppée par le sergent Pyral, en tête de colonne, qui descendit de son cheval invitant ainsi les autres à l'imiter, ils s'étaient arrêté sur un plateau surplombant le port, le sergent trouva plus judicieux d'envoyer un éclaireur évaluer la situation, Taegan fut envoyé et Bekin comme toujours l'accompagna. Arrivant au bord du plateau ils constatèrent alors la catastrophe de la situation : d'énormes corsaires d'Umbar flottaient le long de la côte, la plage était envahis par les ennemis, la bourgade d'El'Odanna étaient en proie au flamme, en bref El'Odanna s'était fait envahir.

Mais au milieu de ce chaos, il y avait un phare surplombant le port, la passerelle qui le relié au port était jonchées de cadavres et au sommet de celui-ci flottait fièrement le drapeau du Gondor, Bekin en déduisit que le drapeau était sûrement un symbole de résistance et que Garrick s'étaient sûrement réfugié dans le phare jusqu'à maintenant inconquis.
Chaque détails dans leur esprit, Taegan et Bekin firent demi-tour afin de faire leur rapport au sergent, c'est Bekin qui prit la parole :

- Sergent, je crains que le pire soit arrivé, le port est en proie au flamme, El'Odanna à était conquis, les corsaires d'Umbar sont là. Cependant il se peut que Garrick ou certain de ses hommes se soit réfugié dans un phare surplombant El'Odanna, bien entendu rien n'est certain. Si je puis me permettre, face au Umbariens, nous n'avons aucune chance, du moins en effectuant un assaut de front, il serait judicieux d'abord de sauver Garrick et ses hommes bloqués dans le phare et ensuite d'évaluer si une attaque est envisageable.

Le sergent acquiesça, puis, la mine grave, se mit à réfléchir quelques instants avant d'élever sa voix afin d'annoncer la suite des évènements qui seraient décisif.

Le sergent Pyral tournait en rond d’un pas rapide, perdu dans ses pensées. Il avait beau être un vétéran des nombreuses campagnes, en tant que sergent sa spécialité était d’effectuer des tâches selon les ordres reçus, diriger ses hommes et prendre des décisions tactiques. A présent il devait décider de la meilleure stratégie à adopter dans une véritable bataille avec plus d’hommes sous ses ordres que jamais auparavant et des conséquences potentiellement énormes pour le sort de la province éloignée du Gondor. Son seul supérieur hiérarchique dans un rayon de plusieurs dizaines de lieues était bloqué dans le phare d’El'Odanna, du moins s’il était encore en vie. Pour résumer la situation, le sergent se sentait quelque peu dépassé.

-Vous avez raison soldat, un assaut frontal serait trop risqué, peut-être même suicidaire. Les corsaires d’Umbar n’ont pas l’habitude de combattre des cavaliers sur la terre ferme, mais les rangers ne sont pas une formation de cavalerie de choc non plus. Cependant, sauver le capitaine Garrick et ses hommes sans déclencher une bataille ouverte avec les pirates me semble quasi-impossible, surtout que pour l’instant nous n’avons aucun moyen de communiquer avec eux. Si c’est bien le capitaine qui s’est réfugié dans ce phare et s’il a la plupart de son Thangion avec lui, en joignant nos forces nous devrions pouvoir vaincre cette vermine, mais ça fait beaucoup de si...Vous avez vu l’emplacement des forces ennemies et l’approche du phare.  Soldat, la mission que je m’apprête à vous donner ne sera pas simple. Vous devrez vous frayer un chemin jusqu’au phare et prendre contact avec ceux qui s’y réfugient. Je vous donnerai trois bouts de tissu : un vert d’Ithilien, qui signifiera que nous pouvons mener un assaut sur les corsaires et que les hommes dans la tour sont suffisamment nombreux pour nous venir en aide. Un noir comme le drapeau des intendants, qui signifie que les défenseurs de la tour ont besoin de notre aide, mais ne seront pas en mesure d’influencer le résultat de la bataille. Et enfin un tissu beige comme le sable de ce maudit bout de continent, s’il n’y a plus personne à sauver...Pendez le tissu adéquat à côté du drapeau en dessus du phare et nous agirons en fonction. Si vous ne le pendez pas d’ici exactement un jour, nous assumerons que la mission fut un échec...

-J’accompagnerai Bekin, sergent.

-Non, Taegan. Vous êtes caporal maintenant, et j’ai besoin de vous ici. Et vous n’avez plus l’agilité ni la vue d’une jeune recrue. Bekin ira tout seul cette fois, et que les Valar guident son chemin...

Ainsi le jeune ranger reçut les trois bouts de tissu et quelques mots d’encouragement de la part de ses compagnons. Sa mission serait plus que difficile, certains la qualifieraient tout simplement de suicidaire. Le sergent Pyral lui avait laissé une liberté totale sur la tactique qu’il comptait utiliser, mais était-ce vraiment un cadeau ?  Il pouvait attendre l’arrivée de la nuit et braver un terrain inconnu dans l’obscurité, ou bien essayer d’utiliser les roches et le soleil comme camouflage en journée. Il pouvait essayer de traverser le village et la passerelle sous le nez des gardes corsaires, ou bien braver l’élément sauvage qu’était la mer afin d’essayer d’atteindre l’ile et escalader ses parois de roche tranchante pour atteindre le phare. Il avait une journée. S’il échouait, le sergent devrait mener ses hommes dans un combat à l’aveugle.

Durant ces quelques instants lourd de tension personne n'osa prononcer un mot, chacun retenait son souffle, face à la situation, le sergent Pyral, semblait dépassé, tournant en rond il semblait avoir oublié les soldats qui l'entouraient, chacun restaient accrochés au lèvres du vétéran attendant une quelconque réponse de sa part.
Le croassement de quelques corbeaux brisèrent le silence, les macabres volatiles descendaient en pic vers les cadavres jonchant le pont reliant le phare au port, cela n'aida en rien à détendre l'atmosphère si étouffante.
Le sergent finit par prononcer son verdict, et c'est à Bekin que revint une tâche des plus périlleuse, s'aventurer dans la gueule du loup, au sein même des troupes ennemies, trois pauvres bout de tissus qui annoncerait si une bataille aurait lieu ou non. Un vert, qui sera synonyme d'espoir, qui annoncerait la possibilité d'un assaut, un noir qui annoncerait que les derniers soldats gondoriens présent à El'odanna étaient encore vivant et qu'ils avaient besoin d'aide, de leurs aides. Et le dernier, un noir qui là serait mauvais signe, il ne restait aucun rescapé de l’invasion et un assaut serait suicidaire.
C’est avec ces trois bouts de tissus que le ranger attendit que la nuit tombe puis, après avoir reçu quelques mots d’encouragement, Bekin descendit le plateau sous les regards de ses compagnons d’armes.
Son plan était simple, traverser le village, emprunter la passerelle et entrer dans le phare, avec comme seul allié, l’obscurité de la nuit.
Le jeune ranger resta crispé tout du long jusqu’à qu’il soit en bordure du village, le village était dans un très mauvais état, une bataille avait eu lieu et les maisons avait subit les revers, certaines avaient été brûlés, d’autres étaient tachées de sang, aucunes vitres n’étaient restés intact.
Le pire fut les corps qui jonchaient le sol, un mélange de gondoriens et d’Umbariens, tous morts, leurs corps étaient traversés par des flèches, certains étaient désarticulés de manière fort peu normal, certains corps avaient encore des lames dans le torses.
Bekin traversa ce décors de guerre, il fit la rencontre de plusieurs soldats Umbariens, torches à la main qui patrouillait, leurs nombres grimpa en flèche au fur à mesure de sa progression, les soldats patrouillaient et par la même occasion certains étaient postés à l’extrémité du pont surveillant une quelconque sortie venant du phare, cela était bon signe, si personne n’avait survécu à leur attaque pourquoi surveiller le phare ?
L’action la plus difficile était à venir, pénétrer par la porte du phare sans se faire remarquer par quiconque, une fois au sein du phare il devrait bien expliquer qu’il n’était pas un Umbarien pour éviter tout accident tragique.
Les gardes postés près du pont étaient cinq, sans compter les patrouilles aux alentours du phare.
Trois d’entre eux étaient adossés à un mur, un feu de camp les réchauffant, les deux autres était à moitié endormis affalés sur le mur. A vrai dire les Umbariens espéraient sûrement que leurs ennemis acculés dans le phare meurt de faim ou, poussés par le désespoir, mènent un assaut suicidaire.
Bekin fut assez près pour les voir distinctement, caché derrière un mur écroulés la vue était parfaite, par le même occasion il pouvait ainsi avoir une vue d’ensemble sur le pont et la manière dont il passerait la passerelle, tenter de franchir la passerelle serait suicidaire, tuer les gardes, impossible, cela laissait peu de possibilité à Bekin, néanmoins il n’y en avait une, risqué, très risqué, mais faisable.
La nuit était un énorme avantage, et il allait l’utiliser, il allait tout simplement s’accrocher sur le côté de la passerelle et atteindre la porte du phare. Le pont semblait vieux, il lui suffirait donc de s'accrocher à la pierre lézardée, une fois à la porte il improvisait et la franchirait.
Pour atteindre le pont sur son flanc il lui suffirait de longer le mur en ruine qui entourait les gardes.
Il le longea en faisant bien attention où il mettait les pieds et se retrouva sur le flanc du pont, il déglutit et il se pencha, d’une main il empoigna une lézarde qui parcourait le dessus du pont et laissa tout simplement le bas de son corps basculait dans le vide. Après un rapide coup d'œil envers les gardes, toujours aussi peu attentif il commença à faire coulisser ses deux mains le long de la lézarde.
Sa progression fut lente, avançant centimètre par centimètre, ses bras devinrent douloureux et ses doigts engourdis, mais il ne lâcha pas.
A quelques mètres de la porte, la lézarde s’arrêta, lâchant un juron à voix basse Bekin se mit à réfléchir tout en cherchant d’une main libre un nouvelle endroit où s'agripper, mais il n’y avait plus un endroit où s'agrippait.
Le jeune ranger improvisa, lentement, très lentement il se hissa sur le pont à la force de ses bras, tout en jetant des coups d'œil inquiets vers la lumière lointaine du feu de camp des gardes.
C’est ainsi que tout en restant allongé, Bekin continua sa progression, en rampant parmi les cadavres parsemant le pont, il passa à côté d’un homme avec un uniforme gondorien, une flèche planté dans l’œil, un autre à deux doigts de tomber de la passerelle le haut du corps pendant dans le vide.
Il prit soin de les éviter et atteignit enfin la porte, il se releva empoigna la poignée de la porte branlante, et l’ouvrit.


Il fut accueilli par une flèche pointée sur son crâne, à deux doigts d’être tué, se crispant Bekin jeta un coup d'œil à tout ce qui l’entourait, en fait plusieurs arcs étaient pointés sur lui, par plusieurs hommes.
D’autres hommes avaient dégainé leurs épées, d’autres étaient inactifs assis le dos contre un mur, un bandeau rouge de sang entourant certaines parties du corps.
Après quelques instant lourd de tension, une voix s’éleva au milieu des archers :

-Baissez vos armes bon sang ! vous ne voyez donc pas que c’est un ami, est-il habillé comme un Umbariens ? Non bon sang !

Les archers baissèrent leurs armes et un homme sortit de toute cette foule, le visage couturé de cicatrice, les habits ensanglantés, et une barbe mal rasée, rien dans son physique ne laissait transparaître la moindre sympathie.

-Alors ? Qui êtes-vous ? Pourquoi un homme seul entre-t-il ici ? gronda t-il

-Capitaine Garrick, je m’appelle Bekin, ranger d’Ithilien, je ne suis pas seul, de nombreux soldats et le sergent Pyral attendent mon signal, déclara t-il solennellement

Après avoir examiné le jeune ranger, Garrick prit la parole une nouvelle fois :

-Alors comme ça vous ne nous avez pas abandonné à notre sort.

-Pour rien au monde le Gondor n’abandonnerait ses hommes.

-Vous parliez d’un signal, quel signal ?

-Eh bien, à vrai dire j’ai trois bouts de tissus avec moi, celui que j’agiterais tiendra au courant le sergent de… votre état.

-Je vois… suivez-moi je vous prie.

D’un geste de la main il invita Bekin à le suivre, ils traversèrent la foule de soldats et montèrent un long escalier circulaire, celui-ci les mena à une hauteur considérable, à travers une fenêtre aux vitres brisées ils eurent une vue donnant sur tout le port et les environs.
Néanmoins, Garrick ne l’avait pas fait monté pour admirer le paysage, il prit la parole :

-Regardez, ces chiens nous ont surpris, moi tout comme mes hommes, aucun de nous ne s’y attendait, à vrai dire il y a quelques jours de cela avant mon départ j’en aurai rigolé ! On a exécuté les ordres, et un beau soir les flammes ont englouti la bourgade et a été obligé de se retrancher ici, regardez-moi ces chiens qui pullulent sur la plage et leur énormes corsaires, après un instant de silence il reprit la parole, vous êtes venus nous sauver et bien vous vous êtes jetez dans la gueule de loup !

Ils se défièrent du regards, et Bekin prit la parole :

-Combien de vos hommes sont blessés ?

-La moitié de mes hommes sont amochés et le reste complètement démoralisé !

Le jeune ranger déglutit puis prit la parole :

-Si je puis me permettre et avec tout le respect que je vous dois, capitaine, nous pourrions vous sauver il me suffirait d’agiter le tissus noir, nous vous évacuerons, mais cela reviendrais à abandonner El’odanna au mains de l’ennemi et fuir le combat, ou, nous pourrions unir nos forces et écrasez l’ennemi, les repoussez, Garrick voulut prendre la parole mais Bekin prit son courage à deux mains et le devança, et je pense que si vous vous êtes engagé il y a de cela quelques années ce n’était pas pour fuir le combat ou abandonner des territoires au main de l’ennemi… capitaine.

Bouche bée, Garrick le regardé, un mélange de fureur et d’étonnement brûlait dans son regard.
Puis il éclata de rire, et après son fou rire il prit la parole :

-Et bien vois-tu soldat, tu me rappelles moi-même à mes débuts, plein de culots, aucun respect pour mes supérieurs, mais des paroles justes ! Dès l’aube tu agiteras le bon bout de tissus et nous prendrons les armes, ces chiens retourneront à leurs niche !


Le soleil se leva et l’aube teinta les nuages d’une lueur d’or, et si vous abaissiez votre regard plus bas vous verriez Bekin accrocher un tissus vert d’Ithilien, à côté du drapeau du Gondor qui battait fièrement dans le vent.

Le jeune ranger avait accompli ce qui semblait être une mission impossible : parcourir les lignes ennemies et s’introduire dans le phare. Il était sans doute rassuré de retrouver le capitaine Garrick, mais le plus dur était encore devant eux.
Entre les morts et les blessés, moins de la moitié du Thangion, comptant à l’origine une centaine de guerriers, était encore en état de combattre. Cela voulait dire que même une fois réunis avec les cavaliers de Pyral, ils seraient moins de quatre-vingt-dix guerriers face à plusieurs centaines de corsaires.

Pourtant, Bekin n’avait pas hésité et le capitaine Garrick semblait partager son opinion. Ils étaient tous conscients du fait que si les pirates d’Umbar parvenaient à ouvrir un troisième front, le sort du Harondor serait scellé.

L’arrivée du ranger avait aidé à remonter un peu le moral des troupes dans le phare, même si les soldats savaient que les chances de s’en sortir dans la bataille qui les attendait à l’aube étaient minces. Ceux qui pouvaient se reposèrent, mais le capitaine donna des ordres très clairs. Les épées et lances furent nettoyés, les flèches réparées, les blessés préparés pour une évacuation rapide. Peu de temps avant l’aube, alors que Bekin s’apprêtait à remonter l’escalier en colimaçon pour pendre le morceau de tissu vert, Garrick lui adressa la parole :

-Bekin, quelle est votre arme de choix ? L’épée, la lance ou l’arc ? Le phare ne dispose que de deux balcons étroits sur lesquels on peut poster un maximum de six archers. Pire encore, nos réserves des flèches sont bien maigres après avoir repoussé les attaques des derniers jours. Je peux garantir un maximum de vingt flèches par archer, alors comme tu peux t’imaginer je préfère poster les meilleurs tireurs là-haut. Tu as fait tes preuves, alors je te laisse le choix du poste.


Tirer du haut du phare était sans doute plus sécurisé que combattre dans la mêlée, mais demanderait une précision hors de commun. De toute façon s’ils échouaient, ils finiraient tous par mourir.

-Quand tu mettras le tissu vert en place, nous commencerons les hostilités de notre côté. Si la charge de cavalerie arrive en premier, les corsaires sauront qu’ils doivent s’attendre à une sortie de notre part. En revanche si nous commençons, ils ne s’attendront pas à être attaqués dans le dos par des cavaliers sortis de nulle part. J’espère juste que le sergent Pyral a une bonne vue ; s’il ne remarque pas le tissu vert et ne lance pas l’assaut alors que les hostilités éclatent, ça va très mal finir pour nous.


Les rangers étaient rassemblés dans la pièce en bas du phare, les armes en main. Des soldats professionnels et redoutables, mais affaiblis par des journées de lutte désespérée dans un terrain inconnu. Le capitaine leur adressa la parole :

-‘Limbe ith Dinen’, rapide et silencieux. C’est notre devise. Mais aujourd’hui l’heure n’est pas à la furtivité. Le temps de l’acier et du sang est arrivé ! Hommes du Gondor, c’est ici, dans le village d'El'Odanna que le sort du Harondor et du Prince d’Ithilien à qui vous avez fait serment sera décidé. Alors battez-vous vaillamment, battez-vous jusqu’à la dernière goutte de sang car si nous échouons ici aujourd’hui, demain l’ennemi sera aux portes du Gondor !


Alors que le phare fut baigné dans la lueur dorée des premiers rayons de soleil, les portes s’ouvrirent et les fiers guerriers du Gondor sortirent sur la passerelle. Les corsaires étaient sans doute surpris mais pas pris au dépourvu. Des cris se firent entendre dans la langue d’Umbar, et le son d’un cor retentit aussitôt. Quelques pirates apparurent sur la passerelle pour lancer des javelots et tirer à l’arc sur les rangers. Deux hommes de Garrick tombèrent sous les projectiles, mais les tireurs d’élite en haut du phare décochèrent à leur tour.

Alors que les deux groupes se rencontrèrent au milieu de la passerelle et les lames s’entrechoquèrent, le bruit des sabots se fit entendre au loin. La cavalerie était arrivée !

Les célèbres cavaliers du Rohan ou les chevaliers de Dol Amroth auraient sans doute regardé la charge des rangers avec pitié ou mépris, mais pour Bekin et les hommes du capitaine c’était la plus belle vue au monde.

Le sergent avait divisé ses hommes en deux groupes. Le premier, dirigé par Taegan, chargeait tout droit vers le phare, en espérant briser la ligne ennemi et ouvrir le chemin aux hommes du capitaine. Le deuxième, mené par Pyral en personne avait opté pour une mission plus risquée encore, celle de charger sur les corsaires rassemblés sur la plage afin de semer le chaos et de les empêcher de venir en renfort à leurs alliés.

Dans cette bourgade portuaire, aucun des deux côtés ne pouvait prétendre être dans son élément. Les pirates préféraient combattre sur la mer et n’avaient pas l’habitude d’affronter des soldats professionnels. Les rangers étaient entrainés et disciplinés, mais leur équipement et tactique correspondait davantage aux forêts ancestrales d’Ithilien qu’aux escarmouches en milieu urbain. Un affrontement sanglant et équilibré venait de commencer entre le nombre et l’expérience.

Bekin put apercevoir que plusieurs corsaires s’étaient équipés de lances courtes et de harpons et s’apprêtaient à faire face aux cavaliers de Taegan, ce qui risquait de briser la charge du Gondor.

Aux premières lueurs de l’aube, les fiers soldats déferlèrent des portes du phare, leur cri de guerre se mêlant à ceux des guerriers d’Umbar, dans un fracas de lames les premières hostilités s’engagèrent sur l’étroite passerelle, les premiers soldats de Garrick tombèrent, mais la cavalerie ne tarda pas à submerger l’ennemi est à dégager un passage aux soldats, la masse compacte, étroitement serrée sur la passerelle ne tarda pas s’étendre sur le petit village d’El‘Odanna.

Au milieu de cette bataille, Bekin frappait la chair, repoussait l’ennemi, à ses côtés trois soldats, deux ne tardèrent pas à tomber, l’un décapité, l’autre une lame dans le ventre.

Parfois encerclés les soldats étaient sans cesse secourus par un cavalier brisant les lignes ennemis, il était difficile de voir qui avait le dessus au milieu de cette bataille, au début chacun frappait au sein des lignes ennemis sans vraiment viser mais à mesure que les ennemis reculaient, la bataille ne fut plus constituée que de divers duels.

Très vite, mais non sans prix, les Umbariens reculèrent face à l’assaut des fiers soldats du gondor. S’arrêtant quelque instants, le jeune ranger balaya du regard le champ de bataille, oui ils avaient bien repoussé l’ennemi, mais un grand nombre des leurs étaient morts, tous tombés au combat. Le village était devenu un charnier, lieu de mort et d’agonie.

Au loin la cavalerie s’apprêtait à s’écraser sur les corsaires Umbariens, les premières lignes furent brisées par des lances et harpons, mais l’assaut continua et malgré les pertes les cavaliers ne tardèrent pas à s’abattre sur les Umbariens.

Les soldats encore vivants décidèrent de poursuivre les fuyards, mais Taegan donna de nouveaux ordres avant que la poursuite commence :

- N’hésitez pas à prendre les chevaux de vos camarades morts, les cavaliers avec moi, on va aider Pyral, ceux sans monture, n’hésitez à me poursuivre les fuyards et à les massacrer !

Bekin se trouva une monture et, au galop, les cavaliers filèrent droit vers les corsaires, là où la bataille était la plus meurtrière, très vite, le jeune ranger eu un aperçu plus précis du déroulement de la bataille. Les chevaux s’écroulaient, transpercés, emportant et écrasant avec eux leurs cavaliers, les cris de douleurs étaient plus nombreux de leur côté.

Les premières lignes des renforts menés par Taegan ne tardèrent pas être elle aussi brisées, pas de chance le jeune ranger était en première ligne. Sa monture fut atteinte par un harpon, le cheval paniqua et tomba sur le côté, projetant le ranger au sol, au milieu de ses camarades morts, mais Bekin ne comptait pas faire partie du décor, il se releva et chercha du regard son épée, introuvable, il arracha une épée des mains d’un des cadavres et s’enfonça dans les lignes ennemis. Il trébucha à de nombreuses reprises se rattrapant de justesse, puis il affronta l’ennemi, il tua, trancha un maximum, chaque mort pouvait faire la différence.

Au milieu de ce champ de bataille impossible de connaître qui avait l’avantage, il n’y avait pratiquement plus de cavaliers, toutes les montures avaient été éliminées.

Le jeune ranger enchaîna les duels, il recueillit quelques blessures, la plupart au bras. Ses habits tachés de sang, le sien et celui des ennemis, il se demanda depuis combien de temps se battait-il, une demi-heure ? une heure ? deux heures ? Il ne savait pas mais la fatigue commença à l’atteindre.

Bientôt Bekin fut jeté à terre par un ennemi plus coriace que prévu, s’apprêtant à rencontrer la mort, son ennemi fut tué au dernier moment par un sauveur inattendu, c’était Pyral, les habits recouverts de sang il lui tendit une main, le jeune ranger la saisit et se releva pour assister avec une immense joie à la fin de la bataille, les derniers duels se terminait ici et là mais leur ennemi avait été terrassés, leur corps jonchant le sable.

Il n’y eu aucun cri de joie ou de victoire, ils avaient gagné mais les trois quarts de leurs effectifs étaient morts au combats, certains pleurèrent leur morts, leur camarades, leur amis.

Leurs dernières tâches consistèrent à rassembler les corps afin de les brûler, Bekin aida à les rassembler, il vit quelques visages, auparavant vu dans le phare, auparavant le regard plein d’espoir, à présent complétement vide de vie.

Parmi ces corps, il y avait celui de Taegan, un harpon en travers de la poitrine. Le vétéran avait vécu sa dernière bataille, son corps fut lui aussi brûlé, cela dit tout le monde finissait par mourir un jour, seule la manière différait. Certains mourrait dans leur lit, paisiblement et de vieillesse, d’autre finissait tuer lors d’un assaut.

La mort de Taegan laissa une impression étrange à Bekin, à ses yeux le vétéran avait vécu de nombreuses batailles sanglantes, il avait survécu à toutes, mais pas à celle-ci. Chaque soldat pouvait mourir à tout moment, chaque soldat avait des ennemis, chaque soldat mourrait de manière sanglante pour le Gondor. Lors d’une bataille il n’y avait ni charge héroïque, ni héros, que des hommes se battant pour leur vie. Une bataille ne laissait aucune gloire, uniquement un champ de mort et des pleurs.

Lorsque le soleil atteignit son zénith, le sergent réunissait les derniers survivants pour une annonce.

Ainsi s'acheva la bataille d'El'Odanna. Ce lieu presque inconnu et cette escarmouche entre quelques centaines de combattants ne seraient sans doute pas mentionnés dans les récits ni dans les légendes, mais de toute façon les rangers avaient l'habitude d'agir dans l'ombre.

Le brave Taegan, vétéran de nombreuses batailles, avait perdu la vie.  Récemment promu au rang de caporal, il avait mené sa dernière charge dans ces terres hostiles. Ils avaient décidé de brûler les corps des défunts, même si cela n'était pas la coutume au Gondor. Les enterrer si loin de leurs forêts natales ne semblait pas juste.

Lorsque quelques-uns des rangers finirent de préparer les bûchers à l'aide de bois récupéré sur les petites barques utilisées par les pirates et les flammes s'emparèrent des corps, Bekin sentit quelqu'un arriver derrière lui. C'était le sergent Pyral qui lui mit une main sur l'épaule.

-Il n'y avait pas d'autre option Bekin. Si nous n'avions pas attaqué, les corsaires auraient fini par prendre contrôle du phare et massacrer les hommes du capitaine Garrick. Les victoires sont plus souvent coûteuses et amères que faciles et glorieuses.

Il se tut pendant un moment, en regardant les flammes.

-J'ai remarqué tout à l'heure que tu avais perdu ton épée lors des combats. J'ai quelque chose pour toi.

Lorsque le jeune ranger tourna le regard vers son supérieur, il put voir que ce dernier lui tendait une longue lame dans un fourreau de cuir usé mais décoré d'une main d'artiste.

-C'est l'épée de Taegan. Il n'avait ni femme ni enfants, et je pense que ça lui plairait de te la céder. C'est une bonne lame. L'oeuvre d'un forgeron nain à la Cité Blanche, elle lui avait coûté plusieurs soldes, mais a souvent sauvé sa vie et celles des autres. Aujourd'hui, la chance a quitté notre ami mais cette épée n'a pas encore fini de servir le Gondor. Je pense qu'il ne l'avait jamais nommé, c'était pas son genre, mais n'hésite pas à le faire si tu le souhaites.

***

Les survivants s'étaient réunis pour l'annonce à l'ombre du phare d'El'Odanna. Le capitaine Garrick était toujours en vie, et le sergent lui avait bien évidemment cédé le commandement, même si les survivants comptaient seulement un quart d'un Thangion.

-Soldats, la douleur de la mort de nos frères d'armes est encore vive et nous pourrons les honorer cette nuit en levant nos coupes à leur mémoire, mais pour l'instant nous devons nous assurer que leur sacrifice n'était pas en vain. Le sergent Pyral m'a informé que ses cavaliers étaient une avant-garde mais que Djafa se préparait à envoyer d'autres hommes à El'Odanna. Ils sont probablement à deux jours de marche. En les attendant, nous allons fortifier l'endroit. Quant aux navires pirates, même si j'ai très envie de les couler, je pense qu'ils pourraient encore s'avérer utile. Le port de Methir au nord d'ici est la base principale de la flotte du Harondor, ils apprécieront sans doute un tel renfort. Pour l'instant, ces trois navires dans le port peuvent servir de distraction si d'autres pirates arrivent. Nous allons y stocker de l'huile et d'autres produits inflammables; si jamais ils sont pris par l'ennemi, nous pourrons y mettre feu et les rendre inutiles.


***

Comment souvent à la guerre, la folie du combat était souvent suivie ou précédée par des périodes de longue attente. Bekin avait été envoyé avec deux autres rangers pour pactiser avec les pêcheurs locaux et demander des provisions. Si les Gondoriens s'attendaient à être accueillis en héros, la réalité fut bien différente. Lorsqu'ils s'en approchèrent, ils virent un groupe de villageois méfiants et armés de bâtons ou d'harpons, sans doute récupérés sur les corps des pirates. Ces hommes n'avaient pas plus en commun avec les Gondoriens qu'avec les Umbarites, et la 'libération' de leur village par les rangers n'allait pas ramener leurs morts à la vie ni reconstruire leurs maisons brûlées.

Celui qui semblait diriger le groupe des villageois demanda aux rangers qu'est-ce qu'ils venaient chercher là.

***

Heureusement pour les Gondoriens, cette fois-ci les renforts étaient arrivés avant une nouvelle flotte des corsaires. Ce matin-là, Bekin était de garde avec un de ses frères d'armes et patrouillait le plateau qui surplombait El'Odanna. La petite armée en approche ne faisait rien pour se rendre discrète, au contraire. Les hommes armés de longues piques avançaient au rythme de tambours, et derrière eux, entouré d'une dizaine de cavaliers et d'une vingtaine d'esclaves, se tenait un homme relativement jeune, dont l'armure d'écaille dorée brillait au soleil. En tout, ils devaient être quatre centaines.

L'homme à l'armure dorée éperonna son destrier noir comme la nuit et s'approcha des deux rangers, dévoilant ses dents blanches dans un sourire:

-Nos chemins se croisent une fois de plus, ranger! As-tu considéré mon offre?

L'homme qui dirigeait la petite armée était nul autre qu'Erkin.

Le soir de la bataille d’El’Odanna les hommes levèrent leurs coupes pour honorer la mémoire des hommes tombés au combat avec honneur, certaines murmurèrent les noms de leurs amis morts tout en levant leur coupe. Le jeune ranger, leva sa coupe en l’honneur du vétéran qui l’avait épaulé pour ses débuts en tant que ranger, tout en sentant contre sa jambe le fourreau de l’ancienne épée sans nom de Taegan qui été à présent sienne.


Les jours suivants la bataille d’El’Odanna furent particulièrement calme, ils fortifièrent l’endroit en cas d’une seconde attaque venant des Umbariens, ils remplirent les navires à présent sans occupant d’huiles et produits inflammables afin de les rendre complétement inutile en cas d’une seconde attaque de l’ennemis, chaque jour servait à fortifier encore davantage le port, aucun soldat ne connut de répit avant que le port ne soit une vraie forteresse.

Bekin mit quelques jours à faire le deuil de Taegan, comme tous les soldats qui perdirent leurs amis au cours de la bataille qui, malheureusement, fut sanglante. Le jeune ranger participa aux travaux collectifs, il du pactiser avec des pêcheurs locaux qui les virent d’un mauvais œil, il fit également de nouvelle rencontre au sein des gondoriens avec qui il discuta de temps en temps bien que ces temps-ci aucun n’avait le cœur à la discussion.

C’est un matin alors que le soleil venait à peine de surgir de l’horizon, que les renforts tant attendus arrivèrent au rythme des tambours, environ quatre cent hommes, ce qui était plutôt impressionnant, tous parfaitement aligné, longues piques toutes à la même hauteur, une personne en particulier se détachait du reste du groupe, en armure d’écailles dorées scintillantes, majestueux sur son étalon noir, celui-ci s’approcha au galop de Bekin qui ce matin-là était de garde avec un autre ranger :

-       Nos chemins se croisent une fois de plus, ranger ! As-tu considéré mon offre ?

Bekin fut alors surpris de découvrir que le fier cavalier n’était autre qu’Erkin, le prisonnier qu’il avait libéré il n’y a pas si longtemps alors qu’il se battait encore au côté de Taegan, celui-ci était donc belle et bien un héritier d’une des maisons nobles de Djafa, et sa proposition tenait encore ! Cependant Bekin avait réfléchis intensément à sa proposition, et n’avait aucune envie de travailler à Djafa à l’avenir, le Nord lui manquait déjà, là où la chaleur était moins accablante, oui l’offre était alléchante, la promesse de plus de prestige et d’une rémunération supérieure, mais il était un homme du Nord :

- Ton offre est alléchante je ne vais pas le nier, mais je vais refuser, ma place n’est pas à Djafa, mais je te suis extrêmement reconnaissant de m’avoir proposé une telle offre.

Le jeune ranger crut voir alors de la déception sur le visage d’Erkin avant qu’il reprenne la parole.

Erkin regarda longuement Bekin droit dans les yeux du haut de son étalon noir comme les nuits du désert. Il finit par dire, doucement:

-Je suppose que tout le monde ne sait pas apprécier la beauté de la Perle du Sud.

Ses paroles furent suivis d'un petit rire, puis d'un geste de la main dans la direction d'El'Odanna.

-Bien, dans ce cas mène nous vers tes officiers, fidèle soldat du Gondor.


Les Gondoriens étaient bien soulagés de voir les renforts arriver avant que d'autres navires pirates n'apparaissent à l'horizon. Le capitaine Garrick avait proposé à Erkin de s'arrêter dans le phare spartiate mais facile à défendre. Cependant, les Harondorims avaient plutôt opté pour un campement aux abords du village. Les rangers furent surpris de voir la quantité de provisions que l'armée de Djafa avait emmenée. La tente de leur commandant était un véritable pavillon de couleur, dans lequel se trouvait un bureau, plusieurs sièges et un lit confortable constitué de tapis précieux et de coussins.

Le soir, le capitaine et le sergent furent invités à diner dans la tente d'Erkin. Des longues heures passèrent avant leur retour au phare.

Bekin fut tiré de son sommeil par quelqu'un qui lui secouait légèrement l'épaule. Il fut surpris de découvrir qu'il s'agissait du capitaine Garrick en personne. Le commandant des rangers semblait l'apprécier, mais dans une situation normale un officier aurait envoyé quelqu'un pour convoquer le ranger. Garrick lui dit:

-Habille-toi et rejoins moi en haut du phare, nous devons parler.


***

Lorsqu'il montait les nombreuses marches, Bekin croisa un ranger qui avait sans doute été posté en haut de la tour. Le capitaine avait du lui dire de se retirer temporairement de son poste. Etrange.

Il finit par arriver en haut du phare après un effort fatiguant même pour un guerrier. Le capitaine Garrick et le sergent Pyral étaient là tous les deux, en train de regarder le panorama nocturne qui s'étendait devant eux. On pouvait entendre le chuchotement régulier des vagues sur la côte en dessous, et distinguer le mouvement de l'eau qui faisait danser les reflets argentés de la lune. De l'autre côté, les feux du campement des Harondorims marquaient un point rouge sur le tableau noir des collines désertiques. Le vent provenant de la mer était frais, apportant un soulagement aux hommes toujours pas entièrement habitués au climat des terres du Sud.

Les deux hommes se tournèrent vers Bekin, et le capitaine prit la parole sans perdre de temps avec des plaisanteries:

-Le sergent Pyral m'a expliqué le contexte de votre première rencontre avec le commandant Erkin de Djafa, comment vous l'avez sauvé des mains des corsaires et ramené jusqu'à la capitale. Il m'a aussi confirmé que le Djafite semblait s'être attaché à toi. J'ai entendu parler de sa proposition d'emploi, ainsi que ton refus.

Disons que...les nobles de Djafa n'ont pas l'habitude d'être contrariés. Pendant notre diner ce soir, Erkin m'a dit qu'il craignait des tentatives d'assassinat de la part de ses ennemis ou ses rivaux. Il a complimenté la réputation des rangers d'Ithilien, et a demandé à ce que deux d'entre eux soient assignés temporairement à sa protection. Dans le contexte actuel, refuser serait une erreur diplomatique et un risque trop grand. Erkin voudra choisir les deux rangers lui même demain. Il n'y a pas besoin d'être un devin pour se douter que son choix tombera sur toi.

Le capitaine échangea un regard avec le sergent, avant de continuer:

-S'il s'agissait juste de satisfaire l'égo d'un noble de Djafa, je t'aurais demandé de ravaler ta fierté et d'accepter cette mission. Mais il y a dans tout ça quelque chose de plus inquiétant. Tout ce que je vais te dire maintenant Bekin doit rester entre nous trois et surtout, fait partie du domaine de l'intuition et des suppositions. Ce ne sont pas des faits confirmés.

Il attendit jusqu'à ce que le ranger acquiesce avant de continuer:

-Le Harondor est un nid de guêpes. Radamanthe dirige d'une poignée de fer et grâce à ses quelques victoires militaires récentes, il est encore au pouvoir. Mais je pense que les familles nobles de Djafa n'apprécient pas spécialement de devoir obéir à un Gondorien, surtout un qui ne provient pas d'une lignée noble. La guerre leur cause des pertes matérielles, le commerce est déstabilisé, leurs hommes périssent sur le front. Les Djafites regardent avec attention le vent et lorsque celui va tourner contre l'Emir, je ne pense pas que beaucoup d'entre eux seront prêts à le suivre jusqu'au bout. Je me demande qu'est-ce qu'Erkin faisait en tant que prisonnier des corsaires. L'avaient-ils réellement capturé alors qu'il chassait des animaux sauvages, ou bien à l'issue de négociations ayant tournées au vinaigre? Et pourquoi est-ce que les renforts de Djafa ont mis tellement de temps à arriver? Est-ce qu'ils avaient vraiment besoin du temps pour rassembler les hommes, ou bien espéraient-ils qu'on se serait déjà entretués avec les corsaires?

Le capitaine se passa la main sur le visage. Il était clairement troublé.

-Ce ne sont que des suppositions, et il se peut que j'ai passé trop de temps ici et que je deviens paranoïaque. Mais je n'ai pas entièrement confiance en nos alliés, et je ne peux pas vraiment m'attendre à ce qu'ils soient des patriotes du Gondor. Nous sommes des étrangers en ces terres même si elles appartiennent à la Couronne. Dans tous les cas, la situation au Harondor devient critique, et sans un soutien plus important de l'armée du Gondor, Radamanthe finira par perdre cette guerre. L'Emir est actuellement à l'autre bout du Harondor et je n'ai aucun moyen facile de le joindre, alors j'ai pris la décision de contacter directement le commandement de l'armée du Gondor. J'ai une missive scellée ici, et tu seras celui qui ira l'apporter en mains propres à Ingthor, le Général aux Frontières. Cela lui permettra d'avoir des informations sur la situation actuelle sur le front, ainsi que mes suppositions. Au prix de ta vie, ne laisses personne briser le sceau sur cette lettre avant de la remettre au Général. Nous avons décidé avec Pyral de te confier cette mission pour deux raisons. D'une part tu as joué un rôle important dans la victoire à El'Odanna et nous savons que tu es un soldat courageux et au sang froid. D'autre part, cela te mettra hors de portée d'Erkin; d'autres rangers seront assignés comme ses gardes du corps.


Le sergent Pyral étendit une carte sur la table, en mettant une dague et une bouteille sur les coins pour empêcher qu'elle se replie.

-Il y a quelques rangers qui ont remporté des blessures graves pendant la bataille  qui les empêchent de combattre, mais pas assez sérieuses pour les empêcher de voyager. Un d'eux à perdu usage de son bras droit, un autre est quasi-aveugle, le troisième a une blessure à la jambe qui l'empêche de marcher mais pas de monter à cheval. Tu voyageras sous prétexte de devoir les raccompagner en Ithilien, ce qui n'est d'ailleurs pas un mensonge. Mais tu t'arrêteras à Pelargir pour rapporter la missive au Général Ingthor. Il te posera sans doute des questions, et je sais que tu sauras témoigner de la situation au Harondor. Ton voyage devra se dérouler de manière suivante. Vous commencerez par trois jours de voyage à cheval vers le Nord, en direction du Port de Methir, quartier général de la flotte harondorime. La traversée de première partie des collines désertiques sera difficile, mais par la suite vous devriez pouvoir suivre une route commerciale qui longe plusieurs villages. A Methir, vous payerez pour un passage sur bateau vers le delta de l'Anduin, que vous remonterez jusqu'au port de Pelargir. Là-bas t'iras voir le Général Ingthor, et tu suivras ses ordres. Tes compagnons quant-à-eux continueront leur chemin jusqu'à nos casernes en Ithilien.

Spoiler:

-Je dois t'avouer que je t'envie un peu de pouvoir rentrer au Gondor, Bekin. Mais un voyage long et risqué t'attend, et ne prends pas à la légère le poids de ta mission. Pendant que tu seras en route, nous continuerons à défendre le Harondor contre tout ennemi, extérieur ou intérieur, mais sans renforts et sans aide nous ne pourrons pas tenir trop longtemps. Bonne chance, soldat.


Après les festivités de la veille et la fatigue liée à plusieurs jours de voyage, Erkin se leva assez tard. Lorsqu'il arriva au phare pour inspecter les rangers et choisir son escorte, quatre d'entre eux étaient absents. Bekin et ses compagnons étaient partis à l'aube, en route vers Pelargir.

L’aube apporta avec elle un nouveau jour chargé de chaleur et de sable, le vent souffla de l’est et souleva des tourbillons de poussières, gare à celui qui ne portait par les habits adaptés aux climat et à la région si spécial qu’est le Harondor, la chaleur pouvait rapidement vous terrasser au sein de ces terres arides et inhospitalière.
La petite colonne de rangers se dirigeant vers le Nord ne souleva aucune question sur son passage tant les villages étaient peu nombreux sur leur itinéraire, partit avec les chevaux avant que le soleil ne se lève, il n’avait cessé de galoper depuis deux jours en direction du Nord, vers le port de Methir, ne faisant que de courtes escales pour les chevaux, leur mission était capitale mais pas au point de devoir risquer la vie des équidés pour celle-ci.
Les batailles et les morts étaient loin derrière eux à présent, leur unique but était maintenant de livrer une missive, une simple lettre en papier mais qui aurait un impact si conséquent sur la suite des événements.
Le capitaine Garrick et le sergent Pyral craignant une trahison des familles nobles et la situation étant tendue dans toute la région, le Gondor avait plus que besoin de renforts seul cette missive et Ingthor, le général aux frontières, pourrait leur apporter cette aide si nécessaire.
Parti avec trois blessés de guerre, Bekin avait la charge de les accompagner jusqu’en Ithilien où ils profiteraient d’un repos bien mérité après les récents évènements, depuis le début le jeune ranger n’avait pas échangé un mot avec eux, pour la simple et bonne raison que chacun scrutait l’horizon en espérant y voir leur destination. Après avoir longé plusieurs petits villages ils finirent par l’apercevoir au loin, en seulement quelques heures ils atteignirent le port de Methir, le port en question possédait un long rempart fait de bois qui entourait intégralement Methir, le rempart ayant longuement vécu était à présent peu imposant ne ressemblant guère plus qu’a un tas de bois sur des bases branlantes. Deux gardes gardaient une grande porte permettant d’accéder au port, faite elle aussi de bois. Les gardes n’avaient pas la carrure imposante ni le visage d’un soldat couturé de cicatrices, mais plutôt le visage d’un ivrogne avec le nez qui allait avec.
La porte était grande ouverte permettant ainsi à de longue caravane de marchand d’y entrer et d’y sortir librement, les quatre ranger entrèrent alors à leur tour dans le port, les odeurs de poissons, de bois cirés, d’algues et les cris des marchands agressèrent leur sens aussitôt après avoir pénétré dans l’enceinte. Ils traversèrent ce qui semblait être la voie principale qui était plutôt large, mais le port semblait rempli de dédale et de sombre et poisseuse petite rue. Ils trouvèrent une écurie où laisser les chevaux et se dirigèrent vers le port en question afin d’y trouver le navire qui leur permettrait d’emprunter le delta de l’Anduin.
Le port était rempli de navires, certains très imposant arborant le drapeau harondien, d’autre plus petit n’attirant pas de suite la vue, c’était exactement ce qu’ils leur fallait, quelque chose de discret qui leur permettrait d’effectuer leur trajet sans attirer l’attention.
Ils se dirigèrent vers le premier en vu, plusieurs marins semblaient charger le petit navire de caisses, tandis qu’un homme semblait leur aboyer des ordres, le capitaine sans aucun doute, celui-ci ressemblait à un ours, imposant de carrure une barbe bien épaisse et des bras pouvant soulevant de lourdes charges.
Après de brève échanges, et quelques pièces échangées le capitaine pour, qui s’appelait en réalité Tusk, accepta de les embarquer sur son navire, il avait pour mission de livrer des marchandises au port de Pelargir, les embarquer sur son navire ne le dérange donc absolument pas.

Après une heure, les marchandises étaient enfin toutes sur le navire, ils purent donc embarquer sur le navire, une traversée de deux jours les attendait, les rangers eurent l’accès à deux cabines chacune avec deux lits afin d’y passer la nuit. Le ranger dormait dans la même chambre que celui qui avait perdu l'usage de son bras droit. Bekin passa les premières heures du voyage sur le pont à observer la mer pendant que l’équipage s’activaient autour de lui, le capitaine se joignit à lui en allumant une pipe :

- Hypnotisant n’est ce pas ?

- En effet.

- Déjà pris la mer ?

- Quelquefois, mais je n’ai jamais vraiment apprécié naviguer.

Une vague percuta de plein fouet le navire projetant de l’eau sur Bekin et le capitaine :

- Vous savez je sais que ce ne sont pas mes affaires, mais je me doute bien que quelque chose ne tourne pas rond avec vous, une affaire importante peut-être ? Vous fuyez quelque chose ? Trois blessés et un soldat sur mon navire, c’est pas fréquent.

- Qu’y a-t-il d’anormal avec des soldats voulant rentrer chez eux ?

- Pardonnez mon indiscrétion mais je vois bien que vous êtes nerveux, et vous ne lâchez jamais votre sacoche, à croire que votre vie en dépend ?

- J’ai payé pour une traversée, par pour un interrogatoire.

Bekin quitta le capitaine pour ses cabines. Une fois dans ses cabines il s’enferma dedans en plaçant une chaise sur la poignée, peut-être des précautions inutiles mais le capitaine se montrait bien trop curieux.

Les deux jours de traversée s'étaient passés sans accroche, Bekin n’avait plus échangé un mot avec le capitaine. En débarquant sur la terre ferme, le jeune ranger ajouta quelque pièce dans la main de Tusk pour acheter son silence :

- De simples soldats voulant rentrer chez eux n’est ce pas ?

Les quatres soldats ne répondirent pas et lui tournèrent le dos. Après de brefs échanges, Bekin serra la main à chacun de ses compagnons qui prirent un chemin différent du jeune ranger, en direction des casernes en Ithilien, tandis que Bekin se dirigeait vers la caserne du Gondor. Après l’avoir trouvé il y pénétra et se renseigna auprès des soldats afin de trouver le  Général Ingthor. On accepta de conduire Bekin jusqu’à une porte gardée par deux soldats, immobile. Après avoir montré le sceau du capitaine Garrick et de brefs échanges, les soldats acceptèrent de le laisser voir le général.
Les deux portes s’ouvrirent sur une grande pièce occupée principalement par une grande table sur laquelle étaient posés de nombreuses cartes et divers objets, le général y était penché, pensif. Il leva la tête, les sourcils froncés et juga de haut en bas le jeune ranger :

- Mon général, le capitaine Garrick m'a chargé de vous livrer cette missive en vos mains uniquement.

Après avoir brisé le sceau, le général semblait encore plus soucieux, tandis que Bekin attendait patiemment les ordres.

Ainsi, Bekin avait laissé derrière lui les sables du désert, la compagnie de ses frères d’armes et les intrigues des nobles de Djafa.

Pourtant, bien qu’il rentrait enfin au Gondor, les inquiétudes du capitaine Garrick et l’importance de la mission qui lui avait été accordée pesaient lourdement sur ses épaules. Quel aurait été l’impact sur la guerre au Harondor si son bâteau avait été coulé par une tempête, ou si l’équipage avait décide d’égorger le ranger et ses compagnons blessés ? Heureusement, la traversée s’était passée sans accroches.


Le Général Inghtor était une figure impressionnante. Il dépassait Bekin presque d’une tête, et malgré son âge il n’y avait pas un gramme de gras inutile sur son corps. Ses hommes disaient d’ailleurs qu’il enlevait sa cotte de maille seulement pour dormir.
Il inspecta pendant un bon moment le ranger. Ses yeux ressemblaient à ceux d’un oiseau de proie. Lorsqu’Inghtor prit enfin la parole, sa voix était froide :

-As-tu parlé des événements au Harondor ou du contenu de cette missive à quiconque lors de ta traversée, ou une fois arrivé à Pelargir ?

Une fois rassuré sur ce point, le général continua sur un ton un peu plus bienveillant.

-Les dernières nouvelles qui m’étaient parvenues venaient du front, où Radamanthe a réussi à remporter plusieurs escarmouches et à établir une garnison du côté Est de la rivière. Ce que je viens d’apprendre, c’est que le succès de l’Emir peut rapidement se transformer en échec cuisant si ses ennemis arrivent à ouvrir un troisième front sur la côte. Surtout – dit-il en regardant attentivement la réaction du ranger – s’il ne peut pas compter entièrement sur ses alliés de Djafa.

Ingthor se mit à tourner en rond dans la pièce, les mains liées derrière le dos, pensif.

-La situation politique au Gondor a beaucoup changé ces derniers mois, depuis les évémenents tragiques à Minas Tirith. Savais-tu déjà que le Général Cartogan est mort, et que le Conseil du Sceptre a choisi le roi Artheyrn de Lossarnach pour prendre sa place ? Je reviens d’ailleurs seulement de cette assemblée...il y a quelques jours tu ne m’aurais pas trouvé à Pelargir. La réalité est que je ne peux pas envoyer de régiments au Harondor à l’heure actuelle, sans en informer les dirigeants du royaume. Pas avec tout ce qui se passe sur la frontière avec le Rohan. Mais l’urgence de cette situation ne peut être ignorée. Je dois me rendre à Minas Tirith.

Il s’arrêta, et se tourna vers Bekin.

-Et toi, soldat. Tu iras avec moi.

***

Les événements se précipitèrent ensuite ; le général Ingthor était un homme d’action. Bekin eut l’occasion de se laver, manger et enfiler un uniforme propre, mais pas de bénéficier d’une nuit de sommeil à la caserne.

Pendant que le ranger faisait ses adieux avec ses camarades blessés qui allaient continuer leur route jusqu’à la caserne des rangers en Ithilien, Ingthor donnait des ordres à un de ses officiers :

-Je serai parti au moins quelques jours. Pendant ce temps-là, veille à la préparation du plus grand nombre possible de bâteaux de transport et de Corvettes pour l’escorte, mais sans créer une atmosphère de panique ni d’excitation inutile. Prévoie aussi des ressources – de la nourriture, de l’eau, du foin pour les chevaux, des tentes, du matériel pour les guérisseurs, et des flèches. Nos stocks devraient être bien approvisionnés mais si on tombe à court, rentres en contact avec la Compagnie du Sud. Et fais signe aux garnisons environnantes de préparer au moins deux Otharrimions à partir immédiatement une fois que l’ordre sera donné.

***

Ils étaient six à partir vers la Cité Blanche : le ranger Bekin, le Général Ingthor, et quatre de ses hommes. En voyant la posture du général et l’épée pendue à sa ceinture on pouvait douter si une escorte était vraiment nécessaire, mais les temps étaient troublés, et ses hommes pouvaient toujours servir de messagers au besoin. Un homme de son rang voyageait d’habitude en carrosse ou en coche, mais ce n’était pas le genre du général ; les six hommes se mirent en selle.

Ils empruntèrent une des grandes routes commerciales reliant les principales cités du royaume, qui les mena à travers les champs dorés de Lossarnach. Cette vue ne pouvait pas laisser Bekin indifférent, après les paysages si différents du Harondor.
L’armée du Gondor était bien organisée – des chevaux frais les attendaient à des relais toutes les demi-journées, ce qui leur permettait de parcourir une distance considérable en peu de temps.

Enfin, la vue toujours aussi époustouflante de la citadelle de Minas Tirith s’offrit à leurs yeux...

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